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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-5
ARRÊT AU FOND
DU 06 AVRIL 2023
N°2023/
MS
Rôle N° RG 21/15872
N° Portalis DBVB-V-B7F-BIL7F
[X] [Z]
C/
ORCHESTRE REGIONAL [Localité 3] [Localité 6]
Copie exécutoire délivrée
le : 06/04/2023
à :
– Me Yohanna WEIZMANN, avocats au barreau de PARIS
– Me Jean-Michel RENUCCI de la SELARL ACTANCE MEDITERRANEE, avocat au barreau de NICE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de CANNES en date du 17 Juin 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 19/00024.
APPELANTE
Madame [X] [Z], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Francine HAVET, avocat au barreau de PARIS et par Me Yohanna WEIZMANN, avocats au barreau de PARIS substituée par Me Thibault GEFFROY, avocat au barreau de PARIS,
INTIMEE
ORCHESTRE REGIONAL [Localité 3] [Localité 6], sis [Adresse 2]
représentée par Me Jean-Michel RENUCCI de la SELARL ACTANCE MEDITERRANEE, avocat au barreau de NICE substitué par Me Lise KLINGUER, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 07 Février 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre, et Madame Gaëlle MARTIN, Conseiller, chargés du rapport.
Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre
Madame Gaëlle MARTIN, Conseiller
Madame Catherine MAILHES, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Pascale ROCK.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Avril 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Avril 2023.
Signé par Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre et Mme Karen VANNUCCI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*-*-*-*-*
FAITS ET PROCÉDURE
Mme [X] [Z] a été engagée par l’Orchestre Régional [Localité 3] [Localité 6] (ci-après l’association)en qualité de chef d’attaque des seconds violons, à compter du 16 septembre 2009, par contrat à durée indéterminée pour 105 heures mensuelles.
Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des entreprises artistiques et culturelles.
L’association employait habituellement au moins onze salariés au moment du licenciement.
A compter du 9 avril 2016, la salariée s’est trouvée placée en arrêt de travail pour maladie non professionnelle de manière continue.
A partir du 10 mars 2017, son arrêt de travail s’est poursuivi au motif d’une maladie professionnelle.
Le 24 mars 2017, Mme [Z] a établi une déclaration de maladie professionnelle au titre d’une ‘disjonction scapho-lunaire avec arthrose du poignet droit “.
Le 12 juillet 2017, l’assurance maladie des Alpes-Martimes a notifié un refus de prise en charge au titre d’une maladie professionnelle.
Au terme d’une visite de reprise, le 24 janvier 2018, puis d’un second examen médical le 31 janvier 2018, la salariée a été déclarée définitivement inapte à son poste, l’avis précisant que ‘l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi’.
Après l’avoir convoquée à un entretien préalable, et consulté les délégués du personnel, l’association Orchestre Régional [Localité 3] [Localité 6], par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 3 mars 2018, a licencié Mme [Z] pour inaptitude avec impossibilité de reclassement.
Par courrier du 23 mars 2018, Mme [Z] a contesté son solde de tout compte.
Le 16 janvier 2019, Mme [Z] a saisi le conseil de prud’hommes de Cannes aux fins d’obtenir des sommes au titre du harcèlement moral exercé à son égard par deux autres salariés et au titre de la réparation d’un préjudice matériel, ainsi que diverses sommes en exécution du contrat de travail.
In limine litis, l’association a soulevé l’incompétence du conseil de prud’hommes au profit du tribunal judiciaire de Grasse pour la demande relative au préjudice matériel.
Par jugement rendu le 17 juin 2021, le conseil de prud’hommes de Cannes, après s’être déclaré incompétent au profit du tribunal judiciaire sur la demande relative au préjudice matériel, a débouté Mme [Z] de l’intégralité de ses demandes, a débouté l’association de ses demandes reconventionnelles et a condamné Mme [Z] aux dépens.
Mme [Z] a interjeté appel de cette décision dans des délais qui ne sont pas critiqués.
Par voie de conclusions, elle a réitéré ses demandes formées en première instance et y ajoutant, a sollicité la requalification de son licenciement en licenciement nul outre la condamnation à diverses à sommes à ce titre, ainsi que des dommages et intérêts au titre de la rupture vexatoire de son contrat de travail et au titre du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.
Par voie de conclusions d’incident, l’orchestre a soulevé l’irrecevabilité des demandes nouvelles en cause d’appel.
Par ordonnance d’incident du 31 août 2022, le conseiller de la mise en état de la cour d’appel d’Aix-en-provence a prononcé l’irrecevabilité des demandes de Mme [Z] portant sur la nullité du licenciement et ses demandes financières subséquentes, sur la rupture vexatoire de son contrat de travail et a déclaré recevable sa demande au titre du manquement à l’obligation de sécurité.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 26 janvier 2023.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par conclusions notifiées par voie électronique le 23 janvier 2023, Mme [Z], appelante, demande à la cour d’infirmer le jugement, sauf en ce qu’il a reconnu la juridiction prud’homale compétente pour statuer du litige, de débouter l’association Orchestre Régional [Localité 3] [Localité 6] de ses demandes et de condamner l’intimé au paiement d’une somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Statuant à nouveau, Mme [Z] demande à la cour de :
– juger qu’elle a été victime de harcèlement moral,
– condamner l’intimé au paiement de :
– 80 000 euros au titre de dommages et intérêts en réparation du harcèlement moral subi,
– 30 000 euros au titre de dommages et intérêts en réparation des manquements de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat,
– 2 250 euros nets à titre de rappel de prime de fin d’année,
– dire que les sommes porteront intérêt au taux légal à compter de la saisine pour les créances salariales et à compter de l’arrêt à intervenir pour les créances indemnitaires articles 1231-6 et 7 (ex-1153 et 1153-1) du code civil et ordonner la capitalisation des intérêts (articles 1343-1 et 2 du Code civil).
L’appelante fait valoir que :
* Sur le harcèlement moral et le manquement à l’obligation de sécurité :
– elle a été victime d’un harcèlement moral successivement par deux de ses subordonnés, M. [NK] qui a occupé les fonctions de violon co-soliste, puis M. [S] qui l’a remplacé au même poste ;
-elle verse des éléments suffisamment précis qui constituent un faisceau d’indices caractérisant la réalité du harcèlement ;
– malgré ses plaintes répétées, sa hiérarchie n’a pris aucune mesure pour faire cesser cette situation, alors qu’elle avait connaissance des agissements pratiqués ;
– il est démontré par les multiples pièces médicales versées aux débats que ces faits ont entraîné une dégradation de son état de santé par la survenance d’un état dépressif, qui a conduit à son inaptitude définitive avec dispense de reclassement dans un emploi. L’inaptitude est due à une aggravation de de son affection au poignet causée directement par son état psychologique fragilisé ;
– au demeurant, si l’on devait considérer que les problèmes médicaux liés à son poignet ont constitué la seule cause de l’inaptitude, il n’en reste pas moins que le harcèlement a produit des conséquence sur son état de santé ;
– il en résulte qu’elle est bien-fondée à solliciter des dommages et intérêts au titre du harcèlement moral et au titre du manquement de son employeur à son obligation de sécurité ;
– son préjudice est justifié eu égard à son âge et à ses difficultés pour retrouver un emploi, ainsi qu’à l’impact de sa situation professionnelle actuelle sur ses futurs droits à retraite, dans la mesure où elle n’exerce plus dans le secteur de la musique depuis son licenciement et ne dispose pas d’autre qualification.
* Sur le rappel de prime de fin d’année :
– l’employeur ne rapporte pas la preuve du versement de la prime de fin d’année pour les années 2015 à 2018, alors qu’en application des dispositions de son contrat de travail, elle n’est soumise à aucune condition de présence effective, de sorte que ses arrêts de travail pour maladie ne justifient pas l’absence de paiement ;
– eu égard à la prescription triennale et à la saisine du conseil de prud’hommes le 16 janvier 2019, elle est bien-fondée à réclamer un rappel de salaire pour les années 2016, 2017 et 2018.
* Sur la demande reconventionnelle de l’employeur au titre d’une procédure abusive :
– l’intimé est mal-fondé à solliciter des dommages et intérêts au titre d’une procédure abusive alors qu’elle a usé de son droit d’ester en justice sans que l’employeur démontre un abus dans cet exercice.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 25 janvier 2023 , l’association Orchestre Régional [Localité 3] [Localité 6], intimée et appelante à titre incident, demande à la cour de confirmer le jugement, sauf en ce qu’il a débouté l’association de ses demandes reconventionnelles, de débouter l’appelante de ses demandes et de condamner Mme [Z] au paiement d’une somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Statutant à nouveau, l’intimée demande à la cour de condamner reconventionnellement Mme [Z] au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure manifestement abusive.
L’intimée réplique que :
* Sur l’absence de harcèlement moral et de manquement à l’obligation de sécurité :
– Mme [Z] ne présente pas de faits laissant supposer un harcèlement moral. Elle précise la nature des agissements dont elle aurait été victime, opportunément et pour la première fois aux termes de ses dernières conclusions du 23 janvier 2023, sans indiquer les dates des faits. Les pièces qu’elle verse aux débats ne corroborent pas les faits de harcèlement moral allégués. Il en résulte que la matérialité des faits n’est pas établie;
– de son côté, l’employeur démontre qu’elle n’a été victime d’aucune mesure discriminatoire pendant l’exécution de la relation de travail ;
– en outre, d’une part il est peu crédible qu’elle ait été harcelée successivement par deux salariés placés sous ses ordres et d’autre part ses explications présentent des incohérences. Notamment, elle ne peut revendiquer avoir subi un harcèlement moral de la part de M. [NK] sur l’ensemble de la période alléguée, étant donné qu’il a été placé en arrêt de travail pour maladie à de nombreuses reprises à compter de 2011, puis de manière continue du 15 juillet 2014 jusqu’à son licenciement pour inaptitude le 22 décembre 2016. M. [S] qui a exercé plusieurs contrats à durée déterminée entre 2013 et 2015, a par la suite été renouvelé sur proposition de l’appelante elle-même. En outre, Mme [Z] a peu travaillé à proximité physique de M. [S], ce dernier ayant occupé plusieurs postes au sein de l’orchestre, de sorte que les agissements déplacés pendant les répétitions qu’elle lui reproche n’étaient pas matériellement réalisables. Mme [Z] omet également de préciser qu’elle a entretenu une relation amoureuse avec ce salarié ;
– contrairement à ce qu’elle prétend, elle n’a jamais porté à la connaissance de son employeur, du médecin du travail et des représentants du personnel une situation de harcèlement moral et elle ne produit d’ailleurs aucun élément dans ce sens. En conséquence, il ne peut être reproché à l’employeur un manquement à son obligation de sécurité. Sa demande de dommages et intérêts à ce titre s’avère donc infondée et est formée pour la première fois en cause d’appel. En tout état de cause, l’appelante ne démontre aucun préjudice distinct à ce titre, de sorte que la somme réclamée a le même objet que celle demandée au titre du harcèlement moral ;
– au demeurant, il n’existe aucun lien de causalité entre son inaptitude et des prétendus faits de harcèlement, celle-ci ayant pour origine l’affection de son poignet droit pour laquelle elle a été opérée en 2016 et a sollicité une demande de reconnaissance au titre d’une maladie professionnelle. Le médecin du travail n’a jamais constaté de faits de harcèlement au cours du suivi médical périodique et il ne fait état d’ aucun lien entre l’inaptitude et une situation de harcèlement. Les divers certificats médicaux produits par la salariée ne permettent pas d’établir ce lien, les médecins rapportant seulement les propos de la salariée sans avoir constaté personnellement les agissements rapportés ;
– Par ailleurs, la période relative aux faits de harcèlement s’avère prescrite. Les actions prud’homales sur ce fondement étant soumises à une prescription de cinq années, la salariée qui a saisi la juridiction prud’homale le 16 janvier 2019 ne peut pas faire état d’agissements antérieurs au 16 janvier 2014. D’autant qu’elle ne peut arguer d’une continuité, les faits étant reprochés à deux salariés différents ;
– au vu de ces éléments, Mme [Z] sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts au titre du harcèlement moral qui est en tout état de cause mal-fondée en ce qu’elle ne justifie pas du préjudice subi, étant considéré que contrairement à ce qu’elle prétend elle est en mesure de jouer du violon et a déjà candidaté à plusieurs postes dans ce domaine.
* Sur le rejet du rappel de prime de fin d’année :
– la salariée est remplie de ses droits au titre de cette prime qui lui a été versée en application des dispositions contractuelles qui prévoient sa proratisation en présence d’arrêts de travail pour maladie ;
* Sur la demande reconventionnelle au titre de la procédure abusive :
– l’employeur est bien-fondé à solliciter des dommages et intérêts en ce que la procédure engagée par Mme [Z] est manifestement abusive.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur les demandes relatives à l’exécution du contrat de travail
1- Sur le harcèlement moral
Selon l’article L. 1152-1 du code du travail « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel » .
En application du même texte et de l’article L. 1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
En l’espèce, Mme [Z] présente les éléments de fait suivants :
– elle a été victime d’un harcèlement moral successivement par deux de ses subordonnés, M. [NK] qui a occupé les fonctions de violon co-soliste, puis M. [S] qui l’a remplacé au même poste ;
-dans le milieu particulier et fortement concurrentiel d’un orchestre, ces salariés qui convoitaient son poste ont mis en place un harcèlement insidieux : M. [NK] l’a harcelée dès son recrutement en 2009, en essayant de cliver les autres membres de l’orchestre contre elle et en cherchant à la destabiliser par diverses manoeuvres et pressions répétées. A compter de son arrivée courant 2013, M. [S] a eu également un comportement harcelant se matérialisant notamment par des reproches insistants, des gestes et propos déplacés, des méthodes de destabilisation et des invectives remettant en cause ses capacités professionnelles ;
– malgré ses plaintes répétées, sa hiérarchie n’a pris aucune mesure pour faire cesser cette situation, alors qu’elle avait connaissance des agissements pratiqués ;
– les multiples pièces médicales versées aux débats démontrent que ces faits ont entraîné un état dépressif, qui a aggravé sa pathologie du poignet.
Au soutien de son allégation d’un harcèlement moral elle produit :
-diverses attestations de salariés, anciens salariés, musiciens et d’un chef d’orchestre ‘invité’ de l’orchestre louant les aptitudes professionnelles et les qualités humaines de Mme [Z] : attestations de M. [JR], Mme [SW], Mme [G]. M.[D], ce dernier soulignant la difficulté du poste de chef d’attaque et déclarant n’avoir pas été étonné ‘de retrouver là Mme [Z] à un poste de soliste'(…)
-diverses attestations de salariés, anciens salariés, musiciens ou chefs d’orchestre de l’orchestre relatant les conditions de travail au sein de l’orchestre en ces termes ( extraits):
– M.[IH], régisseur,
Pendant mes 13 ans de présence, j’ai passé beaucoup de temps à essayer de modifier ce fonctionnement dangereux et malsain et à impulser une autre ambiance plus propice à la musique sans jamais y parvenir. En 2013, j’ai fait un Burn-out, notifié officiellement par le médecin contrôle de la sécurité sociale. A la fin de mon arrêt maladie, j’ai décidé de ne pas replonger dans cette ambiance épouvantable afin d’éviter toute rechute. J’ai donc été licencié pour abandon de poste.
Pour en avoir été’ témoin, j’atteste par la présente que Melle [Z] a bien été’ victime de harcèlement.
Son persécuteur, Mr [NK] avait été recruté quelques années auparavant comme deuxième chef d’ttaque (ou co-soliste) des seconds violons. Révolté’par le mode de fonctionnement décrit ci-dessus, il s’est attaquéfrontalement àla direction dans le but de modifier cette organisation. La cause était juste mais la stratégie de Mr [NK] était frontale et brutale.
Son absence de diplomatie ne lui a pas permis d’btenir de résultats. Ses méthodes ont même exacerbéles tensions existantes et suscitéles critiques de ses collègues. Cet échec a conduit Mr [NK] àdévelopper un individualisme forcené’. Mlle [X] [Z] a réussi son concours de recrutement juste après cet épisode En devenant chef d’attaque des seconds violons, elle prenait possession de ce poste convoité et espéré ‘par Mr [NK]. Elle était enthousiaste, heureuse d’ccuper son poste et très motivée.
Mr [NK] n’a jamais accepté ce nouvel échec, d’autant plus qu’il avait assuré l’intérim de ce poste pendant une saison. Il s’en est pris donc a’ sa nouvelle chef dont il refusait l’autorité’ ayant en permanence de cliver l’ensemble du pupitre contre elle, la déstabilisant volontairement quand elle jouait, de façon à attirer les critiques.
De nombreuses fois, elle venait se plaindre dans mon bureau. Je l’ai souvent vu en larmes. Je ne compte pas le nombre de fois ou ‘je lui ai suggéré ‘de porter plainte pour que l’orchestre soit obligé de traiter le sujet par la racine. Mais elle craignait des représailles. Dès que Mlle [Z] craquait et se retrouvait en arrêt maladie, Mr [NK] la remplaçait àson poste en faisait en sorte que tout se passe bien. Ce harcèlement pervers et continu a fortement fragilisé Mlle [Z]. Il était destiné notamment à la faire douter sur sa façon de jouer.
Cette relation entre Mlle [Z] et Mr [NK] a souvent été évoquée lors de réunions avec la direction. La seule mesure prise a été’ de marquer l’emplacement des chaises de Mr [NK] et Mlle [Z] pour éviter que ce dernier n’empiète physiquement sur son espace et la gêne physiquement déployer pleinement son jeu. »
‘M.[V], chef d’orchestre invité,
« (‘) Lors de ma 2e visite en janvier 2016 j’ai été témoin d’un évènement qui m’a beaucoup choqué : en fin d’une répétition, Madame [X] [Z] s’est effondré en larmes, visiblement dans un état de profond désespoir. Je n’ai pas compris du tout ce qui se passait mais de fil en aiguille j’ai appris que de graves tensions que je n’avais pas détectées avaient lieu dans le pupitre de Madame [Z].
– M.[FF], musicien entre 2009 et 2016
– j’ai pu constater qu’elle avait connu, dès sa nomination des problèmes humains et professionnels avec son co-soliste, Monsieur [NK], qui avait également candidaté pour le poste remporté par Madame [Z](…)
Dans les quelques mois qui ont suivi, Monsieur[S] s’st vu offrir un CDD sans repasser d’audition. J’ai pu constater, dans les mois suivants, que l’ambiance s’est fortement tendue entre Monsieur [S] et Madame [Z] jusqu’à devenir très difficile humainement et professionnellement, et ce jusqu’à ce que madame [Z] quitte son poste pour raisons de santé.
– M.[EN] :
Je connais en tant que collègue Mme [Z] [X] depuis plus de neuf ans après sa nomination de chef d’attaque des seconds violons.
Je peux dire que j’ai été témoin d’accrochages entre Mme [Z] et Mr [E] [NK] à’ deux reprises. Je peux ajouter qu’il y avait des accrochages entre l’ancien chef d’attaque JP MAROLEAU et M. [NK] (‘)
– Mme [L]:
J’ai été recruté sur audition en avril 2016. A partir de mai 2016, j’ai travaillé à côté de Mr [S]. Au début il était très souriant et très charmeur. (…)Tout ce que je faisais était mal fait. Il gommait les doigtés que j’avais pris le soin d’écrire en dessous comme le veut la tradition d’orchestre puisque j’étais à sa droite. Plus tard, il m’a d’ailleurs indiqué que je n’avais pas le droit d’écrire sur SA partition.
En juillet 2016, lors du raccord pour le dernier concert de la saison, j’ai eu problème pour tourner une page. Comme nous étions en extérieur il y avait des pinces à linge. Le principe à linge m’ éhappé et j’ai tourné trop tard. A la fin du raccord, il m’a demandé de le suivre un peu plus loin pour me parler. A ce moment là, il m’ a dit que j’étais mauvaise, que je n’était pas musicienne, que je devais changer de métier et qu’il n’était pas là pour me former.
(…)
Le concert a été très difficile à vivre pour moi car continuer à jouer à côté de lui devenait de plus en plus stressant et compliqué. A la fin de ce concert, plusieurs musiciens m’ont encouragé à aller le raconter en disant «ce n’est pas de ta faute, cette personne est coutumière du fait. Il t’empêche d’exercer ton métier sereinement. »
-M. [MT]:
Les délégués a’ l’époque, en bons termes avec [E] [NK], [C] [N], [DE] [SE] et [B] [IZ] ne l’ont pas soutenu même après qu’elle se soit adressée a’ eux plusieurs fois.
En 2014, il y a eu un petit changement positif: [E] [NK] est parti. Mais, voilà’ qu’après une période de remplaçants successifs sans problèmes au pupitre d'[X] (et à côté de moi), à sa place est installé [Y] [S].
(…)Mais juste après l’obtention du contrat il lui a fait vivre un véritable enfer. Il l’insultait,
refusait de collaborer, sabotait le bon déroulement des répétitions et des concerts. Une nouvelle fois, [X] s’est retrouvée en grave difficulté.Elle aurait dû être aidée par les délégués et la direction, mais au pouvoir il y avait ce fameux clan qui au lieu de l’écouter et trouver une solution l’ont accusée d’être elle le problème.
(…)M. [S] est une personne extrêmement problématique au travail (facilement vérifiable) mais qui était en bons termes avec le clan qui l’ont utilisé pour détruire E. [Z] sans que [HP] [H] ne prenne les mesures nécessaires pour qu’elle puisse travailler dans de bonnes conditions et assurer le bon déroulement de son travail.
– M.[R] :
« (‘) Je siégeais au jury de son concours d’entrée comme chef d’attaque des 2nds violons à l’orchestre de [Localité 3]. En finale, [X] éait confronté à [E] [NK], déjà membre de l’orchestre dans le rang, et qui occupait cette place de chef d’ttaque par intérim, dans l’attente que ce concours soit organisé.C’est [X] qui a remporté le concours.
-M. [W] :
Il est difficile d’expliquer les gestes, paroles ou actions d’arcèement dans le cadre du méier d’artiste musicien dont les codes sont peu connus par le grand public. Cela concerne les façons de jouer, la technique instrumentale ou musicale.
-le procès-verbal de réunion de l’Orchestre Philarmonique de [Localité 4] du 6 février 2013:
Les musiciens présents confirment qu’il s’agit de méthodes de déstabilisation régulièrement employées par M. [S] envers de nombreux collègues. Cette attitude relève du harcèlement moral.
Ces agissements récurrents ont pour but d’atteindre psychologiquement, de saper le moral, créer un stress, de déconcentrer ses collègues, particulièrement lorsque ceux-ci doivent exécuter des parties difficiles par des mimiques et de gestes pour déstabiliser des collègues.
(…)
Est pointée la perversité de l’attitude de M. [S] qui joue sur la peur et l’intimidation, la provocation, créant un climat malsain, incompatible avec le travail artistique. De nombreux musiciens victimes n’osent pas dénoncer ces actes ou paroles, par peur de représailles.
-les attestations de M. [M], M. [P], Mme [RM], Mme [G] ; musiciens au sein de l’orchestre de [Localité 5], ceux-ci témoignent du comportement peu apprécié par les collègues, de M. [S] au sein de cet orchestre; en particulier, M. [M] déclare que ce dernier ‘a été le sujet de plusieurs conseils de discipline et suite à la plainte d’un des musiciens et sur la foi de nombreux témoignages d’arcèlement, celui du 14 mars 2013 a décidé de son licenciement. J’étais à ce moment là représentant du personnel’.(…)
– diverses pièces médicales :
* certificat du 23 septembre 2018 de M. [K] [O], médecin traitant depuis le 1er avril 2013 :
(…)lors des consultations et à de nombreuses reprises, Madame [Z] [I] [X] m’a fait part des difficultés qu’elles rencontre lors de son travail de violoniste dans un orchestre.
Elle se sent harcelée depuis sa prise de fonction le 23 juin 2019, la situation se dégradant dans le temps.
Elle se sent déstabilisée par sa hiérarchie, elle rapporte avoir des cervicalgies dues à une mauvaise position de travail par mal intention d’un collègue qualifié de harceleur par Madame [Z] sans que l’administration ne réagisse selon elle, ce qu’il l’a laissé en grand désarroi, avec des doutes sur son avenir de soliste au sein de l’orchestre. Elle rapporte une ambiance de travail néfaste, épuisante, conflictuelle, mentionne que de nombreux collègues partent en dépression. Elle déclare ne plus avoir de goût pour la musique et semble dans l’incompréhension face à cette situation.
Lors des examens cliniques pratiqués entre 2011 et ce jour j’ai constaté :
-un syndrome dépressif et anxieux sévère(…)
-des cervicalgies chroniques avec névralgie cervico-brachiale, des lombalgies chroniques,(…)
-du stress et de la nervosité accompagnée de tremblements et de tachycardie, (…)
-une prise en charge chirurgicale d’un problème de poignet droit évoluant vers une algoneurodystrophie favorisée par un terrain anxieux et des problèmes de prise en charge administrative(sur perte fonctionnelle du poignet)
Les constatations médicales lors de mes consultations de juin 2011 jusqu’à ce jour semble corroborer les faits rapportés les dires de Madame [Z].
*attestation du 6 janvier 2023 de M. [K] [O], médecin traitant dans lequel celui-ci relève que ‘elle a été suivie par le Docteur [DW] début 2012, rapport à des malveillances de la part des collègues avec un sentiment de harcèlement d’injustices criantes qui devenaient très envahissant dans sa vie quotidienne. Traitement par séroplex a été prescrit de janvier 2014 à nos jours avec une très bonne compliance. Le suivi la prescription et la psycho thérapie soutien ont été assurés par mes soins à partir de 2015 Madame [Z] a repris contact avec son psychiatre en avril 2018. Son traitement par antidépresseurs séroplex lui a permis d’obtenir un certain recul sur sa situation avec une rechute de ces troubles anxieux fin 2015 où elle rapporte de nouveau les événements ressentis comme un harcèlement travail.
Le médecin du travail a pas été consulté car Mme [Z] exprime la crainte de la perte du secret médical vis-à-vis de son employeur’.
– certificat de M.[T] [DW], psychiatre, en date du 1er octobre 2018 :
Dès le début de l’année 2012, Mme [Z] m’a fait part de malveillances, depuis plusieurs mois, venant d’un collègue. Cette situation est devenue de plus en plus envahissante pour elle et revenant beaucoup plus fréquemment dans son discours. Vu la réaction de différents membres du groupe professionnel, un sentiment de non-respect,
d’impunité et d’injustice imprégnaient sa vie.
J’avais proposé, à plusieurs reprises, un traitement antidépresseur, mais Mme [Z] ne souhaitait pas s’engager dans ce processus.
En janvier 2014 elle s’est résolue à prendre ce traitement (SEROPLEX*) devenu incontournable.
Commencé 5mg, il a du être augmenté jusqu’à 25mg afin d’endiguer ses angoisses. Il a étépoursuivi durant l’année 2015.
J’ai revu Mme [Z] en avril 2018. Elle avait été licenciée de son poste à l’orchestre.
Aujourd’hui, elle ne peut plus envisager, sous quelque forme que ce soit, de réintégrer le
milieu de la musique, devenu comme hostile. Il y a aujourd’hui, un dégout de ce métier qui avait, jusque-là’, structuré toute sa vie. Mme [Z] est ressortie affaiblie et
désemparée par ces dernières années. »
– certficat de M. [A] chirurgien.
Elle présentait une invalidité importante au niveau de son poignet droit en raison d’une arthrose périscaphoidienne et ses douleurs s’étaient probablement aggravées par un contexte professionnel difficile.
L’intervention a été suivie d’une algoneurodystrophie sévère, probablement consécutive à son état psychologique fragile.
Mme [Z] a finalement éolué positivement, au prix d’une rééducation intensive et d’un soutien psychologique.
Je l’ai revue en janvier 2018 avec une évolution satisfaisante. Son état de santé ne permettait pas encore une reprise du travail sur son poste normal et je pense que six mois de rééducation complémentaire et de soutien psychologique lui aurait certainement été favorable. »
Ces éléments prouvent le mal être que manifestait Mme [Z] qui subissait une détérioration de son état de santé ainsi que la pratique habituelle d’un même type de comportement hostile et néfaste de la part de M. [S] envers ses collègues violonistes. Ils confortent le ressentiment qu’avait M. [NK] envers l’intéressée à la suite d’un concours remporté par Mme [Z].
Cependant, il ne ressort pas de l’examen des témoignages une description concrète des agissements commis par M. [NK] et/ou M. [S] sur la personne de Mme [Z].Le régisseur M. [IH], s’il atteste que Melle [Z] ‘a bien été victime de harcèlement’ ne décrit aucun fait dont il aurait été personnellemnt témoin, ni n’explique comment M.[NK] s’en est pris à sa nouvelle chef dont il refusait l’autorité . Il apparaît que ce témoin ne fait que rapporter les propos de Mme [Z].M. [EN] quant à lui, affirme avoir été témoin d’accrochages mais ne s’en explique pas ni ne les situe dans le temps et l’espace.
Les faits présentés par les témoins, en termes généraux, ne permettent pas d’identifier les malveillances invoquées par Mme [Z] ni même ne permettent de les rattacher à une répétition ou à une représentation d’une oeuvre musicale en particulier . Ne sont pas décrits par les témoins, de la part de M. [NK] ou de M. [S], des comportements précis et concordants, à l’instar de ceux relatés par Mme [L] au sujet de sa partition de musique, ou de ceux consignés dans le compte rendu de la réunion de l’orchestre philarmonique de [Localité 5].Ne sont pas d’avantage relatées quelles malveillances sont à l’origine de la ‘cervicalgie due à une mauvaise position de travail par mal intention d’un collègue qualifié de harceleur par Mme [Z]’rapportées dans son certificat médical par son médecin traitant de Mme [Z]’.
Le fait invoqué par M. [W] que ‘dans le cadre du métier d’artiste musicien dont les codes sont peu connus par le grand public il est difficile d’expliquer les gestes, paroles ou actions d’harcèlement’ ne dispense pas Mme [Z] de la présentation de faits concrets ne serait-ce que pour permettre à l’association Orchestre Régional de [Localité 3] [Localité 6] de s’en expliquer.
Le récit le plus circonstancié, en dehors de celui de Mme [L], laquelle ne décrit cependant de façon inopérante que des faits la concernant personnellement et non Mme [Z], est celui de M.[V], chef d’orchestre invité. Celui-ci a été témoin du désarroi de Mme [Z] , qui s’est effondrée en larmes à l’issue du concert en janvier 2016, comportement qui a conduit l’employeur à marquer l’emplacement des chaises des deux violonistes (M. [NK] et Mme [Z]) pour éviter un empiètement. Il s’agit du seul comportement harcelant matériellement établi. Mais il ne permet pas à lui seul de caractériser un harcèlement moral au travail, lequel suppose des agissements répétés.
Les médecins, généraliste et psychiatre, de Mme [Z], ne font quant à eux que rapporter les propos de leur patiente sans avoir constaté eux mêmes ses conditions de travail. Il en est de même du chirurgien ayant pratiqué l’intervention sur le poignet de Mme [Z] qui émet l’hypothèse d’un lien de causalité entre son algoneurodystrophie sévère et son état psychologique fragile’.
Ces éléments médicaux ne permettent pas de rattacher à une dégradation de ses conditions de travail la perte fonctionnelle liée à une disjonction scapho-lunaire du poignet droit de Mme [Z], non reconnue comme maladie professionnelle.
Alors qu’elle bénéficiait d’une surveillance médicale renforcée au titre de sa pathologie du poignet antérieure à son embauche, Mme [Z] n’a pas fait état d’un quelconque harcèlement subi au cours des diverses visites médicales passées le 5 octobre 2010, 30 novembre 2011, 26 novembre 2012. Mme [Z] n’a pas fait état d’un harcèlement moral auprès du médecin du travail ni auprès des médecins conseils de l’organisme social à l’occasion de sa demande de reconnaissance du caractère professionnel de sa maladie. Par ailleurs,M. [J], ancien chef d’orchestre, d’une part, ainsi que [DE] [SE] et [U] [N], respectivement secrétaires du CE de novembre 2014 à mars 2017 et de 2009 à juin 2013, affirment n’avoir jamais été saisis en leur qualité de représentants du personnel.
En conséquence, l’ensemble des éléments ainsi produits, appréhendés dans leur ensemble, ne laisse pas supposer l’existence d’un harcèlement moral subi par Mme [Z] auquel il appartiendrait à l’association de répondre.
Confirmant la décision entreprise, la cour déboute Mme [Z] de sa demande de condamnation de l’association Orchestre Régional de [Localité 3] [Localité 6] au paiement de dommages-intérêts et de diverses sommes en réparation des préjudices par elle subis.
2- Sur le manquement à l’obligation de sécurité :
Aux termes de l’article L4121-1du code du travail
L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures comprennent :
1° Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l’article L. 4161-1 ;
2° Des actions d’information et de formation ;
3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.
L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes ;
Selon l’article L4121-2:
L’employeur met en oeuvre les mesures prévues à l’article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :
1° Eviter les risques ;
2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;
3° Combattre les risques à la source ;
4° Adapter le travail à l’homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ;
5° Tenir compte de l’état d’évolution de la technique ;
6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n’est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ;
7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu’ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1, ainsi que ceux liés aux agissements sexistes définis à l’article L. 1142-2-1 ;
8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ;
9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs.
En l’espèce, un fait précis et daté est rapporté par M. [V] chef d’orchestre invité en ces termes est de nature à caractériser un manquement de l’association Orchestre Régional de [Localité 3] [Localité 6] à son obligation de sécurité :
Lors de ma 2e visite en janvier 2016 j’ai été témoin d’un évènement qui m’a beaucoup choqué: en fin d’une répétition, Madame [X] [Z] s’est effondré en larmes, visiblement dans un état de profond désespoir. Je n’ai pas compris du tout ce qui se passait mais de fil en aiguille j’ai appris que de graves tensions que je n’avais pas détectées avaient lieu dans le pupitre de Madame [Z].
L’association ne prouve pas, comme elle le soutient, que, soit Mme [Z], soit M. [NK], était absent en maladie à ce moment là.Corroboré par d’autres témoignages notammentde M. [MT], le fait apparaît établi.
Cependant, il est constant que l’employeur peut s’exonérer de sa responsabilité au titre de l’obligation de sécurité en justifiant avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.
Or, il ressort du témoignage de [F] [IH], régisseur, que dans les suites de cet incident, la décision a été prise par l’association de marquer l’emplacement des chaises de M. [NK] et de Mme [Z] pour éviter un empiètement, ce qui démontre que des mesures ont été aussitôt prises pour éviter une réitération des faits.
Dès lors, le moyen tiré de la commission par l’association Orchestre Régional de [Localité 3] [Localité 6] d’un manquement à son obligation de sécurité manque en fait.
Mme [Z] doit être déboutée de sa demande de dommages-intérêts sur ce fondement.
3- Sur le rappel de prime de fin d’année :
La remise de bulletins de salaire ne dispense pas l’employeur de faire la preuve qu’il a effectivement payé les salaires correspondants.
La circonstance que le salarié ait tardé pour réclamer ses droits, n’implique pas de sa part renonciation à ses droits.
Par ailleurs, il appartient à l’employeur qui prétend avoir payé la totalité du salaire d’en rapporter la preuve, notamment par la production de pièces comptables.
En l’espèce, l’association, si elle produit les bulletins de paie, ne rapporte pas la preuve du versement effectif de la prime de fin d’année pour les années 2015 à 2018, alors qu’en application des dispositions de son contrat de travail, ce versement n’est soumis à aucune condition de présence effective.
Il sera fait droit à la demande de Mme [Z] par infirmation du jugement déféré.
Sur les autres demandes
1-Sur les demandes indemnitaires au titre du caractère abusif de la procédure
L’appel étant pour partie fondé, aucune faute n’est caractérisée à l’encontre de Mme [Z].
2-Sur les intérêts
Les créances salariales sont productives d’intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l’employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation.
La capitalisation des intérêts sera ordonnée dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil.
Sur les frais du procès
En application des dispositions des articles 696 et 700 du code de procédure civile, l’association Orchestre Régional de [Localité 3] [Localité 6] sera condamnée aux dépens ainsi qu’au paiement d’une indemnité de 2.500 euros.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe, en matière prud’homale,
Infirme le jugement en ce qu’il déboute Mme [Z] de sa demande en paiement d’un rappel de prime de fin d’année et en ce qu’il la condamne aux dépens,
Statuant à nouveau des seuls chefs infirmés et y ajoutant,
Condamne l’association Orchestre Régional de [Localité 3] [Localité 6] à payer à Mme [Z] la somme de 2250 € à titre de prime de fin d’année,
Dit que cette somme est productive des intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l’employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation,
Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil,
Condamne l’association Orchestre Régional de [Localité 3] [Localité 6] aux dépens de première instance et d’appel,
Condamne l’association Orchestre Régional de [Localité 3] [Localité 6] à payer à Mme [Z] une somme de 2.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Déboute l’association Orchestre Régional de [Localité 3] [Localité 6] de sa demande d’indemnité de procédure en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Rejette toute autre demande.
LE GREFFIER LE PRESIDENT