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à
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
3e chambre civile
ARRET DU 08 JUIN 2023
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 18/06560 – N° Portalis DBVK-V-B7C-N6O3
dont a été joint le N°RG 19/00081
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 20 novembre 2018
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN
N° RG 14/02778
APPELANTS :
Monsieur [R] [Y]
né le 12 Avril 1954 à [Localité 8]
de nationalité Française
[Adresse 7]
[Localité 8]
Représenté par Me Joël JUSTAFRE de la SCP SAGARD – CODERCH-HERRE ET ASSOCIES, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES
Appelant dans le 18/06560 (Fond)
Intimé dans le 19/00081 (Fond)
MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, en qualité d’assureur de la SARLU IMMOBAT
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social
RCS de LE MANS n°775 652 126
[Adresse 3]
[Localité 10]
Représentée par Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL & ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué sur l’audience par Me Philippe LIDA de la SCP LIDA-CARRIERE, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES
Appelante dans le 19/00081 (Fond)
Intimée dans le 18/06560 (Fond)
INTIMES :
SA AXA FRANCE IARD, en qualité d’assureur de [Y] [R]
[Adresse 6]
[Localité 11]
Représentée par Me Sophie ORTAL de la SCP CASCIO, CASCIO ORTAL, DOMMEE, MARC, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituée sur l’audience par Me DOMMEE de la SCP CASCIO, CASCIO ORTAL, DOMMEE, MARC, avocat au barreau de MONTPELLIER
Intimée dans le 19/00081 (Fond) et dans le 18/06560 (Fond)
Monsieur [B] [M]
né le 10 Juillet 1955 à [Localité 12] (ALGÉRIE)
de nationalité Française
[Adresse 13]
[Adresse 13]
[Localité 9]
Représenté par Me Fanny LAPORTE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituée sur l’audience par Me Jean CODOGNES de la SCP CODOGNES, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES
Intimé dans le 19/00081 (Fond) et dans le 18/06560 (Fond)
Ordonnance de clôture du 1er mars 2023
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 mars 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :
M. Gilles SAINATI, président de chambre
M. Thierry CARLIER, conseiller
Mme Emmanuelle WATTRAINT, conseillère
qui en ont délibéré.
En présence de Mme Stéphanie JEAN-PHILIPPE, avocate stagiaire (PPI)
Greffier lors des débats : Mme Camille MOLINA.
En présence de Mme Marine HOF, greffière stagiaire.
ARRET :
– contradictoire ;
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour fixée au 25 mai 2023 et prorogée au 08 juin 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Camille MOLINA, Greffière.
*
* *
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [B] [M] est propriétaire des parcelles cadastrées section AM N°[Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 4] et [Cadastre 5] sur la commune de [Localité 9] (Pyrénées-Orientales).
Souhaitant procéder à la démolition de trois bâtiments édifiés sur ces parcelles et la construction de quatre nouveaux bâtiments, à savoir une maison d’habitation, un atelier de création et d’expositions, une maison de gardiens, et une réserve pour ses ‘uvres d’art, M. [M] a confié à M. [R] [Y] une mission de maîtrise d”uvre complète suivant contrat du 1er juin 2010 assuré auprès de la compagnie Axa.
Le lot gros ‘uvre a été confié à l’EURL Immobat, assurée auprès de la compagnie MMA IARD Assurances Mutuelles, relatif à un marché de travaux du 23 octobre 2010 d’un montant hors taxes de 340 710, 14 euros, porté par la suite à 413 601,70 euros hors taxes.
L’EURL Immobat a été déclarée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce du 27 juillet 2016, Me [D] [H] ayant été désigné en qualité de mandataire liquidateur.
Le lot peinture de façade a été confié à M. [G] [U] et le lot carrelage à la SARL Oliveira Carrelage.
La SARL Oliveira Carrelage a été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce du 7 janvier 2015, Me [D] [H] ayant été désigné en qualité de mandataire judiciaire.
Les travaux de gros ‘uvre ont fait l’objet d’un procès-verbal de réception le 7 août 2011.
Postérieurement à la réception du lot gros ‘uvre, M. [M] a invoqué des fissures qui sont apparues sur chacun des quatre bâtiments au niveau des briques qui avaient été fabriquées par la SA Wienerberger ; ainsi que des désordres et malfaçons affectant le lot carrelage.
Le lot carrelage et les dalles des ateliers étant également atteints de désordres et malfaçons, M. [M] a obtenu par ordonnance de référé du 3 octobre 2012 la désignation de M. [I] en qualité d’expert, lequel a déposé son rapport le 2 mai 2015.
Par actes des 17 et 21 juillet 2014, M. [B] [M] a assigné l’EURL Immobat, M. [R] [Y], la société MMA IARD Assurances Mutuelles, la SA Axa France IARD, la SA Wienerberger, la SARL Oliveira Carrelage, et M. [G] [U].
Par acte du 31 août 2015, M. [M] a appelé en cause Me [H], en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SARL Oliveira Carrelage, et par acte du 12 janvier 2017, il a appelé en cause Me [H] en sa qualité de mandataire judiciaire dans le cadre de la liquidation judiciaire de l’EURL Immobat.
Les instances ont été jointes les 26 janvier 2016 et 23 février 2017.
Par jugement réputé contradictoire du 20 novembre 2018, le tribunal de grande instance de Perpignan a :
– homologué le rapport d’expertise judiciaire de M. [I],
– débouté la MMA IARD Assurances Mutuelles de sa demande subsidiaire tendant à ordonner avant dire droit, la production par M. [M] et par M. [Y] du procès-verbal de réception provision en date du 15 juin 2011,
– dit que les travaux de gros ‘uvre confiés à l’EURL Immobat, assurée au titre de la responsabilité décennale par la compagnie d’assurance MMA IARD Assurances Mutuelles, ont été réceptionnés le 7 août 2011,
– fixé la réception tacite des travaux de carrelage confiés à la SARL Oliveira Carrelage, au 3 mars 2012,
– dit qu’en l’état des désordres constatés, la solidité de l’ouvrage est compromise et il est impropre à sa destination,
– dit que les désordres n°1, 2, 3, 4 et 5 sont de nature décennale,
– dit que la garantie décennale de plein droit est engagée à l’encontre de l’EURL Immobat de M. [Y] et de la SARL Oliveira Carrelage,
– dit que le désordre n°1 incombe à 80% à l’EURL Immobat et à 20% à M. [Y],
– dit que le désordre n°2 incombe à 100% à la SARL Oliveira Carrelage,
– dit que les désordres n°3 et n°4 incombent à 80% à la SARL Oliveira Carrelage et à 20% à M. [Y],
– dit que le désordre n°5 incombe à 100% à l’EURL Immobat,
– dit que la société Wienerberger est hors de cause,
– dit que M. [U] [G] est hors de cause,
– dit que la garantie décennale sera due par leurs assureurs respectifs, la SA Axa France Iard pour M. [R] [Y], et la MMA IARD Assurances Mutuelles pour l’EURL Immobat,
– dit qu’aucune condamnation pécuniaire ne saurait intervenir contre l’EURL Immobat représentée par Me [H] qui est en liquidation judiciaire, et la SARL Oliveira Carrelage représentée par Me [H] qui est en redressement judiciaire, les créances à leur encontre ne pouvant qu’être fixée dans les mêmes quantum que ceux retenus à la charge de leurs assureurs respectifs, et qu’à défaut de déclaration de créances, elles sont éteintes par application de l’article 53 de la loi du 25 janvier 1985,
– condamné l’assureur décennal de l’EURL Immobat, la MMA IARD Assurances Mutuelles, à payer au titre des désordres n°1, 80% de 36 930, 30 euros TTC, et au titre du désordre n°5, 100% de 10 972, 50 euros,
– condamné M. [R] [Y] à payer au titre des désordres n°1, 3 et 4, et pour chacun des trois, 20% de 36 930, 30 euros TTC, 20% de 15 821, 85 euros (pas de TVA), et 20% de 10 972, 50 euros,
– dit qu’à l’égard de la SARL Oliveira Carrelage, qui auraient été tenue de payer au titre des désordres n°2, 100% de 1 284 euros TTC, et au titre des désordres n°3 et n°4, 80% de 15 921, 85 euros (pas de TVA) et 80% de 800 euros TTC, la créance fixée devait faire l’objet d’une déclaration de créance,
– condamné in solidum l’assureur décennal de l’EURL Immobat, la MMA IARD Assurances Mutuelles, et M. [R] [Y], à payer 15 000 euros au titre du préjudice immatériel, trouble de jouissance et perte locative,
– dit que l’assureur de M. [Y], la SA Axa France IARD, ne le garantit pas au titre des préjudices immatériels,
– dit que le partage de responsabilité n’est pas opposable à M. [B] [M],
– condamné in solidum l’assureur décennal de l’EURL Immobat, la MMA IARD Assurances Mutuelles, et M. [R] [Y] à payer au titre de l’intégralité des condamnations au titre des désordres, avant de pouvoir prétendre à exercer leur recours en fonction des pourcentages de responsabilités,
– condamné in solidum l’assureur décennal de l’EURL Immobat, la MMA IARD Assurances Mutuelles, et M. [R] [Y] à payer les entiers dépens, en ce compris les frais d’expertise judiciaire et de référé, avec distraction au profit du conseil de M. [M],
– condamné in solidum l’assureur décennal de l’EURL Immobat, la MMA IARD Assurances Mutuelles, et M. [R] [Y] à payer à M. [B] [M] la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du CPC,
– condamné M. [B] [M] à payer à la société Wienerberger la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– ordonné l’exécution provisoire,
– rejeté toutes autres demandes des parties plus amples et/ou contraire.
Le 28 décembre 2018, M. [R] [Y] a interjeté appel de ce jugement à l’encontre de M. [M], de la société MMA IARD Assurances Mutuelles et de la SA Axa France IARD.
Le 7 janvier 2019, la Société MMA IARD Assurances Mutuelles a interjeté appel de ce même jugement à l’encontre de la SA Axa France IARD, de M. [M] et de M. [Y].
Suivant une ordonnance rendue le 20 février 2019, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction de ces deux procédures.
Le 22 mars 2019, M. [M] a formulé une requête en radiation en vertu de l’article 526 du code de procédure civile.
Suivant un courrier officiel en date du 23 juillet 2019, M. [M] a demandé de retirer sa requête aux fins de radiation, demande à laquelle M. [Y] ne s’est pas opposé (courrier du 7 septembre 2019).
Vu les dernières conclusions de M. [Y] remises au greffe le 17 mai 2019 ; au terme desquelles il sollicite la condamnation de la société MMA IARD Assurances Mutuelles à le relever et le garantir de toute condamnation prononcée à son encontre au bénéfice de M. [M]. Il demande également de réformer le jugement en ce qu’il a :
– omis de statuer sur la condamnation in solidum de la société Axa France IARD au titre de la réparation des désordres décennaux n°1, 3, et 4 au titre des dépens et des frais irrépétibles,
– fixé le préjudice immatériel, trouble de jouissance et perte locative à la somme de 15 000 euros,
– pas statué sur la faute précontractuelle de la Axa France IARD et n’a pas retenu sa responsabilité pour défaut de conseil et d’information.
En conséquence, il demande de ramener le préjudice immatériel, trouble de jouissance et perte locative de M. [M] à la somme de 2 000 euros, de condamner la société Axa France IARD à payer au concluant une somme équivalente à celle allouée à M. [M] au titre du préjudice immatériel pour défaut de conseil et d’information, de condamner la société Axa France IARD à payer les frais de réparation des désordres décennaux n°3 et 4 et de condamner in solidum la société Axa France IARD avec la société MMA IARD Assurances Mutuelles au titre des frais de réparation du désordre décennal n°1, au titre des dépens, comprenant les frais d’expertise judiciaire, et des frais irrépétibles de première instance.
Enfin, il sollicite la condamnation in solidum de toute partie succombante au paiement d’une somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers et dépens dont distraction au profit de la SCP Sagard ‘ Coderch Herre ‘ Justafre ‘ Sagard ‘ Coderch en application de l’article 699 du code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions de la MMA IARD Assurances Mutuelles remises au greffe le 9 mai 2019 ; au terme desquelles elle sollicite la réformation du jugement en ce qu’il a :
– jugé que la réception des travaux de l’EURL Immobat était fixée au 7 août 2011 sans rechercher l’existence des désordres apparents à cette date affectant les façades,
– jugé de nature décennale le désordre numéro 1,
– jugé que le désordre n°5 de nature décennale alors qu’aucune destination particulière et contractuelle n’était donnée à la date bétonné de l’atelier et du hall et qu’une simple micro fissuration l’affecte sans dangerosité à dire d’expert.
En conséquence, elle demande de débouter la demanderesse de l’ensemble de ses réclamations formées à l’encontre de la MMA.
Subsidiairement, elle demande, avant dire droit, d’ordonner la production par M. [M] et par M. [Y] du PV en date du 15 juin 2011 et à défaut en tirer toute conséquence.
Plus subsidiairement, elle demande d’opérer un partage de responsabilité dans la proportion retenue par l’expert à hauteur de 80%, 20% respectivement entre l’entreprise Immobat et M. [Y] ainsi que leurs assureurs respectifs :
– 80% à la charge de Immobat assurée auprès de MMA soit 29 544, 24 euros,
– 20% à la charge de M. [Y] assuré auprès de Axa soit 7 386,06 euros.
Par ailleurs, elle demande la réformation du jugement qui a arbitrairement fixé à la somme de 15 000 euros le préjudice immatériel évalué à 2 000 euros par l’expert judiciaire, le rejet de la réformation réclamée par M.[Y] qui sollicite condamnation solidaire de Axa et de MMA pour les désordres 3 et 4 qui ne concernent en aucune façon la EURL Immobat assurée par MMA pour sa garantie décennale.
En outre, elle demande la confirmation du jugement en ce qu’il a rejeté toute autre demande de M. [M].
Enfin, elle sollicite la condamnation de toute partie succombante au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens avec application de l’article 699 du code de procédure civile au bénéfice de l’avocat soussigné.
Vu les dernières conclusions de la SA Axa France IARD remises au greffe le 7 mai 2019 ; au terme desquelles elle sollicite l’infirmation du jugement sur l’application de la responsabilité et garantie décennale en l’absence de réception des travaux et en conséquence sa mise hors de cause.
Subsidiairement, elle demande la confirmation du jugement en toutes ses dispositions.
Enfin, elle sollicite la condamnation de M. [Y] et de la compagnie MMA au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Vu les dernières conclusions de M. [M] remises au greffe le 2 mai 2019 ; au terme desquelles il sollicite la réformation du jugement en ce qu’il a condamné M. [Y] à réparer les dommages immatériels subis par M. [M] pour un montant de 15 000 euros.
Il demande la condamnation de M. [Y] et de la compagnie d’assurances Axa France IARD, in solidum au paiement des sommes de 50 000 euros au titre des préjudices immatériels et de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de l’avocat soussigné au titre de l’article 699 du code de procédure civile.
En ce qui concerne l’appel de MMA IARD Assurances Mutuelles, il demande la confirmation du jugement, la condamnation de MMA au paiement de la somme de 50 000 euros in solidum avec M. [Y] et la société Axa au titre des préjudices immatériels et de rejeter sa demande de production du document intitulé « PV en date du 15 juin 2011 » en constatant que, s’il existe, il est forcément en sa possession en sa qualité d’assureur de l’entreprise Immobat.
Enfin, il sollicite la condamnation de la compagnie MMA IARD Assurances Mutuelles au paiement de la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de l’avocat soussigné au titre de l’article 699 du code de procédure civile.
La clôture de la procédure a été prononcée le 1er mars 2023.
MOTIFS
Sur les désordres
L’expert examine les désordres et en donne la liste de 1 à 5 :
Désordre N° 1 : il s’agit de la fissuration des parements des murs de façades. Ces fissures concernent le bâtiment atelier- expo et ses murs de façades et intérieurs, le bâtiment principal d’habitation, le bâtiment logement du gardien. Pour les bâtiments atelier expo et logement du gardien l’expert précise qu’elles sont à l’origine d’infiltrations qui compromettent l’utilisation des locaux portant atteinte à la destination de l’ouvrage et susceptible de rendre les lieux insalubres.
Ce désordre selon ces constatations est imputable à l’EURL Immobat qui a exécuté l’enduit en ne respectant les règles de réalisation.
Ce désordre est imputé donc à 80 % à l’EURL Immobat et 20 % au maître d’oeuvre M. [R] [Y].
L’expert met hors de cause le peintre [U] [G] pour des défauts esthétiques qui ont été réparés suite au rapport [Z] du 15 décembre 2011 et constaté par M. [Z] par la suite le 3 février 2012 ( page 34 du rapport).
Désordre N°2 : il s’agit du décollement de revêtements muraux scellées (intérieurs extérieurs et intérieurs) qui rendent impropre l’ouvrage à sa destination car menaçant la sécurité des ses occupants (risque de chute) dont la cause est l’usage d’une colle inadatée pour le revêtement intérieur et une mise en oeuvre incorrecte pour le revêtement intérieur, l’ensemble de ces désordres engagent la seule responsabilité de la SARL Oliveira Carrelage.
Désordre N°3 : défaut de mise en oeuvre des lames de platelage constituant le deck de la piscine, qui est de nature à constituer un vice grave en ce qu’il est susceptible de blesser les pieds nus des baigneurs dont la cause est une fixation insuffisante des lames et est donc de nature à rendre l’ouvrage impropre à destination. Ce désordre est imputé donc à 80 % à l’EURL Immobat et à 20 % au maître d’oeuvre M. [R] [Y] .
Désordre N°4: Dysfonctionnement des luminaires de type Led encastrés dans les lampes de platelage, dommage consécutif au désordre N°3 et engage les mêmes responsabilités.
Désordre N°5 : fissuration du dallage de sol du bâtiment ateliers expo. Il s’agit d’une fissuration quasi généralisée du sol des locaux qui s’accompagnent d’épaufrures qui aggravent la configuration des fissures.
L’expert insiste sur le caractère décennal du désordre qui rend l’ouvrage impropre à sa destination en ce qu’il rend difficile les opérations de manutention d’oeuvres lourdes dans les ateliers avec des chariots à petites roulettes, de plus il n’autorise pas un nettoyage aisé du sol en raison des aspérités que présentent les épaufrures.
Ce désordre engage la seule responsabilité de la société Immobat.
Ces constatations techniques de l’expert seront donc retenues par la cour, en effet l’ensemble de ces désordres du numéro 1 au numéro 5 conduisent à compromettre la solidité de l’immeuble par infiltration, portent atteinte à la sécurité des personnes (décrochage d’éléments de décoration et risques de blessures aux pieds), et enfin affectent la destination de l’immeuble qui devait servir d’exposition d’oeuvres lourdes et d’atelier de travail, autant d’activités fortement perturbées par les fissurations du dallage : les diverses manoeuvres utiles à la création des oeuvres et leur présentation sont empêchées par ce désordre généralisé qui impacte l’esthétique et la propreté de cet atelier-exposition.
Ces désordres numérotés de 1 à 5 par l’expert sont donc de nature décennale.
Sur la réception des travaux
La compagnie AXA estime que le procès-verbal de réception des travaux en date du 7 août 2011 (pièce 4) porte uniquement sur le lot gros-‘uvre, alors que le marché signé entre le maître d’ouvrage et M. [M] visait spécifiquement à l’article 7 une réception avec « les entreprises » et donc non pas par lot (pièce 5) et à la date du 7 août 2011, les travaux n’étaient pas terminés, et les fissures litigieuses étaient déjà observées par l’expert technique mandaté par le maître d’ouvrage le 14 décembre 2011 (pièce 6).
La compagnie MMA IARD conclue, quant à elle, que l’ existence et la gravité des fissures étaient parfaitement connues au jour de la réception, ces ouvrages ont été réceptionnés en l’état à seule fin, quelques semaines après la réception alléguée, de placer ce sinistre sous le régime de la garantie décennale et ce en pleine connaissance de cause puisque c’est en présence d’un architecte avec mission complète que se déroulèrent les opérations de réception et OPR. A cette fin, de façon subsidiaire et avant dire droit, la MMA IARD sollicite la production par M. [M] et par M. [Y] du procès-verbal en date du 15 juin 2011 et à défaut en tirer toute conséquence.
En réalité, la compagnie AXA opère une confusion entre les fissures et craquelures imputées au travail du peintre M. [G] et constatées par une expertise privée de M. [Z] en fin d’année 2011 et début 2013, désordres esthétiques qui ont été résolus et devaient être pris en charge par M. [G] (voir rapport du 3 février 2012 de M. [Z]), et les fissurations des parements des murs des façades constatées par l’expert judiciaire.
L’expert conformément à sa mission a recherché s’il y avait eu réception et s’il y avait eu des désordres apparents ayant fait l’objet de réserves ou si celles-ci avaient été levées.
Au terme de cette expertise dont le caractère contradictoire n’est pas contesté, l’expert n’a relevé aucun caractère apparent des désordres lors de la réception du 7 août 2011, ou lors de la date de l’achèvement des travaux ; il n’a pas observé qu’à la date de la réception du 7 août 2011, les travaux de gros oeuvre étaient inachevés.
Ce procès-verbal précise que les lots de peinture, électricité, plâtrerie, revêtement de sol, menuiserie et abords ne sont pas concernés mais expose aussi qu’une réception provisoire des bâtiments a eu lieu le 15 juin et ” suite à cette dernière et après voir procédé à la levée des réserves sus visées, nous constatons contradictoirement et visuellement que les travaux ont été exécutés suivant descriptif et devis approuvés. Nous décidons conjointement que la réception définitive est accordée sans réserve.”
Il s’infère de la lecture de ce procès-verbal qu’aucun désordre apparent n’a été constaté sauf à considérer que ce procès-verbal constitue une fausse déclaration intentionnelle de la part du maître d’oeuvre qui n’est corroboré par aucun autre élément. La production d’un éventuel procès-verbal de réception provisoire ne repose que sur une interprétation, de la MMA : le procès-verbal de réception du 7 août 2011 ne faisant pas allusion à un procès-verbal.
Confirmant le jugement de première instance, la MMA sera déboutée de sa production d’un procès-verbal provisoire, les travaux de gros oeuvre confiés à l’EURL Immobat, assurée au titre de la responsabilité décennale par la compagnie d’assurance MMA, ont été réceptionnés le 7 août 2011 et les travaux de carrelage confiés à la SARL Oliveira Carrelage, ont été réceptionnés tacitement le 3 mars 2012.
Sur la partage de responsabilité
Il sera retenu le partage de responsabilités proposé par l’expert et développé supra et retenu par le tribunal, dont il convient de noter que pour le désordre N°5 l’EURL IMMOBAT a engagé sa responsabilité à 100 %.
Sur le préjudice immatériel
L’expert a retenu une somme forfaitaire de 2 000 euros ayant constaté qu’il n’y a aucun préjudice dans l’activité artistique du maître de l’ouvrage.
Le tribunal a retenu une somme de 15 000 euros en raison du contexte spécifique constitué par l’activité de M. [M] :
– celui-ci sera temporairement privé de l’usage de certains locaux pendant le temps des travaux et gêné dans son lieu d’exercice professionnel,
– absence de jouissance paisible des lieux
– Par contre, pas de perte locative invoqué démontrée.
M. [M] sollicite la somme de 50 000 euros et expose que son immeuble à un caractère d’exception et peut être loué en juillet et août entre 4 500 euros et 4 800 euros la semaine, toutefois cette évaluation n’est qu’une hypothèse, puisqu’aucun élément n’est produit aux débats sur l’effectivité de cette location.
Il sera donc retenu la somme retenue par le tribunal en observant que les nombreuses imperfections et désordres ont impactés et dévalorisés le caractère d’exception de ce lieu d’exposition et de création, en ce sens le trouble apporté à la jouissance paisible des lieux est caractérisé et justifie la somme évaluée à 15 000 euros.
Sur la garantie de la compagnie AXA France IARD
Le jugement a retenu l’absence de toute garantie de la compagnie
AXA au titre des préjudices immatériels en l’état d’un contrat d’assurance qui ne couvre que la responsabilité décennale de M. [Y].
Il résulte de l’examen des documents versés au débat que M. [Y] s’est rapproché de la compagnie AXA afin de pouvoir obtenir la garantie obligatoire qu’il n’arrivait pas à obtenir par ailleurs, enclenchant ainsi l’obtention de la garantie d’assurance obligatoire prévue en matière de construction par l’article L 243-4 du code des assurances.
Le cabinet Ramonatoxo, agent ” toutes assurances “, courtier, précisait par courrier 21 février 2008 ne pas pouvoir assurer M. [Y] en RC et décennale.
Par la suite il semble que le contrat à effet du 21 juillet 2008 ait été régularisé mais M. [Y] ne verse pas l’attestation de contrat référencé 4082211204, mais les conditions particulières et générales du contrat d’assurance souscrit par M. [Y] en date du 4 novembre 2008 ne visent en page 3 que la garantie responsabilité décennale à l’exclusion de toute autre et notamment de sa responsabilité avant ou après réception pour dommages immatériels consécutifs (article 9 des conditions particulières) ou responsabilité civile pour préjudices causés à autrui (article 11 des conditions particulières), ce que savait parfaitement M. [Y].
Ces conditions particulières sont parfaitement claires, et M. [Y] savait parfaitement que seule la garantie obligatoire était souscrite.
Dès lors la Compagnie AXA n’a manqué à aucune de ses obligations.
Concernant la responsabilité et faute de l’agent général AXA M. [V] , verse une lettre d’accompagnement du 18 mai 2010, de la société AXA, sous l’égide de M. [V]qui précise « Vous trouverez ci-joint votre attestation pour le contrat référencé ci-dessus, souscrit auprès de la société AXA. Je vous souhaite que ce contrat vous donne pleine satisfaction. Il fait partie d’une gamme d’assurances conçue pour vous, afin de vous offrir une protection efficace et complète au meilleur tarif » (Pièce n° 6) mais M. [Y] ne verse pas aux débats l’attestation d’assurance jointe.
De plus, compte tenu des difficultés qu’il avait rencontré pour souscrire un contrat d’assurance et la connaissance des conditions particulières, aucun défaut de conseil et d’information ne peut être retenu à l’encontre de la compagnie d’assurance ou de son agent d’assurance au profit de M. [Y].
En conséquence la compagnie AXA sera mis hors de cause pour toute garantie des dommages immatériels.
Sur les dépens et l’article 700 code de procédure civile
La compagnie MMA IARD Assurances Mutuelles, succombant en cause d’appel seront condamnés à payer à M. [M] la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 code de procédure civile.
M. [Y], succombant, à l’encontre de la compagnie AXA France IARD sera condamné à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 code de procédure civile.
La compagnie MMA IARD Assurances Mutuelles (assureur de la SARLU Immobat) , M. [Y] et sa compagnie d’assurances AXA France IARD seront condamnés in solidum aux entiers dépens incluant les frais d’expertise selon une répartition en fonction du partage de responsabilités : 20% à charge de M. [Y] et de son assureur et 80 % de la MMA IARD Assurances Mutuelles (assureur de la SARLU Immobat).
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Confirme dans toutes ses dispositions le jugement du 20 novembre 2018 du tribunal de grande instance de Perpignan ;
Y ajoutant,
Condamne la compagnie MMA IARD Assurances Mutuelles, succombant en cause d’appel, à payer à M. [B] [M] la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 code de procédure civile ;
Condamne M. [R] [Y], succombant, à payer la somme de 1 500 euros à la compagnie AXA France IARD au titre de l’article 700 code de procédure civile ;
Condamne la compagnie MMA IARD Assurances Mutuelles (assureur de la SARLU Immobat), M. [R] [Y] et sa compagnie d’assurances AXA France IARD in solidum aux entiers dépens incluant les frais d’expertise selon une répartition en fonction du partage de responsabilité de 20% à la charge de M. [R] [Y] et de son assureur, et de 80 % à la charge de la MMA IARD Assurances Mutuelles (assureur de la SARLU Immobat).
La greffière, Le président,