Redressement de l’URSSAF : Cour d’appel de Grenoble, Ch.secu-fiva-cdas, 21 mars 2023, 21/03046

·

·

Redressement de l’URSSAF : Cour d’appel de Grenoble, Ch.secu-fiva-cdas, 21 mars 2023, 21/03046
Ce point juridique est utile ?

Selon l’article L. 133-9 du Code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 1er juillet 2015 au 1er janvier 2019, « Les groupements d’artistes et les personnes physiques ou morales, publiques ou privées, mentionnés à l’article L. 7122-22 du code du travail, lorsqu’ils exercent l’activité d’entrepreneur de spectacles vivants, procèdent auprès d’un organisme habilité par l’Etat au versement de l’ensemble des cotisations et contributions sociales, d’origine légale ou conventionnelle, prévues par la loi, ainsi que, le cas échéant et dans des conditions fixées par convention, d’autres cotisations et contributions sociales, et se rapportant uniquement à leur activité de spectacle. »

* * * REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS C5

N° RG 21/03046

N° Portalis DBVM-V-B7F-K6UA

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

la SCP GIRARD-MADOUX ET

ASSOCIES

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE – PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU MARDI 21 MARS 2023

Appel d’une décision (N° RG 17/00167)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire d’ANNECY

en date du 27 mai 2021

suivant déclaration d’appel du 03 juillet 2021

APPELANTE :

L’URSSAF RHONE ALPES, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 2]

représentée par Me Marie GIRARD-MADOUX de la SCP GIRARD-MADOUX ET ASSOCIES, avocat au barreau de CHAMBERY substituée par Me Antoine GIRARD-MADOUX, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEE :

L’EHPAD [4], pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Thibault DOUBLET, avocat au barreau de QUIMPER substitué par Me Claire CHABREDIER, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président,

Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller,

M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,

Assistés lors des débats de Mme Chrystel ROHRER, Greffier, et de Mme Fatma DEVECI, greffier stagiaire en pré-affectation

DÉBATS :

A l’audience publique du 10 janvier 2023,

M. Pascal VERGUCHT, chargé du rapport, M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président et Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller ont entendu le représentant de la partie appelante en ses conclusions et plaidoirie, et le représentant de la partie intimée en son dépôt de conclusions.

Et l’affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l’arrêt a été rendu.

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 1er octobre 2015, un courrier de l’URSSAF Rhône-Alpes avisait la [4] d’un contrôle sur site les 3, 5, 9 et 12 novembre 2015 concernant l’application de la législation sociale, à compter du 1er janvier 2013, et demandait la mise à disposition de divers documents parmi lesquels les déclarations [5] ([5]).

Le 3 février 2016, une lettre d’observations de l’URSSAF Rhône-Alpes notifiait à la Fondation un rappel de cotisations et contributions sociales de 31.014 euros, outre 31 euros de majoration complémentaire, pour un contrôle terminé le 3 février 2016 et portant sur les années 2013 et 2014, en retenant 16 chefs de régularisation (CSG/CRDS sur part patronale aux régimes de prévoyance complémentaire, forfait social assiette hors prévoyance, préavis et plafond applicable, cotisations rupture forcée du contrat de travail avec limites d’exonération, CSG/CRDS rupture de contrat de travail, avantage en nature nourriture, CUI CAE limite d’exonération, avantage en nature logement, comité d’entreprise bons d’achats et cadeaux en nature, mutuelle et non-respect du caractère collectif, réduction Fillon, prévoyance complémentaire, dissimulation d’emplois salariés, frais professionnels véhicule personnel, rémunérations non déclarées, défaut de licence d’entrepreneur de spectacles). Il était mentionné un délai d’observations de trente jours et, passé ce délai, l’envoi d’un avis de mise en recouvrement correspondant.

Le même jour, une seconde lettre d’observations, portant sur l’application de la législation et de la réglementation relative au [5], et mentionnant une date de fin de contrôle et une période vérifiée identiques, concluait à un rappel de cotisation de 390 euros et avisait la Fondation du fait que la somme lui serait réclamée par mise en demeure sous pli séparé par le [5].

Le 25 août 2016, une mise en demeure de l’URSSAF Rhône-Alpes à la suite du contrôle de l’application des législations sociales sur les années 2013 et 2014 avec notification de chefs de redressement du 3 février 2016 pour un total de cotisations de 31.014 euros, outre 4.471 euros de majorations de retard et 31 euros de majoration complémentaire, soit un total de 35.516 euros, était envoyée à la Fondation.

Le 23 septembre 2016, la Fondation saisissait la commission de recours amiable contre cette mise en demeure.

Le 13 octobre 2016, un courrier de l’URSSAF Rhône-Alpes informait la Fondation de l’annulation de la mise en demeure après la saisine de la commission de recours amiable, en relevant qu’il était reproché une absence de réception de la lettre d’observations et qu’une nouvelle lettre d’observations relative au contrôle opéré lui sera prochainement adressée pour ouvrir une période de 30 jours afin de reformuler des remarques.

Le 14 octobre 2016, une lettre d’observations était adressée à la Fondation qui mentionnait : l’envoi de deux lettres d’observations le 3 février, l’une sur le contrôle du compte du régime général, l’autre sur le contrôle pour le compte [5] ; l’indication par la Fondation qu’elle n’avait reçu que la lettre d’observations relative au [5] ; la jonction au courrier de la lettre d’observations du compte régime général. La suite du courrier reprenait le contenu de la précédente lettre d’observations, avec la mention d’une date de fin de contrôle au 14 octobre 2016.

Le 3 novembre 2016, la Fondation demandait l’annulation de la mise en recouvrement à la commission de recours amiable au vu de sa précédente saisine et de la nouvelle lettre d’observations.

Le 18 novembre 2016, l’URSSAF Rhône-Alpes adressait à la Fondation un courrier l’informant que sa saisine de la commission de recours amiable, par lettre du 3 novembre, était prématurée en l’absence de mise en demeure et en application de l’article R. 142-1 du Code de la sécurité sociale, la saisine devant être renouvelée dans les termes de cet article.

Le 25 novembre 2016, la commission de recours amiable saisie le 23 septembre a rejeté la contestation contre la mise en demeure du 25 août 2016, devenue sans objet du fait de son annulation par courrier du 13 octobre 2016.

Le 9 décembre 2016, l’URSSAF Rhône-Alpes adressait à la Fondation une mise en demeure à la suite du contrôle de l’application des législations sociales pour les années 2013 et 2014, à la suite d’une notification de chefs de redressement du 14 octobre 2016, pour le montant de 35.516 euros (31.104 euros de cotisations, 4.471 euros de majorations de retard et 31 euros de majoration complémentaire).

Le 27 février 2018, la commission de recours amiable saisie le 3 novembre 2016 à la suite de la lettre d’observations du 14 octobre 2016, puis le 12 janvier 2017 à la suite de la mise en demeure du 14 décembre 2016, a rejeté la contestation contre cette mise en demeure.

Le pôle social du tribunal judiciaire d’Annecy saisi par l’EHPAD [4] d’un recours contre l’URSSAF Rhône-Alpes a décidé, par jugement du 27 mai 2021, de :

– prononcer la jonction de deux procédures 17/167 (contestation de la décision du 25 novembre 2016) et 18/474 (contestation de la décision du 27 février 2018),

– débouter l’EHPAD de sa demande d’annulation de la procédure de contrôle,

– constater que la demande d’annulation de la mise en demeure du 25 août 2016 est devenue sans objet,

– annuler la mise en demeure du 9 décembre 2016 notifiée le 14,

– débouter l’URSSAF de sa demande tendant à la condamnation au paiement de la somme de 35.516 euros réclamée par cette mise en demeure,

– débouter les demandes de l’EHPAD tendant à l’annulation des décisions de l’URSSAF des 14 décembre 2016 et 26 juin 2018,

– débouter l’URSSAF de sa demande sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

– condamner l’URSSAF à payer à l’EHPAD une somme de 1.200 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

– condamner l’URSSAF aux dépens.

Par déclaration du 3 juillet 2021, l’URSSAF Rhône-Alpes a relevé appel de cette décision.

Par conclusions déposées le 13 décembre 2022 et reprises oralement à l’audience devant la cour, l’URSSAF Rhône-Alpes demande :

– l’infirmation du jugement sur l’annulation de la mise en demeure, le débouté des demandes de condamnation au paiement des sommes de 35.516 et 1.200 euros, la condamnation de l’URSSAF aux dépens et au titre des frais irrépétibles,

– la confirmation pour le reste,

– le débouté des demandes de l’EHPAD,

– sa condamnation à lui payer 35.516 euros au titre de la mise en demeure,

– la condamnation de l’EHPAD à lui payer 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

– la condamnation de l’EHPAD aux dépens.

Par conclusions déposées le 16 janvier 2023 et reprises oralement à l’audience devant la cour, l’EHPAD [4] demande :

– la confirmation de l’annulation de la mise en demeure du 9 décembre 2016, du débouté de la demande de condamnation au paiement de 35.516 euros, et de la condamnation de l’URSSAF aux dépens et à lui verser 1.200 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

– l’infirmation du débouté de la demande d’annulation de la procédure de contrôle,

– l’annulation du contrôle en totalité et des mises en demeure des 25 août et 9 décembre 2016,

– le débouté des demandes de l’URSSAF,

– la condamnation de l’URSSAF aux dépens et à lui verser 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

En application de l’article 455 du Code de procédure civile, il est donc expressément référé aux dernières conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIVATION

L’article R. 243-59 du Code de la sécurité sociale, dans sa version en vigueur du 1er janvier 2014 au 11 juillet 2016, prévoyait que « Tout contrôle effectué en application de l’article L. 243-7 est précédé de l’envoi par l’organisme chargé du recouvrement des cotisations d’un avis adressé à l’employeur ou au travailleur indépendant par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception, sauf dans le cas où le contrôle est effectué pour rechercher des infractions aux interdictions mentionnées à l’article L. 8221-1 du code du travail. (…)

A l’issue du contrôle, les inspecteurs du recouvrement communiquent à l’employeur ou au travailleur indépendant un document daté et signé par eux mentionnant l’objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle. Ce document mentionne, s’il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle, assorties de l’indication de la nature, du mode de calcul et du montant des redressements et des éventuelles majorations et pénalités définies aux articles L. 243-7-2, L. 243-7-6 et L. 243-7-7 envisagés. (‘) Il indique également au cotisant qu’il dispose d’un délai de trente jours pour répondre par lettre recommandée avec accusé de réception, à ces observations et qu’il a, pour ce faire, la faculté de se faire assister d’un conseil de son choix.

En l’absence de réponse de l’employeur ou du travailleur indépendant dans le délai de trente jours, l’organisme de recouvrement peut engager la mise en recouvrement des cotisations, des majorations et pénalités faisant l’objet du redressement. (…)

L’inspecteur du recouvrement transmet à l’organisme chargé de la mise en recouvrement le procès-verbal de contrôle faisant état de ses observations, accompagné, s’il y a lieu, de la réponse de l’intéressé et de son propre courrier en réponse. »

Dans sa version en vigueur du 11 juillet 2016 au 24 novembre 2016, le même article prévoyait les mêmes dispositions en précisant notamment : « III.-A l’issue du contrôle, les agents chargés du contrôle communiquent au représentant légal de la personne morale contrôlée ou au travailleur indépendant contrôlé une lettre d’observations datée et signée par eux mentionnant l’objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle. Ce document mentionne, s’il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle. Ces dernières sont motivées par chef de redressement. A ce titre, elles comprennent les considérations de droit et de fait qui constituent leur fondement et, le cas échéant, l’indication du montant des assiettes correspondant, ainsi que pour les cotisations et contributions sociales l’indication du mode de calcul et du montant des redressements et des éventuelles majorations et pénalités définies aux articles L. 243-7-2, L. 243-7-6 et L. 243-7-7 qui sont envisagés. (…)

La lettre d’observations indique également à la personne contrôlée qu’elle dispose d’un délai de trente jours pour répondre à ces observations et qu’elle a, pour ce faire, la faculté de se faire assister d’un conseil de son choix. (…)

IV.-A l’issue du délai mentionné au troisième alinéa du III ou des échanges mentionnés au III, afin d’engager la mise en recouvrement des cotisations, des majorations et pénalités faisant l’objet du redressement, l’agent chargé du contrôle transmet à l’organisme effectuant le recouvrement le procès-verbal de contrôle faisant état de ses observations, accompagné, s’il y a lieu, de la réponse de l’intéressé et de son propre courrier en réponse. »

Selon l’article L. 133-9 du Code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 1er juillet 2015 au 1er janvier 2019, « Les groupements d’artistes et les personnes physiques ou morales, publiques ou privées, mentionnés à l’article L. 7122-22 du code du travail, lorsqu’ils exercent l’activité d’entrepreneur de spectacles vivants, procèdent auprès d’un organisme habilité par l’Etat au versement de l’ensemble des cotisations et contributions sociales, d’origine légale ou conventionnelle, prévues par la loi, ainsi que, le cas échéant et dans des conditions fixées par convention, d’autres cotisations et contributions sociales, et se rapportant uniquement à leur activité de spectacle. »

L’article L.133-9-1, dans sa version en vigueur du 1er mai 2008 au 1er janvier 2018, venait préciser que : « L’organisme habilité par l’Etat mentionné à l’article L. 133-9 recouvre les cotisations et contributions pour le compte des administrations et organismes devant conclure l’une des conventions mentionnées à l’alinéa suivant. »

L’article L. 133-9-3 en vigueur depuis le 30 septembre 2011 prévoit que « Sans préjudice des missions et pouvoirs des agents des administrations et des organismes parties aux conventions prévues à l’article L. 133-9-1 du présent code et de ceux des fonctionnaires et agents mentionnés à l’article L. 8271-1-2 du code du travail, les organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général de sécurité sociale sont habilités, dans les conditions définies à la section 4 du chapitre III du titre IV du livre II du présent code, à contrôler l’application par les employeurs des dispositions des articles L. 7122-22 à L. 7122-27 du code du travail (relatives au guichet unique pour le spectacle vivant) et des articles L. 133-9 à L. 133-9-2 (idem) pour le compte de l’organisme habilité par l’Etat. »

A titre de rappel de la chronologie, il ressort des pièces versées au débat et rappelées dans l’exposé du litige que l’URSSAF :

– a envoyé un avis de contrôle du 1er octobre 2015 sur la législation sociale comprenant la réglementation en matière de GUSO,

– a envoyé le 3 février 2016 une lettre d’observations sur le contrôle en matière de GUSO concluant à un rappel de cotisations et contributions sociales devant être recouvert par le [5] (en sachant qu’il n’est pas justifié de la mise en demeure qui devait être envoyée ensuite par le [5]),

– aurait envoyé le 3 février 2016 une autre lettre d’observations sur le contrôle pour le reste de la législation sociale concluant à un rappel de cotisations et contributions sociales plus conséquent qui a fait l’objet d’une mise en demeure du 25 août 2016, annulée par l’URSSAF le 13 octobre 2016 (ce qu’a validé la commission de recours amiable le 25 novembre 2016), et remplacée par une nouvelle lettre d’observations du 14 octobre 2016 suivie d’une nouvelle mise en demeure du 9 décembre 2016.

La [4] conteste le contrôle et le recouvrement dont elle a fait l’objet au titre de la législation sociale, hors du régime au titre du GUSO, en faisant valoir plusieurs arguments.

En premier lieu, elle prétend que l’article R. 243-59 du Code de la sécurité sociale est d’application stricte et ne prévoit pas la possibilité de réaliser deux lettres d’observations à l’occasion d’un seul contrôle, avec des dates de fin de contrôle différentes. Toutefois, ainsi que le rappelle l’URSSAF sur le fondement des articles cités ci-dessus, le recouvrement des cotisations relatives au guichet unique pour le spectacle vivant relève d’un organisme différent des URSSAF, mais celles-ci conservent un pourvoir de contrôle du respect de la réglementation qui concerne ce type de spectacle. Il était donc légitime pour l’URSSAF, à l’issue d’un contrôle portant sur l’ensemble des législations sociales, de procéder à deux lettres d’observations puisque deux organismes de recouvrement différents devaient intervenir ; aucune disposition de l’article R. 243-59 n’interdit cette distinction en fonction des organismes de recouvrement. Par ailleurs, s’agissant de la date de fin de contrôle différente entre les deux lettres, elle visait à assurer la garantie des droits de la Fondation dans le respect des dispositions de l’article R. 243-59, et en particulier l’exercice effectif de son droit d’observations au cours d’une période contradictoire suivant la réception de la lettre d’observations ayant annulé et remplacé la précédente.

En deuxième lieu, la Fondation prétend que l’article R. 243-59 ne prévoit pas la possibilité de la reprise d’opérations de contrôle après la transmission des procès-verbaux de contrôle à l’organisme de recouvrement, ayant conduit à l’envoi d’une mise en demeure, et encore moins après l’envoi de celle-ci. Toutefois, ici aussi, les dispositions de cet article n’interdisent pas la reprise des opérations de contrôle lorsque, faute de justifier de la réception de la lettre d’observations par la personne contrôlée, l’URSSAF reprend la procédure de notification de la lettre d’observations pour garantir à la Fondation l’exercice de ses droits, en conformité avec l’article dont elle se prévaut, et en actualisant la date de fin de contrôle pour faire partir un nouveau délai d’échanges et d’observations.

En troisième lieu, la Fondation estime qu’elle a bien reçu une lettre d’observations du 3 février 2016 et que la mise en demeure ne correspondait pas au rappel figurant dans cette lettre. Or, la lettre d’observations reçue se rapportait au [5], dont le recouvrement ne dépendait pas de l’URSSAF, ainsi que cela était expressément rappelé dans la lettre, et il n’est pas contesté que l’URSSAF a bien émis deux lettres d’observation le 3 février 2016, seule la réception de celle se rapportant à la législation sociale hors [5] étant contestée. La Fondation considère donc à tort que l’URSSAF était tenue par une seule lettre d’observations qui s’imposait donc à elle et n’aurait pas permis l’édition d’une nouvelle lettre ou d’une nouvelle mise en demeure.

En quatrième lieu, la Fondation conteste la possibilité pour l’URSSAF d’annuler la mise en demeure du 25 août 2016 après l’expiration du délai de recours contentieux contre celle-ci. La mise en demeure mentionnait un délai d’un mois pour saisir la commission de recours amiable, qui a été saisie le 23 septembre suivant, l’annulation intervenant le 13 octobre. Mais, dans la mesure où la Fondation avait fait état de l’absence de réception de la lettre d’observations ne se rapportant pas au [5], l’URSSAF était bien en droit de la notifier à nouveau, tout en actualisant les dates afin de, comme déjà mentionné, faire bénéficier à la Fondation des garanties de l’échange contradictoire prévu par l’article R. 243-59 du Code de la sécurité sociale. L’EHPAD contrôlé n’a donc pas été privé de ses droits, puisqu’il a pu saisir la commission de recours amiable sur la mise en demeure irrégulière, et bénéficier d’un temps d’échanges contradictoires avant la reprise de la procédure de recouvrement, aucun caractère définitif ne pouvant être accordé à la précédente mise en demeure, aucune disposition n’interdisant une nouvelle tentative de recouvrement sous réserve des délais de prescription.

En cinquième lieu, la Fondation se prévaut de l’article R. 244-1 du Code de la sécurité sociale qui exige que « la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées ainsi que la période à laquelle elles se rapportent », et reproche à la mise en demeure du 9 décembre 2016 de réclamer un montant ne correspondant pas à la lettre d’observations relative au [5], ni à l’addition des montants des deux lettres d’observations invoquées par l’URSSAF. Comme il a déjà été précisé, la mise en demeure de l’URSSAF ne pouvait pas concerner le recouvrement des cotisations au titre du guichet unique des spectacles vivant, comme cela était bien précisé dans la lettre d’observations reçue par la Fondation.

Par conséquent, le jugement, qui a retenu ce dernier argument de la Fondation, devra être infirmé en ce qu’il a prononcé l’annulation de la mise en demeure du 9 décembre 2016 et débouté l’URSSAF de sa demande de condamnation à payer la somme réclamée à ce titre. L’infirmation portera également sur les dépens et la condamnation de l’URSSAF à verser à la Fondation une indemnité au titre des frais irrépétibles.

Le jugement sera confirmé pour le reste (jonction des procédures, débouté de la demande d’annulation de la procédure de contrôle, constat que la demande d’annulation de la mise en demeure du 25 août 2016 est devenue sans objet, débouté des demandes de l’EHPAD tendant à l’annulation des décisions de l’URSSAF des 14 décembre 2016 et 26 juin 2018, débouté de l’URSSAF de sa demande sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile), la procédure de contrôle et de recouvrement étant régulière et aucune demande n’étant formulée en appel sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile en ce qui concerne spécialement la première instance.

L’intimée devra supporter les dépens.

L’équité et la situation des parties justifient que l’URSSAF ne conserve pas l’intégralité des frais exposés en appel pour faire valoir ses droits et la Fondation sera condamnée à lui payer une indemnité de 1.500 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, en dernier ressort après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement du pôle social du tribunal judiciaire d’Annecy du 27 mai 2021, sauf en ce qu’il a :

– annulé la mise en demeure du 9 décembre 2016 notifiée le 14 suivant,

– débouté l’URSSAF de sa demande tendant à la condamnation au paiement de la somme de 35.516 euros réclamée par cette mise en demeure,

– condamné l’URSSAF à payer à l’EHPAD une somme de 1.200 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

– condamné l’URSSAF aux dépens,

Et statuant à nouveau,

Déboute l’EHPAD [4] de sa demande d’annulation de la mise en demeure du 9 décembre 2016,

Condamne l’EHPAD [4] à payer à l’URSSAF Rhône-Alpes une somme de 35.516 euros au titre de la mise en demeure du 9 décembre 2016,

Déboute l’EHPAD [4] de sa demande sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

Condamne l’EHPAD [4] aux dépens de la première instance,

Y ajoutant,

Condamne l’EHPAD [4] aux dépens de la procédure d’appel,

Condamne l’EHPAD [4] à payer à l’URSSAF Rhône-Alpes la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. DELAVENAY, Président et par M. OEUVRAY, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Chat Icon