Droits des Artistes : Tribunal administratif de Lille, 7 mars 2023, 2301210

·

·

Droits des Artistes : Tribunal administratif de Lille, 7 mars 2023, 2301210
Ce point juridique est utile ?

Extraits :
* * *
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête et deux mémoires complémentaires, enregistrés le 9 février 2023 et le 23 février 2023, Mme B A, représentée par Me Stienne-Duwez, demande au juge des référés :

1°) de suspendre, en application de l’article

L. 521-1 du code de justice administrative, l’exécution de la décision du 5 décembre 2022 par laquelle le maire de la commune de Seclin l’a placée en disponibilité pour convenances personnelles ;

2°) de suspendre, en application de l’article

L. 521-1 du code de justice administrative, la décision du 10 janvier 2023 par laquelle le directeur général des services de la commune de Seclin a refusé de retirer l’arrêté du 5 décembre 2022 portant mise en disponibilité pour convenances personnelles ainsi que la décision implicite de rejet du maire de retirer ce même arrêté ;

3°) d’enjoindre au maire de la commune de Seclin de la réintégrer dans ses fonctions dans un délai de 8 jours à compter de la notification de l’ordonnance à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l’État la somme de 2 400 euros au titre de l’article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

– la condition d’urgence est remplie ; elle est en disponibilité et le poste sur lequel elle est affectée a fait l’objet d’une publication de vacance ; elle ne perçoit qu’un demi-traitement ;

– il existe un doute sérieux sur la légalité de l’arrêté du 5 décembre 2022, dès lors que :

* le maire de la commune ne pouvait pas considérer que sa demande de mise en disponibilité pour convenances personnelles résulte d’une volonté claire et non équivoque ; l’arrêté attaqué a été pris postérieurement à sa demande de retrait de demande de mise en disponibilité pour convenances personnelles ; compte-tenu de son état de santé, le maire de la commune devait se douter qu’elle n’était pas dans son état normal lorsqu’elle avait sollicité une mise en disponibilité pour convenances personnelles ;

– il existe un doute sérieux sur la légalité de la décision du 10 janvier 2023, dès lors que :

* elle a été prise par une autorité incompétente ;

* elle méconnaît les dispositions de l ‘article

L.242-2 du code des relations entre le public et l’administration ; elle n’était pas en mesure d’apprécier la portée de sa demande de placement en disponibilité pour convenances personnelles ; le poste qu’elle a occupé est toujours vacant ; la date limite des candidature pour candidater sur son poste est fixée au 19 février 2023 ; le poste est à pourvoir le 1er mars 2023 ; elle occupait ses fonctions avec compétence ; son travail a été salué par son employeur ; le maire de la commune a commis une erreur manifeste d’appréciation ; si la commune de Seclin recherche désormais un fonctionnaire de catégorie A pour occuper son poste, elle n’en a pas modifié les missions ; elle n’a pas méconnu le secret des correspondances en produisant des copies des échanges de SMS avec le maire ; les SMS n’ont pas été obtenus de manière déloyale ;

– il existe un doute sérieux sur la légalité de la décision implicite de rejet du maire de la commune, dès lors que :

* elle méconnaît les dispositions de l’article

L.242-2 du code des relations entre le public et l’administration ; elle n’était pas en mesure d’apprécier la portée de sa demande de placement en disponibilité pour convenances personnelles ; le poste qu’elle a occupé est toujours vacant ; la date limite des candidature pour candidater sur son poste est fixée au 19 février 2023 ; le poste est à pourvoir le 1er mars 2023 ; elle occupait ses fonctions avec compétence ; son travail a été salué par son employeur ; le maire de la commune a commis une erreur manifeste d’appréciation ; si la commune de Seclin recherche désormais un fonctionnaire de catégorie A pour occuper son poste, elle n’en a pas modifié les missions.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 février 2023, la commune de Seclin, représentée par Me Forgeois, conclut au rejet de la requête et à ce qu’il soit mis à la charge de Mme A une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article

L.761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

– les conclusions à fin de suspension dirigées contre des décisions du maire de Seclin et de son directeur général des services par lesquelles ils ont refusé de retirer l’arrêté du 5 décembre 2022 sont irrecevables, dès lors qu’ils n’ont pas été saisis d’une demande de retrait de cet arrêté ; elle soutient que la requérante n’établit pas avoir saisi le tribunal d’une requête au fond tendant à l’annulation des décisions attaquées ;

– la condition d’urgence n’est pas remplie ; en sollicitant une mise en disponibilité pour convenances personnelles, Mme A est à l’origine de la situation qu’elle subit ; elle perçoit des prestations en espèces à hauteur de 1 369,14 euros par mois en raison d’un placement en arrêt maladie ;

– elle estime que la production de SMS ne constitue pas une preuve recevable, dès lors qu’elle méconnaît le secret des correspondances ;

– aucun des moyens de la requête n’est de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la requête.

Vu :

– la requête par laquelle Mme A demande l’annulation des décisions attaquées ;

– les autres pièces du dossier.

Vu :

– le code général de la fonction publique ;

– le décret n°2012-437 du 29 mars 2012 portant statut particulier du cadre d’emplois des assistants territoriaux d’enseignement artistique ;

– le code de justice administrative.

Le président du tribunal a désigné M. Lassaux premier conseiller, pour statuer sur les demandes de référé.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique du 23 février 2023 à 11 h30 :

– le rapport de M. Lassaux, juge des référés,

– les observations de Me Stienne-Duwez, représentant Mme A qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens que la requête ;

– les observations de Me Forgeois, représentant la commune de Seclin qui reprend ses écritures en défense.

La clôture de l’instruction a été différée au 24 février 2023 à 14 heures.

Par un mémoire, enregistré le 24 février 2023 à 12h12, la commune de Seclin conclut au rejet de la requête et à ce qu’il soit mis à la charge de Mme A une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article

L.761-1 du code de justice administrative. Elle conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens que la requête.

Mme A, représentée par Me Stienne Duwez, a produit des pièces complémentaires le 24 février 2023 à 10h21 qui ont été communiquées à la partie défenderesse.

Mme A, représentée par Me Stienne-Duwez, a produit une lettre le 24 février 2023 à 13h58 qui n’a pas été communiquée à la commune de Seclin.

Considérant ce qui suit

:

1. Mme B A, assistante territoriale d’enseignement artistique principal de 1ère classe exerce au sein des services de la commune de Seclin les fonctions de responsable du pôle ” rayonnement et communication “. Mme A a demandé le 19 octobre 2022 à être placée en disponibilité pour convenances personnelles. Par un arrêté du 5 décembre 2022, le maire de Seclin a accordé à l’intéressée une disponibilité pour convenances personnelles à compter du 1er janvier 2023. Toutefois le 4 décembre 2022, Mme A a souhaité revenir sur sa demande de mise en disponibilité pour convenances personnelles. Le 9 janvier 2023, Mme A a demandé, par courriel, si la mise en disponibilité pour convenances personnelles avait été retirée. Le 10 janvier 2023, le directeur général des services de la commune de Seclin l’informait que la décision du 5 janvier 2022 lui accordant une disponibilité pour convenances personnelles ne serait pas retirée.

2. Par cette requête, Mme A demande au juge des référés, sur le fondement de l’article

L.521-1 du code de justice administrative de suspendre la décision du 5 décembre 2022 par laquelle le maire de Seclin l’a placée en disponibilité pour convenances personnelles, la décision du 10 janvier 2023 par laquelle le directeur général des services a refusé de retirer la décision du 5 décembre 2022 précitée. Elle demande également la suspension de l’exécution de la décision implicite par laquelle maire de Seclin a refusé de retirer sa décision susvisée du 5 décembre 2022. Toutefois, par une décision datée du 29 décembre 2022, communiquée pour la première fois à la requérante, le 22 février 2023, parmi les productions en défense de la commune, le maire de Seclin a refusé expressément de retirer son arrêté du 5 décembre 2022. Par suite, les conclusions à fin de suspension de l’exécution de la décision implicite de rejet du maire de Seclin doivent être regardées comme étant désormais dirigées contre cette décision du 29 décembre 2022.

Sur les fins de non-recevoir opposées par la commune de Seclin :

3. Comme il a été rappelé au point précédent, dès lors que le maire de Seclin a refusé expressément de retirer l’arrêté du 5 décembre 2022 par lequel il a placé Mme A en disponibilité pour convenances personnelles, les conclusions à fin de suspension de l’exécution de la décision implicite de rejet de procéder à un tel retrait doivent être regardées comme étant dirigées contre cette décision expresse du 29 décembre 2022. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par la commune de Seclin tirée de ce qu’aucune décision implicite de rejet du maire de Seclin afférente à une prétendue demande de retrait de son arrêté initial du 5 décembre 2022 ne peut être contestée, à défaut d’avoir pu naître, doit être rejetée.

4. Par ailleurs, il résulte des termes du courriel du directeur général des services de la commune de Seclin daté du 10 janvier 2023 que son auteur a, par une décision faisant grief, rejeté la demande de retrait de l’arrêté susvisé du 5 décembre 2022. La seconde fin de non-recevoir opposée par la commune de Seclin doit être également rejetée.

Sur les conclusions aux fins de suspension :

5. Aux termes de l’article

L. 521-1 du code de justice administrative : ” Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision () “. Aux termes du premier alinéa de son article R. 522-1 : ” La requête visant au prononcé de mesures d’urgence doit () justifier de l’urgence de l’affaire “.

En ce qui concerne l’urgence :

6. L’urgence justifie que soit prononcée la suspension d’un acte administratif lorsque l’exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre. Il appartient au juge des référés d’apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l’acte litigieux sur la situation de ce dernier ou, le cas échéant, des personnes concernées, sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l’exécution de la décision soit suspendue. L’urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l’ensemble des circonstances de l’espèce.

7. Il résulte de l’instruction que Mme A qui percevait une rémunération de 2 827,88 euros nets de cotisations sociales avant son placement en disponibilité pour convenances personnelles ne s’est vue accordée que la somme de 1 277,40 euros nets de cotisations sociales au titre des indemnités journalières ” maladie ” qui lui ont été accordées par son employeur au titre de chacun des mois de janvier et février 2023. Eu égard à ses conséquences sur les revenus de l’intéressée, les décisions attaquées ayant pour effet de la maintenir en disponibilité pour convenances personnelles porte à sa situation une atteinte suffisamment grave pour caractériser une situation d’urgence au sens des dispositions de l’article

L. 521-1 du code de justice administrative.

En ce qui concerne le doute sérieux quant à la légalité de la décision :

S’agissant de la décision du 5 décembre 2022 :

8. Comme il a été rappelé au point 1, le maire de Seclin a pris son arrêté le 5 décembre 2022 plaçant l’intéressée en disponibilité pour convenances personnelles. Cette décision a été envoyée le 8 décembre 2022 à Mme A qui l’a reçue le 9 décembre 2022. La requérante a demandé, par un courrier du 4 décembre 2022, reçu le 8 décembre 2022 par le maire de Seclin, de retirer sa demande de placement en congé pour convenances personnelles.

9. En l’état de l’instruction, les moyens invoqués par Mme A à l’encontre de l’arrêté du 5 décembre 2022 tels que visés dans la présente ordonnance ne sont pas de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée.

S’agissant de la décision du 29 décembre 2022 :

10. D’une part, l’article

L. 242-4 du code des relations entre le public et l’administration dispose que : ” Sur demande du bénéficiaire de la décision, l’administration peut, selon le cas et sans condition de délai, abroger ou retirer une décision créatrice de droits, même légale, si son retrait ou son abrogation n’est pas susceptible de porter atteinte aux droits des tiers et s’il s’agit de la remplacer par une décision plus favorable au bénéficiaire “. Si, lorsque les conditions prévues par ces dispositions sont réunies, l’auteur d’une décision peut, sans condition de délai, faire droit à une demande de retrait présentée par son bénéficiaire, il n’est toutefois pas tenu de procéder à un tel retrait, alors même que la décision serait entachée d’illégalité. Il appartient ainsi à l’auteur de la décision d’apprécier, sous le contrôle du juge, s’il peut procéder ou non au retrait, compte tenu tant de l’intérêt de celui qui l’a saisi que de celui du service.

11. D’autre part, aux termes de l’article

L.512-1 du code général de la fonction publique : ” L’activité est la position du fonctionnaire qui, titulaire d’un grade, exerce effectivement les fonctions de l’un des emplois correspondant à ce grade “. Sous réserve de dispositions statutaires particulières, tout fonctionnaire en activité tient de son statut le droit de recevoir, dans un délai raisonnable, une affectation correspondant à son grade. A titre exceptionnel, si l’intérêt du service le justifie, l’affectation d’un agent sur des emplois normalement occupés par des agents de grade supérieur peut être admise.

12. Il ressort des pièces du dossier que Mme A, assistante d’enseignement artistique principal de 1ère classe, occupait jusqu’à sa mise en disponibilité pour convenances personnelles le poste de responsable ” rayonnement et communication ” de la commune de Seclin dont les missions ne relèvent pas de celles, définies par le décret n°2012-437 du 29 mars 2012, que peuvent effectuer un agent titulaire de son grade. En l’état de l’instruction, le moyen tiré de ce que le maire de Seclin a entaché sa décision attaquée d’une erreur manifeste d’appréciation en refusant de retirer son arrêté précité du 5 décembre 2022 n’est pas de nature à créer un doute sérieux quant à sa légalité.

13. Le moyen tiré de ce que le maire de Seclin ne pouvait pas refuser le retrait de cet arrêté du 5 décembre 2022 au motif que cet acte était illégal, dès lors que Mme A n’était pas en mesure d’apprécier la portée de sa demande de placement en disponibilité pour convenances personnelles, n’est pas davantage de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée.

S’agissant de la décision du 10 janvier 2023 prise par le directeur général des services de la commune de Seclin :

14. En l’état de l’instruction, le moyen tiré de ce que le directeur général des services de la commune de Seclin n’était pas compétent pour refuser de retirer l’arrêté du 5 décembre 2022 par lequel le maire de Seclin a placé Mme A en disponibilité pour convenances personnelles est de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée.

15. En revanche, aucun des autres moyens invoqués par la requérante à l’encontre de la décision attaquée tels que visés par la présente ordonnance n’est de nature à créer un doute sérieux quant à sa légalité.

16. Il résulte de ce tout ce qui précède que Mme A n’est fondée à solliciter que la suspension de l’exécution de la décision prise par le directeur général des services de la commune de Seclin le 10 janvier 2023.

Sur les conclusions aux fins d’injonction sous astreinte :

17. Eu égard au motif de suspension de l’exécution de la décision du 10 janvier 2023 et au rejet des autres conclusions à fin de suspension de l’exécution des décisions précitées prises par le maire de Seclin, il n’y a pas lieu d’enjoindre à ce dernier de procéder au réexamen de la situation de la requérante. Les conclusions à fin d’injonction et d’astreinte doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

18. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge des parties une quelconque somme au titre des dispositions de l’article

L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

Article 1er : L’exécution de la décision du 10 janvier 2023 prise par le directeur général des services de la commune de Seclin est suspendue.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Seclin sur le fondement des dispositions de l’article

L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme B A et à la commune de Seclin.

Fait à Lille, le 7 mars 2023.

Le juge des référés,

signé

P. LASSAUX

La République mande et ordonne au préfet du Nord en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

N°2301210


Chat Icon