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REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 9
ARRET DU 19 JANVIER 2023
(n° , 9 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/08968 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDUXZ
Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Avril 2021 – Tribunal de Commerce de BOBIGNY – RG n° 2021L00248
APPELANTE
SOCIETE TWENTIETH CENTURY FOX FILM CORPORATION
[Localité 1]
[Localité 5] – ETATS UNIS
Représentée par Me Magali THORNE de la SELARL DUCLOS, THORNE, MOLLET-VIEVILLE ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0075, substituée par Me Inès FAYE, avocat postulant et plaidant
INTIMEE
S.A. EUROPACORP
N° SIRET : 384 824 041
[Adresse 4]
[Localité 7]
Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018, avocat postulant
Représentée par Me Isabelle GIMONET, avocat au barreau de PARIS, toque : C2338, avocat plaidant
PARTIES INTERVENANTES FORCEES
S.E.L.A.F.A. MJA, en la personne de Me [M] [E]
en qualité de mandataire judiciaire de la SA EUROPACORP
[Adresse 2]
[Localité 6]
S.E.L.A.R.L. BALLY MJ,
en qualité de mandataire judiciaire de la SA EUROPACORP
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représentées par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018, avocat postulant
Représentées par Me Isabelle GIMONET, avocat au barreau de PARIS, toque : C2338, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 23 novembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Sophie MOLLAT, Présidente
Madame Isabelle ROHART, Conseillère
Madame Déborah CORICON, Conseillère
qui en ont délibéré
GREFFIERE : Madame FOULON, lors des débats
ARRET :
– contradictoire
– rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame Sophie MOLLAT, Présidente et par Madame FOULON, Greffière .
**********
La société Europacorp est une société anonyme cotée en bourse, fondée par M. [N] [F], qui a pour activité la production et la distribution d’oeuvres audio-visuelles.
Par un jugement du 13 mai 2019, le tribunal de commerce de Bobigny a ouvert une procédure de sauvegarde à l’égard de la société Europacorp. Le plan de sauvegarde a été homologué par un jugement du 24 juillet 2020.
La société 20th Century Fox Film Corporation (TCF), est une société américaine qui a pour activité la production et la distribution de films cinématographiques.
Par un contrat de 2006, la société TCF a confié à la société Europacorp la distribution de son film ‘HITMAN’ en France, DROM COM, Monaco et Andorre, en contrepartie du paiement de redevances annuelles.
Le contrat prévoyait l’envoi par la société Europacorp à la société TCF de bordereaux de redditions de compte faisant apparaître la quote-part due à la société TCF au titre de l’exploitation du film sur une année civile, sans prévoir de délai pour adresser les redditions de comptes.
Par jugement du 13 mai 2019, le tribunal de commerce de Bobigny a placé la société Europacorp en procédure de sauvegarde.
Suite à plusieurs relances de la part de la société TCF, la société Europacorp a adressé, le 30 juillet 2020, les redditions de comptes pour l’année 2019 en informant la société TCF que la somme de 58 607,32 dollars avait été gelée en raison de l’ouverture de la procédure de sauvegarde à son égard.
La société TCF a sollicité un relevé de forclusion par requête du 15 décembre 2020, afin d’être autorisée à faire valoir sa créance d’un montant de 58 607,32 dollars auprès du mandataire judiciaire.
Par ordonnance du 4 janvier 2021, le juge-commissaire a rejeté la demande de relevé de forclusion au motif que la requête n’avait pas été déposée au greffe du tribunal de commerce dans le délai de six mois prévu par l’article L. 622-26 du code de commerce.
La société TCF a formé opposition contre l’ordonnance par lettre recommandée avec accusé de réception du 18 janvier 2021.
Par jugement du 27 avril 2021, le tribunal de commerce de Bobigny a confirmé en toutes ses dispositions l’ordonnance rendue le 4 janvier 2021 par le juge-commissaire.
La société TCF a interjeté appel du jugement par déclaration du 7 mai 2021.
Par conclusions du 17 février 2022, la société Europacorp a soulevé un incident aux fins de caducité de la déclaration de la société TCF.
Par assignation du 2 mars 2022, la société TCF a assigné la SELAFA MJA prise en la personne de Maître [E], et la SELAFA BAILLY MJ es qualités de mandataires judiciaires de la société Europacorp.
Par une ordonnance du 19 mai 2022, le conseiller de la mise en état a rejeté les demandes de caducité et d’irrecevabilité de l’appel de la société TCF, et rejeté la demande d’irrecevabilité de l’appel incident de la société Europacorp.
Saisie sur déféré, la cour a, par arrêt du 27 octobre 2022, confirmé l’ordonnance.
*****
Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 22 août 2022, la société 20th Century Fox Film Corporation demande à la Cour de’:
– La recevoir en son appel et l’y déclarer bien fondée.
– Confirmer le jugement du 27 avril 2021 en ce qu’il l’a déclarée recevable en sa demande.
– Infirmer le jugement du 27 avril 2021 en ce qu’il a dit qu’il n’y a pas lieu de relever cette dernière de la forclusion encourue au motif que sa demande était mal fondée, faute d’avoir été introduite dans le délai de six mois prévu à l’article L622-26 du Code de Commerce.
Statuant à nouveau,
– Dire qu’elle n’a été informée ni par EUROPACORP ni par le mandataire judiciaire de l’ouverture d’une procédure de sauvegarde à l’encontre d’EUROPACORP et d’avoir à déclarer sa créance à ladite procédure.
– Dire encore qu’elle a été placée, du fait des omissions délibérées d’EUROPACORP et de son comportement déloyal, dans l’impossibilité de connaître l’existence de sa créance avant le 30 juillet 2020.
– Dire que le délai de 6 mois pour solliciter le relevé de forclusion n’a donc couru qu’à compter du 30 juillet 2020 – date à laquelle EUROPACORP l’a finalement informée de sa qualité de créancier antérieur à la procédure de sauvegarde ouverte à son encontre, pour les redevances collectées par EUROPACORP jusqu’au 12 mai 2019 -, et a pris fin le 30 janvier 2021.
– Dire qu’elle était donc bien fondée à solliciter le relevé de forclusion par requête du 15 décembre 2020.
– Dire qu’en tout état de cause, la dissimulation intentionnelle de sa dette par EUROPACORP justifie qu’elle soit relevée de la forclusion.
– Dire en conséquence qu’il y a lieu de la relever de la forclusion pour lui permettre de déclarer sa créance.
– Débouter EUROPACORP, la SELARL BALLY M.J. et la SELAFA MJA, prise en la personne de Maître [M] [E], es qualités de mandataires judiciaires de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.
– Condamner EUROPACORP, la SELARL BALLY M.J. et la SELAFA MJA, prise en la personne de Maître [M] [E], es qualités de mandataires judiciaires, à 7500 euros au titre de l’article 700 CPC et aux dépens.
*****
Dans leurs dernières conclusions signifiées par voie électronique le 1er juin 2022, la société Europacorp, ainsi que la société MJA prise en la personne de Maître [E] et la société Bailly ML es qualités de mandataires judiciaires de la société Europacorp, demandent à la Cour de’:
– Confirmer le jugement du 27 avril 2021 du Tribunal de Commerce de Bobigny en ce qu’il a débouté TWENTIETH CENTURY FOX FILM CORPORATION de sa demande en relevé de forclusion et l’a condamnée aux entiers dépens et l’infirmer en ce qu’il l’a déclarée recevable ;
Et, par conséquent :
A titre principal
– CONSTATER que le délai prévu à l’article R. 621-21 du code de commerce n’a pas été respecté et, par conséquent, déclarer TWENTIETH CENTURY FOX FILM CORPORATION irrecevable en son opposition ;
A titre subsidiaire
– CONSTATER que TWENTIETH CENTURY FOX FILM CORPORATION ne pouvait pas sérieusement ignorer l’existence de sa créance antérieure au jugement ;
– CONSTATER que TWENTIETH CENTURY FOX FILM CORPORATION ignorait uniquement le montant de sa créance intérieure, ce qui ne l’empêchait pas de faire une déclaration de créance dans les délais légalement prévus ;
– CONSTATER que TWENTIETH CENTURY FOX FILM CORPORATION ne peut pas bénéficier du report du point de départ du délai de 6 mois prévu à l’article L 622-26 du code de commerce ;
– CONSTATER que TWENTIETH CENTURY FOX FILM CORPORATION bénéficiait d’un délai expirant le 22 novembre 2019 pour effectuer une requête en relevé de forclusion;
– DÉCLARER, par conséquent, que TWENTIETH CENTURY FOX FILM CORPORATION est irrecevable en son action en relevé de forclusion ;
A titre infiniment subsidiaire
– CONSTATER que TWENTIETH CENTURY FOX FILM CORPORATION bénéficiait d’un délai expirant le 30 juin 2020 pour effectuer une requête en relevé de forclusion ;
– DÉCLARER, par conséquent, que TWENTIETH CENTURY FOX FILM CORPORATION est de plus fort irrecevable en son action en relevé de forclusion ;
En tout état de cause :
– CONFIRMER en conséquence, l’ordonnance du juge commissaire du 4 janvier 2021 ;
– DEBOUTER TWENTIETH CENTURY FOX FILM de l’intégralité de ses demandes ;
– CONDAMNER TWENTIETH CENTURY FOX FILM CORPORATION au paiement de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– CONDAMNER TWENTIETH CENTURY FOX FILM CORPORATION aux entiers dépens.
SUR CE,
Sur le délai d’opposition
Les intimées font valoir que la société TCF ne produit aucun document justifiant la date de réception de la notification et l’envoi de la contestation au greffe ; qu’à défaut de ces documents, sa demande est irrecevable car il n’est pas établi qu’elle ait été formé dans le délai de l’article R. 621-21 du code de commerce.
L’appelante rappelle que l’article R. 621-21 alinéa 4 du code de commerce, dispose que les ordonnances du juge-commissaire ‘peuvent faire l’objet d’un recours devant le tribunal dans les dix jours de la communication ou de la notification, par déclaration faite contre récépissé ou adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception au greffe’, et que l’article 643 du code de procédure civile prévoit que le délai d’opposition est augmenté de deux mois pour les personnes demeurant à l’étranger.
Elle indique qu’en l’espèce, elle a formé un recours le 18 janvier 2021 contre l’ordonnance du juge-commissaire rendue le 4 janvier 2021, et que demeurant à l’étranger elle disposait d’un délai de 2 mois.
Elle indique qu’en tout état de cause l’avis de notification de l’ordonnance attaquée a été réceptionné le 11 janvier 2021 par son conseil, et qu’en conséquence, en vertu de l’article 668 du code de procédure civile, qui dispose que ‘la date de notification par voie postale est (‘) à l’égard de celui à qui elle est faite, la date de réception de la lettre’, elle a formé son opposition moins de 10 jours après notification de l’ordonnance à son avocat.
Il ressort des pièces produites par la société TCF que celle-ci a formé opposition le 18 janvier 2021, réceptionnée le 19 janvier 2021 par le greffe, soit dans le délai de 2 mois prévu par l’article 643 du code de procédure civile pour les personnes demeurant à l’étranger, à l’ordonnance rendue le 4 janvier 2021 par le juge-commissaire. Son opposition est donc recevable.
Sur le relevé de forclusion
L’appelante invoque les dispositions des articles L. 622- 6 alinéa 1 et 2 et L. 626-26 du code de commerce, et indique qu’il ressort de ces textes que le créancier peut obtenir le relevé de forclusion lorsque l’absence de déclaration de sa créance n’est pas due à sa faute, notamment lorsqu’il a été omis sur la liste des créanciers par le débiteur, et que lorsque le créancier a été placé dans l’impossibilité de connaître l’obligation du débiteur avant l’expiration du délai de six mois pour agir en forclusion, le délai court à compter de la date à laquelle il est établir qu’il ne pouvait ignorer l’existence de l’obligation.
Elle indique que la jurisprudence énonce que la dissimulation intentionnelle de sa dette par le débiteur justifie un relevé de forclusion ; qu’en l’espèce, l’absence de déclaration de créance n’est pas due à sa faute mais à celle de la société Europacorp qui a intentionnellement omis d’informer le mandataire judiciaire de l’existence de cette créance en omettant d’indiquer la société TCF dans la liste de ses créanciers, et a omis d’informer l’appelante de l’existence de la procédure de sauvegarde, ce qui l’a placée dans l’impossibilité de connaître l’existence de sa créance ; qu’en conséquence elle n’a pas été avertie par le mandataire dans les 15 jours suivant le jugement d’ouverture de la procédure de sauvegarde d’avoir à déclarer sa créance.
Elle souligne que cette situation lui est particulièrement préjudiciable étant basée à l’étranger.
Elle expose à ce titre que le règlement n° 2015/848 du 20 mai 2015 relatif aux procédures d’insolvabilité prévoit en son article 54 une obligation d’informer les créanciers étrangers connus, par l’envoi individuel d’une note, et que la jurisprudence a précisé que le défaut d’envoi de la note individuelle justifiait que le créancier concerné soit relevé de sa forclusion.
Elle conteste être de mauvaise foi aux motifs soulevés par les intimés qu’elle dispose d’une filiale en France qui a constitué un GIE avec une filiale d’Europacorp, que la procédure de sauvegarde d’Europacorp a été très médiatisée en France et aux États-Unis, et que le conseil de l’appelante aurait été présent dans plusieurs contentieux liant les parties. Elle réplique que la filiale française de la société TCF n’est pas sa filiale directe et opère dans un secteur distinct, que les deux articles de presse produits par l’intimée ne suffisent pas à justifier du fait qu’elle aurait été informée de la procédure de sauvegarde ouverte à l’égard de la société Europacorp ; qu’enfin, son conseil n’est intervenu qu’au moment de la saisine en novembre 2020 et n’était pas le conseil habituel.
L’appelante conclut donc que l’absence de déclaration de sa créance n’est pas due à sa faute mais à celle d’Europacorp.
Elle considère ensuite avoir été placée dans l’impossibilité de connaître l’existence de sa créance avant l’expiration du délai de six mois pour agir en relevé de forclusion car en l’espèce, les accords liant les parties prévoyaient que les redevances étaient dues sur l’année civile entière du 1er janvier au 31 décembre et qu’Europacorp avait pour habitude d’adresser l’état des redevances dues dans les trois premiers mois de l’année suivante ; que cependant pour l’année 2020, Europacorp n’avait pas adressé l’état des redevances justifiant l’existence de sa créance, qu’elle a alors relancé Europacorp par courrier du 18 mai 2020 puis les 27 mai 2020 et le 3 juin 2020 et que ce n’est que le 30 juillet 2020, que l’état des redevance pour l’année 2019 lui est parvenue et qu’Europacorp l’informait de l’existence de la procédure de sauvegarde.
Par conséquent, l’appelante énonce que dans l’ignorance de l’existence de la procédure de sauvegarde ouverte à l’encontre de la société Europacorp, elle ignorait avoir la qualité de créancier antérieur pour les redevances collectées par Europacorp jusqu’au 12 mai 2019.
Elle considère donc que le délai de six mois doit commencer à courir le 30 juillet 2020, date à laquelle Europacorp l’a informée de la procédure de sauvegarde ouverte à son égard ; que ce délai devait expirer le 31 janvier 2021, et que son action ayant été introduite le 15 décembre 2020, elle doit être considérée comme recevable.
Enfin l’appelante fait valoir que l’omission par Europacorp de l’informer de l’ouverture de la procédure de sauvegarde est volontaire ; qu’en l’espèce la société Europacorp lui a écrit dix jours après l’ouverture de la procédure de sauvegarde afin de lui poser des questions sur les redevances dues pour le film TAKEN sans en profiter pour l’informer de son obligation de déclarer sa créance ni lors des divers échanges.
Les intimées rappellent dans un premier temps que selon l’article L. 622-7 du code de commerce, ‘le jugement ouvrant la procédure emporte, de plein droit, interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d’ouverture, à l’exception du paiement par compensation de créances connexes. Il emporte également, de plein droit, interdiction de payer toute créance née après le jugement d’ouverture, non mentionnée au I de l’article L. 622-17. Ces interdictions ne sont pas applicables au paiement des créances alimentaires’.
Elles indiquent qu’en l’espèce, le montant des recettes qui revient à la société TCF pour la distribution du film est inconnu au moment de la conclusion du contrat de sorte que ce montant naît au fur et à mesure de l’exploitation des droits, et constitue le fait générateur de ces créances futures. Elle indique que cette situation a été analysée par la Commission du Conseil Supérieur de la Propriété Littéraire et Artistique. Elle expose que c’est la raison pour laquelle elle a différencié dans son courrier du 30 juillet 2020, les recettes afférentes à la distribution ayant eu lieu entre le 1er janvier 2019 et le 12 mai 2019 d’un montant de 58 607,32 dollars, et celles pour la distribution du film entre le 13 mai 2019 et le 31 décembre 2019 d’un montant de 21 007,41 dollars, et qu’ainsi les recette antérieures au 13 mai 2019 sont des créances antérieures dont le paiement est gelé par la procédure de sauvegarde.
Les intimées indiquent s’agissant du délai applicable pour demander le relevé de forclusion, qu’au regard des articles L. 622-24, R. 622-24 et L. 622-26 du code de commerce, il faut distinguer trois types de créance antérieures’:
– les créances dont l’existence est connue le jour de la publication du jugement d’ouverture mais dont le montant n’est pas encore fixé, qui doivent être déclarées au passif sur la base d’une évaluation dans le délai de quatre mois suivant la publication du jugement d’ouverture de la procédure si le créancier n’a pas son siège social en France. À défaut de déclaration, le créancier forclos pourra solliciter un relevé de forclusion dans les six mois suivant la publication du jugement d’ouverture conformément à l’article L. 622-26 du code de commerce.
– la créance antérieure dont l’existence était inconnue au jour de la publication du jugement mais qui est devenue connue dans les six mois suivant la publication du jugement d’ouverture, dans ce cas l’action en relevé de forclusion doit être exercée dans les six mois suivant la publication du jugement d’ouverture et le créancier ne peut pas bénéficier des dispositions sur le report du point de départ du délai de six mois.
– la créance antérieure dont l’existence ne pouvait pas être connue par le créancier dans les six mois suivant la publication du jugement d’ouverture. Si la créance est manifestement inconnue dans les six mois suivants la publication du jugement d’ouverture, l’action en relevé de forclusion peut être exercée dans les six mois suivants la date à laquelle le créancier ne pouvait ignorer l’existence de sa créance.
Elles exposent qu’en l’espèce, la société TCF entretient une confusion entre la connaissance du montant de la créance et la connaissance de son existence, et que si en effet ce n’est que le 30 juillet 2020 qu’elle pouvait connaître le montant de la créance, elle connaissait son existence au jour de la publication du jugement d’ouverture de la procédure de sauvegarde puisque la créance naît de l’exploitation du film.
Les intimées considèrent que la société TCF aurait donc dû faire une déclaration de créance prévisionnelle sur la base des redditions de comptes des années précédentes. Elle conteste que la société TCF puisse bénéficier du report du point de départ du délai de six mois car elle ne pouvait ignorer l’existence de la créance.
Elles ajoutent enfin que la société TCF est de mauvaise foi en affirmant que, étant une société étrangère, elle n’était pas en mesure de connaître la situation de son débiteur situé dans un autre pays ni les conséquences attachées à une absence de déclaration de créance, alors que TCF dispose d’une filiale en France qui a constitué un GIE avec Europacorp Home Entertainment, filiale du groupe Europacorp, ayant aussi bénéficié d’une procédure de sauvegarde, et que le conseil de la société TCF était présent lors de plusieurs contentieux entre les parties. Elle expose par ailleurs que la procédure de sauvegarde d’Europacorp a été très médiatisée en France et aux États-Unis au regard de la renommée de cette société appartenant à [N] [F].
Subsidiairement, elles exposent que l’appelante ne pouvait ignorer l’existence de sa créance au 1er janvier 2020, comme l’ont retenu les premiers juges, si bien qu’elle pouvait exercer son action en relevé de forclusion jusqu’au 30 juin 2020.
Aux termes des dispositions du 2ème alinéa de l’article L. 622-6 du code de commerce, lorsqu’une procédure collective est ouverte, ‘Le débiteur remet à l’administrateur et au mandataire judiciaire la liste de ses créanciers, du montant de ses dettes et des principaux contrats en cours. Il les informe des instances en cours auxquelles il est partie’.
Aux termes des dispositions de l’article L. 622-24 du même code : ‘A partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d’ouverture, à l’exception des salariés, adressent la déclaration de leurs créances au mandataire judiciaire dans des délais fixés par décret en Conseil d’Etat. (…) La déclaration des créances doit être faite alors même qu’elles ne sont pas établies par un titre. Celles dont le montant n’est pas encore définitivement fixé sont déclarées sur la base d’une évaluation’.
L’article R. 622-24 du même code prévoit un délai de déclaration de 4 mois pour les sociétés disposant d’un siège social sis à l’étranger.
Aux termes des dispositions du dernier alinéa de l’article L. 622-26 du même code : ‘L’action en relevé de forclusion ne peut être exercée que dans le délai de six mois. Ce délai court à compter de la publication du jugement d’ouverture (…). Par exception, si le créancier justifie avoir été placé dans l’impossibilité de connaître l’obligation du débiteur avant l’expiration du délai de six mois, le délai court à compter de la date à laquelle il est établi qu’il ne pouvait ignorer l’existence de sa créance’.
Il résulte de ces dispositions que la créance dont l’existence était connue le jour de la publication du jugement d’ouverture mais dont le montant n’était pas encore fixé, doit être déclarée dans un délai de 4 mois à compter de la publication du jugement si le créancier est établi à l’étranger. A défaut de déclaration dans ce délai, le créancier peut demander un relevé de forclusion dans un délai de 6 mois suivant la publication du jugement. Il ne peut cependant bénéficier du report du point de départ de ce délai, la loi n’ouvrant cette possibilité qu’au créancier dont l’existence même de la créance était ignorée au jour de l’ouverture et qui se serait trouvé dans l’impossibilité de connaître l’existence de sa créance.
En l’espèce, la société TCF avait connaissance, le jour de l’ouverture de la procédure de sauvegarde, de l’existence de sa créance envers la société Europacorp puisque celle-ci trouvait sa cause dans un contrat conclu en 2006 prévoyant le versements de redevances annuelles. Par suite, elle devait déclarer sa créance selon les modalités rappelées ci-dessus et ne peut prétendre à un report du point de départ du délai de 6 mois pour être relevée de forclusion, dans la mesure où elle avait connaissance de l’existence de sa créance le jour du jugement d’ouverture. Il n’y a donc pas lieu d’examiner ses moyens au soutien de l’application de la dernière phrase du dernier alinéa de l’article L. 622-26.
Le jugement sera confirmé.
Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens
La société TCF demande la condamnation d’Europacorp, la SELARL BALLY M.J. et la SELAFA MJA, prise en la personne de Maître [M] [E], es qualités de mandataires judiciaires, à lui payer la somme de 7 500 euros
Les intimées demandent la condamnation de la société TCF à lui payer la somme de 10 000 euros.
Il y a lieu de condamner la société TCF, qui succombe, à payer aux intimées la somme de 3 000 euros sur ce fondement.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement attaqué,
Y ajoutant,
Condamne la société 20th Century Fox Film Corporation à payer la somme de 3 000 euros à la société Europacorp, la société MJA prise en la personne de Me [E] et la SELARL Bally MJ es-qualités de mandataires judiciaires de la société Europacorp,
Condamne la société 20th Century Fox Film Corporation aux entiers dépens.
La greffière La présidente