Droits des Artistes : Tribunal administratif de Caen, 2 mars 2023, 2300438

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Droits des Artistes : Tribunal administratif de Caen, 2 mars 2023, 2300438
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Extraits :
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REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 21 février 2023, M. A C, représenté par la SCP Chéneau et Puybasset, demande au juge des référés :

1°) de suspendre l’exécution de l’arrêté du 26 janvier 2023 par lequel le président de la communauté urbaine Caen la Mer l’a suspendu de ses fonctions à compter du 27 janvier 2023 ;

2°) d’enjoindre au président de la communauté urbaine Caen la Mer de le réintégrer dans ses fonctions de professeur territorial d’enseignement artistique au conservatoire de Caen, dans un délai de huit jours à compter de l’ordonnance à intervenir et sous astreinte de 250 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de la communauté urbaine Caen la Mer une somme de 2 000 euros en application de l’article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur l’urgence :

– son éviction brutale, à laquelle la direction a donné une large publicité, est susceptible de causer une atteinte irrémédiable à sa réputation ;

Sur le doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée :

– le non-respect des consignes hiérarchiques en matière d’horaires de travail ne constitue manifestement pas une faute d’une gravité suffisante, alors qu’il est d’usage que les enseignants artistiques conviennent des horaires de leurs cours individuels avec les parents d’élèves ; une note interne a confirmé qu’il pouvait regrouper ses cours au conservatoire les vendredis et samedis, afin de pouvoir travailler les autres jours à l’orchestre de la Philharmonie de Paris ; la situation des élèves en classes à horaires aménagés musique n’imposait pas une organisation différente ; à compter de sa reprise de début janvier 2023, il a parfaitement assuré ses cours les vendredis et samedis, sans aucune absence ;

– à les supposer établis, des manquements au devoir de réserve ne justifient généralement que des sanctions des deux premiers groupes ; il est toujours resté dans un strict cadre professionnel pour échanger avec les parents ; des parents ont tenu à témoigner de ses compétences ;

– ainsi, les faits reprochés ne présentent pas un caractère de vraisemblance ni de gravité suffisant pour justifier une mesure de suspension ;

– ses qualités humaines et ses compétences professionnelles ont été reconnues lors de son entretien professionnel du 8 décembre 2021 ; il bénéficie du soutien de nombreux parents d’élèves ; il n’a encore jamais fait l’objet d’une sanction disciplinaire ;

– dès lors, l’arrêté attaqué est entaché d’un erreur de qualification juridique des faits et d’une erreur d’appréciation ;

– cet arrêté s’inscrit dans une liste de mesures vexatoires destinées à le contraindre à quitter le conservatoire en demandant une disponibilité pour une longue durée et ce, pour des motifs étrangers à l’intérêt du service ;

– cet arrêté est entaché d’un détournement de pouvoir.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Le président du tribunal a désigné M. B pour statuer sur les demandes de référé.

Considérant ce qui suit

:

1. Aux termes de l’article

L. 521-1 du code de justice administrative : ” Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision () “. En vertu de l’article

L. 522-3 de ce code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d’urgence n’est pas remplie ou lorsqu’il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu’elle est irrecevable ou qu’elle est mal fondée.

2. L’urgence justifie que soit prononcée la suspension d’un acte administratif lorsque l’exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre. Il appartient au juge des référés d’apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l’acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l’exécution de la décision soit suspendue.

3. Pour justifier de l’urgence à suspendre l’exécution de la décision en litige, le requérant soutient que son éviction brutale, à laquelle la direction aurait donné une large publicité, est susceptible de causer une atteinte irrémédiable à sa réputation. L’arrêté attaqué, qui maintient l’intégralité du traitement de M. A C, n’a pas un caractère disciplinaire ni pour finalité de préjudicier à la carrière du requérant. Cet arrêté a pour objet de l’écarter temporairement du service aux fins de préserver le bon fonctionnement de ce service et de permettre l’établissement contradictoire des faits. M. C, qui est par ailleurs titularisé depuis le 28 novembre 2022 au sein de l’orchestre de la Philharmonie de Paris, n’établit pas, en produisant un courriel du 27 janvier 2023 de la direction informant les agents du conservatoire de Caen de sa suspension, que cette mesure aurait été accompagnée d’une publicité de nature à porter une atteinte irrémédiable à sa réputation. Ainsi, les circonstances avancées par le requérant ne caractérisent pas en elles-mêmes une situation d’urgence au sens des dispositions de l’article

L. 521-1 du code de justice administrative. Dès lors, et en l’absence de préjudice financier, la condition d’urgence ne peut pas être considérée comme remplie. Par suite, la requête de M. C doit être rejetée en toutes ses conclusions selon la procédure prévue par l’article

L. 522-3 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de M. C est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A C.

Copie en sera adressée pour information à la communauté urbaine Caen la Mer.

Fait à Caen, le 2 mars 2023.

Le juge des référés,

Signé

F. B

La République mande et ordonne au préfet du Calvados, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme,

la greffière,

C. Bénis


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