Droits des héritiers : 24 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/10877

·

·

Droits des héritiers : 24 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/10877

24 mai 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
20/10877

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 3 – Chambre 1

ARRET DU 24 MAI 2023

(n° 2023/ , 15 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/10877 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCE2N

Décision déférée à la Cour : Arrêt du 10 Juin 2020 – Cour d’Appel de PARIS – RG n° 18/21285

DEMANDEUR A L’OPPOSITION

Madame [HW] [E]-[PJ] épouse [U]

née le 23 Décembre 1970 à [Localité 9] (63)

[Adresse 7]

[Localité 6]

représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

ayant pour avocat plaidant Me Najoua BOSSARD, avocat au barreau de PARIS, toque : B364

DEFENDEURS A L’OPPOSITION

Monsieur [V] [D] [Y]-[C]

né le 24 Juin 1955 à [Localité 13] (03)

[Adresse 4]

[Localité 2]

représenté par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

ayant pour avocat plaidant Me Jean-Michel de ROCQUIGNY, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

Monsieur [O], [PJ], [M], [K], [T] [E]

né le 27 Juillet 1973 à [Localité 9] (63)

[Adresse 5]

[Localité 12]

représenté par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753

ayant pour avocat plaidant Me Dominique MUNIZAGA, avocat au barreau de PARIS

Madame [R] [D] [Y]-[C] épouse [EP], assignée par acte d’huissier du 17.08.2020 remis à sa personne

née le 09 Novembre 1959 à [Localité 13] (03)

[Adresse 3]

[Localité 1]

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 15 Février 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Patricia GRASSO, Président

Mme Sophie RODRIGUES, Conseiller

Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Mme Sophie RODRIGUES dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier lors des débats : Mme Emilie POMPON

ARRET :

– réputé contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Patricia GRASSO, Président, et par Mme Emilie POMPON, Greffier.

***

EXPOSE DU LITIGE

[A] [PJ], née le 6 décembre 1932 à [Localité 8] [Localité 8], est décédée le 9 juillet 2009, laissant :

– cinq enfants nés de son union avec [J] [D] [Y] dont elle a divorcé en 1971 : [H], [V], [YA], [L] et [R], adoptés par [W] [I] [C] selon jugement du tribunal de grande instance de Cusset du 5 juillet 1961,

– deux enfants nés de son union avec M. [M] [E] : [HW] et [O].

Mme [H] [D] [Y] et MM. [YA] et [L] [D] [Y] ont renoncé à la succession de leur mère.

Par jugement réputé contradictoire du 13 juillet 2018, M. [O] [E] et Mme [HW] [E] n’étant pas réprésentés à la procédure engagée par M. [V] [D] [Y]-[C] et Mme [R] [D] [Y]-[C], le tribunal de grande instance de Paris a notamment :

– rejeté la demande tendant à déclarer M. [O] [E] et Mme [HW] [E] déchus de tout droit dans la succession de [A] [PJ] pour recel,

– ordonné la vérification d’écriture des testaments olographes des 4 juillet 2007 et 29 juin 2009,

– sursis à statuer sur les autres demandes.

Sur appel interjeté par M. [V] [D] [Y]-[C], limité au rejet de sa demande tendant à voir imputer un recel successoral à M. [O] et Mme [HW] [E], la cour d’appel a notamment, par arrêt rendu par défaut du 10 juin 2020 infirmant le jugement en ce qu’il a rejeté la demande tendant à reconnaître que M. [O] [E] et Mme [HW] [E] avaient commis un recel successoral dans le cadre de la succession de leur mère [A] [PJ] :

– dit que M. [O] [E] et Mme [HW] [E] ont commis un recel successoral dans le cadre de la succession de leur mère [A] [PJ] par dissimulation de l’existence des enfants ([D] [Y]) issus du premier mariage de leur mère,

– dit que M. [O] [E] et Mme [HW] [E] seront en conséquence privés de leurs droits dans l’héritage de leur mère à hauteur de la part (susceptible de majorer leurs droits personnels dans la succession) devant revenir à M. [V] [D] [Y]-[C] et sa s’ur, héritiers dissimulés,

– déclaré M. [O] [E] irrecevable en ses prétentions reconventionnelles tendant à voir imputer un recel successoral à M. [V] [D] [Y]-[C] et en sa demande de restitution d’une somme de 104 839,65 euros accessoire à ce recel.

Par acte d’huissier du 15 juillet 2020, cet arrêt a été signifié à Mme [HW] [E] qui a formé opposition par deux déclarations successives déposées par avocat, l’une le 25 juin 2020 enregistrée sous le n°RG 20/10877 et l’autre le 17 août 2020 enregistrée sous le n°RG 20/11341. Les deux procédures ont été jointes par ordonnance du 1er décembre 2020, et il a été dit qu’elles se poursuivraient sous le seul n°RG 20/10877.

M. [O] [E] a formé opposition par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 10 août 2020 reçue à la cour le 31 août 2020 et enregistrée sous le n° RG 20/12871.

Par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 1er décembre 2020, cette opposition a été déclarée irrecevable pour n’avoir pas été déclarée par avocat, au visa des articles 573 et 575 du code de procédure civile.

Dans le dossier n°RG 20/10877, M. [V] [D] [Y]-[C], par conclusions d’incident notifiées le 1er juillet 2021, a soulevé l’irrecevabilité des trois oppositions.

Par ordonnance sur incident du 16 décembre 2021, le magistrat en charge de la mise en état a :

– rejeté la demande d’irrecevabilité des oppositions de Mme [HW] [E] formée par M. [V] [D] [Y]-[C],

– condamné M. [V] [D] [Y]-[C] aux dépens de l’incident,

– condamné M. [V] [D] [Y]-[C] à payer à Mme [HW] [E] la somme de 1 000 euros au titre l’article 700 du code de procédure civile,

– rejeté la demande de M. [V] [D] [Y]-[C] au titre l’article 700 du code de procédure civile,

– rejeté la demande de M. [O] [E] au titre l’article 700 du code de procédure civile.

Dans le dossier n°RG 20/10877, M. [O] [E], par conclusions d’incident notifiées le 17 janvier 2022, a soulevé un nouvel incident devant le conseiller de la mise en état aux fins de voir ordonner le sursis à statuer dans l’attente de l’issue des procédures pénales en cours en France et en Pologne.

Par ordonnance d’incident du 10 mai 2022, le magistrat en charge de la mise en état a rejeté la demande de sursis à statuer formée par M. [O] [E] et rejeté la demande de dommages-intérêts formée par M. [V] [D] [Y]-[C].

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 31 janvier 2023, Mme [HW] [E] demande à la cour :

sur la saisine de la cour :

– de « juger ce que droit l’opposition formée par M. [O] [E] »,

– de « juger ce que droit la première opposition » qu’elle a formée,

– de juger recevable la seconde opposition qu’elle a formée le 17 août 2020, par application de l’article 564 du code de procédure civile,

– de la juger recevable et bien fondée à saisir la cour de moyens tendant à faire reconnaître le recel successoral de M. [V] [G] [Y]-[C] et « l’existence de dette vis à vis de la succession au titre de transactionnelle polonaise » (sic),

– de la déclarer recevable et bien fondée en ses prétentions devant la cour,

sur le fond :

– de rétracter l’arrêt entrepris en toutes ses dispositions,

et, statuant à nouveau,

in limine litis,

– de se dessaisir au profit des juridictions polonaises saisies préalablement aux juridictions françaises,

– de faire application de la loi polonaise et débouter purement et simplement M. [V] [G] [Y] de l’ensemble de ses demandes fins et prétentions,

– de juger qu’elle n’a nullement dissimulé l’existence de ses frères et s’urs utérins [G] [Y]-[C] dans la succession de leur mère et à tout le moins pas volontairement,

– de condamner M. [V] [G] [Y]-[C] pour recel successoral,

– de prononcer la déchéance de M. [V] [G] [Y]-[C] de tous ses droits sur la succession d'[A] [PJ],

– de condamner M. [V] [G] [Y]-[C] à lui restituer la somme de 446 271,27 euros (erreur dans la monnaie : il s’agit de 446 271,27 zlotys, soit environ 100 000 euros) qui lui revient de droit, par l’application de la loi polonaise,

– de condamner M. [V] [G] [Y] à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– de condamner M. [V] [G] [Y] aux dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 30 janvier 2023, M. [O] [E] demande à la cour de :

– le déclarer recevable et fondé en ses demandes,

y faisant droit,

– ordonner le sursis à statuer dans l’attente de l’issue des procédures pénales en cours en France et en Pologne,

– rétracter l’arrêt entrepris en toutes ses dispositions,

– faire application de la loi polonaise,

subsidiairement,

– dire qu’il n’a commis aucun acte de recel successoral,

en tout état de cause,

– débouter M. [V] [D] [Y]-[C] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

– dire que M. [V] [D] [Y]-[C] a commis un recel successoral dans le cadre de la succession de sa mère, [A] [PJ],

– déclarer [V] [D] [Y]-[C] déchu de tout droit dans la succession de sa mère, [A] [PJ],

– condamner M. [V] [D] [Y]-[C] à lui restituer la somme indûment perçue, soit 104 005,80 euros,

– condamner M. [V] [D] [Y]-[C] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [V] [D] [Y]-[C] aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 31 janvier 2023, M. [V] [D] [Y]-[C] demande à la cour de :

– prononcer la jonction des instances RG 20/10877, 20/11341 et 20/12871,

– débouter M. [O] [E] de toutes ses demandes fins et conclusions et le condamner au paiement d’une somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour man’uvres dilatoires,

– déclarer Mme [HW] [E] irrecevable à formuler des prétentions nouvelles en appel,

– l’en débouter comme de toutes ses demandes fins et conclusions,

– déclarer Mme [HW] [E] irrecevable à saisir la cour de moyens qui tendent à remettre en cause l’autorité de chose jugée par la cour dans son arrêt irrévocable et définitif vis-à-vis de M. [O] [E] en ce qui concerne les points litigieux indivisibles constitués de l’absence de recel successoral du concluant comme de l’absence de dette de sa part à l’égard de la succession au titre d’une transaction partielle polonaise,

– déclarer Mme [HW] [E] non fondée en son opposition l’en débouter comme de toutes ses demandes fins et conclusions,

« ajoutant au jugement (sic), infirmant,

– priver Mme [HW] [E] totalement pour recel successoral tendant à s’accaparer la totalité de la succession, par faux testament établi depuis le jugement, de toute part dans les biens ou les droits dépendant de la succession de sa mère [A] [PJ], »

– condamner in solidum M. [O] [E] et Mme [HW] [E] au paiement d’une indemnité de 6 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des moyens développés par les parties constituées au soutien de leurs prétentions, il sera renvoyé à leurs écritures susvisées conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

Mme [R] [D] [Y]-[C], défenderesse à l’opposition, n’a pas constitué avocat.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 31 janvier 2023.

Le 7 février 2023, M. [V] [D] [Y]-[C] a notifié par voie électronique des conclusions aux fins de rabat de clôture pour pouvoir communiquer ses pièces n°35 à 39, 57, et 63 à 65, que Mme [HW] [E] n’a indiqué ne pas avoir reçues que par ses conclusions du 27 janvier 2023, et admettre leur production aux débats.

Le 13 février 2023, Mme [HW] [E] a notifié par voie électronique des conclusions d’incident de procédure et un bordereau de communication de pièces faisant apparaître trois nouvelles pièces, n°25 à 27, notées comme communiquées le même jour.

Elle s’oppose à la révocation de l’ordonnance de clôture sollicitée et demande que les pièces n°35, 36, 37, 38, 39, 57, 63, 64 et 65 de la partie adverse soient écartées des débats comme ne lui ayant pas été communiquées.

A titre subsidiaire, elle entend présenter des observations concernant le contenu de ces pièces, demande que soit rejetée toute demande fondées sur celle-ci et en communique à son tour trois autres.

L’affaire a été appelée à l’audience du 15 février 2023.

Par bulletin du 28 mars 2023, la cour, constatant qu’indépendamment des pièces n°35, 36, 37, 38, 39, 57, 63, 64 et 65 de M. [V] [D] [Y]-[C] dont la communication à Mme [HW] [E] est discutée, les pièces n°58 à 62 étaient manquantes dans le dossier qui lui avait été remis en vue de son délibéré, a invité le conseil de M. [V] [D] [Y]-[C] à les lui adresser.

Lui sont parvenues, par voie électronique le 30 mars 2023 et en format papier le 13 avril 2023, les pièces n°34, 57, 58, 59, 60, 61, 61-1, 62, 63, 64, 65.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les jonctions

Dans ses dernières conclusions, M. [V] [D] [Y]-[C] continue de solliciter la jonction des instances n°RG 20/10877, 20/11341 et 20/12871.

Or les procédures n°RG 20/10877 et n°RG 20/11341 ont déjà été jointes par ordonnance du 1er décembre 2020, et il a été dit qu’elles se poursuivraient sous le seul n°RG 20/10877 ; la procédure enregistrée sous le n° RG 20/12871 a quant à elle pris fin le 1er décembre 2020 avec le prononcé de l’ordonnance du conseiller de la mise en état ayant déclaré l’opposition irrecevable.

Il résulte de l’article 367 du code de procédure civile que le juge ne peut ordonner la jonction que d’instances pendantes devant lui.

La demande de jonction des procédures n°RG 20/10877 et n°RG 20/11341 est devenue sans objet.

Celle concernant la procédure n° RG 20/12871 sera rejetée puisque cette procédure n’est plus pendante.

Sur la révocation de l’ordonnance de clôture

Selon l’article 803 du code de procédure civile, l’ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s’il se révèle une cause grave depuis qu’elle a été rendue.

En l’espèce, le demandeur à la révocation ne se prévaut expressément d’aucune cause grave.

Certes, il y a lieu de constater que le dossier de M. [V] [D] [Y]-[C] remis à la cour ne comportait pas les pièces n°34 à 39 intitulées « 2012/2014 : méls de [V] [D] [Y] a [HW] [E] et son père pour demander ou en est la succession sans réponse » (sic) et la pièce n°57 intitulée « 57- Expertise graphologique judiciaire ICART » alors que les pièces n°1 à 60 étaient mentionnées dès le premier bordereau de communication de pièces joint aux premières conclusions déposées pour son compte et notifié par voie électronique le 1er juillet 2021. Ce constat accrédite l’allégation de Mme [HW] [E] selon laquelle ces pièces ne lui ont pas été communiquées, d’autant que la lettre d’accompagnement des pièces adressées à la cour le 30 mars 2023 sur sa demande en cours de délibéré précise que « les pièces manquantes » ont été transmises la veille aux parties adverses par voie électronique.

Il sera toutefois relevé que Mme [HW] [E] n’a pas saisi le conseiller de la mise en état d’une demande d’injonction de communiquer ces pièces dont elle affirme seulement dans ses conclusions du 27 janvier 2023 qu’elle ne les a pas reçues alors que, dès ses conclusions remises au greffe et notifiées le 10 janvier 2023, elle mentionnait des pièces adverses n°58 ou 60 par exemple.

Les pièces n°63 à 65 apparaissent quant à elles pour la première fois sur le bordereau de pièces annexé aux conclusions de M. [V] [D] [Y]-[C] remises au greffe et notifiées par voie électronique le 17 mars 2022. La cour constate que le caractère nouveau de ces pièces n’est pas formellement mis en exergue et que les conclusions suivantes, notifiées par voie électronique le 22 mars 2022, ne portent plus trace de ces pièces alors que les pièces n°59, 61 et 62 sont mentionnées en gras comme étant une modification des précédentes écritures. Les pièces n°63 à 65 réapparaissent sur le bordereau de pièces annexé aux conclusions de M. [V] [D] [Y]-[C] remises au greffe et notifiées par voie électronique le 27 janvier 2023, encore une fois sans mise en forme de nature à mettre en évidence une production nouvelle.

Compte tenu de ces incohérences et de leur absence du dossier de la cour jusqu’à la demande adressée à M. [V] [D] [Y]-[C] en cours de délibéré, leur communication à Mme [HW] [E] n’est pas certaine.

Toutefois, la pièce n°63 est une copie de l’ordonnance du conseiller de la mise en état du 1er décembre 2020 ayant déclaré irrecevable l’opposition de M. [O] [E] enregistrée sous le n° RG 20/12871.

Les pièces n°64 et 65 sont relatives à un certificat d’hérédité délivré à M. [O] [E] par la mairie de [Localité 12]. M. [V] [D] [Y]-[C] ne s’y réfère pas dans le corps de ses écritures.

Il n’y a dès lors pas lieu de révoquer l’ordonnance de clôture pour permettre à la cour de prendre en considération les pièces n°35 à 39 et 57 de M. [V] [D] [Y]-[C], qui seront écartées des débats puisque leur communication dans le respect de la contradiction n’est pas établie. Il en va de même de ses pièces n°63 à 65 qui, au demeurant, ne sont pas utiles.

Les observations présentées par Mme [HW] [E] et les trois pièces nouvelles qu’elle entendait produire à titre subsidiaire ne seront dès lors pas examinées.

Sur la recevabilité des oppositions

Selon l’article 794 du code de procédure civile auquel renvoie l’article 907 du même code pour la procédure d’appel, les ordonnances du juge de la mise en état n’ont pas, au principal, l’autorité de la chose jugée à l’exception de celles statuant sur les exceptions de procédure, sur les fins de non-recevoir, sur les incidents mettant fin à l’instance et sur la question de fond tranchée en application des dispositions du 6° de l’article 789.

L’opposition de M. [O] [E] a été déclarée irrecevable par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 1er décembre 2020.

La demande d’irrecevabilité des oppositions de Mme [HW] [E] formée par M. [V] [D] [Y]-[C] a été rejetée par ordonnance sur incident du 16 décembre 2021.

L’ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 1er décembre 2020 et celle du 16 décembre 2021 ont l’autorité de la chose jugée. La cour statuant au fond n’est pas la juridiction de recours de ces décisions de sorte qu’il n’y a plus lieu de statuer sur la recevabilité de ces oppositions, les demandes sur ce point étant à ce stade irrecevables en application de l’article 122 du code de procédure civile.

Sur le sursis à statuer

M. [O] [E] demande que soit ordonné le sursis à statuer dans l’attente de l’issue des procédures pénales en cours en France et en Pologne.

Il expose qu’en France, M. [V] [D] [Y]-[C] et Mme [R] [D] [Y]-[C] ont déposé une plainte pénale à son encontre et à l’encontre de sa s’ur Mme [HW] [E] en novembre 2017 pour escroquerie, faux et usage de faux, qu’il a de son côté déposé contre eux le 27 mars 2019 plusieurs plaintes pénales successives pour faux, usage de faux, recel successoral et escroquerie au jugement, et s’est constitué partie civile le 27 mars 2019 devant le juge d’instruction du tribunal de grande instance, devenu tribunal judiciaire, de Cusset, que sa constitution de partie civile a été déclarée irrecevable par ordonnance du 12 novembre 2019. Il ajoute qu’il a déposé une plainte similaire en Pologne, et que la procédure y demeure en cours.

Cette demande a déjà été soumise au conseiller de la mise en état qui l’a rejetée par son ordonnance d’incident du 10 mai 2022.

La demande de sursis à statuer constituant une exception de procédure, l’ordonnance d’incident du conseiller de la mise en état en date du 10 mai 2022 a l’autorité de la chose jugée en application de l’article 794 du code de procédure civile précité.

La cour statuant au fond n’est pas la juridiction de recours de cette ordonnance. La nouvelle demande de sursis à statuer de M. [O] [E] est irrecevable en application de l’article 122 du code de procédure civile.

Sur la compétence internationale

Compte tenu de la date de décès de la défunte, le règlement européen n°650/2012 du 4 juillet 2012 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l’exécution des décisions, et l’acceptation et l’exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d’un certificat successoral européen n’est pas applicable.

Lorsque le décès du défunt est survenu avant le 17 août 2015, les principes applicables résultent de la jurisprudence.

Selon ces principes, les tribunaux français sont compétents pour statuer sur une succession mobilière lorsque le défunt avait son domicile en France ; ils sont compétents pour statuer sur une succession immobilière pour les immeubles situés en France.

Mme [HW] [E] ne conteste pas que sa mère avait son domicile en France avant son décès mais elle fait valoir, comme M. [O] [E], que la compétence exclusive de la juridiction polonaise a été reconnue par un jugement rendu le 8 avril 2016 par le tribunal d’instance de Varsovie, en présence de M. [V] [D] [Y]-[C], et devenu définitif.

Une traduction de cette décision par laquelle le juge polonais a décidé de « rejeter l’objection formelle concernant le manque de juridiction nationale » est versée aux débats. Il en ressort que le litige soumis au fond aux juridictions polonaises concernait la succession de quatre personnes dont aucune n’est [A] [PJ]. La décision polonaise du 8 avril 2016 ne saurait dès lors lier les juridictions françaises quant à leur compétence dans un litige relatif à la succession de cette dernière.

Il convient de relever qu’au contraire, la décision de la cour de district de Varsovie en date du 28 avril 2021 produite par M. [V] [D] [Y]-[C] et Mme [HW] [E] a rejeté le recours formé par M. [O] [E] contre la décision du tribunal de district de Varsovie en date du 11 décembre 2017 ayant notamment retenu une « absence de compétence nationale » pour statuer sur les demandes de « déclaration d’acquisition d’héritage » relatives aux successions d'[A] [PJ] et de [T] [Z] [PJ], son père, aucun d’eux n’ayant la nationalité polonaise ou n’étant résident polonais. Les critiques élevées par Mme [HW] [E] quant à la motivation de cette décision polonaise sont inopérantes devant la présente cour, française, qui n’est pas la juridiction de recours de la cour de district de Varsovie.

En toute hypothèse, il y a lieu de constater qu’en l’état des décisions polonaises versées aux débats, les juridictions polonaises n’ont pas retenu leur compétence exclusive pour statuer sur la succession d'[A] [PJ], à supposer qu’une telle exclusivité soit envisageable.

Il est constant qu'[A] [PJ] était de nationalité française et résidait habituellement en France où elle est décédée de sorte qu’il convient de déclarer les juridictions françaises compétentes pour statuer sur les prétentions des parties puisqu’elles sont compétentes pour connaître des demandes relatives à sa succession pour les biens immobiliers situés sur le territoire français et tous les biens mobiliers qui la composent, y compris, le cas échéant, sa part de droit à indemnisation pour des confiscations opérées en Pologne.

Mme [HW] [E] se prévaut par ailleurs de l’article 100 du code de procédure civile français aux termes duquel si le même litige est pendant devant deux juridictions de même degré également compétentes pour en connaître, la juridiction saisie en second lieu doit se dessaisir au profit de l’autre si l’une des parties le demande, ou, à défaut, peut le faire d’office.

Il est admis que ces dispositions peuvent être étendues à l’ordre international.

Mme [HW] [E] soutient qu’ « il est patent » que la succession d'[A] [PJ] fait l’objet d’une procédure encore pendante devant les juridictions polonaises, en l’espèce devant le tribunal d’instance de Varsovie depuis sa demande du 31 juillet 2014.

Il convient toutefois de rappeler que la décision de la cour de district de Varsovie en date du 28 avril 2021 a confirmé l’incompétence des juridictions polonaises pour statuer sur la succession d'[A] [PJ].

Mme [HW] [E] ne justifie pas d’un recours contre cette décision ayant abouti à une solution contraire.

Il n’est donc pas établi que le litige opposant les parties soit actuellement pendant devant une autre juridiction, polonaise, également compétente pour en connaître.

L’exception de litispendance soulevée par Mme [HW] [E] sera rejetée.

Sur la loi applicable

Comme pour la question de la compétence internationale, compte tenu de la date de décès de la défunte, le règlement européen n°650/2012 du 4 juillet 2012 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l’exécution des décisions, et l’acceptation et l’exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d’un certificat successoral européen n’est pas applicable et il y a lieu, en application des principes de droit international privé dégagés par la jurisprudence, de distinguer, parmi les biens successoraux, entre les meubles soumis à la loi du dernier domicile du défunt et les immeubles régis par la loi de leur lieu de situation.

En se fondant sur la consultation de M. [F] [X], Mme [HW] [E] et M. [O] [E] soutiennent que la loi polonaise est applicable.

Or, la lecture attentive de lettre adressée à M. [O] [E] le 31 octobre 2018 par Me [X] montre que ce dernier retient bien que « c’est la loi polonaise qui a vocation à régir la dévolution de [sa] mère pour les biens immobiliers situés en Pologne » et seulement ceux-là, conformément aux principes précédemment rappelés, et n’étend nullement l’application de la loi polonaise à d’autres éléments de la succession.

Dans la mesure où la compétence de la présente juridiction, française, n’est retenue que pour les biens immobiliers situés sur le territoire français et les biens mobiliers, où qu’ils se trouvent, dépendant de succession d'[A] [PJ], il n’y a pas lieu de faire application de la loi polonaise, sans pour autant adopter la position soutenue par M. [V] [D] [Y]-[C], qui prétend que la loi française est d’ordre public, et qu’elle soumet le règlement de la succession d’une personne de nationalité française, demeurant en France et décédée en France, aux seules dispositions du code civil français nonobstant l’existence au sein de l’actif successoral d’immeubles situés à l’étranger.

Déboutant Mme [HW] [E] et M. [O] [E] de leur demande tendant à faire application de la loi polonaise, il y a lieu de dire la loi française applicable au litige soumis à la cour, qui porte essentiellement sur des recels successoraux et sur le sort de la somme de 446 271,27 zlotys, soit environ 104 005,80 euros, relevant de la succession d'[A] [PJ].

Sur la recevabilité des demandes de Mme [HW] [E]

Mme [HW] [E] affirme que M. [V] [D] [Y]-[C], dans ses dernières conclusions au fond, continue de soutenir que son opposition serait irrecevable et qu’elle n’aurait pas la qualité de « défaillante » au sens de l’article 571 du code de procédure civile, pour développer ses moyens en réplique.

Or M. [V] [D] [Y]-[C] ne poursuit plus l’irrecevabilité de l’opposition de Mme [HW] [E], de sorte que les développements de celle-ci sur sa qualité de partie défaillante ou sur la motivation de son opposition sont inutiles, mais celle des demandes de cette dernière s’agissant du recel successoral qu’elle lui impute et de la créance alléguée de l’indivision portant sur la somme de 446 271,27 zlotys, soit environ 104 005,80 euros, qu’il a encaissée dans le cadre d’une transaction portant sur les droits d'[A] [PJ] au titre des indemnités de restitution polonaises.

Il fait valoir d’une part qu’elles sont nouvellement présentées devant la cour de sorte qu’elles encourraient l’irrecevabilité prévue par l’article 564 du code de procédure civile, et d’autre part qu’elles porteraient atteinte à l’autorité de la chose jugée de l’arrêt dont il est fait opposition en ses dispositions devenues définitives à l’égard de M. [O] [E], en raison de l’indivisibilité des droits litigieux.

D’une part, selon l’article 565 du code de procédure civile, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.

Les demandes de Mme [HW] [E] tendant à voir reconnaître un recel successoral de M. [V] [D] [Y]-[C] et à voir fixer une créance de l’indivision au titre de la somme qu’il a encaissée seul dans le cadre de la transaction polonaise, qui a pour objet le règlement de la succession d'[A] [PJ], tend aux mêmes fins que les prétentions initiales de M. [V] [D] [Y]-[C] devant le juge de première instance, dont celle au titre du recel successoral qu’il impute lui-même à M. [O] [E] et Mme [HW] [E].

D’autre part, les demandes nouvelles de Mme [HW] [E] constituent des demandes reconventionnelles également recevables en appel en vertu de l’article 567 du code de procédure civile.

Enfin, il est de jurisprudence constante qu’en matière de partage, les parties étant respectivement demanderesses et défenderesses quant à l’établissement de l’actif et du passif, toute demande doit être considérée comme une défense à une prétention adverse.

Les demandes nouvelles de Mme [HW] [E] n’encourent dès lors pas l’irrecevabilité prévue à l’article 564 du code de procédure civile.

Par ailleurs, aux termes de l’article 1355 du code civil, l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement ; il faut que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause, que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.

Les demandes tendant à voir reconnaître un recel successoral de M. [V] [D] [Y]-[C] et à voir fixer une créance de l’indivision au titre de la somme qu’il a encaissée seul dans le cadre de la transaction polonaise n’ont pas fait l’objet d’un examen au fond par la cour ayant prononcé l’arrêt du 10 juin 2020, qui a seulement déclaré M. [O] [E] irrecevable à les présenter et ne l’a pas débouté contrairement à ce que prétend M. [V] [D] [Y]-[C].

Les prétentions similaires formées par Mme [HW] [E] sur sa propre opposition ne portent dès lors pas atteinte à l’autorité de la chose jugée de l’arrêt du 10 juin 2020 attachée à cette irrecevabilité relative à M. [O] [E] et à lui seul.

Aucune indivisibilité ne saurait être retenue sur cet aspect purement procédural.

Il convient donc de rejeter les fins de non-recevoir opposées par M. [V] [D] [Y]-[C] aux demandes de Mme [HW] [E].

Sur les recels

Le recel successoral résulte de tout procédé tendant à frustrer les cohéritiers d’un bien d’une succession, caractérisant l’élément matériel, notamment la dissimulation ou la minoration d’un bien dépendant de la succession, d’une donation ou d’une dette à l’égard de la succession, la fausse allégation d’une créance ou encore la non révélation d’un héritier, lorsque s’y ajoute l’intention de rompre l’égalité du partage.

Aux termes de l’article 778 du code civil :

« Sans préjudice de dommages et intérêts, l’héritier qui a recelé des biens ou des droits d’une succession ou dissimulé l’existence d’un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l’actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés. Les droits revenant à l’héritier dissimulé et qui ont ou auraient pu augmenter ceux de l’auteur de la dissimulation sont réputés avoir été recelés par ce dernier.

Lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l’héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part.

L’héritier receleur est tenu de rendre tous les fruits et revenus produits par les biens recelés dont il a eu la jouissance depuis l’ouverture de la succession. »

Sur le recel imputé à M. [O] [E] et à Mme [HW] [E]

M. [V] [D] [Y]-[C] accuse Mme [HW] [E] et M. [O] [E] d’avoir volontairement dissimulé l’existence de leurs frères et s’urs utérins aux juridictions polonaises chargées de la restitution de biens dépendant de la succession de leur mère.

Le juge de première instance avait écarté l’élément intentionnel du recel imputé à Mme [HW] [E] et M. [O] [E] en retenant qu’il ne peut être présumé du seul fait que les enfants de [G] [Y]-[C] sont frères utérins des enfants [E] que ces derniers connaissaient l’existence des premiers dans la mesure où les enfants de [G] [Y]-[C] ont été adoptés quelques années après leur naissance par [I] [C] et qu’ils vivaient au domicile de celle-ci, laquelle leur donnait des soins depuis leur naissance, alors que les enfants [E] sont issus d’une seconde union de la défunte et que onze années séparent le benjamin des enfants du premier lit de l’aîné des enfants du second lit.

L’arrêt du 10 juin 2020 a dit que M. [O] [E] et Mme [HW] [E] ont commis un recel successoral dans le cadre de la succession de leur mère par dissimulation de l’existence des enfants ([D] [Y]) issus du premier mariage de celle-ci en constatant, au vu de procès-verbaux polonais, dans leur version traduite par une traductrice assermentée de la cour d’appel de Colmar, qu’ils avaient déclaré ne pas connaître d’autres enfants de leur mère dans la procédure polonaise de recherche des héritiers d'[A] [PJ], et que cette omission des autres héritiers de cette dernière ne pouvait qu’être délibérée puisque différentes pièces (le faire-part de décès d'[A] [PJ], des attestations, messages publiés sur Facebook et photographies) démontraient l’existence de relations régulières entretenues, au moins depuis la fin des années 1970, entre les deux fratries, et que M. [V] [D] [Y]-[C] leur avait écrit moins de deux mois avant leur audition par les juridictions polonaises au sujet de la succession de leur mère.

M. [V] [D] [Y]-[C] fait valoir que le constat et la sanction du recel à l’égard de M. [O] [E] sont définitifs à la suite de l’arrêt du 10 juin 2020 et qu’il est impossible de juger différemment à l’égard de Mme [HW] [E] ce qui est ainsi irrévocable et indivisible.

M. [O] [E] soutient lui aussi que le litige est indivisible mais il en conclut au contraire qu’en dépit de l’arrêt de la cour du 10 juin 2020, il peut encore défendre et bénéficier le cas échéant d’une nouvelle décision retenant l’absence de recel successoral et de dette de sa part à l’égard de la succession.

Il y a lieu de rappeler qu’en vertu de l’article 572 du code de procédure civile, l’opposition ne remet en question, devant le même juge, que les points jugés par défaut pour qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit.

Les chefs de dispositif de l’arrêt du 10 juin 2020 ayant dit que M. [O] [E] a commis un recel successoral dans le cadre de la succession de sa mère par dissimulation des enfants issus du premier mariage de celle-ci et ayant en conséquence appliqué la sanction du recel prévue à l’article 778 du code civil sont définitifs à l’égard de M. [O] [E].

Comme la cour l’a énoncé à juste titre dans son arrêt du 10 juin 2020, le recel implique des agissements personnels imputables à l’héritier mis en cause.

Les agissements imputés par M. [V] [D] [Y]-[C] à Mme [HW] [E] pour fonder sa demande au titre du recel la concernant sont distincts de ceux que la cour a pris en considération le 10 juin 2020 à l’encontre de M. [O] [E]. L’indivisibilité alléguée tant par M. [V] [D] [Y]-[C] que M. [O] [E] n’existe pas sur ce point. Il appartient à la cour de céans d’apprécier si le recel attribué à Mme [HW] [E] est constitué, indépendamment de celui retenu pour M. [O] [E].

M. [V] [D] [Y]-[C] affirme que Mme [HW] [E] n’émet aucune critique effective à l’encontre de la motivation de l’arrêt du 10 juin 2020 qui, la concernant, s’est fondé sur deux procès-verbaux d’audition devant le tribunal de Varsovie, respectivement datés des 28 janvier 2015 et 13 octobre 2015, dont il résulte qu’elle a déclaré qu’à part elle, sa mère a eu un autre enfant, son frère [O], et qu’elle n’a pas eu d’autres enfants à sa connaissance, omettant ainsi ses frères et s’urs nés de l’union d'[A] [PJ] avec [J] [D] [Y].

Mme [HW] [E] conteste la sincérité de ces procès-verbaux.

Alors qu’elle indique qu’ils ne lui ont pas été communiqués en première instance, puisqu’elle n’était pas représentée devant le tribunal, et pas davantage à hauteur de cour, les moyens qu’elle développe démontrent qu’elle a pu en prendre parfaitement connaissance.

Elle souligne en effet qu’elle ne les a pas signés, qu’ils ont été rédigés en langue polonaise, qu’elle ne connaît pas, et que le résumé de son audition qu’ils contiennent a été dicté au greffe par le juge polonais à partir de la traduction de ses propos assurés par une interprète de sorte qu’ils manquent de fiabilité. Elle conteste avoir déclaré être la seule enfant d'[A] [PJ] et admet seulement avoir indiqué qu’elle était « une héritière ». Elle explique qu’en raison de l’adoption des enfants nés de l’union d'[A] [PJ] avec [J] [D] [Y] par [I] [C], et au regard de la loi polonaise qui permet au testateur de disposer de tout son patrimoine, le cas échéant en l’attribuant à un tiers, et du testament de sa mère la désignant comme seule héritière, c’est en toute bonne foi qu’elle a cru qu’ils ne pouvaient hériter d'[A] [PJ]. Elle ajoute que les relations entre les deux fratries n’ont été que ponctuelles.

Il résulte des attestations des professionnels polonais, avocat et interprète que Mme [HW] [E] verse aux débats que les modalités de rédaction des procès-verbaux discutés et l’absence de signature par le témoin entendu sont conformes à la pratique polonaise. Les éventuelles voies de contestation locales du contenu de ces procès-verbaux ne sont pas précisées et Mme [HW] [E] ne prétend pas avoir essayé de les faire corriger.

Quoi qu’il en soit, ses allégations pour tenter de faire croire à une mauvaise transcription de ses déclarations devant le tribunal de Varsovie manquent de cohérence : si elle était convaincue que, la loi polonaise s’appliquant à la succession de sa mère, elle était, en vertu du testament dont elle se prévaut, la seule héritière de celle-ci, elle n’avait aucune raison de citer son frère [O], et lui seul, puisque, selon elle, il n’était pas plus appelé à hériter de leur mère que ses autres frères et s’urs utérins, indépendamment de leur adoption par [I] [C].

Elle échoue donc à rapporter la preuve contraire aux procès-verbaux qui établissent qu’elle a omis de faire état de l’ensemble de la fratrie devant le juge polonais.

Puisqu’elle admet avoir assisté au mariage de M. [V] [D] [Y]-[C] en 1982 et au mariage de Mme [R] [D] [Y]-[C] en 1978, et avoir hébergé M. [V] [D] [Y]-[C] en 2006, elle ne saurait soutenir utilement qu’elle ne connaissait pas cette partie de la fratrie de sorte que le caractère volontaire de son omission est établi.

Mme [HW] [E] ne conteste pas que, comme l’a relevé la cour dans l’arrêt du 10 juin 2020, M. [V] [D] [Y]-[C] lui avait peu de temps auparavant adressé deux courriels en date du 28 août 2015 où il lui faisait part de ses interrogations quant aux suites de la succession polonaise de leur mère (pièce 34 appelant), et lui rappelait que la volonté de la défunte était que ses sept enfants partagent cette succession.

Dans ce contexte, l’élément intentionnel du recel par dissimulation d’héritiers est caractérisé.

Dès lors, il n’y a pas lieu de rétracter les chefs de dispositif de l’arrêt dont il est fait opposition ayant dit que Mme [HW] [E], comme M. [O] [E], a commis un recel successoral, et dit que Mme [HW] [E] sera en conséquence, comme M. [O] [E], privé de ses droits dans l’héritage de leur mère à hauteur de la part susceptible de majorer ses droits personnels dans la succession devant revenir à M. [V] [D] [Y]-[C] et Mme [R] [D] [Y]-[C].

M. [V] [D] [Y]-[C] sollicite « une sanction supplémentaire » contre Mme [HW] [E] en demandant qu’elle soit privée « totalement pour recel successoral tendant à s’accaparer la totalité de la succession, par faux testament établi depuis le jugement, de toute part dans les biens ou les droits dépendant de la succession de sa mère ».

Il affirme que sa pièce n°57, correspondant au rapport de l’expertise graphologique ordonnée par le juge de première instance, démontre que le testament dont Mme [HW] [E] se prévaut est un faux et qu’elle a cherché par ce moyen à appréhender l’intégralité de la succession. Cette pièce étant écartée des débats, elle ne saurait utilement fonder sa demande qui, au surplus, ne distingue pas les droits que Mme [HW] [E] tient de sa réserve héréditaire de ceux auxquels elle prétend sur la quotité disponible en vertu du testament litigieux.

M. [V] [D] [Y]-[C] sera donc débouté de sa demande complémentaire.

Sur le recel imputé à M. [V] [D] [Y]-[C]

L’arrêt du 10 juin 2020 a déclaré M. [O] [E] irrecevable en ses prétentions reconventionnelles tendant à voir imputer un recel successoral à M. [V] [D] [Y]-[C] et en sa demande de restitution d’une somme de 104 839,65 euros accessoire à ce recel.

Comme pour les autres chefs de dispositif de cet arrêt du 10 juin 2020 concernant M. [O] [E], cette irrecevabilité est définitive à l’égard de ce dernier. Le moyen qu’il développe sur l’opposition de sa s’ur, portant sur l’erreur du motif de l’arrêt du 10 juin 2020 retenant à tort que l’accord polonais a été conclu le 15 avril 2019, postérieurement au jugement de première instance, alors que cette date correspond à celle de la traduction de l’accord intervenu le 1er février 2018, est par conséquent inopérant.

En revanche, l’opposition de Mme [HW] [E] permet à celle-ci de former sa propre demande de constat d’un recel imputable à M. [V] [D] [Y]-[C] et de sanction de ce recel.

Elle reproche à M. [V] [D] [Y]-[C] d’avoir effectué des démarches en Pologne au moyen d’actes de notoriété obtenus frauduleusement pour bénéficier seul de sommes provenant de la succession de leur mère, aux termes d’un accord signé le 1er février 2018 avec d’autres héritiers de la branche maternelle.

M. [V] [D] [Y]-[C] n’a développé aucun moyen de fond aux termes de ses dernières conclusions pour s’opposer à la demande de recel formée à ce titre à son encontre, se contentant de soulever l’irrecevabilité pour violation de l’autorité de la chose jugée de l’arrêt du 10 juin 2020 qui a été précédemment écartée.

Il résulte de la traduction de l’accord conclu à Varsovie le 1er février 2018 entre M. [V] [D] [Y]-[C] et trois héritiers d’une autre branche de la famille paternelle d'[A] [PJ] aux termes duquel ces derniers s’engagent à payer à M. [V] [D] [Y]-[C] la somme de 446 271,26 zlotys correspondant à sa part dans la succession de son grand-père maternel, [T] [PJ], s’agissant de la part de ce dernier dans la succession de [OI] [WZ] et de [P] [WZ], la part de M. [V] [D] [Y]-[C] étant définie à un quart de la succession d'[A] [PJ] sur la base de l’acte de notoriété d'[A] [PJ] dressé le 3 mai 2016 par Me [N] [B], notaire à [Localité 10] rectifié par acte du 15 juin 2016. Compte tenu des renonciations à succession antérieures de Mme [H] [D] [Y] et MM. [YA] et [L] [D] [Y], rappelées au point 11 du préambule de l’accord, demeuraient quatre héritiers acceptants, réservataires. Au paragraphe intitulé « Déclarations et assurances de l’héritier révélé », M. [V] [D] [Y]-[C] assure les autres parties à l’accord que tous les documents qu’il leur a présentés « sont complets, authentiques, obtenus de bonne foi conformément à la loi du pays de leur établissement, ce qui concerne notamment l’acte de notoriété de [T] [PJ] et d'[A] [PJ] ».

Aucune des parties ne produit l’acte de notoriété du 3 mai 2016.

M. [V] [D] [Y]-[C] produit le certificat d’hérédité établi le 15 juin 2016 par Me [B] à sa demande, attestant que les sept enfant d'[A] [PJ] « sont habiles à se dire et porter héritiers ou ayants droit, sauf l’incidence d’éventuels legs, récompenses ou donations antérieures rapportables », ensemble pour la totalité des biens dépendant de la succession et chacun pour un septième.

Il n’est pas établi que ce certificat comporte des mentions inexactes de nature à majorer les droits de M. [V] [D] [Y]-[C] au détriment des autres cohéritiers.

Mme [HW] [E] met d’ailleurs en exergue non ce certificat d’hérédité mais l’acte de notoriété établi par Me [NH] [S], notaire à [Localité 11], à la requête de MM. [V], [YA] et [L] [D] [Y]-[C], le 28 décembre 2017, comportant une mention par laquelle ces derniers déclarent que la personne décédée n’a laissé aucune disposition à cause de mort non relatée dans l’acte et qu’aucun testament n’a été présenté à un notaire français alors qu’elle démontre qu’avant cette date, le 12 janvier 2016, le conseil de M. [V] [D] [Y]-[C] et de Mme [R] [D] [Y]-[C] lui avait adressé une lettre faisant déjà état du testament dont elle se prévalait.

Cependant, elle ne justifie pas que M. [V] [D] [Y]-[C] se soit prévalu de cet acte de notoriété du 28 décembre 2017 qui, en tout cas, n’est pas cité par l’accord du 1er février 2018.

Or, il découle de ses conclusions (page 16) que le recel qu’elle impute à M. [V] [D] [Y]-[C] est caractérisé selon elle par l’établissement d’actes de notoriété erronés à son seul profit lui ayant permis de recevoir une avance sur la succession d'[A] [PJ] en exécution de l’accord du 1er février 2018.

Par conséquent, la preuve du recel qu’elle allègue n’est pas rapportée et il convient de la débouter de sa demande fondée sur l’article 778 du code civil.

Sur la demande de dommages et intérêts formée par M. [V] [D] [Y]-[C]

M. [V] [D] [Y]-[C] sollicite l’allocation de dommages et intérêts d’un montant de 20 000 euros pour la « résistance madrée et abusive » de M. [O] [E].

Il soutient que cette posture de M. [O] [E] lui cause un préjudice en raison du retard pris dans le règlement du dossier en Pologne, qui reste bloqué tant qu’il ne pourra pas être justifié du caractère définitif de l’arrêt du 10 juin 2020.

Dans la mesure où cette situation, à supposer qu’elle engendre un préjudice personnel à M. [V] [D] [Y]-[C], découle, non d’un choix procédural de M. [O] [E] mais de l’exercice par Mme [HW] [E] de son droit d’opposition, la demande de dommages et intérêts présentée contre M. [O] [E] sera rejetée.

Sur les frais et dépens

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

Il convient, eu égard à la nature du litige et alors que chaque partie représentée voit rejeter tout ou partie de ses prétentions, de dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage et supportés par toutes les parties à proportion de leurs droits dans le partage.

A défaut de condamnation d’une partie aux dépens, il ne saurait être fait application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Dit que la demande de jonction des procédures n°RG 20/10877 et n°RG 20/11341 est devenue sans objet ;

Rejette la demande de jonction de la procédure n° RG 20/12871 à la procédure n°RG 20/10877 ;

Rejette la demande de révocation de l’ordonnance de clôture ;

Écarte des débats les pièces n°35 à 39, n°57, et n°63 à 65 de M. [V] [D] [Y]-[C] ;

Déclare irrecevables les demandes portant sur la recevabilité des oppositions de Mme [HW] [E] et M. [O] [E] ;

Rejette la demande de sursis à statuer formée par M. [O] [E] ;

Rejette l’exception de litispendance soulevée par Mme [HW] [E] ;

Rejette la demande de Mme [HW] [E] et M. [O] [E] tendant au dessaisissement des juridictions françaises au profit des juridictions polonaises ;

Rejette la demande de Mme [HW] [E] et M. [O] [E] tendant à l’application de la loi polonaise et dit que la loi française est applicable au litige soumis à la cour ;

Rejette les fins de non-recevoir opposées par M. [V] [D] [Y]-[C] aux demandes de Mme [HW] [E] ;

Sur l’opposition de Mme [HW] [E] à l’encontre de l’arrêt rendu par défaut le 10 juin 2020 par la cour d’appel de Paris (pôle 3 – chambre 1, n°RG 18/21285),

Dit n’y avoir lieu de rétracter les chefs de dispositif de cet arrêt ayant dit que Mme [HW] [E] a commis un recel successoral dans le cadre de la succession de sa mère [A] [PJ] par dissimulation de l’existence des enfants ([D] [Y]) issus du premier mariage de celle-ci et dit que Mme [HW] [E] sera en conséquence privée de ses droits dans l’héritage de sa mère à hauteur de la part (susceptible de majorer ses droits personnels dans la succession) devant revenir à M. [V] [D] [Y]-[C] et Mme [R] [D] [Y]-[C], héritiers dissimulés ;

Ajoutant à l’arrêt du 10 juin 2020,

Déclare M. [O] [E] irrecevable en ses demandes tendant à voir :

– dire qu’il n’a commis aucun acte de recel successoral,

– dire que M. [V] [D] [Y]-[C] a commis un recel successoral dans le cadre de la succession de sa mère, [A] [PJ],

– déclarer [V] [D] [Y]-[C] déchu de tout droit dans la succession de sa mère, [A] [PJ],

– condamner M. [V] [D] [Y]-[C] à lui restituer la somme indûment perçue, soit 104 005,80 euros ;

Déboute M. [V] [D] [Y]-[C] de sa demande tendant à voir priver Mme [HW] [E] de toute part dans les biens ou les droits dépendant de la succession d'[A] [PJ] pour recel successoral par faux testament ;

Déboute Mme [HW] [E] de ses demandes au titre d’un recel de M. [V] [D] [Y]-[C] ;

Déboute M. [V] [D] [Y]-[C] de sa demande de dommages et intérêts formée à l’encontre de M. [O] [E] ;

Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage et supportés par les parties à proportion de leurs droits dans le partage ;

Rejette les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x