Droits des héritiers : 16 mars 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/07706

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Droits des héritiers : 16 mars 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/07706

16 mars 2023
Cour d’appel de Versailles
RG n°
21/07706

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53J

16e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 16 MARS 2023

N° RG 21/07706 – N° Portalis DBV3-V-B7F-U5KT

AFFAIRE :

[D] [Y]

[T] [Y]

C/

S.A COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS – CE GC

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Novembre 2021 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de VERSAILLES

N° RG : 19/03201

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 16.03.2023

à :

Me Michelle DERVIEUX de la SELARL MBD AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Jack BEAUJARD de la SELAS DLDA AVOCATS, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEIZE MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur [D] [Y]

né le [Date naissance 2] 1997 à [Localité 7] (78)

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 8]

Monsieur [T] [Y]

né le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 7] (78)

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 8]

Représentant : Me Michelle DERVIEUX de la SELARL MBD AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 276 – N° du dossier 19MD2850, substituée par Me Typhanie BOURDOT, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 276

APPELANTS

****************

S.A COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS – CEGC

N° Siret : 382 506 079 (RCS Nanterre)

[Adresse 3]

[Localité 6]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège

Représentant : Me Jack BEAUJARD de la SELAS DLDA AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 543 – N° du dossier 20220306 – Représentant : Me François-Xavier WIBAULT de la SELARL WIBAULT AVOCAT, Plaidant, avocat au barreau d’ARRAS, vestiaire : 53

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 08 Février 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller chargé du rapport et Madame Florence MICHON, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Fabienne PAGES, Président,

Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller,

Madame Florence MICHON, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO,

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon offre préalable acceptée le 24 juin 2009, la société Caisse d’épargne d’Ile de France a consenti à M [T] [Y] et à Mme [J] [V] solidairement, pour financer l’acquisition de leur résidence principale située à [Localité 8] :

un prêt ‘E023 PIA Report Groupe OC’ d’un montant de 230 000 €, au taux fixe de 3,22 %, remboursable en 300 mensualités,

un prêt ‘G009 Relais Groupe DIF Total’ d’un montant de 98 000 €, au taux fixe de 3,22 %, remboursable en 12 mensualités,

garantis par le cautionnement solidaire de la société Compagnie Européenne de Garanties et Cautions (ci-après « la CEGC »).

[J] [V] est décédée le [Date décès 4] 2010, laissant comme unique héritier son fils alors mineur, [D] [Y], pour le compte duquel M [T] [Y] a accepté purement et simplement la succession de sa mère.

L’assurance décès a pris en charge le remboursement partiel du prêt à hauteur de 132 788,80 €, de sorte qu’il restait dû à l’échéance de décembre 2010, une créance de 88 525,86 € sur le prêt principal, seul restant à rembourser.

Par ailleurs, par jugement du 5 novembre 2012, M [Y] qui exerçait en qualité de travailleur indépendant, a été placé en liquidation judiciaire, Maître [S] [G] étant désigné comme liquidateur judiciaire, aux droit duquel a été désignée par ordonnance du 7 avril 2016, la Selarl ML Conseils.

M [T] [Y] a continué à rembourser le prêt ‘E023 PIA Report Groupe OC 017′ jusqu’à l’échéance d’août 2016, puis au constat de la non-régularisation des incidents de paiement, la Caisse d’Epargne d’Ile de France a prononcé la déchéance du terme par lettre recommandée du 27 février 2018, et a actionné la garantie de la CEGC qui lui a réglé la somme de 77 075,71 euros suivant quittance subrogative en date du 18 avril 2018.

Le tribunal judiciaire de Versailles, saisi par assignation du 5 avril 2019, en paiement des sommes lui étant dues sur le fondement de l’article 2305 du code civil, par jugement contradictoire du 18 novembre 2021, a :

Dit que M [T] [Y] et M [D] [Y] sont solidairement tenus, à l’encontre de la CEGC, au paiement de la somme de 77 075,71 €, majorée des intérêts au taux légal à compter du 18 avril 2018,

Constaté que la CEGC est créancière à l’encontre de M [T] [Y] de la somme de 77 075,71 €, majorée des intérêts au taux légal à compter du 18 avril 2018,

Condamné M [D] [Y] à payer à la CEGC la somme de 77 075,71 €, majorée des intérêts au taux légal à compter du 18 avril 2018 ,

Ordonné la capitalisation des intérêts, à compter de l’assignation, sur les seuls intérêts dus depuis au moins une année entière,

Débouté M [T] [Y] et M [D] [Y] de leurs demandes de délais de paiement,

Débouté la CEGC de sa demande de consolidation de l’inscription d’hypothèque judiciaire provisoire prise le 1er avril 2019,

Condamné solidairement M [T] [Y] et M [D] [Y] aux entiers dépens de l’instance et Dit que Maître Marion Cordier membre de la SELARL Sillard Cordier et associés pourra directement recouvrer ceux des dépens dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision,

Condamné solidairement M [T] [Y] et M [D] [Y]à payer à la CEGC la somme de 500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Ordonné l’exécution provisoire,

Débouté les parties du surplus de leurs demandes.

Le 27 décembre 2021, MM [Y] ont interjeté appel du jugement.

Aux termes de leurs dernières conclusions transmises au greffe le 9 septembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, les appelants demandent à la cour au visa des articles 1343-5 du code civil et L649-9 et L.622-21 du code de commerce, de :

les recevoir en leur appel et leurs conclusions et les y déclarer bien fondés,

Infirmer la décision dont appel en [toutes ses dispositions],

Et statuant à nouveau

A titre principal

Juger la CEGC irrecevable en ses demandes formées à l’encontre de M [D] [Y] et de M [T] [Y],

Débouter en l’état la CEGC de toutes ses demandes, fins et conclusions ,

Enjoindre à la CEGC de lever l’hypothèque judiciaire provisoire inscrite le 1er avril 2019 sur les biens immobiliers de MM [T] et [D] [Y] sous astreinte de 100 € par jour de retard passé un délai de six mois à compter de la décision à intervenir,

Débouter la CEGC de son appel incident,

Subsidiairement

Confirmer la décision dont appel en ce qu’elle a jugé que la créance de la CEGC est limitée au paiement de la somme de 77 075,71 €, majorée des intérêts au taux légal à compter du 18 avril 2018,

Limiter la condamnation au profit de la CEGC à cette somme,

En tout état de cause,

Juger n’y avoir lieu à condamnation solidaire de M [D] [Y],

Reporter de 24 mois le règlement de la condamnation en application de l’article 1343-5 du code civil,

Condamner CEGC à payer à MM [Y] ensemble, une somme de 2 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamner la CEGC aux dépens de première instance et d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions transmises au greffe le 15 juin 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la CEGC, intimée, demande à la cour de :

Confirmer le jugement [entrepris] en tous ses chefs de dispositif sauf en ce qu’il a débouté la CEGC de sa demande de consolidation de l’inscription d’hypothèque judiciaire provisoire prise le 1er avril 2019,

Et statuant à nouveau :

Dire et juger que conformément aux dispositions des articles R. 533-1 et R. 533-4 du code des procédures civiles d’exécution, la CEGC pourra, à sa diligence, convertir à titre définitif, l’inscription d’hypothèque judiciaire provisoire et conservatoire régularisée le 1er avril 2019 Volume 2019 V 975,

Débouter M [D] [Y] et M [T] [Y] de l’ensemble de leurs prétentions fins et conclusions, plus amples ou contraires,

Condamner solidairement M [D] [Y] et M [T] [Y] au paiement de la somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, – Condamner solidairement M [D] [Y] et M [T] [Y] aux entiers frais et dépens engagés dans le cadre de la présente instance.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 10 janvier 2023. L’audience de plaidoirie a été fixée au 8 février 2023 et le prononcé de l’arrêt au 16 mars 2023 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire la cour rappelle qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif, pour autant qu’elles sont soutenues par des moyens développés dans la discussion et ne répond aux moyens que pour autant qu’ils donnent lieu à une prétention correspondante figurant au dispositif des conclusions, et que les « dire et juger » et les « constater » qui sont des rappels des moyens invoqués à l’appui des demandes, ne conférant pas -hormis les cas prévus par la loi- de droit à la partie qui les requiert, ne sont pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile.

Il convient de constater que la caution exerce son recours personnel sur le fondement des dispositions de l’article 2305 du code civil en vigueur à la date de l’assignation, qui lui permet de récupérer contre le débiteur, le principal de ce qu’elle a payé portant intérêts au taux légal à compter de son paiement.

L’un des codébiteurs étant décédé, il convient d’abord d’identifier les débiteurs contre qui elle est en droit d’exercer son recours. Par ailleurs, l’autre codébiteur étant l’objet d’une liquidation judiciaire, la question est de savoir si elle peut exercer son gage sur le bien immobilier indivis, alors que préalablement au paiement de la caution, la banque n’avait pas déclaré sa créance à la procédure collective ni pris d’inscription sur le bien avant l’ouverture de la procédure collective.

Sur la solidarité passive et l’obligation à la dette de M [D] [Y]

Les appelants font valoir qu’à réception de l’indemnité d’assurance couvrant la part d’emprunt de feue [J] [V], un nouveau plan de remboursement a été établi pour le remboursement du solde de 88 525,83 €, avec des mensualités réduites à 469,23 € , et transmis à M [T] [Y] seul, emportant novation du prêt, et que la banque, qui n’a prononcé la déchéance du terme qu’à l’égard de M [T] [Y], n’a exécuté aucune formalité à l’égard de M [D] [Y] en méconnaissance de l’article 877 du code civil. Même la quittance subrogative ne mentionne pas M [D] [Y], de sorte que la banque n’a pas pu transmettre à la CEGC un droit dont elle ne disposait plus.

Il convient d’observer tout d’abord qu’il est constant que le prêt a été consenti à M [Y] et Mme [V] en qualité d’emprunteurs solidaires. Ensuite, il n’est pas contesté que M [D] [Y] est l’héritier de sa mère [J] [V]. Si M [T] [Y] a accepté la succession en représentation de son fils mineur, c’est nécessairement avec l’autorisation du juge des tutelles, laquelle en date du 5 septembre 2011, est mentionnée dans l’attestation immobilière notariée du 22 septembre 2011 et le premier juge ne peut qu’être approuvé d’avoir relevé que l’acceptation pure et simple de la succession a transmis à l’héritier tant les éléments d’actif que les éléments de passif du patrimoine du défunt, dont faisait partie le crédit consenti par la Caisse d’Epargne, et d’avoir rappelé que le décès d’un codébiteur solidaire n’efface pas le caractère solidaire de la dette. L’article 20 des conditions générales de l’offre du prêt le prévoit d’ailleurs expressément.

Il doit tout autant être approuvé d’avoir analysé la prise en charge partielle du prêt par l’assurance-décès contractée par [J] [V] en un remboursement partiel anticipé, ne faisant pas disparaître le caractère solidaire des engagements subsistant sur le solde, dès lors qu’un héritier a été saisi de sa part dans cet engagement. Le rééchelonnement du solde de la dette après ce remboursement partiel, laissant au demeurant inchangé le terme du prêt, ne peut donc valoir novation du prêt en un prêt simple à l’égard du seul emprunteur survivant, étant souligné que la novation ne se présume pas ainsi qu’il résulte de l’article 1273 ancien du code civil (devenu 1330).

Enfin, les conditions dans lesquelles la banque a prononcé la déchéance du terme ne sont pas opposables à la caution qui a payé la dette solidaire, et qui exerce son recours sur le fondement de l’article 2305 du code civil alors en vigueur. De plus, l’article 877 du code civil ne soumet à la signification préalable à l’héritier que le caractère exécutoire à son égard du titre détenu par le créancier contre le défunt. Cette disposition est sans application dans le cas présent puisque l’action de la CEGC tend précisément à l’obtention d’un titre exécutoire dont elle n’est pas encore pourvue, et que M [D] [Y] est à cette fin, une partie à l’instance depuis son introduction.

M [D] [Y] est donc bien obligé à toute la dette comme venant aux droits de sa mère co-empruntrice solidaire prédécédée, et la caution est recevable à exercer son recours contre lui.

Sur la recevabilité de l’action contre M [T] [Y]

A l’égard de ce dernier, la société CEGC limite ses poursuites au droit de se faire payer de sa créance sur les droits du débiteur dans l’immeuble indivis sur lequel elle a fait inscrire une hypothèque judiciaire conservatoire, en se prévalant de la circonstance suivant laquelle l’immeuble échappe à la procédure de liquidation judiciaire, qu’elle est créancière de l’indivision au sens de l’article 815-17 du code civil, et que la suspension de son droit de poursuites individuelles résultant de l’article L622-21 du code de commerce ne l’empêche pas d’agir pour obtenir un titre exécutoire constatant l’existence, le montant et l’exigibilité de sa créance, à défaut d’obtenir la condamnation du débiteur. C’est ainsi que le tribunal a constaté qu’interpellée sur la recevabilité de sa demande en condamnation contre M [Y], elle avait après la réouverture des débats, renoncé à cette demande, au bénéfice du simple constat de l’existence de sa créance et de son exigibilité.

L’appelant fait valoir que la règle appliquée par le tribunal – selon laquelle les créanciers de l’indivision qui auraient pu agir sur les biens indivis avant l’ouverture de la liquidation judiciaire conservent leur droit de poursuite sur l’immeuble indivis et peuvent s’il n’en ont déjà un, obtenir un titre exécutoire constatant l’existence et d’exigibilité de la créance – ne peut trouver application ici au profit de la CEGC dans la mesure où à la date d’ouverture de la procédure collective le 6 novembre 2012, la Caisse d’Epargne n’était pas un créancier de l’indivision au sens de l’article 815-17 du code civil, puisque [D] [Y] n’était âgé que de 15 ans, et qu’au surplus, la banque n’avait pas pris d’inscription sur l’immeuble avant l’ouverture de la liquidation judiciaire ; mais qu’elle n’était créancière que de M [T] [Y] et était tenue de déclarer sa créance. Il plaide que les jurisprudences auxquelles se réfère la caution ne sont pas transposables à la présente situation. Il ajoute qu’il importe peu qu’il ait continué à régler les échéances du prêt: qu’il était dessaisi de ses droits par la liquidation judiciaire, et que la banque devait obtenir la position du liquidateur sur la poursuite du prêt et le cas échéant prononcer cette déchéance à l’égard du liquidateur. Il en conclut qu’à défaut, elle n’a pas pu transmettre plus de droits qu’elle n’en avait à la CEGC dont l’action méconnaît toutes les règles d’ordre public de la procédure collective.

La CEGC réplique que dès lors qu’elle dispose d’un droit de poursuite sur un bien échappant à l’actif de la liquidation, son action destinée à l’obtention d’un titre exécutoire lui permettant de convertir son inscription provisoire sur l’immeuble en inscription définitive, est recevable, peu important qu’elle n’ait pas déclaré sa créance à la procédure de liquidation judiciaire, et peu important que son inscription sur l’immeuble soit postérieure à l’ouverture de cette procédure, puisque l’indivision successorale sur le bien immobilier est née au décès de Mme [V] le 25 décembre 2010, alors que la liquidation judiciaire n’a été ouverte que le 6 novembre 2012.

Ceci étant exposé, il importe de rappeler que le principe de l’arrêt des poursuites individuelles résultant de l’article L622-21 du code de commerce a pour corollaire la représentation collective des créanciers, et que le liquidateur ne peut légalement agir que dans l’intérêt de tous les créanciers et non dans l’intérêt personnel d’un créancier ou d’un groupe de créanciers. La représentation collective n’existant pas dès lors que certains créanciers tiennent de l’article 815-17 du code civil le droit d’être payé sur un bien de l’actif avant tout partage, l’immeuble qui fait partie du gage de ces derniers échappe lui-même au gage collectif des créanciers de la procédure collective.

La CEGC ne peut qu’être approuvée lorsqu’elle soutient que l’indivision sur l’immeuble est née avant l’ouverture de la procédure collective, peu important à cet égard l’âge du successeur de Mme [V], et qu’elle est un créancier de l’indivision, dès lors qu’elle a payé aux lieu et place des débiteurs le prêt ayant servi à financer l’acquisition de ce bien, qui est étranger à l’activité professionnelle de M [Y].

Le défaut de déclaration de créance du créancier d’origine, à savoir la Caisse d’Epargne d’Ile de France n’a aucun effet sur l’efficacité de l’action de la CEGC qui n’exerçant que son droit de poursuites sur l’immeuble indivis, ne vient pas en concours avec la masse des créanciers de la liquidation judiciaire. Le seul effet d’une telle déclaration de créance aurait été d’interrompre la prescription du droit de la banque au titre du prêt, alors que dans le cadre de son recours personnel, le droit de la caution naît de son paiement le 18 avril 2018, et n’encourait aucune critique au regard de la prescription, l’action ayant été introduite dès le 5 avril 2019.

Le tribunal a donc fait une parfaite application des principes ainsi énoncés pour en conclure que la demande à l’encontre de M [T] [Y] est recevable.

La demande des appelants tendant à ce qu’il soit fait injonction à la CEGC de lever l’hypothèque judiciaire provisoire inscrite le 1er avril 2019 sur le bien immobilier de MM [T] et [D] [Y] sous astreinte de 100 € par jour de retard passé un délai de six mois à compter de la décision à intervenir, ne peut donc qu’être rejetée.

Sur le montant de la créance de la caution 

La CEGC admet dans ses écritures qu’agissant au titre de son recours personnel, en application de l’article 2305 du code civil, le tribunal a à bon droit limité sa créance au montant payé à la banque soit 77 075,71 €, majoré des intérêts au taux légal à compter de son paiement soit le 18 avril 2018.

Les appelants quant à eux, ont demandé à la cour à titre subsidiaire la confirmation du jugement à ce titre. La cour n’est donc pas saisie d’un moyen d’infirmation et ne peut que confirmer le jugement de ce chef.

Sur la demande de délais de paiement

MM [Y] ont été déboutés de cette demande au motif que les impayés sont anciens, que leurs justificatifs de ressources sont antérieurs à l’assignation, et que les débiteurs ont reconnu eux mêmes qu’en l’absence de clôture de la procédure de liquidation judiciaire, l’obtention d’un nouveau prêt pour désintéresser la caution s’avérera compliquée.

En cause d’appel, ils font valoir que depuis le jugement, et grâce à l’effort continu de règlement de M [Y] à l’égard du liquidateur, le passif de la procédure collective est intégralement apuré, de sorte que la liquidation va enfin pouvoir être clôturée.

Force est de constater que cependant, ils ne versent aucune pièce au soutient de cette affirmation, ni aucune pièce justificative de leur situation professionnelle et patrimoniale actuelle.

Le jugement ne peut qu’être confirmé sur ce point.

Sur l’appel incident de la CEGC relatif à la « consolidation de l’inscription d’hypothèque judiciaire provisoire prise le 1er avril 2019 » 

Le tribunal a répondu que cette « consolidation » appartenant à la seule diligence du créancier dans le délai de deux mois suivant le jour où la décision constatant sa créance sera passée en force de chose jugée, il n’y avait pas lieu de faire droit à une telle demande.

Ce faisant, les premiers juges n’ont fait qu’appliquer le principe selon lequel les demandes ne conférant pas de droit à la partie qui les requiert, ne sont pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile auxquelles la juridiction soit tenue de répondre, à l’instar des demandes de « dire » ou de « donner acte ».

Le libellé de ce chef de demande au dispositif des conclusions d’appel incident le confirme parfaitement : « Dire et juger que conformément aux dispositions des articles R. 533-1 et R. 533-4 du Code des procédures civiles d’exécution, la CEGC pourra, à sa diligence, convertir à titre définitif, l’inscription d’hypothèque judiciaire provisoire et conservatoire régularisée le 1er avril 2019 Volume 2019 V 975 ».

La CEGC connaît les dispositions lui permettant de convertir son inscription en provisoire en inscription définitive, et elle réunit désormais les conditions pour le faire. Point n’est donc besoin d’une décision de justice pour le constater.

Le jugement sera seulement réformé en ce que qu’au lieu de « débouter » la CEGC de cette demande, qui implique que la question juridique soit tranchée au fond avant d’être rejetée, il convient de dire qu’il n’y a pas lieu de statuer sur cette demande, ce qui ne privera la CEGC d’aucun de ses droits.

Sous cette réserve, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.

Les appelants supporteront les dépens d’appel et l’équité commande d’allouer à la partie intimée une somme complémentaire de 500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort,

CONFIRME la décision entreprise en toutes ses dispositions, à l’exception de celle ayant débouté la CEGC de sa demande de consolidation de l’inscription d’hypothèque provisoire,

Réformant ce seul point,

Dit n’y avoir lieu de dire et juger que conformément aux dispositions des articles R. 533-1 et R. 533-4 du Code des procédures civiles d’exécution, la CEGC pourra, à sa diligence, convertir à titre définitif, l’inscription d’hypothèque judiciaire provisoire et conservatoire régularisée le 1er avril 2019 Volume 2019 V 975,

Condamne solidairement M [D] [Y] et M [T] [Y] à payer à la société CEGC la somme de 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne solidairement M [D] [Y] et M [T] [Y] aux dépens d’appel, qui pourront être recouvrés directement dans les conditions posées par l’article 699 alinéa 2 du code de procédure civile.

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Fabienne PAGES, Président et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

 


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