Droits des héritiers : 25 mai 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/01730

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Droits des héritiers : 25 mai 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/01730

25 mai 2023
Cour d’appel de Douai
RG n°
21/01730

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 1

ARRÊT DU 25/05/2023

****

N° de MINUTE :

N° RG 21/01730 – N° Portalis DBVT-V-B7F-TQ3D

Jugement (N°17/415) rendu le 29 septembre 2020 par le tribunal judiciaire de Béthune

APPELANTE

Madame [Z] [Y] épouse [E]

née le 07 décembre 1952 à [Localité 34]

demeurant [Adresse 9]

[Localité 20]

représentée par Me Eric Laforce, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistée de Me Laetitia Ricbourg, avocat au barreau d’Amiens, avocat plaidant

INTIMÉS

Madame [C] [S]

née le 17 octobre 1948 à [Localité 34]

demeurant [Adresse 12]

[Localité 23]

Madame [T] [V]

née le 06 novembre 1949 à [Localité 34]

demeurant [Adresse 14]

[Localité 16]

Madame [A] [W]

née le 22 Décembre 1950 à [Localité 34]

demeurant [Adresse 39]

[Localité 21]

représentées par Me Bernard Franchi, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistées de Me Jean Emmanuel Robert, avocat au barreau de Reims, avocat plaidant

Madame [SZ] [Y] épouse [O]

demeurant [Adresse 11]

[Localité 22]

représenté par Me Ludovic Hemmerling, avocat au barreau de Béthune, avocat constitué

Monsieur [P] [Y]

né le 11 février 1956 à [Localité 34]

demeurant [Adresse 8]’

[Localité 27]

représenté par Me Didier Darras, avocat au barreau de Béthune, avocat constitué

assisté de Me Gonzague de Limerville et Me Chrystèle Varlet, avocats au barreau d’Amiens, avocats plaidants

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Bruno Poupet, président de chambre

Céline Miller, conseiller

Camille Colonna, conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe

DÉBATS à l’audience publique du 06 février 2023 après rapport oral de l’affaire par Céline Miller. Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 25 mai 2023 après prorogation du délibéré en date du 11 mai 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Bruno Poupet, président et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 30 janvier 2023

****

Par donation-partage en date du 8 juillet 1981, [D] [Y] et son épouse, [B] [H], ont fait une donation entre vifs de la nue-propriété de diverses parcelles de terres et de bois à leurs six enfants, Mme [C] [Y] épouse [S] (ci-après, « Mme [S] »), Mme [T] [Y] épouse [V] (ci-après, « Mme [V] »), Mme [A] [Y] veuve [W] (ci-après, Mme [W]), Mme [Z] [Y] épouse [E] (ci-après, « Mme [E] »), M. [P] [Y] et Mme [SZ] [Y] épouse [O] (ci-après, « Mme [O] »).

[D] [Y] et [B] [H] sont décédés respectivement en 2008 et 2013, laissant pour leur succéder leurs six enfants.

 

Par actes d’huissier en date des 7, 19 et 22 décembre 2016, Mmes [S], [V] et [W] ont fait assigner Mmes [E] et [O] et M. [Y], devant le tribunal de grande instance de Béthune aux fins d’obtenir le partage de l’indivision successorale, la vente par adjudication judiciaire de divers biens immobiliers dépendant de l’indivision successorale, le rapport de donations indirectes qui auraient été reçues par Mme [E] et M. [Y], une expertise des biens occupés par ces derniers, outre par Mme [W], fixer l’indemnité d’occupation due par ceux-ci pour leur occupation des biens indivis et enfin, les autoriser à agir pour le compte de la succession.

 

Par ordonnances des 6 février et 11 septembre 2018, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Béthune a désigné successivement Me [I] puis Me [G] en qualité d’administrateurs provisoires des successions des défunts.

 

Par ordonnance du 27 février 2019, le juge des référés du tribunal de grande instance de Béthune, saisi par Mmes [S], [V] et [W], a fait droit à la demande de ces dernières tendant à la distribution des bénéfices générés par les biens indivis et à obtenir une avance en capital sur leurs parts dans l’indivision successorale, limitant ce montant à la somme de 20 000 euros chacune.

 

Par jugement assorti de l’exécution provisoire en date du 29 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Béthune a ordonné l’ouverture des opérations de partage judiciaire des successions de [D] [Y] et [B] [H] et, pour y parvenir, celles du régime matrimonial ayant existé entre eux, désigné pour procéder auxdites opérations Me [G], notaire à [Localité 31] [‘], prolongé la désignation de Me [G] en qualité d’administrateur provisoire des successions de [D] [Y] et [B] [H] jusqu’à l’issue des opérations de partage des successions des défunts et de leur régime matrimonial.

En outre, il a :

– Débouté Mmes [S], [V] et [W] de la totalité de leurs demandes tendant à ordonner la licitation des biens indivis ;

–  Dit que Mme [E] devait rapporter à la succession de [D] [Y] pour la période allant du 1er mars 1979 au 14 avril 2008, et à celle de [B] [H] pour la période allant du 15 avril 2008 au 28 juin 2013, l’avantage indirect dont elle a bénéficié au titre de son occupation sans bourse délier des immeubles situés à [Localité 20], lieudit [Localité 37] et [Adresse 41] cadastrés AN n° [Cadastre 1], [Cadastre 10], [Cadastre 13], [Cadastre 25] et [Cadastre 26], correspondant aux loyers qui auraient dû être versés en contrepartie de son occupation des lieux, et dit que le notaire commis déterminerait le montant de ce rapport lors des opérations de liquidation ;

– Dit que M. [Y] devait rapporter aux successions des défunts la donation indirecte qu’il a reçu par suite de l’abandon du prix de cession de 600 000 francs d’une exploitation agricole, et dit que le montant de ce rapport serait déterminé par le notaire lors des opérations de liquidation en application des dispositions de l’article 860-1 du code civil ;

– Dit que Mme [E] était redevable envers les indivisions successorales d’une indemnité d’occupation au titre de son occupation privative des immeubles situés à [Localité 20], lieudit [Localité 37] et [Adresse 41], cadastrés AN, n° [Cadastre 1], [Cadastre 10], [Cadastre 13], [Cadastre 25] et [Cadastre 26] à compter du 28 juin 2013 et dont le montant serait déterminé par le notaire lors des opérations de liquidation ;

–  Dit que Mme [W] était redevable envers les indivisions successorales d’une indemnité d’occupation au titre de son occupation privative de la maison d’habitation située [Adresse 39] à [Localité 21], cadastrée section AL n° [Cadastre 17] et [Cadastre 19], à compter du 28 juin 2013 et dont le montant serait déterminé par le notaire lors des opérations de liquidation.

Le tribunal a par ailleurs débouté Mmes [S], [V] et [W] de leur demande de rapport formée à l’encontre de M. [Y] au titre de son occupation des biens situés à [Localité 27], lieudit [Localité 36] cadastrés section AC n° [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7], et de leurs autres demandes tendant à mettre à la charge de celui-ci une indemnité d’occupation au titre des immeubles précités, à ordonner une expertise pour évaluer la valeur locative des biens de [Localité 20] et de [Localité 21], à mettre à la charge de Mme [E], Mme [W] et M. [Y] une indemnité d’occupation provisoire, à être autorisées à agir en justice au nom de l’indivision et à utiliser les fonds détenus par le notaire pour le compte de l’indivision pour faire face à ces actes d’administration.

Il a, également, débouté Mme [E] de sa demande d’expertise en vue de procéder à l’évaluation de l’ensemble des biens indivis, dit que, dans le cadre des opérations de partage, il devrait être tenu compte de l’avance de 20 000 euros qu’ont chacune perçue Mmes [S], [V] et [W] par suite de l’ordonnance du juge des référés en date du 27 février 2019, sans qu’il y ait lieu d’ordonner le rapport desdites sommes.

Il a, enfin, sursis à statuer sur la demande d’attribution préférentielle formée par M. [Y] dans l’attente de la décision définitive du tribunal paritaire des baux ruraux de Béthune à intervenir concernant la cession à son fils du bail rural lui ayant été consenti le 14 juin 1991, invité M.'[Y] à préciser les parcelles et leurs références cadastrales sur lesquelles porte sa demande d’attribution préférentielle, ordonné la révocation de l’ordonnance de clôture et le renvoi du dossier sur ce point à la mise en état, réservé les dépens, sursis à statuer sur les demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Mme [E] a interjeté appel de ce jugement et, aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 27 janvier 2023, demande à la cour, au visa des articles 843 et suivants et 815-1 et suivants du code civil, de confirmer le jugement dont appel dans toutes ses dispositions sauf celles la concernant, de l’infirmer pour le surplus et, statuant à nouveau, de débouter Mmes [S], [V] et [W], ou tout autre indivisaire, de leurs demandes tendant à mettre à sa charge une indemnité de rapport à la succession de [D] [Y] pour la période allant du 1er mars 1979 au 14 avril 2008 et à celle de [B] [H] pour la période allant du 15 avril 2008 au 28 juin 2013, au titre de l’avantage indirect dont elle aurait bénéficié au titre de son occupation des immeubles situés à [Localité 20], lieudit [Localité 37] et [Adresse 24], cadastrés section AN n°[Cadastre 1], [Cadastre 10], [Cadastre 13], [Cadastre 25] et [Cadastre 26],

Subsidiairement, si par extraordinaire une indemnité d’occupation devait être mise à sa charge, elle demande à la cour de dire et juger que le rapport ne peut porter que sur le lot n° 1 composé de la maison d’habitation de l’allée, à l’exclusion des autres biens visés dans ce lot, et à l’exception des lots n°s 2, 3 et 4, et que le notaire devra procéder à une compensation entre cette indemnité et les travaux réalisés par ses soins.

Elle demande, en outre, de : 

– Condamner Mme [W] à rapporter à la succession de [B] [H] pour la période allant du 1er juillet 1972 au 28 juin 2013, l’avantage indirect dont elle a bénéficié au titre de son occupation sans bourse délier de la maison d’habitation située [Adresse 39] à [Localité 21], correspondant aux loyers qui auraient dû être versés en contrepartie de son occupation des lieux et donner mission au notaire, ou à l’expert commis, de déterminer le montant de ce rapport lors des opérations de liquidation ;

–  Condamner M. [Y] à rapporter à la masse active de la succession de ses parents la donation indirecte dont il a bénéficiée et consistant en l’abandon de toute autre demande de loyers sur la période du 1er janvier au 28 juin 2013, et donner mission au notaire, ou à l’expert commis, de déterminer le montant de ce rapport lors des opérations de liquidation  ;

– Débouter Mmes [S], [V] et [W], ou tout autre indivisaire, de leurs demandes tendant à mettre à sa charge une indemnité d’occupation au titre de son occupation privative des immeubles situés à [Localité 20], cadastrés section AN n° [Cadastre 1], [Cadastre 10], [Cadastre 13], [Cadastre 25] et [Cadastre 26] ;

Subsidiairement, si par extraordinaire une indemnité d’occupation devait être mise à sa charge, elle demande à la cour de dire et juger que cette indemnité ne peut porter que sur le lot n° 1 composé de la maison d’habitation de l’allée, à l’exclusion des autres biens visés dans ce lot, et à l’exception des lots n° 2, 3 et 4, et que le notaire devra procéder à une compensation entre cette indemnité et les travaux réalisés par elle.

Elle sollicite également :

– la condamnation de M. [Y] au paiement d’une indemnité d’occupation envers les indivisions successorales au titre de son occupation privative de la partie non donnée à bail de la maison d’habitation située 1[Adresse 18] à [Localité 27], pour la période à compter du 28 juin 2013,

– la désignation d’un expert par la cour aux fins d’évaluer les valeurs vénales et locatives des immeubles sis à [Localité 20], AN n° [Cadastre 1], [Cadastre 13], [Cadastre 13],[Cadastre 25] et [Cadastre 26], à [Localité 27], [Adresse 8], [Localité 40], et à [Adresse 39], la valeur des travaux réalisés par elle, ou pour son compte, pour les périodes du 1er mars 1979 au 14 avril 2008, du 15 avril 2008 au 28 juin 2013 et à compter du 28 juin 2013, établir un compte entre les parties, après compensation entre les sommes éventuellement dues au titre des indemnités d’occupation, procéder à l’évaluation de tous les biens appartenant à l’indivision ;

– d’ordonner que dans le cadre des opérations de partage, il soit tenu compte de l’avance de 20 000 euros que Mmes [S], [V] et [W] ont toutes les trois perçue par suite de l’ordonnance rendue en première instance par le juge des référés, avec production d’intérêts à compter de sa perception,

– de débouter Mmes [S], [V] et [W] de leur demande tendant à agir au nom de l’indivision pour engager les procédures visées en pages 38 et 39 de leurs dernières conclusions et de donner mission à l’administrateur provisoire d’engager ces actions,

– débouter les intimés de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,

– condamner Mmes [S], [V] et [W] aux entiers dépens, ainsi qu’au paiement d’une somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

 

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 14 septembre 2021, Mme [O] demande à la cour de confirmer le jugement rendu en première instance sur les dispositions frappées d’appel par Mme [E] et dont est saisie la cour, et la débouter de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

Subsidiairement, si une mesure d’expertise devait être ordonnée par la cour au sujet des parcelles pour lesquelles il a été mis à la charge de Mme [E] une indemnité d’occupation au titre de son occupation privative et des travaux qu’elle a réalisés, elle demande à la cour de dire et juger que ces frais d’expertise seront avancés par cette dernière.

En outre, elle sollicite la condamnation de l’appelante aux entiers frais et dépens d’appel, ainsi qu’au paiement d’une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 12 janvier 2023, M. [Y] demande à la cour de confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a dit qu’il devait rapporter à la succession des défunts la donation indirecte qu’il aurait reçue par suite de l’abandon du prix de cession de 600 000 francs d’une exploitation agricole, dit que le montant de ce rapport serait déterminé par le notaire lors des opérations de liquidation en application des dispositions de l’article 860-1 du code civil, et en ce qu’il a dit que dans le cadre des opérations de partage, il devrait être tenu compte de l’avance de 20 000 euros qu’ont chacune perçue Mmes [S], [V] et [W] sans qu’il y ait lieu d’y appliquer intérêts et capitalisation.

Il demande à la cour, statuant à nouveau, de :

– débouter Mmes [S], [V] et [W] de leur demande tendant à ce qu’il rapporte à la succession des défunts la prétendue donation indirecte dont il aurait bénéficié,

– ordonner qu’il soit tenu compte, dans les opérations de partage, de l’avance de 20 000 euros qu’ont chacune perçue Mmes [S], [V] et [W] par suite de l’ordonnance rendue en première instance par le juge des référés et que ces sommes soient productives d’un intérêt au taux légal à compter de la date à laquelle elles ont été touchées par ces indivisaires, outre capitalisation de ces intérêts,

et, en tout état de cause, de :

– dire et juger Mme [E] irrecevable en sa demande nouvelle en cause d’appel tendant à voir dire et juger qu’il est redevable envers les indivisions successorales d’une indemnité d’occupation au titre de « son occupation privative de la partie non donnée à bail de la maison d’habitation située [Adresse 8], pour la période à compter du 28 juin 2013 » et, à titre subsidiaire, de l’en débouter,

– débouter Mmes [S], [V] et [W] de leur appel incident et les condamner, ainsi que Mme [E], aux entiers dépens d’appel et au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 13 janvier 2023, Mmes [S], [V] et [W] demandent à la cour, au visa des articles 815 et suivants du code civil et de l’article 564 du code de procédure civile, de :

– déclarer Mme [E] irrecevable en sa prétention visant à voir « dire et juger que Mme [W] devra rapporter à la succession de [D] [Y] pour la période allant du 1er juillet 1972 au 14 avril 2008 et à la succession de [B] [H] pour la période allant du 15 avril 2008 au 28 juin 2013, l’avantage indirect dont elle a bénéficié au titre de son occupation sans bourse délier de la maison d’habitation située [Adresse 39] à [Localité 21], correspondant aux loyers qui auraient dû être versés en contrepartie de son occupation des lieux et dire et juger que le notaire, ou l’expert commis, déterminera le montant de ce rapport lors des opérations de liquidation »’;

– débouter Mme [E] de son appel sauf en ce qu’il vise à voir « dire et juger que M. [Y] est redevable envers les indivisions successorales d’une indemnité d’occupation au titre de son occupation privative de la partie non donnée à bail de la maison d’habitation située [Adresse 8], pour la période à compter du 28 juin 2013 ».

Formant appel incident, elles sollicitent l’infirmation du jugement entrepris en ce qu’il :

– a prolongé la désignation de Me [G] en qualité d’administrateur provisoire des successions des deux défunts jusqu’à l’issue des opérations de partage desdites successions ;

-les a déboutées de leurs demandes :  

– de rapport formée à l’encontre de M. [Y] au titre de son occupation des biens situés à [Localité 27], lieudit [Localité 36] cadastrés section AC n°s [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7] ;

– tendant à mettre à la charge de M. [Y] une indemnité d’occupation au titre des immeubles précités ;

– tendant à être autorisées en justice à agir au nom de l’indivision et à utiliser les fonds détenus par le notaire pour le compte de l’indivision pour faire face à ces actes d’administration ;

– a débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

et demandent à la cour, statuant à nouveau, de condamner M. [Y] à :

– rapporter à la masse active de la succession de ses parents la donation indirecte dont il a bénéficié et consistant en l’abandon de toute demande de loyers sur la période du 1er janvier jusqu’au 28 juin 2013 concernant l’occupation de la maison d’habitation située à [Adresse 8], et de dire et juger que le rapport de cette donation devra être effectuée par le notaire au regard et en application de l’article 858 du code civil ;

– verser une indemnité d’occupation à la succession de ses parents à compter du 28 juin 2013 concernant l’occupation privative de la maison d’habitation située à [Adresse 8] et dont le montant sera déterminé par le notaire lors des opérations de liquidation.

Elles sollicitent, en outre, l’autorisation de la cour à agir au nom de l’indivision pour engager toute procédure en :

– recouvrement des fermages ou des loyers à l’encontre des locataires des biens immobiliers appartenant à l’indivision [Y] ;

– résiliation des baux ruraux portant sur des parcelles appartenant à l’indivision [Y] en raison du non-respect par les locataires de leur obligation ;

– recouvrement de créances au profit de l’indivision [Y] ;

– expulsion à l’encontre de tout occupant sans droit des immeubles relevant de l’indivision [Y] ;

– fixation judiciaire du montant du fermage du bail renouvelé tant en ce qui concerne le bail en date du 14 juin 1991 qui a été consenti à M. [Y] que concernant les autres baux ruraux qui ont été consentis à des tiers ;

Ainsi que pour :

– faire délivrer tout congé sur le fondement de l’article L. 416-1 du code rural ou L. 411-64 du code rural au nom de l’indivision [Y] à l’encontre de tout preneur à bail rural qui aurait atteint l’âge légal de la retraite et, en particulier, à l’encontre des époux [M] et de M.’Minennee,

– donner mandat au nom de l’indivision [Y] à la société Sotheby’s pour mettre en vente les deux statues en bronze représentant des chiens de chasse attribués à [K] [X] [F] pour un prix net vendeur et/ou de retrait de 250 000 euros à charge pour Me [G] d’en percevoir le prix et de le partager entre les héritiers,

– louer par bail de chasse l’ensemble de bois appartenant à l’indivision successorale.

Enfin, elles demandent à la cour de dire et juger qu’elles sont autorisées à utiliser les fonds actuellement détenus chez Me [G] pour le compte de l’indivision pour faire face aux dépenses liées à ses différents actes d’administration.

A titre subsidiaire, elles sollicitent qu’il soit dit et jugé que Me [G] aura comme mission complémentaire, en sa qualité d’administrateur provisoire, de :

– Délivrer tout congé sur le fondement de l’article L. 416-1 du code rural ou L. 411-64 du code rural au nom de l’indivision [Y] à l’encontre de tout preneur à bail rural qui aura atteint l’âge légal de la retraite et, en particulier à l’encontre des époux [M] et de M. [Y] ;

– De louer par bail de chasse l’ensemble de bois appartenant à l’indivision successorale.

Elles sollicitent également que M. [Y] soit jugé irrecevable en son appel incident et de l’en débouter, la condamnation solidaire de Mme [E], de M. [Y] et de Mme [O] à leur payer la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et que soit ordonné l’emploi des dépens, y compris les frais de licitations, en frais privilégiés de compte liquidation et partage.

 

Par application de l’article 455 du code de procédure civile, il sera référé aux dernières écritures des parties pour le détail de leur argumentation.

L’ordonnance de clôture de la mise en état a été rendue le 30 janvier 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

Liminaire

Aux termes de l’article 562 du code de procédure civile, l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent. La dévolution ne s’opère pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.

Il sera observé que le jugement déféré n’est pas contesté en ce qu’il a :

– ordonné l’ouverture des opérations de partage judiciaire des successions de [D] [Y], décédé le 14 avril 2008 à [Localité 32], et de [B] [H] sa veuve, décédée le 28 juin 2013 à [Localité 33] et pour y parvenir, celles du régime matrimonial ayant existé entre eux,

– désigné pour y procéder Maître [R] [G],

– prolongé la désignation de celle-ci en qualité d’administrateur provisoire des successions de [D] [Y] et [B] [H], avec les mêmes missions que celles définies par l’ordonnance du juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Béthune en date du 11 septembre 2018 jusqu’à l’issue des opérations de partage des successions de [D] [Y] et [B] [H] et de leur régime matrimonial,

– débouté Mmes [S], [V] et [W] de la totalité de leurs demandes tendant à ordonner la licitation des biens indivis et à mettre à la charge de Mmes [E], [W] et de M. [Y] une indemnité d’occupation provisoire,

– sursis à statuer sur la demande d’attribution préférentielle formée par M. [P] [Y] dans l’attente de la décision définitive du tribunal paritaire des baux ruraux de Béthune devant statuer sur la cession à son fils du bail rural lui ayant été consenti le 14 juin 1991.

Il ne sera donc pas statué sur ces dispositions, définitives.

I- Sur les demandes de rapport

Aux termes de l’article 843 du code civil, tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l’actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu’il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu’ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale.

L’article 893 dudit code définit la libéralité comme l’acte par lequel une personne dispose à titre gratuit de tout ou partie de ses biens ou de ses droits au profit d’une autre personne. Il ne peut être fait de libéralité que par donation entre vifs ou par testament.

L’article suivant précise que la donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée en faveur du donataire qui l’accepte.

L’héritier ayant reçu directement ou indirectement une libéralité du vivant du de cujus est tenu de la rapporter à la succession de ce dernier si elle ne lui a pas été consentie hors part successorale.

De même, l’avantage indirect consenti à un hériter est également soumis à rapport dès lors qu’il traduit l’intention libérale du de cujus à son égard.

Le mécanisme du rapport qui s’applique lors du partage d’une succession, destiné à garantir l’égalité successorale, s’impose ainsi à chaque héritier et ne consiste pas en la restitution pure et simple des sommes ou biens perçus, mais en leur réunion fictive à la masse à partager afin de permettre le calcul de la quotité disponible et de la réserve héréditaire.

[Cadastre 1]-[Cadastre 1]- Sur la demande de rapport formée à l’encontre de Mme [Z] [E]

Aux termes de l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui s’en prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

Mme [Z] [E] sollicite l’infirmation de la décision entreprise en ce que celle-ci a dit qu’elle serait tenue de rapporter à la succession de son père pour la période allant du 1er mars 1979 au 14 avril 2008, puis à la succession de sa mère pour la période allant du 15 avril 2008 au 28 juin 2013 l’avantage indirect dont elle a bénéficié au titre de son occupation sans bourse délier des immeubles sis à [Localité 20], lieudit [Localité 37] et [Adresse 24], cadastrés section AN n°[Cadastre 1], [Cadastre 10], [Cadastre 13], [Cadastre 25] et [Cadastre 26], correspondant aux loyers qui auraient dû être versés en contrepartie de son occupation des lieux, et dit que le notaire déterminerait le montant de ce rapport lors des opérations de succession.

Si elle reconnaît occuper les lieux sans payer de loyer depuis mars 1979, elle fait valoir qu’elle n’occupe que la maison d’habitation du lot n° [Cadastre 1], à l’exclusion des autres bâtiments figurant dans ce lot, que cette maison ne pouvait faire l’objet d’une location compte tenu de son état de dégradation et de vétusté et qu’elle a dû engager des travaux de rénovation importants pour la rendre habitable, ce qui compense l’absence de loyer.

Les intimés soutiennent que le caractère inhabitable des lieux n’est pas établi, que Mme [E] a pris l’initiative d’installer ses deux enfants (majeurs) dans les maisons individuelles situées aux n° [Cadastre 13] et [Adresse 24] à [Localité 20], qu’elle utilise les dépendances pour l’activité professionnelle de son époux, les bois pour y faire effectuer des coupes à son bénéfice et y faire divaguer ses chiens alors qu’ils sont loués à une association de chasse.

SUR CE

Il résulte des conclusions des parties et des éléments produits que si l’occupation du domaine de [J] par Mme [E] depuis mars 1979 n’est pas contestée, l’emprise de cette occupation l’est en revanche, ainsi que l’état des lieux occupés, étant précisé que ce domaine comporte :

– sur un terrain cadastré section AN n°[Cadastre 1], sis [Adresse 9] à [Localité 20], lieudit ‘[Localité 37], d’une surface de 80 a 93 ca, une maison d’habitation (‘le château’, occupé par Mme [E]) et plusieurs dépendances, dont des locaux commerciaux et dépôts couverts (8A, 8B, 8C, et 8D) ainsi qu’un parc,

– sur un terrain cadastré section AN n° [Cadastre 10], sis n° [Adresse 15], une maison avec jardin ([Cadastre 1] a 70 ca),

– un bois cadastré section AN n° [Cadastre 13] (99 a 45 ca),

– sur un terrain cadastré section AN n°[Cadastre 25] (8 a 20 ca) et [Cadastre 26] (2 a 15 ca), sis n° [Adresse 24], une maison et un jardin.

* Ce domaine, qui avait appartenu en propre à [P] [Y], décédé en 1974, était la propriété en 1979 d’une indivision résultant de la succession de celui-ci, composée de son fils unique [D] [Y] à hauteur de la moitié et de ses six petits-enfants, légataires universels à hauteur de 1/12ème chacun. Puis, par acte notarié en date du 28 juin 2001, [D] [Y] a fait donation à ses six enfants de ses droits en nue-propriété recueillis dans la succession de son père. Il est donc resté usufruitier de ce domaine à hauteur de la moitié jusqu’à son décès intervenu le 14 avril 2008. A son décès, son usufruit s’est éteint pour rejoindre la nue-propriété qu’il avait précédemment donnée à ses six enfants, de sorte que ceux-ci sont devenus pleins propriétaires des lots concernés, sans que son épouse survivante ait de droits d’usufruit sur les immeubles.

Dès lors, l’obligation à rapport de Mme [E] de l’avantage indirect dont elle a bénéficié pour l’occupation des lieux à titre gratuit ne peut porter que sur la succession de son père, à hauteur de la moitié de la valeur locative des biens occupés correspondant aux droits en pleine propriété puis en usufruit de son père dans l’indivision, et pour la période de mars 1979 au 14 avril 2008, date du décès de celui-ci.

* Les témoignages de personnes du village ou de proches de la famille ayant connu la maison depuis les années 1970 ainsi que les quelques factures versées aux débats par Mme [E] permettent d’établir qu’à son entrée dans les lieux, la maison principale d’habitation (‘le chateau’) était dénuée de tout confort, sans sanitaires (WC, salle d’eau), sans assainissement, sans chauffage central, avec des huisseries et une toiture fuyardes, et qu’elle a entrepris d’importants travaux de rénovation pour la rendre habitable.

Si Mme [E] semble avoir financé certains de ces travaux dont elle produit les factures, elle ne justifie cependant pas de l’ensemble de ceux qu’elle dit avoir réalisé, pas plus que de leur financement.

Or l’accord non verbal passé en 1979 entre Mme [E] et l’indivision propriétaire des lieux pour l’occupation des ceux-ci peut s’analyser en une convention de prêt à usage, laquelle peut très bien avoir été assortie de charges pour l’occupante, telles que la réalisation de travaux de rénovation normalement à la charge du propriétaire.

Dès lors, l’avantage indirect que [D] [Y] a entendu accorder à sa fille en mettant à sa disposition gratuitement un logement qu’elle occupe depuis 1979, lui permettant ainsi de réaliser de substantielles économies de loyer, doit se mesurer à l’aune des charges effectivement supportées par celle-ci, autres que le simple entretien des lieux normalement à la charge de l’occupant dans le cadre d’un prêt à usage, et dont il lui appartiendra de justifier dans le cadre des opérations de liquidation.

* S’agissant de l’occupation des deux pavillons individuels situés à l’entrée du domaine, aux n°'[Adresse 15] et [Adresse 24] à [Localité 20], par les enfants de Mme [E], il résulte de la pièce n°29 versée aux débats par celle-ci que [D] [Y] avait autorisé, le 6 avril 2008, ‘des travaux de rénovation dans l’immeuble pavillon de garde [Adresse 15] par son petit-fils [SX] [E]’, étant précisé que ‘[SX] prend les choses dans l’état où elles sont, mais il ne peut entrer en jouissance qu’après avoir fait dresser par un huissier un état de l’immeuble et tenu compte du manque de branchement Edf, du tout à l’égout et de l’absence de compteur d’eau. [SX] s’engage à entretenir en bon état et d’en assumer les charges qui incombent normalement au propriétaire, telles que les contributions.’

Cet écrit, bien que datant de quelques jours seulement avant le décès de M. [D] [Y], s’analyse également en une convention de prêt à usage, mais au profit de M. [SX] [E], portant sur le pavillon de garde cadastré section AN n° [Cadastre 10], de sorte que Mme [E], qui n’occupe pas personnellement les lieux et dont il n’est pas établi qu’elle l’ait fait avant l’occupation par son fils, ne saurait être tenue à rapporter à la succession l’avantage indirect qu’elle aurait tiré de l’occupation à titre gratuit de cet immeuble.

* S’agissant du bois cadastré section AN n°[Cadastre 13], aucun élément ne permet d’établir que Mme [E] en ait eu la jouissance à titre gratuit, étant précisé qu’il résulte des éléments versés aux débats qu’il était loué en 2014 et depuis plusieurs années par l’indivision [Y] à une association de chasse. Il n’y a donc pas lieu à rapport par Mme [E] à la succession de son père pour l’avantage indirect qu’elle aurait tiré de la jouissance à titre gratuit de ce terrain.

* Par ailleurs, s’il n’est pas établi que Mme [E] ait occupé personnellement le pavillon sis [Adresse 24], cadastré section AN n° [Cadastre 25] et [Cadastre 26], désormais occupé par sa fille depuis 2012, s’il résulte des éléments produits qu’elle est à l’origine de cette occupation sans qu’elle ait été autorisée au préalable par l’indivision successorale faisant suite au décès de [D] [Y], cette occupation, postérieure à ce décès, ne saurait constituer un avantage indirect rapportable à la succession de celui-ci.

La décision entreprise sera donc infirmée concernant les modalités du rapport dû par Mme [E] au titre de l’avantage indirect tiré de l’occupation à titre gratuit de l’occupation du domaine de [J] et, statuant à nouveau, il convient de dire que celle-ci sera tenue de rapporter à la succession de [D] [Y] l’avantage indirect tiré de l’occupation à titre gratuit, de mars 1979 au 14 avril 2008, de l’immeuble cadastré section AN n°[Cadastre 1], sis [Adresse 9] à [Localité 20], lieudit ‘[Localité 37], d’une surface de 80 a 93 ca, comportant une maison d’habitation (‘le château’) et plusieurs dépendances, dont des locaux commerciaux et dépôts couverts (8A, 8B, 8C, et 8D) ainsi qu’un parc, à hauteur de la moitié de la valeur locative de ce bien pendant cette période, laquelle sera déterminée de manière évolutive en fonction de l’état du bien et des travaux réalisés, et dont il conviendra de déduire les travaux de grosses réparations normalement à la charge du propriétaire effectivement pris en charge par Mme [E] et dont elle devra justifier dans le cadre des opérations de liquidation.

[Cadastre 1]-2- Sur les demandes de rapport formées à l’encontre de M. [P] [Y]

* Sur la demande de rapport résultant de l’abandon du prix de cession de l’exploitation agricole

Formant appel incident, M. [P] [Y] sollicite l’infirmation du jugement entrepris en ce que celui-ci a dit qu’il devait rapporter à la succession de ses parents la donation indirecte qu’il a reçu par l’abandon du prix de cession de 600 000 francs d’une exploitation agricole reçue par Me [U] et enregistrée le 8 juillet 1990 et dit que le montant de ce rapport serait déterminé par le notaire lors des opérations de liquidation en application des dispositions de l’article 860-[Cadastre 1] du code civil.

Soutenant que c’est à celui qui se prévaut d’une libéralité d’en démontrer l’existence, l’intention libérale du disposant devant être constatée afin d’ordonner le rapport à la succession de l’avantage présumé, il fait valoir que cette somme de 600 000 francs a été intégralement payée par le biais de deux prêts souscrits par ses soins auprès du Crédit mutuel agricole et rural, l’un à hauteur de 400 000 francs et l’autre à hauteur de 262 500 francs, dont il rapporte la preuve.

Ses soeurs concluent à la confirmation du jugement, soutenant que l’appelant incident ne démontre pas le paiement qu’il allègue.

SUR CE

Aux termes de l’article 1353 (anciennement 1315) du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

L’article 1341 ancien du code civil applicable en l’espèce dispose par ailleurs qu’il doit être passé acte devant notaires ou sous signatures privées de toutes choses excédant une somme ou une valeur fixée par décret, même pour dépôts volontaires, et il n’est reçu aucune preuve par témoins contre et outre le contenu aux actes, ni sur ce qui serait allégué avoir été dit avant, lors ou depuis les actes, encore qu’il s’agisse d’une somme ou valeur moindre.

Cependant, il est admis en application de ce texte que la preuve du paiement, qui est un fait, peut être rapportée par tous moyens et notamment par présomptions et commencements de preuve par écrit.

Il ressort des éléments produits que selon acte authentique reçu par Maître [U] le 23 mai 1990, les époux [Y]-[H] ont cédé à leur fils [P] divers matériels agricoles, des stocks de paille, foin et fioul, ainsi que plusieurs cheptels pour un prix de 1 033 600 francs, réduit à 600’000 francs déduction faite d’un leg reçu par M. [P] [Y] de son grand-père et resté en la possession de ses parents.

L’acte de vente stipule en sa clause ‘prix et modalités de paiement’ que le prix est payable directement par le cessionnaire au cédant dès l’obtention par le cessionnaire d’un prêt déjà accepté par le Crédit mutuel de [Localité 21], un ordre irrévocable à cet effet ayant été signé par le cessionnaire à la banque.

M. [P] [Y], à qui il appartient de prouver qu’il a bien payé ce prix de vente, verse aux débats les tableaux d’amortissements et deux avis d’échéances du Crédit Mutuel de [Localité 21] en date des 25 décembre 1992 et 25 juin 1992 relatifs à deux prêts bonifiés agricoles, l’un de 262’500 francs et l’autre de 400 000 francs, dont le montant total correspond à celui de la cession, remboursables en échéances annuelles de 39 593 francs et 67 671 francs jusqu’en 2000, outre un relevé bancaire du 31 mai 1999, établissant qu’il lui restait alors un solde de 36 408,81 francs à rembourser sur son prêt bonifié spécial élevage de 262 500 francs et un solde de 51 728,04 francs à rembourser sur son prêt bonifié spécial jeune agriculteur, d’un montant de 400 000 francs.

Il résulte de ces éléments que la preuve est suffisamment rapportée du paiement par M. [P] [Y] du prix relatif à la cession qui lui a été consentie par ses parents.

Il convient donc d’infirmer la décision entreprise et de dire n’y avoir lieu à rapport par M. [P] [Y] au titre de l’abandon par ses parents du prix de cession.

* Sur la demande de rapport résultant de l’abandon de loyer

Mmes [S], [V] et [W] sollicitent l’infirmation de la décision entreprise en ce qu’elle les a déboutées de leur demande de rapport formée à l’encontre de M. [P] [Y] au titre de son occupation des biens sis à [Localité 27], lieudit [Localité 40], cadastrés section AC n°[Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7] et sa condamnation à rapporter à la masse active de la succession la donation indirecte dont il a bénéficié et consistant en l’abandon de toute demande de loyers sur la période du 1er janvier jusqu’au 28 juin 2013 concernant l’occupation de la maison d’habitation sise à [Adresse 8].

Elles font valoir que si leur frère dispose bien d’un bail rural portant sur divers biens et bâtiments d’exploitation agricole et sur un appartement situé au premier étage dépendant de la maison d’habitation, ce bail n’a jamais porté sur l’ensemble de la maison qu’il occupe cependant de manière privative depuis le décès de ses parents.

Mme [E] forme la même demande.

M. [Y] s’y oppose, soutenant que cette demande de Mme [E] est irrecevable comme nouvelle en cause d’appel et qu’il a toujours payé ses fermages et loyers.

SUR CE

En application de l’article 564 du code de procédure civile, en matière de partage de succession, les parties étant respectivement demanderesses et défenderesses quant à l’établissement de l’actif et du passif, toute demande doit être considérée comme une défense à une prétention adverse, de sorte que les demandes formées pour la première fois en cause d’appel sont recevables.

La demande de rapport formée par Mme [E] en cause d’appel est donc recevable, de même que celle, modifiée, de Mmes [S], [V] et [W].

C’est par de justes motifs, que la cour adopte, que le premier juge, ayant relevé qu’il ressortait des pièces versées aux débats qu’aux termes d’un acte en date du 14 juin 1991 reçu par Maître [U], notaire à [Localité 30], les époux [Y] [H] et cinq de leurs enfants avaient consenti au sixième enfant des premiers, M. [P] [Y], un bail rural à long terme portant sur de nombreuses terres et pâtures ainsi que sur divers bâtiments d’exploitation agricole érigés sur un terrain sis à [Adresse 8], lieudit ‘[Localité 40]’ et ‘[Adresse 38]’, cadastrés section AC n°[Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7] moyennant le paiement d’un fermage annuel égal à la valeur en espèces de 746 quintaux de blé de froment de première qualité et qu’il n’était soutenu par aucune des parties que M. [P] [Y] aurait été défaillant dans le règlement de ses fermages, en a déduit qu’il n’apparaissait pas que l’intéressé ait occupé les lieux gratuitement suite à un abandon de loyers que lui auraient consenti ses parents.

La cour y ajoute que le bail rural précité emportait également location à M. [P] [Y] d’un appartement situé au premier étage dépendant d’une maison à usage d’habitation sise à [Adresse 29], occupée par M. et Mme [D] [Y] [H] et Mme [L] [N], avec droit de passage et de circulation les plus étendus pour accéder aux parties non comprises dans le bail, moyennant un loyer annuel de 6 000 francs, ce loyer revenant pour 3/[Cadastre 10] indivis à [D] [Y], s’agissant d’un bien provenant originairement de la communauté [Y] Degrugillier (ses parents), et pour [Cadastre 1]/[Cadastre 10] indivis aux autres bailleurs, dont M. [P] [Y].

Or il n’est pas établi que M. [P] [Y] ait manqué à son obligation de paiement du loyer ni qu’il ait occupé l’ensemble de la maison du vivant de son père, de sorte qu’il ne saurait être tenu à rapport à la succession de celui-ci de ce chef.

Enfin, il convient de relever que les appelantes ont, sans doute par erreur matérielle du dispositif de leurs conclusions alors que leur motivation demandait un rapport pour l’ensemble de la période de 1990 à 2013, limité leur demande de rapport à la période du 1er janvier au 28 juin 2013. Or, elles ne démontrent pas un manquement par leur frère à ses obligations de paiement de loyer ou son occupation de l’ensemble de la maison à cette période pendant laquelle leur mère avait conservé l’usufruit de la maison suite au décès de son époux, de sorte qu’il n’y a pas non plus lieu à rapport à la succession de celle-ci.

La décision entreprise sera confirmée en ce qu’elle a rejeté la demande de rapport formée à l’encontre de M. [P] [Y] au titre de l’abandon de loyers.

[Cadastre 1]-3- Sur la demande de rapport formée à l’encontre de Mme [A] [W]

* Sur la recevabilité de la demande

Comme cela a été indiqué plus haut, en application de l’article 564 du code de procédure civile, en matière de partage de succession, les parties étant respectivement demanderesses et défenderesses quant à l’établissement de l’actif et du passif, toute demande doit être considérée comme une défense à une prétention adverse, de sorte que les demandes formées pour la première fois en cause d’appel sont recevables.

La demande de rapport formée par Mme [E] pour la première fois en cause d’appel à l’encontre de Mme [W] est donc recevable.

* Sur le fond

Mme [E] sollicite la condamnation de Mme [W] à rapporter à la succession de [B] [H] l’avantage indirect dont elle a bénéficié au titre de son occupation sans bourse délier de la maison d’habitation sise [Adresse 39] à [Localité 21] pour la période allant du 1er juillet 1972 (date de son mariage) au 28 juin 2013 (décès de leur mère), correspondant aux loyers qui auraient du être versés en contrepartie de son occupation des lieux.

Mmes [W], [S] et [V] s’y opposent, soutenant que cette maison est un immeuble propre de leur mère et que Mme [E] est en conséquence mal fondée à solliciter le rapport à la succession de [D] [Y] pour la période allant du 1er juillet 1972 au 14 avril 2008 de l’avantage indirect dont a bénéficié Mme [W].

M. [Y] et Mme [O] ne prennent pas position sur ce point.

SUR CE

Il résulte des conclusions des parties qu’il n’est pas contesté que Mme [W] occupe à titre gratuit, depuis le 1er juillet 1972, une maison à usage d’habitation sise [Adresse 39] à [Localité 21], ayant appartenu à leur mère, [B] [H].

Mme [W] sera donc tenue de rapporter à la succession de [B] [H] l’avantage indirect constitué par son occupation à titre gratuit de cet immeuble entre le 1er juillet 1972 et le 28 juin 2013, cet avantage correspondant à la valeur des loyers qui auraient dû être versés en contrepartie de son occupation des lieux et qui sera déterminée lors des opérations de liquidation.

II- Sur les indemnités d’occupation

L’article 815-9 alinéa 2 du code civil dispose que l’indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d’une indemnité.

2-1- Demandées à l’encontre de Mme [E]

Il résulte des développements qui précèdent que Mme [E] occupe l’immeuble cadastré section AN n°[Cadastre 1], sis [Adresse 9] à [Localité 20], lieudit ‘[Localité 37], d’une surface de 80 a 93 ca, comportant une maison d’habitation (‘le château’) et plusieurs dépendances, dont des locaux commerciaux et dépôts couverts (8A, 8B, 8C, et 8D) ainsi qu’un parc.

Elle doit être tenue, à compter du 28 juin 2013, aucune demande n’étant formulée à ce titre pour la période entre le 15 avril 2008 et le 28 juin 2013, d’une indemnité d’occupation à l’égard de l’indivision successorale résultant du décès de son père, laquelle sera évaluée par le notaire en fonction de l’état du bien et de l’usage des lieux, étant précisé qu’elle pourra faire valoir des créances sur l’indivision si elle a été amenée à engager des travaux normalement à la charge de celle-ci.

S’agissant des deux pavillons d’entrée, sis [Adresse 15] et [Adresse 24], cadastrés section AN n°[Cadastre 10], [Cadastre 25] et [Cadastre 26], occupés par les enfants majeurs de Mme [E], celle-ci ne saurait être tenue au paiement d’une indemnité d’occupation, n’occupant pas personnellement les lieux, étant précisé qu’il appartient à l’indivision, le cas échéant, d’engager les voies de droit nécessaires pour obtenir leur condamnation au paiement d’une indemnité d’occupation, solliciter la fin du prêt à usage consenti par [D] [Y] à son petit-fils [SX], la reconnaissance éventuelle de l’occupation sans droit ni titre de la fille de Mme [E], et l’expulsion si nécessaire des occupants.

Enfin, il n’y a pas lieu de condamner Mme [E] au paiement d’une indemnité d’occupation pour la parcelle boisée cadastrée section AN n°[Cadastre 13], donnée en location par l’indivision à une association de chasse, les déboires rencontrés par Mme [E] avec cette association il y a plusieurs années n’étant pas suffisants à établir qu’elle aurait la jouissance exclusive de ce bois.

2-2- Demandées à l’encontre de M. [Y]

* Sur la recevabilité de la demande

La demande d’indemnité formulée pour la première fois en cause d’appel par Mmes [E], [S], [V] et [W] à l’encontre de M. [P] [Y] pour l’occupation privative, à compter du 28 juin 2013, de la maison d’habitation sise à [Adresse 28], est recevable pour les mêmes raisons qu’exposées précédemment.

* Sur le bien-fondé

M. [Y], à qui un appartement avait été donné à bail au premier étage de l’immeuble sis à [Adresse 28] pendant que ses parents continuaient d’occuper le reste de la maison, ne conteste pas son occupation privative des lieux depuis le décès de sa mère intervenu le 28 juin 2013, se contentant d’exposer qu’il n’empêche pas les autres indivisaires d’accéder aux lieux.

Il n’établit cependant pas avoir remis les clefs de l’habitation aux autres indivisaires ou les avoir interpellés pour mettre le bien à leur disposition, que ce soit pour son occupation ou sa mise en location.

Il sera donc tenu à une indemnité d’occupation envers l’indivision résultant de la succession de [D] [Y] à qui le bien appartenait pour partie avec ses enfants, pour son occupation du reste de l’habitation à compter du 28 juin 2013.

2-3- Demandées à l’encontre de Mme [W]

Mme [W] sera tenue, à compter du 28 juin 2013, d’une indemnité d’occupation à l’égard de l’indivision résultant de la succession de [B] [H], pour son occupation privative du bien sis [Adresse 39] à [Localité 21] ayant appartenu en propre à celle-ci.

III- Sur la demande d’expertise

C’est à juste titre que le premier juge a estimé qu’en l’état, la demande d’expertise dans le but de déterminer la valeur des biens occupés en vue de la fixation des indemnités d’occupation apparaissait prématurée dès lors qu’il n’était justifié ni même allégué d’aucune difficulté particulière sur ce point.

Il convient donc de confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a débouté Mmes [S], [V] et [W] de leur demande tendant à voir ordonner une expertise pour évaluer la valeur locative des biens de [J] et de [Localité 21] et de débouter Mme [E] de sa demande formulée en cause d’appel aux fins d’évaluer les valeurs locatives et vénales des biens sis à [Localité 20], [Localité 21], [Localité 27] et de tous les biens dépendant de l’indivision.

Il convient toutefois de rappeler, ainsi que l’a fait le premier juge, que le notaire peut, dans le cadre de sa mission, si la valeur ou la consistance des biens le justifie, s’adjoindre un expert choisi d’un commun accord entre les copartageants ou à défaut, désigné par le juge commis.

IV- Sur les demandes d’autorisation à agir au nom de l’indivision

Aux termes du premier alinéa de l’article 815-5 du code civil, un indivisaire peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le consentement d’un coïndivisaire serait nécessaire, si le refus de celui-ci met en péril l’intérêt commun.

En l’espèce, Mmes [S], [V] et [W], qui ont été déboutées de cette demande en première instance aux motifs notamment que leurs écritures méconnaissaient les dispositions de l’article 753 du code de procédure civile et ne mettaient pas le tribunal à même d’apprécier le bien-fondé de leur demande alors qu’elle versaient au débats 193 pièces, sollicitent l’autorisation d’agir au nom de l’indivision pour  engager toute procédure :

– de recouvrement des fermages ou des loyers à l’encontre des locataires des biens immobiliers appartenant à l’indivision [Y] ;

– de résiliation des baux ruraux portant sur des parcelles appartenant à l’indivision [Y] en raison du non-respect par les locataires de leur obligation ;

– de recouvrement de créances au profit de l’indivision [Y] ;

– en expulsion à l’encontre de tout occupant sans droit des immeubles relevant de l’indivision [Y] ;

– en fixation judiciaire du montant du fermage du bail renouvelé tant en ce qui concerne le bail en date du 14 juin 1991 qui a été consenti à M. [Y] que concernant les autres baux ruraux qui ont été consentis à des tiers ;

Ainsi que pour :

– faire délivrer tout congé sur le fondement de l’article L. 416-1 du code rural ou L. 411-64 du code rural au nom de l’indivision [Y] à l’encontre de tout preneur à bail rural qui aurait atteint l’âge légal de la retraite et, en particulier, à l’encontre des époux [M] et de M.'[Y],

– donner mandat au nom de l’indivision [Y] à la société Sotheby’s pour mettre en vente les deux statues en bronze représentant des chiens de chasse attribués à [K] [X] [F] pour un prix net vendeur et/ou de retrait de 250 000 euros à charge pour Me [G] d’en percevoir le prix et de le partager entre les héritiers,

– louer par bail de chasse l’ensemble de bois appartenant à l’indivision successorale.

Elles font valoir que l’ensemble des fermages et loyers des biens immobiliers appartenant à l’indivision [Y] sont actuellement encaissés auprès de l’étude de Me [G], notaire, mais que certaines parcelles de terres sont exploitées sans pour autant que l’indivision ne perçoive de fermages, que certains bois sont châssés sans qu’aucun loyer soit versé, comme le bois situé à [Localité 35] ; que Me [G] se refuse à engager les procédures nécessaires pour recouvrer les fermages impayés ainsi qu’à mettre en place des procédures d’expulsion au motif que de tels actes ne relèveraient pas de sa mission ; qu’il est nécessaire d’introduire les procédures en recouvrement qui s’imposent en particulier pour interrompre le délai de prescription quinquennal en matière de loyers et fermages et demander l’expulsion de tout occupant sans droit ni titre de biens immobiliers appartenant à l’indivision.

Elles ajoutent qu’il est également dans l’intérêt de l’indivision successorale de récupérer et de partager ou vendre des biens libres de toute occupation et donc de délivrer congé aux locataires de parcelles de terre appartenant à l’indivision et ayant atteint l’âge de la retraite, dont M. [P] [Y].

Elles font valoir que l’attitude de blocage de leurs frère et soeurs depuis plusieurs années, qui jouissent de biens dépendant de l’indivision et se refusent à toute idée de partage global, met en péril l’indivision successorale qui perd chaque année d’importantes rentrées d’argent, les biens indivis n’étant pas gérés en bon père de famille et de nombreux occupants profitant de cette situation pour ne rien payer.

Mme [E] s’oppose à la demande de ses soeurs tendant à être désignées pour agir au nom de l’indivision et sollicite qu’il soit donné mission à l’administrateur provisoire d’engager les actions demandées.

M. [P] [Y] s’oppose à la demande formulée au motif que le tribunal a parfaitement retenu que ses soeurs ne précisaient pas en quoi l’intérêt commun des indivisaires nécessitait de délivrer congé en urgence aux preneurs ayant atteint l’âge de la retraite et notamment à lui-même et que si la révision des fermages et la vente des deux statues pouvaient effectivement présenter un avantage financier pour l’indivision, les demanderesses ne démontraient pas en quoi cette non-exécution était de nature à mettre en péril l’intérêt commun au regard de l’importance du patrimoine indivis.

Mme [O] n’a pas pris position sur cette demande.

SUR CE

Les intérêts de l’indivision peuvent être mis en péril en raison de l’occupation de terrains appartenant à l’indivision par des locataires ne respectant pas leurs obligations ou des tiers sans droit ni titre, et il apparaît nécessaire que l’indivision puisse agir en justice aux fins de préserver ses intérêts et notamment d’éviter d’éventuelles prescriptions de ses créances ou des prescriptions acquisitives en matière immobilière.

Le caractère conflictuel de la succession exclut cependant que Mmes [S], [V] et [W] soient autorisées à agir au nom de l’indivision.

Il convient donc d’étendre la mission de l’administrateur provisoire des successions aux fins d’engager toutes procédures :

– de recouvrement des fermages ou des loyers à l’encontre des locataires des biens immobiliers appartenant à l’indivision [Y] ;

– de résiliation des baux ruraux portant sur des parcelles appartenant à l’indivision [Y] en raison du non-respect par les locataires de leur obligation ;

– de recouvrement de créances au profit de l’indivision [Y] ;

– en expulsion à l’encontre de tout occupant sans droit des immeubles relevant de l’indivision [Y],

et aux fins de donner en location par bail de chasse l’ensemble de bois appartenant à l’indivision successorale

En revanche, les appelantes incidentes seront déboutées purement et simplement du surplus de leurs demandes aux fins de délivrer congé au nom de l’indivision pour les locataires de baux ruraux ayant atteint l’âge de la retraite, dont leur frère, de révision des fermages et de vente aux enchères de deux statues indivises attribuées à [K] [X] [F] qui, si elles peuvent présenter un intérêt financier pour l’indivision, ne sont pas de nature à mettre en péril l’intérêt commun en cas de non réalisation, notamment au regard de l’importance du patrimoine indivis, la décision entreprise étant confirmée à cet égard, de même qu’en ce qui concerne le débouté de la demande subséquente des appelantes incidentes tendant à être autorisées à utiliser les fonds détenus par le notaire pour le compte de l’indivision pour faire face aux actes d’administration.

V- Sur la demande de rapport des avances en capital

C’est par de justes motifs, que la cour adopte intégralement, que le premier juge a dit qu’il serait tenu compte lors des opérations de partage, des avances en capital de 20 000 euros perçues par Mmes [S], [V] et [W] par suite de l’ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire de Béthune en date du 27 février 2019, sans qu’il y ait lieu d’ordonner le rapport desdites sommes avec intérêts et capitalisation.

La décision entreprise sera confirmée de ce chef.

VI- Sur les demandes accessoires

Eu égard à la nature de l’affaire, il convient de dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage et que les parties conserveront la charge de leurs propres frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour

Statuant dans les limites de l’appel,

Infirme la décision entreprise en ce qu’elle a :

– Dit que Mme [E] devait rapporter à la succession de [D] [Y] pour la période allant du 1er mars 1979 au 14 avril 2008, et à celle de [B] [H] pour la période allant du 15 avril 2008 au 28 juin 2013, l’avantage indirect dont elle a bénéficié au titre de son occupation sans bourse délier des immeubles situés à [Localité 20], lieudit [Localité 37] et [Adresse 41] cadastrés AN n° [Cadastre 1], [Cadastre 10], [Cadastre 13], [Cadastre 25] et [Cadastre 26], correspondant aux loyers qui auraient dû être versés en contrepartie de son occupation des lieux, et dit que le notaire commis déterminerait le montant de ce rapport lors des opérations de liquidation ;

– Dit que M. [Y] devait rapporter aux successions des défunts la donation indirecte qu’il a reçue par suite de l’abandon du prix de cession de 600 000 francs d’une exploitation agricole, et dit que le montant de ce rapport serait déterminé par le notaire lors des opérations de liquidation en application des dispositions de l’article 860-1 du code civil ;

-Dit que Mme [E] était redevable envers les indivisions successorales d’une indemnité d’occupation au titre de son occupation privative des immeubles situés à [Localité 20], lieudit [Localité 37] et [Adresse 41], cadastrés AN, n° [Cadastre 1], [Cadastre 10], [Cadastre 13], [Cadastre 25] et [Cadastre 26] à compter du 28 juin 2013 et dont le montant serait déterminé par le notaire lors des opérations de liquidation ;

La confirme pour le surplus,

Statuant à nouveau sur les chefs de jugement infirmés,

– Dit que Mme [Z] [Y] épouse [E] devra rapporter à la succession de [D] [Y] l’avantage indirect tiré de l’occupation à titre gratuit, de mars 1979 au 14 avril 2008, de l’immeuble cadastré section AN n° [Cadastre 1], sis [Adresse 9] à [Localité 20], lieudit ‘[Localité 37], d’une surface de 80 a 93 ca, comportant une maison d’habitation (‘le château’) et plusieurs dépendances, dont des locaux commerciaux et dépôts couverts (8A, 8B, 8C, et 8D) ainsi qu’un parc, à hauteur de la moitié de la valeur locative de ce bien pendant cette période, laquelle sera déterminée de manière évolutive en fonction de l’état du bien et des travaux réalisés, et dont il conviendra de déduire les travaux de grosses réparations normalement à la charge du propriétaire effectivement pris en charge par Mme [E], et dit que le notaire déterminera le montant de ce rapport lors des opérations de liquidation ;

– Déboute Mmes [C] [Y] épouse [S], [T] [Y] épouse [V], [A] [Y] veuve [W] du surplus de leur demande de rapport formée à l’encontre de Mme [Z] [Y] épouse [E] ;

– Déboute Mmes [C] [Y] épouse [S], [T] [Y] épouse [V], [A] [Y] veuve [W], [Z] [Y] épouse [E] de leur demande tendant au rapport par M. [P] [Y] aux successions des défunts d’une donation indirecte qu’il aurait reçue par suite de l’abandon du prix de cession de 600 000 francs d’une exploitation agricole’;

-Dit que Mme [Z] [Y] épouse [E] est redevable envers l’indivision successorale faisant suite au décès de [D] [Y] d’une indemnité d’occupation au titre de son occupation privative des immeubles situés à [Localité 20], lieudit [Localité 37] et [Adresse 41], cadastrés AN, n° 1 à compter du 28 juin 2013 et dont le montant sera déterminé par le notaire lors des opérations de liquidation ;

– Déboute Mmes [C] [Y] épouse [S], [T] [Y] épouse [V], [A] [Y] veuve [W] du surplus de leurs demandes d’indemnités d’occupation formées à l’encontre de Mme [Z] [Y] épouse [E] ;

Y ajoutant,

– Dit que Mme [A] [Y] veuve [W] sera tenue de rapporter à la succession de [B] [H] l’avantage indirect constitué par son occupation à titre gratuit de l’immeuble sis à [Adresse 39], entre le 1er juillet 1972 et le 28 juin 2013, cet avantage correspondant à la valeur des loyers qui auraient dû être versés en contrepartie de son occupation des lieux et dont le montant sera déterminé par le notaire lors des opérations de liquidation’;

– Dit que M. [P] [Y] sera tenu à l’égard de l’indivision résultant du décès de [D] [Y] d’une indemnité au titre de l’occupation, à compter du 28 juin 2013, du reste de l’immeuble sis à [Adresse 28] non donné à bail, dont le montant sera déterminé par le notaire lors des opérations de liquidation ;

– Ordonne l’extension de la mission de Me [R] [G], administrateur provisoire des successions aux fins d’engager toutes procédures :

– de recouvrement des fermages ou des loyers à l’encontre des locataires des biens immobiliers appartenant à l’indivision [Y] ;

– de résiliation des baux ruraux portant sur des parcelles appartenant à l’indivision [Y] en raison du non-respect par les locataires de leur obligation ;

– de recouvrement de créances au profit de l’indivision [Y] ;

– en expulsion à l’encontre de tout occupant sans droit des immeubles relevant de l’indivision [Y],

et aux fins de donner en location par bail de chasse l’ensemble de bois appartenant à l’indivision successorale ;

– Déboute Mmes [C] [Y] épouse [S], [T] [Y] épouse [V], [A] [Y] veuve [W], [Z] [Y] épouse [E] du surplus de leurs demandes aux fins d’extension de la mission de l’administrateur provisoire ;

– Dit que les dépens de première instance et d’appels seront employés en frais privilégiés de partage ;

– Dit que les parties conserveront la charge de leurs propres frais irrépétibles.

Le greffier

Delphine Verhaeghe

Le président

Bruno Poupet

 


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