Irrecevabilité des appels incidents

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Irrecevabilité des appels incidents
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Dans la lignée de la jurisprudence constante de la Cour de cassation, l’ordonnance rappelle dans sa motivation que « seul l’acte d’appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement. Aussi lorsque la déclaration d’appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l’effet dévolutif n’opère pas », tout en ajoutant que « la portée de l’effet dévolutif relève de la Cour et non du conseiller de la mise en état ».

Il s’en déduit, comme le soutient à juste titre l’appelant, que cette décision a acquis, en l’absence de procédure de déféré, autorité de la chose jugée. Mais, uniquement en ce qu’elle a tranché la question de l’exception de nullité, d’une part, et la fin de non-recevoir sur le défaut et la qualité à agir de l’appelant de la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST, d’autre part.

La portée de l’effet dévolutif n’a donc pas encore été tranchée.

Et, pour cause, elle relève de l’appréciation de la Cour ayant à statuer au fond puisqu’une déclaration non affectée de nullité peut néanmoins être dépourvue d’effet dévolutif. Il ne s’agit pas ici de la sanction d’un vice de procédure (même si elle produit les mêmes effets, en ce sens que la cour d’appel ne connaîtra pas du fond de l’affaire), mais d’une conséquence de la définition nouvelle donnée à l’effet dévolutif. Si le vice de forme touchant la déclaration d’appel affecte l’acte de saisine de la cour d’appel, et pose la question de sa régularité, l’effet dévolutif détermine les effets et le périmètre de cette saisine, au où elle est régulière.

L’existence d’une autre sanction que la nullité pour vice de forme est d’ailleurs rappelée par la circulaire la circulaire du 4 août 2017, qui précise même clairement que la « nullité de forme de la déclaration d’appel est doublée d’une autre sanction puisqu’en cas d’appel général, l’effet dévolutif de l’appel ne jouera pas et la cour d’appel ne sera pas saisie. »

Cela vient compléter l’idée poursuivie par la réforme, voir circonscrire l’appel à des chefs de la décision de première instance expressément énoncés par la déclaration d’appel. La circulaire d’application de ce décret indique encore : «s’agissant de la procédure d’appel à proprement parler, le décret redéfinit l’objet de cette voie de recours, dont il est désormais expressément précisé qu’elle vise à critiquer la décision des premiers juges. Le décret encadre la portée de l’effet dévolutif de l’appel, qui n’impose de statuer à nouveau en fait et en droit que dans les limites qu’il détermine. Est affirmé le principe selon lequel l’appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs du jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent. »

Dans le même sens, la Cour de cassation (cass. 2° civ. 30 janvier 2020) a rappelé que l’article 562 du code de procédure civile doit s’interpréter par rapport aux articles 542, 561 et 901 4° du code de procédure civile, l’ensemble constituant l’économie de la réforme du 6 mai 2017.

En conséquence, lorsque l’appelant se contente dans sa déclaration d’appel du 21 juillet 2020 de mentionner que l’objet, la portée de son appel consiste en un « appel limité aux chefs de jugement critiqués », sans autre précision ou annexe autre que le jugement querellé, il doit en être tiré la conséquence que son appel est privé d’effet dévolutif, et que la Cour n’est saisie d’aucune demande. En effet,les moyens développés dans le corps des conclusions, déposées nécessairement ultérieurement, ne sont pas de nature à suppléer cette carence. Cette solution s’impose d’autant plus au cas particulier qu’aucune autre déclaration d’appel aux fins de régularisation n’est intervenue dans les délais légaux (3 mois à compter de la déclaration d’appel).

Reste toutefois posée la question de l’effet dévolutif attaché aux appels incidents formés par les intimés. Aux termes de l’article 550 du CPC, « sous réserve des articles 905-2, 909 et 910, l’appel incident ou l’appel provoqué peut être formé, en tout état de cause, alors même que celui qui l’interjetterait serait forclos pour agir à titre principal. Dans ce dernier cas, il ne sera toutefois pas reçu si l’appel principal n’est pas lui-même recevable ou s’il est caduc. »

Au cas particulier, la cour n’ayant jamais été valablement saisie de l’appel principal pour les motifs exposés supra, il convient par conséquent de déclarer irrecevables les appels incidents.


 

ARRÊT N°23/

FA

R.G : N° RG 20/01140 – N° Portalis DBWB-V-B7E-FMPG

[C]

C/

S.A.R.L. CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST

COUR D’APPEL DE SAINT – DENIS

ARRÊT DU 04 JANVIER 2023

Chambre commerciale

Appel d’une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT DENIS en date du 28 JANVIER 2020 suivant déclaration d’appel en date du 21 JUILLET 2020 RG n° 16/04155

APPELANT :

Monsieur [Z] [C]

[Adresse 3]

[Localité 11]

Représentant : Me Jacques HOARAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMÉE :

S.A.R.L. CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST

[Adresse 2]

[Localité 9]

Représentant : Me Guillaume jean hyppo DE GERY de la SELARL GERY-SCHAEPMAN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

PARTIES INTERVENANTES

SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 10]

Représentant : Me Alain ANTOINE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Madame [H] [B]

[Adresse 7]

[Localité 8]

Représentant : Me Alain ANTOINE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Mademoiselle [K] [N] [M] [U]

[Adresse 1]

[Localité 8]

Représentant : Me Alain ANTOINE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Mademoiselle [A] [I] [Y] [U]

[Adresse 1]

[Localité 8]

Représentant : Me Alain ANTOINE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

SARL COMPTA OUEST

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 10]

SCP POPINEAU-MAREL-[R] & AH FENNE (NOTAIRES)

[Adresse 6]

[Localité 9]

Représentant : Me Jacques BELOT de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Maître Valérie [R]

[Adresse 6]

[Localité 9]

Représentant : Me Jacques BELOT de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DATE DE CLÔTURE : 11/04/2022

DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 05 octobre 2022 devant Monsieur ALZINGRE Franck, Conseiller, qui en a fait un rapport, assisté de Madame Nathalie BEBEAU, Greffière, les parties ne s’y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l’issue des débats, que l’arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 07 décembre 2022 prorogé par avis au 04 janvier 2023.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Madame Sophie PIEDAGNEL, Conseillère

Conseiller : Monsieur Franck ALZINGRE, Conseiller

Conseiller : Madame Magali ISSAD, Conseillère

Qui en ont délibéré

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 04 janvier 2023.

* * *

LA COUR :

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant acte sous signature privée à effet au 1er mai 2005, M. [Z] [C] a donné à bail commercial à Mme [P] [X] épouse [O] une villa située [Adresse 4] à [Localité 11], à usage de cours de musique et de danse, moyennant un loyer mensuel de 1 200 euros.

Par avenant du 25 août 2005, il a été adjoint à la chose louée un terrain de 500 m².

Selon acte authentique en date du 16 juillet 2007, Mme [O] a cédé son fonds de commerce, y compris le droit au bail, à M. [V] [U] et son épouse, Mme [H] [B], lesquels ont constitué le 11 avril 2011 la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST pour exploiter ledit fonds.

Par acte sous seing privé du 17 août 2012, M. [J] [F], qui a constitué ensuite la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST, a pris en gérance-libre le fonds de commerce portant sur une activité d’enseignement en arts théâtral et musical, notamment. Cet acte a été préparé et rédigé par le cabinet COMPTA-OUEST, qui était alors l’expert comptable du gérant-libre et du bailleur.

Le gérant-libre devait s’acquitter auprès du propriétaire du fonds d’une redevance mensuelle de 4 700 euros hors taxes (HT) se divisant en 2 127 € HT pour les murs et 2 573 € HT pour la location gérance, avec une possibilité de se porter acquéreur du fonds à tout moment.

Un acte notarié de cession de fonds de commerce sous condition suspensive, au profit de la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST, a été signé le 30 août 2013, pour un prix de 160 000 euros, par-devant Maître [T] [R], notaire. L’acquéreur s’est acquitté du paiement du dépôt de garantie (1 500 euros).

La condition n’a pas été satisfaite dans le délai mais les négociations de vente ont repris au cours des semaines écoulées en vue d’une cession pour 130 000 €.

Le 18 février 2014, le notaire rédacteur de la promesse de cession informait le gérant libre avoir reçu une lettre de la commune du [Localité 11] lui notifiant qu’au regard du plan local d’urbanisme, ne sont autorisées que des constructions à usage exclusif d’habitation et, que l’installation d’une école de musique et de danse sur la parcelle concernée n’est pas conforme au règlement de la zone UC du Plan Local d’Urbanisme

Le 27 août 2014, le gérant-libre du fonds a reçu une lettre du Maire de la Commune du [Localité 11] lui confirmant le caractère irrégulier de l’activité exercée à cette adresse, au regard du plan local d’urbanisme.

Par ailleurs, par lettre en date du 6 février 2015, l’assureur (Prima Assurance) du gérant libre a résilié le contrat d’assurance ; la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST n’a pas obtenu son prêt demandé auprès de la Banque de la Réunion, la démarche ayant été interrompue à l’initiative du demandeur ; le dernier loyer acquitté a été celui du mois de juillet 2014.

Dans ce contexte, la société CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST (gérant-libre) a, tout d’abord, par acte du 6 novembre 2014, introduit une action au fond devant le Tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de la Réunion aux fins de voir prononcer la nullité du contrat de gérance libre, ensuite, a quitté le site le 12 novembre 2014 et signé un nouveau bail commercial.

Selon exploits délivrés le 10 août 2015, Maître [T] [R], la SCP POPINEAU, MAREL, POPINEAU & AH-FENNE et la SARL COMPTA-OUEST ont été appelés en la cause.

Le 8 juin 2016, le Tribunal mixte de commerce saisi s’est déclaré incompétent et a renvoyé l’affaire devant le Tribunal de grande instance de Saint-Denis.

Par acte délivré le 6 mars 2017, la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST a fait assigner en intervention forcée M. [Z] [C].

Par jugement du 28 janvier 2020, le Tribunal de grande instance de Saint-Denis (devenu le Tribunal judiciaire à compter du 1er janvier 2020) a statué comme suit :

-déboute la SARL COMPTA-OUEST de sa demande d’annulation de l’assignation qui lui a été délivrée par exploit d’huissier le 10 août 2015 ;

-condamne la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST à rembourser à la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST la somme de 122 500 euros au titre des sommes acquittées pour la période allant du mois d’août 2012 au mois de juillet 2014 ;

-condamne la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST à verser à la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST la somme de 122 500 euros au titre de l’indemnité d’occupation due pour la période allant du mois d’août 2012 au mois de juillet 2014 ;

-Condamne la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST à verser à la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST la somme de 994,87 euros qui emportera intérêts au taux légal à compter de la date de la présente décision ;

-Déclare le commandement de payer délivré à Monsieur [J] [F] le 24 octobre 2014 eu égard aux loyers dus pour les mois d’août à octobre 2014 sans objet ;

-Ordonne la compensation entre les créances réciproques de la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST et de la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST ;

-Prononce l’annulation du contrat de cession d’un fonds sous conditions suspensives conclu le 30 août 2013 par la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST et la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST ;

-Condamne Maître [T] [R] à payer à la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST la somme de 1 500 euros au titre de la restitution du dépôt de garantie ;

-Déclare les demandes formées par la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST à l’encontre de Monsieur [Z] [C] recevables ;

-Condamne Monsieur [Z] [C] à garantir la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST de toutes les condamnations prononcées contre elle par la présente décision ;

-Condamne Monsieur [Z] [C] à verser à la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST la somme de 128 000 euros au titre de la perte de chance de céder son fonds de commerce ;

-Condamne la société COMPTA-OUEST à garantir Madame [H] [B], Madame [K] [U] et Madame [A] [U] de la condamnation mise à leur charge par l’ordonnance rendue le 19 mai 2016 et rectifiée le 25 mai 2016 ;

-Condamne la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST à payer à la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

-Condamne la SARL COMPTA-OUEST à payer à la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

-Condamne Maître [T] [R] à payer à la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile -Condamne la société COMPTA-OUEST à payer à la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

-Condamne Monsieur [Z] [C] à payer à la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

-Condamne la SARL COMPTA-OUEST à payer à la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST, à Madame [H] [B], à Madame [K] [U] et à Madame [A] [U] la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile

-Déboute toutes les parties de leurs autres demandes différentes, plus amples ou contraires au présent dispositif ;

-Condamne in solidum Monsieur [Z] [C] la SARL COMPTA-OUEST et maître [T] [R] aux dépens de la présente procédure.

*

Par déclaration au greffe en date du 21 juillet 2020, M. [C] a interjeté appel de la décision rendue le 28 janvier 2020.

Un conseiller de la mise en état a été désigné par ordonnance en date du 23 juillet 2020.

Le 31 juillet suivant, la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST a constitué avocat. La SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST, Mme [H] [B], Mme [K] [U], Mme [A] [U] ont fait de même le 17 septembre 2020.

L’appelant a déposé ses premières conclusions le 19 octobre 2020.

Faute pour eux d’avoir constitué avocat, la SAS COMPTA OUEST, la SCP POPINEAU-MAREL-[R] & AH-FENNE, M° [T] [R] se sont vus signifier par l’appelant la déclaration d’appel et les conclusions d’appel, le 16 novembre 2020.

Le 8 décembre 2020, la SCP POPINEAU-MAREL-[R] & AH-FENNE, M° [T] [R] ont constitué avocat.

Par conclusions notifiées par RPVA les 15, 19 janvier 2021 et 10 février 2021, les intimés, exception faite la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST, ont saisi le conseiller chargé de la mise en état d’un incident.

Par ordonnance d’incident du 25 octobre 2021, il a été statué comme suit :

– rejetons la fin de non-recevoir du défaut d’intérêt et de qualité à agir ;

– rejetons l’exception de nullité de la déclaration d’appel ;

– disons n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

– disons que chaque partie conservera la charge de ses dépens.

La SAS COMPTA OUEST n’a pas constitué avocat.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 11 avril 2022 (je ne l’ai pas vue au dossier ‘ il y a juste un avis de clôture pour le 11 avril 2022).

*

Parallèlement :

– par assignations en référé du 26 septembre 2014 et du 6 novembre 2014, la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST a fait citer la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST afin d’obtenir la suppression des paiements de redevances. Elle a été déboutée par ordonnance du 1er mars 2015. A la suite de l’appel interjeté, par arrêt en date du 18 novembre 2015, la Cour d’appel de Saint-Denis a infirmé l’ordonnance et ordonné la suspension du paiement de la redevance mensuelle de 4 700 euros HT due par la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST ;

– par actes d’huissier des 23 et 30 novembre 2015, le bailleur a fait délivrer à M. et Mme [U] deux commandements de payer visant la clause résolutoire aux fins d’obtenir le paiement de la somme de 21 700 euros au titre de loyers échus de février 2015 à novembre 2015 ; par ordonnance en référé en date du 19 mai 2016, il a été constaté la réalisation de la clause résolutoire du bail à la date du 30 décembre 2015 et prononcé l’expulsion de M. et Mme [U], ces derniers étant en outre condamnés à payer solidairement au bailleur la somme de 21 270 euros au titre des loyers impayés ainsi qu’une indemnité d’occupation mensuelle de 2 127 euros à compter du 1er janvier 2016 ;

– par acte d’huissier du 12 novembre 2020, M. [Z] [C] a fait assigner la société CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST devant le premier président de la Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion, statuant en référé, à l’effet que soit arrêtée, ce qui concerne sa condamnation, l’exécution provisoire attachée au jugement rendu le 28 janvier 2020 par le Tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion ; par décision du 9 février 2021, la demande a été rejetée et M. [C] a été autorisé à procéder dans le délai de deux mois à la consignation de la somme de 129 000 euros entre les mains de la caisse des dépôts et consignations.

PRÉTENTIONS ET MOYENS

Par conclusions responsives et récapitulatives notifiées par RPVA le 20 février 2022, M. [Z] [C] a sollicité de voir la Cour:

Vu l’article 122 du code de procédure civile,

Vu les articles 1382 ancien et 1240 du code civil,

Vu les pièces, et notamment les ordonnances de référé des 19 mai 2016 et 25 mai 2016,

– RECEVOIR Monsieur [Z] [C] en son appel à l’encontre du jugement du 28 janvier 2020,

Vu la réforme opérée par le décret du 28 décembre 2010 a conduit a articuler l’application des articles 775, 914 alinéa 2 et 916 alinéa 2 du Code de procédure civile,

Vu l’autorité de la chose jugée attachée à l’ordonnance du 25 octobre 2021 du conseiller de la mise en état rejetant l’exception de nullité de la déclaration d’appel des intimées ayant saisi le conseiller de la mise en état de la nullité de la déclaration d’appel en ce qu’elle n’indiquait pas les chefs de jugement critiqués, et qu’en son dispositif il est dit « rejetons la ‘n de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt et de qualité à agir; rejetons l’exception de nullité de la déclaration d’appel »

– JUGER qu’il n’est plus possible, avec le nouveau texte, en raison de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état en matière de nullités ,de soulever à nouveau devant la Cour la nullité de la déclaration d’appel en ce qu’elle ne la saisirait d’aucun chef du jugement dont appel et ce même si le conseiller de la mise en état aurait statué par excès de pouvoir, ou qu’il s’agirait d’un moyen nouveau applicable aux faits, ou que la cour pourrait soulever d’office ou même d’ordre public puisque l’autorité de chose jugée s’impose à la juridiction du fond,

– INFIRMER le jugement attaqué en ce qu’il a

déclaré les demandes formées par la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST à l’encontre de M. [Z] [C] recevables;

condamné M. [Z] [C] à garantir la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST de toutes condamnations prononcées contre elle par la présente décision ;

condamné M. [Z] [C] à verser à la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST la somme de 128 000 euros au titre de la perte de chance de céder son fonds de commerce,

condamné M. [Z] [C] à verser à la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

-DÉBOUTER la Sarl CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST et Mmes [H] [B], [K] [U] et [A] [U] de toutes leurs demandes et moyens contraires à l’encontre de M. [Z] [C],

-CONDAMNER solidairement la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST et Mesdames [H] [B], [K] [U] et [A] [U] à payer à M. [Z] [C] la somme de 10 000 euros à titre de frais irrépétibles de première instance et d’appel en application de l’article 700 du code de procédure civile,

-CONDAMNER solidairement la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST, et de Mmes [H] [B], [K] [U] et [A] [U] à payer à M. [Z] [C] aux dépens de première instance et d’appel au profit de M° Jacques HOARAU, avocat aux offres de droit et faire application de l’article 699 du code de procédure civile.

En réplique, la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST conclut en ces termes :

A titre principal,

– DIRE ET JUGER nulle la déclaration d’appel pour absence d’indication des chefs du jugement critiqués,

– REFORMER la décision de la Cour, en ce qu’elle a condamné la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST au paiement de la somme de 122 500 euros au profit de la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST au titre d’une indemnité d’occupation,

– DIRE ET JUGER NUL, de nullité absolue, le contrat de gérance-libre, comme étant fondé sur un bail commercial lui-même frappé de nullité ainsi que sur une clientèle inexistante,

– DIRE ET JUGER qu’il en résulte un préjudice direct pour la société CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST ouvrant droit à une indemnisation,

– CONDAMNER ensemble la société CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST et la société COMPTA-OUEST, auteur du contrat, au paiement de la somme de 122 500 euros, correspondant au montant des redevances de gérance-libre payées par le demandeur et affecter cette somme d’un intérêt au taux légal à compter de la date d’assignation en référé soit le 26 septembre 2014,

– CONDAMNER ensemble la société CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST et la société COMPTA-OUEST au paiement de la somme de 7 770,17 euros à titre de réparation du préjudice subi du fait des aménagements et investissements, devenus inutiles, créés dans les locaux à l’occasion de l’entrée en gérance-libre et affecter cette somme d’un intérêt au taux légal à compter de la date d’assignation en référé soit le 26 septembre 2014,

– CONDAMNER la société COMPTA OUEST à rembourser à la société CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST, les honoraires relatifs à la mission de préparation et de rédaction du contrat de location-gérance, soit la somme de 1 280,30 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la date d’assignation en référé soit le 26 septembre 2014,

– CONDAMNER Maître [T] [R], auteur de la promesse d’achat du fonds de commerce, la SCP POPINEAU, MAREL, POPINEAU, [R] & AH-FENNE au paiement de la somme de 300 euros correspondant aux honoraires perçus pour la rédaction du contrat de cession sous condition suspensive, somme assortie des intérêts au taux légal à compter de la date d’assignation en référé soit le 26 septembre 2014,

– CONDAMNER Maître [T] [R], la SCP POPINEAU, MAREL, POPINEAU, [R] & AH-FENNE à restituer à la société CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST la somme de 1 500 euros reçue en dépôt de garantie, somme assortie des intérêts au taux légal à compter de la date d’assignation en référé soit le 26 septembre 2014,

– CONDAMNER in solidum Maître [T] [R], la SCP POPINEAU, MAREL, POPINEAU, [R] & AH-FENNE, la société CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST et la société COMPTA-OUEST au paiement d’une indemnité d’un montant de 250 000 euros au profit de la société CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST, en réparation du préjudice subi du fait de l’annulation des actes contractuels,

– DIRE ET JUGER nul le commandement de payer délivré par la société CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST en date du 24 octobre 2014,

– DEBOUTER la société CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST de sa demande de résiliation du contrat de gérance-libre, fondée sur le non-paiement des redevances.

En tout état de cause,

– DEBOUTER la société CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST, Madame [H] [B] et Monsieur [V] [U] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions plus amples et contraires,

– DEBOUTER Maître [T] [R] et la SCP POPINEAU-MAREL-POPINEAU, [R] & AH-FENNE de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions plus amples et contraires,

– DEBOUTER la société COMPTA-OUEST de l’ensemble de ses demandes et conclusions plus amples et contraires,

– CONDAMNER Maître [T] [R], la SCP POPINEAU-MARELPOPINEAU, [R] & AH-FENNE, la société CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST, Madame [B], Monsieur [U] et la société COMPTAOUEST au paiement, chacun, de la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 CPC et aux entiers dépens,

– ASSORTIR la décision de l’exécution provisoire Saint-Denis, le 27.01.2020

La SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST, Mme [H] [B], Mme [K] [U], et Mme [A] [U] ont conclu comme suit, par dernières conclusions notifiées par RPVA le 15 février 2022:

-DIRE que la déclaration d’appel déposée par M. [C] ne défère à la Cour aucun chef critiqué du jugement attaqué,

Par conséquent,

-DIRE que la Cour n’est saisie d’aucune demande,

-DIRE que l’appel incident de CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST suit le sort de l’appel principal, ayant été formé au-delà du délai légal,

-CONDAMNER M. [C] à verser aux concluantes la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-CONDAMNER M. [C] aux entiers dépens.

À défaut :

-CONFIRMER le jugement en toutes ses dispositions y compris les condamnations au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

sauf en ce qu’il a débouté la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST de ses demandes de condamnations de la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST pour avoir continué d’exploiter le fonds après son départ en octobre 2014,

sauf en ce qu’il a condamné la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST à verser des sommes (994,87 euros) à la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST au titre de prétendus préjudices liés à des investissements durant la location-gérance,

y ajoutant ou statuant à nouveau,

-JUGER que la condamnation de M. [C] à réparer la perte de chance de céder le fonds à hauteur de 128 000 euros bénéficiera à Mme [B], Mmes [K] et [A] [U] et la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST qui feront leur affaire personnelle du partage de l’indemnité,

-JUGER que M. [C] devra relever et garantir Mme [B], Mmes [K] et [A] [U] de toute condamnation mise à leur charge au titre de la présente décision,

-JUGER que le bail commercial signé en 2005 sur le local sis [Adresse 4] est nul, l’activité prévue en objet du bail et la nature commerciale du bail étant proscrite par le plan local d’urbanisme de 2004 ou subsidiairement JUGER que le bail commercial est résolu aux torts exclusifs du bailleur, M. [C], à compter du 12 février 2014,

En conséquence,

-ANNULER les ordonnances de référé des 19 et 26 mai 2016 ou à défaut JUGER que ces ordonnances sont de nul effet,

-ANNULER la dette locative à compter de février 2015,

-CONDAMNER M. [C] à rembourser à Mme [B] les sommes versées en exécution de l’ordonnance, soit la somme de 8 714,55 euros sauf à parfaire, avec intérêt au taux légal à compter du 19 mai 2016,

-CONDAMNER la SELARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST à verser à la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST la somme de 49 992 euros HT en réparation des préjudices en lien avec la rupture brutale des négociations sur la cession du fonds, et l’appropriation par voie de fait du fonds et en particulier de la clientèle de la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST,

-DIRE que toutes les sommes produiront intérêt au taux légal, sauf date antérieure fixée dans le présent dispositifs, au 12 août 2016, date de libération des lieux, avec anatocisme,

en tout état de cause,

-CONDAMNER tout succombant à verser à Mme [K] et [A] [U], venant aux droits de M. [U], Mme [B] et la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST, la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

-DEBOUTER les parties de toutes demande plus ample ou contraire,

-CONDAMNER tout succombant aux entiers dépens, avec distraction au profit de Maître Alain ANTOINE sur le fondement de l’article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions dernières conclusions notifiées le 28 janvier 2022, la SCP MAREL-PINEAU-[R]- AH-FENNE-CHANNE KHU HINE ‘ PONS SERVEL, et M° [T] [R], notaire associé de la SCP, concluent en ces termes :

-CONFIRMER le jugement du Tribunal judiciaire de Saint-Denis en date du 28 janvier 2020 en ce qu’il a débouté la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST des demandes qu’elle avait formulées à l’encontre de Maître [T] [R], la SCP MAREL POPINEAU [R] AF-FENNE CHANEKHU HINE PONS SERVEL,

-INFIRMER la décision en ce qu’elle a prononcé la nullité du contrat de cession de fonds sous condition suspensive et condamné Maître [T] [R] à payer à la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST la somme de 1 500 euros au titre de la restitution du dépôt de garantie et lui payer 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau :

-CONSTATER la caducité de l’acte de cession sous condition suspensive,

-En conséquence, DIRE qu’il y a lieu de restituer le dépôt de garantie à la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST,

-CONDAMNER la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST à payer à Maître [T] [R] et la SCP MAREL POPINEAU [R] AF-FENNE CHANEKHU HINE PONS SERVEL, la somme de 3 000 euros chacun, au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-LA CONDAMNER aux entiers dépens.

*

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions des parties, visées ci-dessus, pour l’exposé de leurs prétentions et moyens.

Le prononcé de l’arrêt, par mise à disposition du greffe, a été fixé au 7 décembre 2022 puis reporté au 4 janvier 2023. Par avis RPVA en date du 29 novembre 2022, les parties ont été invitées à conclure avant le 16 décembre 2023 sur les conséquences de la rédaction de la déclaration d’appel sur l’effet dévolutif des appels principal et incidents. Les parties n’ont ont émis les observations complémentaires suivantes :

– par RPVA du 15 décembre 2022, la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST, Mme [H] [B], Mme [K] [U], Mme [A] [U], soutiennent l’absence d’effet dévolutif des actes d’appel, principal et incident, conformément à l’article 550 du code de procédure civile et à la récente position de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, dans son arrêt du 30 juin 2022 : « (‘) Il résulte de ces textes que seul l’acte d’appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement, de sorte que lorsque la déclaration d’appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l’effet dévolutif n’opère pas » ;

– par RPVA du 12 décembre 2022, la société CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST indique que, compte tenu de l’absence d’indication, dans la déclaration d’appel, des chefs du jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité, la déclaration d’appel est nulle ainsi que tout appel incident ;

– par RPVA du 15 décembre 2022, M. [Z] [C] considère que l’ordonnance sur incident du 25 octobre 2021 est définitive et que l’effet dévolutif de l’appel n’est pas général mais circonscrit dans l’appel aux chefs de jugement expressément critiqués

MOTIFS

A titre liminaire, compte tenu de la date de conclusion du contrat, il sera fait application des dispositions du code civil dans leur rédaction antérieure à l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations.

Sur la déclaration d’appel

Par application de l’article 914 du code de procédure civile, issu du décret du 6 mai 2017, l’appelant fait valoir que l’ordonnance du conseiller de la mise état, ayant statué sur la nullité de la déclaration d’appel, a acquis autorité de la chose jugée. À ce titre, et à défaut d’avoir fait l’objet d’un déféré dans les quinze jours, les points tranchés ne peuvent plus être remis en cause au fond, étant rappelé que le conseiller chargé de la mise en état s’est vu attribuer une compétence exclusive. Il ajoute ensuite que ledit conseiller n’a pas été saisi d’un moyen de sanction résultant de la nullité pour vice de forme de la déclaration d’appel et, qu’en tout état de cause, le moyen de l’intimée (SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST, Mme [H] [B], Mme [K] [U] et Mme [A] [U]) n’a pas été soulevé avant toute défense au fond, contrevenant ainsi à l’article 74 du code de procédure civile.

La société CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST conclut, sur le fondement de l’article 901 du code de procédure civile, à la nullité de la déclaration d’appel aux motifs que celle-ci ne mentionne pas quels sont les chefs du jugement expressément critiqués.

Quant à la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST, elle soutient que lorsque la déclaration d’appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l’effet dévolutif n’opère pas, quand bien même la nullité de la déclaration d’appel n’aurait pas été sollicitée par l’intimé sur le fondement de l’article 901 du code de procédure civile. Elle précise que l’absence d’effet dévolutif s’impose à la Cour d’appel qui doit le soulever d’office, autrement cette juridiction excèderait ses pouvoirs. Par ailleurs, elle estime que les appels incidents, notamment celui formé par la société CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST après expiration du délai légal, tombent avec l’appel principal du fait de l’application de l’article 550 du code de procédure civile.

Sur ce,

L’article 901 du code de procédure civile dispose : « La déclaration d’appel est faite par acte contenant, outre les mentions prescrites par l’article 57, et à peine de nullité:

– la constitution de l’avocat de l’appelant;

– l’indication de la décision attaquée;

– l’indication de la cour devant laquelle l’appel est porté;

– les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité, sauf si l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible (…) ».

L’article 562 du même code prévoit quant à lui : « L’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent. La dévolution ne s’opère pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible. »

Au cas d’espèce, la décision du conseiller de la mise en état, en date du 25 octobre 2021, a statué en rappelant que la sanction attachée à la déclaration d’appel portant comme « objet / portée de l’appel : appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués », sans autre précision, ne répondait pas aux exigences posées par l’article 901 précité. Elle a également relevé que « la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST ne justifie ni même n’allègue de l’existence d’un grief du fait de cette irrégularité de forme ; que l’objet du litige n’est pas indivisible ; que l’appel ne tend pas à l’annulation du jugement ; qu’une nouvelle déclaration d’appel ne peut plus intervenir, le délai imparti à l’appelant pour conclure étant expiré depuis le 21 octobre 2020 ». Elle a ainsi conclu au rejet de l’exception de nullité.

Dans la lignée de la jurisprudence constante de la Cour de cassation, l’ordonnance rappelle dans sa motivation que « seul l’acte d’appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement. Aussi lorsque la déclaration d’appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l’effet dévolutif n’opère pas », tout en ajoutant que « la portée de l’effet dévolutif relève de la Cour et non du conseiller de la mise en état ».

Il s’en déduit, comme le soutient à juste titre l’appelant, que cette décision a acquis, en l’absence de procédure de déféré, autorité de la chose jugée. Mais, uniquement en ce qu’elle a tranché la question de l’exception de nullité, d’une part, et la fin de non-recevoir sur le défaut et la qualité à agir de l’appelant de la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST, d’autre part.

La portée de l’effet dévolutif n’a donc pas encore été tranchée.

Et, pour cause, elle relève de l’appréciation de la Cour ayant à statuer au fond puisqu’une déclaration non affectée de nullité peut néanmoins être dépourvue d’effet dévolutif. Il ne s’agit pas ici de la sanction d’un vice de procédure (même si elle produit les mêmes effets, en ce sens que la cour d’appel ne connaîtra pas du fond de l’affaire), mais d’une conséquence de la définition nouvelle donnée à l’effet dévolutif. Si le vice de forme touchant la déclaration d’appel affecte l’acte de saisine de la cour d’appel, et pose la question de sa régularité, l’effet dévolutif détermine les effets et le périmètre de cette saisine, au où elle est régulière.

L’existence d’une autre sanction que la nullité pour vice de forme est d’ailleurs rappelée par la circulaire la circulaire du 4 août 2017, qui précise même clairement que la « nullité de forme de la déclaration d’appel est doublée d’une autre sanction puisqu’en cas d’appel général, l’effet dévolutif de l’appel ne jouera pas et la cour d’appel ne sera pas saisie. »

Cela vient compléter l’idée poursuivie par la réforme, voir circonscrire l’appel à des chefs de la décision de première instance expressément énoncés par la déclaration d’appel. La circulaire d’application de ce décret indique encore : «s’agissant de la procédure d’appel à proprement parler, le décret redéfinit l’objet de cette voie de recours, dont il est désormais expressément précisé qu’elle vise à critiquer la décision des premiers juges. Le décret encadre la portée de l’effet dévolutif de l’appel, qui n’impose de statuer à nouveau en fait et en droit que dans les limites qu’il détermine. Est affirmé le principe selon lequel l’appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs du jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent. »

Dans le même sens, la Cour de cassation (cass. 2° civ. 30 janvier 2020) a rappelé que l’article 562 du code de procédure civile doit s’interpréter par rapport aux articles 542, 561 et 901 4° du code de procédure civile, l’ensemble constituant l’économie de la réforme du 6 mai 2017.

En conséquence, lorsque l’appelant se contente dans sa déclaration d’appel du 21 juillet 2020 de mentionner que l’objet, la portée de son appel consiste en un « appel limité aux chefs de jugement critiqués », sans autre précision ou annexe autre que le jugement querellé, il doit en être tiré la conséquence que son appel est privé d’effet dévolutif, et que la Cour n’est saisie d’aucune demande. En effet,les moyens développés dans le corps des conclusions, déposées nécessairement ultérieurement, ne sont pas de nature à suppléer cette carence. Cette solution s’impose d’autant plus au cas particulier qu’aucune autre déclaration d’appel aux fins de régularisation n’est intervenue dans les délais légaux (3 mois à compter de la déclaration d’appel).

Reste toutefois posée la question de l’effet dévolutif attaché aux appels incidents formés par les intimés.

*

Aux termes de l’article 550 du CPC, « sous réserve des articles 905-2, 909 et 910, l’appel incident ou l’appel provoqué peut être formé, en tout état de cause, alors même que celui qui l’interjetterait serait forclos pour agir à titre principal. Dans ce dernier cas, il ne sera toutefois pas reçu si l’appel principal n’est pas lui-même recevable ou s’il est caduc. »

Au cas particulier, la cour n’ayant jamais été valablement saisie de l’appel principal pour les motifs exposés supra, il convient par conséquent de déclarer irrecevables les appels incidents.

Sur les mesures accessoires

M. [Z] [C], partie qui succombe, devra supporter l’intégralité des dépens.

Il sera équitable, par application de l’article 700 du code de procédure civile, qu’il soit condamné à payer à la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST, Mme [H] [B], Mme [K] [U] et Mme [A] [U], la somme de 5 000 euros.

Les autres demandes formulées par la SCP POPINEAU-MAREL-[R] & AH-FENNE, Maître [T] [R] et, la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST seront rejetées, puisqu’elles ne pas dirigées contre l’appelant principal.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire rendu en dernier ressort, en matière commerciale, par mise à disposition au greffe conformément à l’article 451 alinéa 2 du code de procédure civile ;

CONSTATE que l’acte par lequel, le 21 juillet 2020, M. [Z] [C] a interjeté appel du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion le 28 janvier 2020 est dépourvu d’effet dévolutif,

en conséquence

DÉCLARE IRRECEVABLES les appels incidents formés par :

la SARL CEDRIC ARTISTIQUE DE L’OUEST,

la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST, Mme [H] [B], [K] [U], [A] [U],

la SCP POPINEAU-MAREL-[R] & AH-FENNE et Maître Valérie [R],

DIT qu’il n’y a pas lieu de statuer,

Vu l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [Z] [C] à payer à la SARL CENTRE ARTISTIQUE DE L’OUEST, Mme [H] [B], [K] [U], [A] [U], une indemnité de 5 000 euros au titre des frais non répétibles,

CONDAMNE M. [Z] [C] aux dépens d’appel.

Le présent arrêt a été signé par Madame Sophie PIEDAGNEL, Conseillère, et par Madame Nathalie BEBEAU, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE SIGNE LA PRÉSIDENTE

 


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