Droits des héritiers : 1 juin 2023 Cour d’appel d’Amiens RG n° 22/01806

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Droits des héritiers : 1 juin 2023 Cour d’appel d’Amiens RG n° 22/01806

1 juin 2023
Cour d’appel d’Amiens
RG n°
22/01806

ARRET

[H]

C/

[H]

[H]

[H]

[H]

[H]

[H]

PM/SGS/DK

COUR D’APPEL D’AMIENS

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU PREMIER JUIN

DEUX MILLE VINGT TROIS

Numéro d’inscription de l’affaire au répertoire général de la cour : N° RG 22/01806 – N° Portalis DBV4-V-B7G-INE7

Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D’AMIENS DU QUATORZE JANVIER DEUX MILLE VINGT DEUX

PARTIES EN CAUSE :

Madame [V] [A] [H] épouse [J]

née le 27 Mai 1961 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 12]

[Localité 11]

Représentée par Me Christian LUSSON de la SCP LUSSON ET CATILLION, avocat au barreau D’AMIENS

Plaidant par Me BRARD, avocat au barreau du VAL D’OISE

APPELANTE

ET

Madame [W] [X] [BT] [H] épouse [Y]

née le 07 Octobre 1952 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 7]

Monsieur [S] [L] [K] [H]

né le 01 Octobre 1950 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 10]

Monsieur [P] [G] [H]

né le 08 Juin 1957 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 8]

Monsieur [R] [P] [Z] [H]

né le 28 Août 1951 à [Localité 13]

de nationalité Française

[Adresse 14]

[Localité 9]

Représentés par Me SAGOT substituant Me Franck DELAHOUSSE de la SELARL DELAHOUSSE ET ASSOCIÉS, avocat au barreau D’AMIENS

Madame [C], [E], [BT] [H] épouse [M]

née le 02 Avril 1949 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Laetitia BEREZIG de la SCP BROCHARD-BEDIER ET BEREZIG, avocat au barreau D’AMIENS

Madame [EZ] [I] [T] [BT] [H] épouse [ZP]

née le 26 Avril 1948 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 8]

Représentée par Me Audrey BOUDOUX D’HAUTEFEUILLE, avocat au barreau D’AMIENS

INTIMES

DÉBATS & DÉLIBÉRÉ :

L’affaire est venue à l’audience publique du 30 mars 2023 devant la cour composée de Mme Véronique BERTHIAU-JEZEQUEL, Présidente de chambre, Mme Christina DIAS DA SILVA, Présidente de chambre et M. Pascal MAIMONE, Conseiller, qui en ont ensuite délibéré conformément à la loi.

A l’audience, la cour était assistée de Mme Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.

Sur le rapport de M. [FE] [U] et à l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré et la présidente a avisé les parties de ce que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 01 juin 2023, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

PRONONCÉ :

Le 01 juin 2023, l’arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Véronique BERTHIAU-JEZEQUEL, Présidente de chambre et Madame Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.

*

* *

DECISION :

[BT]-[D] [F] veuve de [N] [H] est décédée le 14janvier 2013 laissant pour lui succéder ses sept enfants, à savoir :

-Mme [EZ] [H] épouse [ZP],

-Mme [C] [H] épouse [M],

-M. [S] [H],

-M. [R] [H],

-Mme [W] [H] épouse [Y],

-M [P] [H],

-Mme [V] [H] épouse [J].

Par jugement du 22 juin 2016, le tribunal de grande instance d’Amiens a notamment ordonné l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [BT]-[D] [F] veuve [H], et désigné Maître [YV] [O], notaire à [Localité 8], pour procéder aux dites opérations.

Suivant procès-verbal d’ouverture des opérations de liquidation de la succession en date du 13 janvier 2017, Maître [YV] [O] a dressé la liste des éléments composant la masse active et passive de la succession.

Rappelant que ses trois frères M. [S] [H], M. [R] [H] et M. [P] [H] avaient chacun été bénéficiaires du transfert de 650 actions de la SALafarge Fils, entre les années 1988 et 1991, et estimant que ces transferts d’actions constituaient des donations indirectes ou déguisées, Mme [EZ] [H] épouse [ZP] les a, par actes d’huissier en date des 28 novembre, 29 novembre, 3 décembre, 5 décembre et 9 décembre 2019, fait assigner, ainsi que Mme [C] [H] épouse [M] et Mme [V] [H] épouse [J], devant le tribunal de grande instance d’Amiens, devenu depuis tribunal judiciaire d’Amiens, aux fins de voir ordonner le rapport de ces actions à la succession de leur mère.

Par acte d’huissier en date du 5 décembre 2019, Mme [EZ] [H] épouse [ZP] a fait assigner sa s’ur Mme [W] [H] épouse [Y] aux mêmes fins.

Les deux instances ont été jointes.

Par jugement du 14 janvier 2022, le tribunal judiciaire d’Amiens a :

-Débouté Mme [V] [H] épouse [J] de sa demande de révocation de l’ordonnance de clôture rendue par le juge de la mise en état le 27 mai 2021,

-Déclaré Mme [EZ] [H] épouse [ZP] et Mme [V] [H] épouse [J] irrecevables en leurs demandes dé rapports formées à l’encontre de M [S] [H], de M. [R] [H] et de M. [P] [H] au bénéfice de la succession de [BT]- [D] [F] veuve [H],

-Débouté Mme [EZ] [H] épouse [ZP] de sa demande de rapport formée à l’encontre de M. [S]-[H], de M. [R] [H] et de M. [P] [H] au bénéfice de la succession de [N] [H],

-Débouté Mme [EZ] [H] épouse [ZP] de sa demande d’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [N] [H],

-Débouté Mme [EZ] [H] épouse [ZP] de sa demande d’indemnité présentée sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

-Condamné Mme [EZ] [H] épouse [ZP] à payer à M. [S] [H], à M. [R] [H] et à M. [P] [H] la somme globale de 2.000 € et à Mme [C] [H] épouse [M] la somme de 1.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

-Condamné in solidum Mme [EZ] [H] épouse [ZP] et Mme [V] [H] épouse [J] aux dépens,

-Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire de la décision.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 14 avril 2022, Mme [V] [H] épouse [J] a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions transmises par la voie électronique le 8 juillet 2022, Mme [V] [H] épouse [J] demande à la cour de :

-Infirmer et réformer la décision entreprise en ce qu’il a :

‘-Déclaré Madame [EZ] [H] épouse [ZP] et Madame [V] [H] épouse [J] irrecevables en leurs demandes de rapports formées à l’encontre de Monsieur [S] [H], de Monsieur [R] [H] et de Monsieur [P] [H] au bénéfice de la succession de Madame [BT] [D] [F] veuve [H],

-Débouté Madame [EZ] [H] épouse [ZP] de sa demande de rapport formée à l’encontre de Monsieur [S] [H], de Monsieur [R] [H] et de Monsieur [P] [H] au bénéfice de la succession de Monsieur [N] [H],

-Débouté Madame [EZ] [H] épouse [ZP] de sa demande d’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de Monsieur [N] [H],

-Débouté Madame [EZ] [H] épouse [ZP] de sa demande d’indemnité présentée sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

-Condamné Madame [EZ] [H] épouse [ZP] à payer à Monsieur [S] [H], à Monsieur [R] [H] et à Monsieur [P] [H] la somme globale de 2 000 (DEUX MILLE) euros et à Madame [C] [H] épouse [M] la somme de 1 000 (MILLE) euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

-Condamné in solidum Madame [EZ] [H] épouse [ZP] et Madame [V] [H] épouse [J] aux dépens.’

En conséquence,

– Ordonner l’ouverture des opérations relatives à la succession de [N] [H] et renvoyer les parties devant le notaire en charge de la succession de [BT]-[D] [F] épouse [H] ;

– Ordonner le rapport à l’actif de la succession de [N] [H] et / ou de [BT]-[D] [H] par MM. [S], [P] et [R] [H] de 650 actions chacun de la SA [H] & fils évaluées au jour du partage d’après leur état en 1988 et 1991, selon les dates précisées dans l’assignation ;

– De façon subsidiaire, constater le non-paiement des cessions des 1950 actions acquises par MM. [S], [P] et [R] [H] chacun de la SA [H] & fils et ordonner le paiement du prix tel que déclaré par les trois acquéreurs augmenté des intérêts de retard au taux légal au profil du compte de la succession de [BT]-[D] [H] ;

– De façon infiniment subsidiaire, ordonner le rapport à l’actif de la succession de [N] [H] et / ou de [BT]-[D] [H] par MM. [S], [P] et [R] [H] de la différence entre le prix de cession et la valeur réelle telle que définie au jour du partage.

– Condamner MM. [S], [P] et [R] [H] in solidum au paiement de la somme de 1000 € chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Par conclusions transmises par la voie électronique le 6 janvier 2023, M.[S] [H], M. [R] [H] et M. [P] [H] demandent à la cour de :

-Dire et juger Mme [V] [H] épouse [J] mal fondée en son appel et l’en débouter,

-Dire et juger Mme [EZ] [H] épouse [ZP] mal fondée en son appel incident et l’en débouter,

Confirmer le jugement dont appel,

Si par extraordinaire la cour infirmait le jugement dont appel et ordonnait le rapport à succession des actions cédées,

-Infirmer le jugement dont appel et juger que [N] [H] a consenti une libéralité aux époux [ZP] [H] lors de la vente de l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 8],

-Ordonner le rapport à succession de la donation reçue par Mme [EZ] [ZP] de l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 8],

A titre encore plus subsidiaire, la déclarer prescrite en sa demande de voir ordonner le paiement du prix,

-Condamner Madame [V] [H] épouse [J] au paiement de la somme de 4000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL Delahousse & Associés.

Par conclusions transmises par la voie électronique le 7 octobre 2022, Mme [C] [H] épouse [M] demande à la cour de :

-Dire recevable mais mal fondée Mme [V] [H] épouse [J] en son appel et ses demandes.

En conséquence, l’en débouter.

-Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

-Condamner Mme [V] [H] épouse [J] à lui payer une somme de 5 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Brochard -Bedier & B.

Par conclusions transmises par la voie électronique également le 7octobre 2022, Mme [EZ] [H] demande à la cour de :

-Infirmer le jugement du 14 janvier 2022,

Statuant à nouveau

-Ordonner l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de M. [N] [H] et renvoyer les parties devant Maître [YV] [O], notaire associé à [Localité 8] pour y procéder ;

-Ordonner le rapport au bénéfice de la succession de [N] [H] et/ou de [BT] [D] [H] par M. [S] [H], M. [R] [H] et M. [P] [H] des 650 actions chacun de la SA [H] Fils, évaluées au jour du partage d’après leur état selon le tableau historique des actions de la SA [H] faisant mention d’un transfert de 200 actions le 16 mai 1988, de 200 actions le 7 octobre 1988 et de 250 actions le 17 mars 1991, ou à défaut, le prix de cession des dites actions ;

-Débouter M. [S] [H], M. [R] [H], M. [P] [H] et Mme [C] [H] épouse [M] de leurs demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

-Débouter M. [S] [H], M [R] [H], M. [P] [H] et Mme [C] [H] épouse [M] de leurs demandes au titre des dépens;

-Condamner in solidum M. [S] [H], M. [R] [H], M. [P] [H] et Mme [C] [H] épouse [M] aux dépens ;

Y ajoutant,

-Déclarer irrecevable la demande de rapport à succession présentée par M. [S] [H], M. [R] [H] et M [P] [H] au titre de l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 8];

-Débouter M. [S] [H], M. [R] [H], M. [P] [H] et Mme [C] [H] épouse [M] de l’ensemble de leurs demandes ;

-Condamner in solidum M. [S] [H], M. [R] [H] et M. [P] [H] à payer à Mme [EZ] [H] épouse [ZP] la somme de 2000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

-Condamner in solidum M. [S] [H], M [R] [H] et M. [P] [H] aux dépens d’appel.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions des parties, visées ci-dessus, pour l’exposé de leurs prétentions et moyens.

Mme [W] [H] épouse [Y] n’a pas constitué avocat.

Par ordonnance du 22 mars 2023, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture et renvoyé l’affaire pour plaidoiries à l’audience du 30 mars 2023.

La déclaration d’appel ayant été signifiée à Mme [W] [H] épouse [Y] selon acte déposé en l’étude de l’huissier instrumentaire, conformément aux dispositions de l’article 474 alinéa 2 du code de procédure civile, il convient de statuer par décision rendue par défaut.

CECI EXPOSE, LA COUR,

Sur la demande de rapport formée au bénéfice de la succession de [BT]-[D] [F] veuve [H] :

Aux termes des dispositions de l’article 850 du code civil, le rapport ne se fait qu’à la succession du donateur et il est considéré que la libéralité consentie par un défunt avant le changement de son régime matrimonial en communauté universelle ne peut être rapportée qu’à sa propre succession.

En l’espèce, Mme [EZ] [H] et Mme [V] [H] sollicitent le rapport de donations prétendument consenties par [N] [H] entre les années 1988 et 1991.

Or, comme l’ont justement relevé les premiers juges, il est établi que suivant acte notarié dressé préalablement à leur mariage célébré le 20 septembre 1946, [N] [H] et [BT]-

[D] [F] ont adopté le régime de la séparation de biens, et que ce n’est que par acte notarié en date du 14 avril 2005 qu’ils ont adopté le régime de la communauté universelle, ce changement de régime matrimonial ayant été homologué par jugement du tribunal de grande instance de Créteil en date du 18 novembre 2005, lequel précise que « le changement homologué a effet entre les parties à dater du jour où le jugement d’homologation est devenu définitif et qu’il n’y a pas de rétroactivité ».

Il est donc acquis que les donations alléguées ont été consenties par [N] [H] alors qu’il se trouvait encore sous le régime de la séparation de biens, de sorte que la demande de rapport ne peut être formée qu’au bénéfice de sa succession, et non de celle de son épouse.

En outre, le fait que la créance invoquée résultant de la cession d’actions dont il est demandé rapport si elle était fondée serait ensuite entrée dans l’actif de la communauté universelle n’est pas de nature à remettre en cause le principe énoncé de manière constante selon lequel la libéralité consentie par un défunt avant le changement de son régime matrimonial en communauté universelle ne peut être rapportée qu’à sa propre succession.

Enfin, il n’est pas rapporté la preuve qu’il existerait une pratique notariale consistant en cas de changement du régime matrimonial et d’adoption du régime de la communauté universelle de n’ouvrir que la succession du premier des mourants étant précisé que si une telle pratique était effective la Cour de cassation n’aurait jamais eu à se poser la question de savoir si le rapport pouvait ou non être demandé dans le cadre de la succession du second des mourants.

Il est au contraire d’usage, comme il a été pratiqué dans le cadre de la succession des époux [H], en cas de communauté universelle de n’ouvrir que la succession du second des mourants et, dans l’hypothèse où il est avéré qu’une libéralité devant être rapportée a été consentie par le premier mourant avant l’adoption du régime de la communauté universelle, d’ouvrir alors la succession de ce dernier pour permettre ce rapport.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré Mme [EZ] [H] et Mme [V] [H] irrecevables en leurs demandes de rapports formées au bénéfice de la succession de [BT]- [D] [F].

Sur la demande de rapport formée par Mme [EZ] [H] et Mme [V] [H] et la demande d’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [N] [H] :

Aux termes des dispositions du premier alinéa de l’article 843 du code civil, tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l’actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu’il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu’ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale.

En application des dispositions de l’article 1353 du code civil celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

En application de l’ensemble de ces dispositions, il appartient à celui qui demande le rapport d’une libéralité d’apporter la preuve de l’existence de celle-ci, c’est-à-dire tant de l’appauvrissement du donateur que de l’intention libérale dont a été animé ce dernier à l’égard de son héritier et il appartient au copartageant qui conteste l’existence de cette libéralité, en invoquant un paiement, de rapporter la preuve de l’existence de ce paiement.

En l’espèce, ainsi que le reconnaissent eux-mêmes dans leurs conclusions M. [S] [H], M. [R] [H] et M. [P] [H], seule la vérification de l’actionnariat et la réalité des transferts d’action entrent dans le champ d’intervention du commissaire aux comptes d’une société et le commissaire aux comptes n’a pas connaissance des prix de cession des actions de la société contrôlée par lui, ces prix ressortant des rapports exclusifs entre vendeur et acheteur.

Il en résulte que le document intitulé « Historique des mouvements d’actions depuis 1973 avec indication des prix de cession ” dûment attesté par la SA KPMG en sa qualité de commissaire aux comptes de la SA [H] Fils indiquant que les 16 mai 1988, 7 octobre 1988 et 17 mars 1991,

M. [N] [H] a cédé à chacun de ses trois fils M. [S] [H], M. [R] [H] et M. [P] [H] respectivement 200 actions au prix de 27 € chacune, 200 actions au prix de 27 € chacune et 250 actions au prix de 46 € (soit 300 francs) chacune, ne vaut pas preuve de la réalité de la valeur retenue entre l’acheteur et le vendeur et ne fait que reprendre les prix de cession qui lui ont été à l’époque indiqué par [N] [H].

Ce document est seulement suffisant pour établir la réalité d’une cession qui n’est d’ailleurs pas contestée.

Par ailleurs, le tableau reprenant le prix de cession des dites actions est un document établi par M. [S] [H], M. [R] [H] et M. [P] [H] et n’a pas été visé par le commissaire au compte de la société.

Enfin, M. [S] [H], M. [R] [H] et M. [P] [H] qui font état d’un prix de cession à des conditions normales et d’un paiement effectif de ce prix ne produisent aucun document de nature à établir la réalité du prix de cession qu’ils invoquent et celle du paiement effectif du prix de cession.

Il en résulte qu’il n’est pas établi que la cession d’action au profit de M. [S] [H], M. [R] [H] et M. [P] [H] a été effectuée moyennant une contrepartie financière.

Partant, cette cession a appauvri [N] [H].

En outre, cette cession sans aucune contrepartie établie qui avait pour but de favoriser M. [S] [H], M. [R] [H] et M. [P] [H] au détriment de Mme [EZ] [H] et Mme [V] [H] avait manifestement une intention libérale.

Enfin, dès lors qu’un rapport doit être effectué à la succession de [N] [H], l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de sa succession s’impose.

Il convient donc :

– d’infirmer le jugement en ce qu’il a débouté Mme [EZ] [H] et Mme [V] [H] de leur demande de rapport à la succession de [N] [H] par M. [S] [H], M. [R] [H] et M. [P] [H] de 650 actions chacun de la SA [H] et fils évaluées au jour du partage selon leur valeur à la date de leur cession en 1988 et 1991 ;

– d’infirmer le jugement en ce qu’il a débouté Mme [EZ] [H] et Mme [V] [H] de leur demande d’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [N] [H] ;

– d’ordonner l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [N] [H] devant le notaire en charge de la succession de [BT]-Madeleine [F] veuve [H] ;

– d’ordonner le rapport à la succession de [N] [H] par M. [S] [H], M. [R] [H] et M. [P] [H] de 650 actions chacun de la SSA [H] et fils évaluées au jour du partage selon leur valeur à la date de leur cession en 1988 et 1991.

Sur la demande de rapport à la succession de [N] [H] de l’immeuble [Adresse 5] à [Localité 8] par Mme [EZ] [H] :

Le fait que cet immeuble ait été acquis par Mme [EZ] [H] et son époux M. [B] [ZP] n’est pas de nature à rendre irrecevable la demande de rapport au titre de cet immeuble dès lors que cette demande n’est pas dirigée contre Mme [EZ] [H] et son époux M. [B] [ZP] mais uniquement contre Mme [EZ] [H] qui en sa qualité d’héritière est susceptible d’être soumise à rapport à succession.

Toutefois, il n’est produit aucun document établissant que cet immeuble, vendu par [N] [H] alors qu’il se trouvait encore sous le régime de la séparation de bien, l’a été en dessous de sa valeur vénale et Mme [EZ] [H] établit par une attestation notariale et celle d’un témoin que cet immeuble se trouvait en mauvais état lors de la vente. De plus cet immeuble n’était pas libre d’occupation ors de sa cession, ce qui en diminuait sa valeur vénale.

Enfin, Mme [EZ] [H] justifie du paiement d’un acompte sur le prix de vente de 40 000 € lors de la signature de l’acte de vente constaté par l’acte et du paiement du solde de 160 000 € deux ans plus tard par une pièce comptable du notaire.

Cette vente à tempérament n’a manifestement pas été consentie par [N] [H] sans contrepartie puisque l’acte de vente précise que jusqu’à complet paiement du prix de vente le vendeur se réservait la perception des loyers.

Il n’est donc pas démontré que la vente opérée par [N] [H] au profit de Mme [EZ] [H] l’a appauvri et l’intention libérale en faveur de Mme [EZ] [H] n’est pas non plus établie.

Il convient donc de déclarer recevable la demande de rapport à la succession de [N] [H] formée contre Mme [EZ] [H] au titre de l’immeuble [Adresse 5] à [Localité 8] mais de rejeter cette demande comme étant mal fondée.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Chacune des parties succombant partiellement en ses demandes, il convient :

– d’infirmer le jugement en ce qu’il a condamné in solidum Mme [EZ] [H] et Mme [V] [H] aux dépens de première instance ;

– d’infirmer le jugement en ce qu’il a condamné Mme [EZ] [H] à payer au titre des frais irrépétibles à M. [S] [H], M. [R] [H] et M. [P] [H] par Mme [EZ] [H] la somme de 2000 € et celle de 1000 € à Mme [C] [H] ;

– de dire que chacune des parties conservera à sa charge ses dépens de première instance et d’appel ;

– de débouter chacune des parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort :

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a débouté Mme [V] [H] épouse [J] de sa demande de révocation de l’ordonnance de clôture et déclaré Mme [EZ] [H] épouse [ZP] et Mme [V] [H] épouse [J] irrecevables en leurs demandes de rapports formées à l’encontre de M [S] [H], de M. [R] [H] et de M. [P] [H] au bénéfice de la succession de [BT]- [D] [F] veuve [H] ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

Ordonne l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [N] [H] devant le notaire en charge de la succession de [BT]-Madeleine [F] veuve [H] ;

Ordonne le rapport à la succession de [N] [H] par M. [S] [H], M. [R] [H] et M. [P] [H], chacun de 650 actions de la SA [H] et fils évaluées au jour du partage selon leur valeur à la date de leur cession en 1988 et 1991;

Déclare recevable la demande de rapport à la succession de [N] [H] formée contre Mme [EZ] [H] au titre de l’immeuble [Adresse 5] à [Localité 8] ;

Déboute M. [S] [H], M. [R] [H] et M. [P] [H] de leur demande de rapport à la succession de [N] [H] formée contre Mme [EZ] [H] au titre de l’immeuble [Adresse 5] à [Localité 8] ;

Déboute les parties de leurs plus amples demandes ;

Laisse à la charge de chacune des parties ses dépens de première instance et d’appel ;

Autorise la SCP Delahousse et associés ainsi que la SCP Brochard-Bedier et Berezig à recouvrer directement ceux des dépens dont ils ont fait l’avance sans recevoir de provision, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


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