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COUR D’APPEL
DE RIOM
Troisième chambre civile et commerciale
ARRET N°
DU : 01 Mars 2023
N° RG 21/01134 – N° Portalis DBVU-V-B7F-FTHH
FK
Arrêt rendu le Premier Mars deux mille vingt trois
Sur APPEL d’une décision rendue le 20 Avril 2021 par le Tribunal de commerce de CUSSET (RG n° 2020/000433)
COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :
Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre
Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller
M. François KHEITMI, Magistrat Honoraire
En présence de : Mme Christine VIAL, Greffier, lors de l’appel des causes et du prononcé
ENTRE :
La société THEMAFORTE
SAS immatriculée au RCS de Lyon sous le n° 828 718 312 00014
[Adresse 19]
[Adresse 19]
Représentants : Me Sébastien RAHON, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND (postulant) et Me Sylvain LETEMPLIER, avocat au barreau de LYON (plaidant)
APPELANTE
ET :
M. [P] [I]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentant : Me Antoine PORTAL de la SARL TRUNO & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
La société ALTO EVENTI
SAS à associé unique immatriculée au RCS de Moulins sous le n° 825 236 987 00012
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentant : Me Antoine PORTAL de la SARL TRUNO & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
INTIMÉS
DEBATS : A l’audience publique du 04 Janvier 2023 Monsieur KHEITMI a fait le rapport oral de l’affaire, avant les plaidoiries, conformément aux dispositions de l’article 785 du CPC. La Cour a mis l’affaire en délibéré au 01 Mars 2023.
ARRET :
Prononcé publiquement le 01 Mars 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Exposé du litige :
La SAS Themaforte, immatriculée au registre du commerce et des sociétés du tribunal de commerce le Lyon le 13 avril 2017, a fait l’objet d’une modification des statuts et d’une augmentation de capital le 10 décembre 2018 ; elle a depuis lors pour associés Mme [L] [F], détentrice de la majorité des actions, M. [Z] [F] et M. [P] [I], la présidence étant assurée par Mme [F]. L’objet principal de cette société est la production d’expositions thématiques.
Le 31 décembre 2018, la SAS Themaforte a émis, aux noms de M. [P] [I] et de la SASU Alto Eventi, une facture de 3 003,53 euros pour des « Frais de mise à disposition de la structure Attractive London pour la soirée de lancement et action de relations publiques de la SASU Alto Eventi et de [P] [I], son dirigeant ».
Cette facture étant restée impayée, la SAS Themaforte a fait assigner, le 1er août 2019, la SASU Alto Eventi devant le tribunal de commerce de Cusset pour obtenir paiement de la dite facture, et d’une somme de 2 000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive.
Le tribunal de commerce, suivant un jugement contradictoire du 20 avril 2021, a principalement :
– jugé que la SAS Themaforte ne justifiait d’aucun intérêt à agir, et l’a déboutée de sa demande en paiement de la dite facture ;
– déclaré irrecevable une intervention volontaire formée par M. [P] [I], en paiement de la valeur de ses actions de la SAS Themaforte ;
– déclaré recevable l’intervention de M. [I], en paiement de ses frais engagés pour la SAS Themaforte, et condamné celle-ci à lui payer une somme de 1 667,21 euros à ce titre ;
– dit que la SASU Alto Eventi n’a pas engagé sa responsabilité envers la SAS Themaforte ;
– condamné la SAS Themaforte aux dépens, et au paiement des sommes de 500 et de 300 euros à la SAS Alto Eventi et à M. [I], par application de l’article 700 du code de procédure civile.
Le tribunal a notamment énoncé, dans les motifs du jugement, que la SAS Themaforte n’avait pas été partie à un acte conventionnel du 1er mars 2017, passé entre la SASU Alto Eventi et une SAS Comunicom et Associés, en exécution de laquelle avait été réalisée la prestation facturée.
La SAS Themaforte, suivant une déclaration faite au greffe de la cour le 20 mai 2021, a interjeté appel de ce jugement, dans toutes ses dispositions lui faisant grief.
La société appelante expose, sur la facture susdite, qu’elle a elle-même conçu et commercialisé un premier concept d’exposition dénommé Attractive London, et que c’est encore elle qui, sur la demande de M. [I], a organisé et monté plusieurs scénographies de cette exposition à l’espace médiéval [17] à [Localité 18], espace qu’elle avait elle-même pris en location ; que la facture en litige comporte les mentions obligatoires prévues au code général des impôts et à l’article L. 441-3 du code de commerce, et se fonde sur des faits et des coûts facilement vérifiables ; qu’elle l’a émise de manière équitable, pour les frais liés à cette manifestation qu’elle a prise en charge ; que la SASU Alto Eventi s’est appropriée la manifestation pour ses seuls besoins, alors que la SAS Themaforte l’avait organisée dans le but de démontrer à ses prospects son savoir-faire, et d’illustrer par cet exemple le concept qu’elle commercialisait auprès d’organisateurs de foires, d’expositions ou de salons ; que cette appropriation constitue un enrichissement sans cause, et qu’il y a lieu de condamner la SASU Alto Eventi à payer la facture, sur la base s’il y a lieu de ce dernier fondement.
La SAS Themaforte demande d’autre part que la SASU Alto Eventi soit condamnée à lui verser 100 000 euros de dommages et intérêts pour parasitisme commercial et actes déloyaux : elle affirme cette dernière société et M. [I] se sont approprié ses créations et réalisations, se mettant en avant eux-mêmes au détriment de la SAS Themaforte ; la SASU Alto Eventi n’a pas rempli ses obligations envers elle, en s’abstenant de donner une extension satisfaisante à l’exposition Attractive London, qu’elles avaient développée conjointement. Elle demande enfin, à titre subsidiaire, l’allocation d’une autre indemnité de 25 000 euros, en réparation de son « préjudice d’image ».
La SASU Alto Eventi forme appel incident, et conclut à l’irrecevabilité des demandes fondées sur la facture du 31 décembre 2018, faute d’intérêt et de qualité pour agir, et de la demande au titre du préjudice d’image, formée pour la première fois en cause d’appel. À titre subsidiaire elle conclut au débouté de la SAS Themaforte de ses demandes fondées sur cette facture ou sur l’enrichissement sans cause, et de toutes ses demandes indemnitaires. Elle fait valoir, sur la facture, que la SAS Themaforte n’a pas été et ne pouvait être partie à la convention commerciale du 1er mars 2017, faute d’avoir eu d’existence légale à cette date ; qu’elle n’a d’ailleurs pas participé à l’organisation de l’exposition ; et qu’au surplus cette facture n’est pas fondée. La SASU Alto Eventi conteste l’activité parasitaire et déloyale que lui reproche l’appelante : elle n’a pas tiré profit du savoir-faire et de la notoriété de la SAS Themaforte, au surplus l’exposition Attractive London, que cette dernière société n’a pas créée, n’est pas protégée par un droit relevant de la propriété intellectuelle.
M. [I], formant appel incident lui aussi, demande à la cour de déclarer recevable son action en paiement de la valeur des actions qu’il détient dans la SAS Themaforte, et de condamner celle-ci à lui verser à ce titre une somme de 2 000 euros. Il fait valoir qu’il a informé cette société, par lettre du 10 novembre 2018, de son intention de se retirer, que cette décision a été évoquée lors d’une assemblée générale du 7 décembre suivant, et que la présidente lui a annoncé le versement de la somme de 2 000 euros pour le prix de ces actions, somme qui cependant ne lui a pas été payée. Il conclut à la confirmation du jugement, en ce qu’il a condamné la SAS Themaforte à lui payer une somme de 1 667,21 euros au titre des frais qu’il a exposés pour cette société.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 24 novembre 2022.
Il est renvoyé, pour l’exposé complet des demandes et observations des parties, à leurs dernières conclusions déposées au greffe le 22 septembre 2022 et le 26 octobre 2022.
Motifs de la décision :
Sur la facture du 31 décembre 2018 :
La SAS Themaforte a manifestement intérêt à demander paiement d’une facture qu’elle prétend lui être due, c’est donc par erreur que le tribunal a jugé qu’elle ne justifiait pas d’un intérêt à agir. M. [P] [I] et la SASU Alto Eventi contestent d’autre part la qualité à agir de la SAS Themaforte, aux motifs qu’elle n’a pas réalisé les prestations facturées, et qu’elle n’avait pas d’existence légale, au jour où la SASU Alto Eventi et la société Comunicon & Associés ont conclu ensemble une convention commerciale, le 1er mars 2017 ; cependant ces observations portent non sur la qualité à agir de la SAS Themaforte, mais sur le fond même de son droit à obtenir le paiement qu’elle demande ; il n’y a pas lieu de déclarer irrecevable la demande de la SAS Themaforte, et il convient d’examiner sur le fond le mérite de cette demande. Le jugement sera infirmé, en ce qu’il a jugé que la SAS Themaforte ne justifiait pas d’un intérêt à agir, absence d’intérêt qui d’ailleurs aurait dû conduire la juridiction non à un débouté, mais à une décision d’irrecevabilité.
La SAS Themaforte doit, pour obtenir paiement, établir qu’elle a réalisé la prestation facturée, en exécution d’une commande passée par la SASU Alto Eventi.
Or cette société n’avait, à la date de la prestation qu’elle dit avoir réalisée, aucune existence juridique, puisqu’elle a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 13 avril 2017, qu’elle n’a donc acquis la personnalité morale qu’à cette date conformément à l’article 1842 du code civil, que la prestation en cause aurait été réalisée en février ou en mars 2017, et que la SAS Themaforte ne fait pas état d’engagements qui auraient été pris en son nom par des tiers alors qu’elle était en formation, comme le prévoit l’article 1843 du même code ; par ce seul motif, la demande en paiement de la SAS Themaforte au titre de la facture susdite apparaît mal fondée, et doit être rejetée, faute pour cette société d’avoir pu contracter et réaliser elle-même des prestations, avant la date de son immatriculation.
Au surplus la société appelante ne justifie, ni même ne prétend avoir reçu commande de la SASU Eventi : elle déclare qu’elle a conçu et commercialisé un « concept d’exposition » dénommé Attractive London, et que « sur les instances de M. [P] [I] [elle] a organisé et monté plusieurs scénographies de l’exposition à l’espace médiéval de [Localité 18], de manière à démontrer son savoir-faire et son concept aux organisateurs de salons et de foire » (cinquième page des conclusions de la SAS Themaforte) ; que « la société Alto Eventi et M. [I] ont organisé unilatéralement et à leur seule initiative le 10 mars 2017 une réception privée en soirée, dans le cadre de l’exposition montée par la SAS Themaforte » (même page des conclusions de la société appelante) ; qu’à cette occasion, « M. [I] a mis en avant les seules activités de la société Alto Eventi et son intervention dans le secteur d’activité des foires, salons et expositions », et que « par ces actes, la société Alto Eventi et M. [I] se sont approprié des réalisations de la société Themaforte, à des fins personnelles, non liées à l’intérêt social de cette dernière » (même conclusions de la SAS Themaforte, sixième page).
Il résulte ainsi des propres affirmations de la SAS Themaforte que celle-ci, à supposer qu’elle ait existé, n’a reçu aucune commande de la SASU Alto Eventi, pour la réalisation des prestations qu’elle lui a facturées.
Au surplus, la SASU Alto Eventi conteste les affirmations de la SAS Themaforte, selon lesquelles celle-ci a elle-même organisé et monté l’exposition de [Localité 18] : elle déclare que ces prestations n’ont été réalisées que par elle-même et la société Comunicom & Associés ; la SAS Themaforte n’apporte pas la preuve contraire, preuve que ne sauraient constituer ni la facture qu’a émise la SASU Alto Eventi à l’adresse de la SAS Themaforte le 10 mai 2017, et portant à payer diverses sommes en « avance pour […] compte », dont la location de l’Espace [17] à [Localité 18] le 15 février 2017, ni aucune des autres pièces qu’elle produit.
La SAS Themaforte n’est pas davantage fondée à demander paiement de sa facture sur le fondement de l’enrichissement sans cause : outre l’absence de personnalité juridique de la SAS Themaforte à l’époque des faits, cette demande se heurte à l’article 1303-3 du code civil, selon lequel l’appauvri n’a aucune action de ce chef, lorsqu’une autre action ne lui est ouverte : la société appelante, qui échoue à obtenir paiement de sa facture sur le fondement d’une commande, ne peut invoquer l’enrichissement sans cause à titre subsidiaire.
Il convient de confirmer le jugement, en ce qu’il a débouté la SAS Themaforte de sa demande en paiement de la facture susdite.
Sur les autres chefs de litige :
Sur les demandes de dommages et intérêts de la SAS Themaforte :
La SAS Themaforte reproche à la SASU Alto Eventi d’avoir commis des actes de parasitisme commercial à son détriment, et en s’appropriant les créations et réalisations de la SAS Themaforte ; elle lui reproche d’autre part des actes de concurrence déloyale, pour s’être placée dans le sillage de la SAS Themaforte, en commercialisant auprès du Parc des Expositions de [Localité 6] une exposition autour du thème « [Localité 20] » ; elle précise « que ce projet d’exposition avait été conçu et élaboré dès 2017 par la société Comunicom & Associés [sic] pour le commercialiser », qu’à l’époque « trois expositions thématiques avaient été conçues et élaborées par la société Comunicom & Associés conformément à la convention commerciale de 2017 », que la SAS Themaforte avait alors élaboré et diffusé « un support marketing et promotionnel auprès de nombreux prospects, notamment à la foire de [Localité 8] », que « la société Comunicom & Associés a également effectué un dépôt sous enveloppe Soleau à l’INPI attestant de cette création le 28 octobre 2017 », et qu’en commercialisant pour son compte l’exposition [Localité 20] auprès du Parc des Expositions de [Localité 6] pour septembre 2020, la SASU Alto Eventi s’est placée « dans le sillage de la SAS Themaforte afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, ce qui correspond à un acte de parasitisme commercial ». La société appelante fait état d’autre part du parasitisme commercial et de la déloyauté de [P] [I], « lorsqu’il revendiqué unilatéralement la paternité de l’exposition Attractive London, sans citer la SAS Themaforte ».
La société appelante produit, parmi d’autres pièces, la « Convention commerciale » conclue le 1er mars 2017 entre les sociétés Alto Eventi et Comunicom & Associés, « en présence de la société Themaforte », et selon laquelle ces deux sociétés, spécialisées pour l’une dans l’organisation de foires ou de salons professionnels, pour l’autre dans la mercatique et la communication, convenaient « de rattacher leur savoir faire » respectif en constituant la SAS Themaforte, qui devait assurer « la location des expositions », et rester « seule propriétaire des structures et mobiliers d’exposition, des droits de propriété intellectuelle, et du portefeuille de clientèle acquis ». La même convention prévoyait que la SASU Alto Eventi assurerait la commercialisation, la planification et le suivi du montage sur site et du démontage des expositions, la société Comunicom & Associés réalisant pour sa part la conception globale des expositions (création, conception, direction artistique, charte graphique, plan d’exécution). Les sociétés Alto Eventi et Comunicom & Associés devaient facturer leurs prestations à la SAS Themaforte, en leur qualité de fournisseurs.
La SAS Themaforte produit aussi l’accusé de réception d’une enveloppe Soleau auprès de l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI), en date du 28 octobre 2017, pour une exposition sur [Localité 20] (pièce n° 30) ; mais ni ce document, ni aucune autre des pièces versées aux débats ne permet d’identifier l’auteur de ce dépôt.
Dans un message adressé à la SASU Alto Eventi le 6 février 2018, Mme [L] [F], présidente des deux sociétés Themaforte et Comunicom & Associés, indiquant cette double qualité, a reproché à la société adverse des appropriations indues au détriment soit de l’une, soit de l’autre de ces sociétés : elle a fait état de telles appropriations les 4 janvier et 2 février 2018 à la foire de [Localité 5]-[Localité 7], pour des créations de « Comunicom », mais aussi et pour les mêmes faits « au détriment de Themaforte qui en est la société productrice et détentrice des droits » (pièce n°9 de la SAS Themaforte). La SASU Alto Eventi, en la personne de son président M. [I], lui a répondu le même jour sur le mode ironique : « En raison de mon comportement délictueux sur les réseaux sociaux, je vous propose de porter à la connaissance des intéressés votre mail. Il est vrai que les foires de [Localité 8], [Localité 12], [Localité 5], [Localité 9] et [Localité 15] n’ont aucune idée de qui sont Themaforte SAS, Comunicom SAS, [L] [F], [Z] [F] avec qui elles ont contracté. De même les foires de [Localité 10], [Localité 14], [Localité 3], [Localité 11], [Localité 13], [Localité 2], [Localité 16] […] ».
Mme [F] lui a répliqué le même jour 6 février 2018, en regrettant d’abord le ton et les « sarcasmes » du dernier message adverse, puis en faisant état des importants travaux qu’avait réalisés « Comunicom » pour l’exposition Attractive London, et de la diffusion, sur les réseaux sociaux, d’informations « volontairement incomplètes à l’adresse de Themaforte et de Comunicom avec l’appropriation particulièrement choquante faite d’après vous sous forme décalée ou humoristique, interprétation [‘] tout à fait discutable » (pièce n° 11 de la SAS Themaforte).
La société appelante produit encore quatre captures d’écran du réseau Facebook, portant les dates du 4 janvier, 1er février et 11 mars (de l’année 2017 selon un ajout manuscrit), où M. [P] [I] apparaît, avec la raison sociale de la SASU Alto Eventi, ainsi que des affiches représentant pour l’une la Foire de [Localité 6], avec la mention « Oh mon travail ! », sous la photographie de M. [I] (pièce n° 15), pour la deuxième diverses photographies pouvant évoquer diverses villes ou manifestations (la place de Jaude à [Localité 6], l’affiche du salon des vins du [Localité 4]) et la Grande-Bretagne, pour la troisième ces mêmes photographies évoquant diverses villes ou manifestations, avec un titre de journal (« [P] [I] : le retour »), à la date du 1er février 2017, et pour la quatrième une affiche de l’exposition Attractive London de septembre 2018, avec la mention suivante : « Pour les Moulinois qui devraient découvrir l’exposition Attractive London. Elle sera près de chez vous en septembre. Bien sûr vous serez accueillis personnellement par Lord [I] ».
Ces différents éléments de preuve, et les autres observations ou pièces formulées ou produites de part et d’autre, permettent à la cour de constater que, selon les propres affirmations de la SAS Themaforte, ci-avant résumées et citées, les trois expositions thématiques en cause ont été conçues non par la SAS Themaforte, mais par la société Comunicom & Associés, qui seule aurait donc une action en concurrence déloyale. Mme [F] elle-même dans son premier message du 6 février 2018, fait état expressément de réalisations effectuées par « Comunicom » ; et le dépôt effectué auprès de l’INPI en octobre 2017 pour l’exposition sur [Localité 20] n’apporte aucune information sur son bénéficiaire.
Dès lors les agissements parasitaires, qui pourraient ressortir des captures d’écran prises sur un réseau social, où sont associés les noms de M. [I] et de la SASU Alto Eventi avec diverses expositions, sans indication d’une autre personne morale ou physique y ayant concouru, à les supposer même établis, n’apparaissent pas avoir causé de torts à la SAS Themaforte, mais à la seule société Comunicom & Associés. La SAS Themaforte ne rapporte pas la preuve d’un préjudice, en relation avec les fautes qu’elle reproche à la société intimée ; c’est à bon droit que le tribunal a prononcé que la SASU Alto Eventi n’avait pas engagé sa responsabilité envers elle. Les demandes de dommages et intérêts de la SAS Themaforte seront rejetées, qu’elles soient fondées sur la responsabilité civile, sur l’enrichissement sans cause, ou sur une inexécution prétendue de la Convention commerciale du 1er mars 2017, à laquelle cette société n’était pas partie, et qui n’a donc créé aucune obligation contractuelle à son profit. Sera également rejetée sa demande subsidiaire au titre du préjudice d’image, demande d’ailleurs recevable, dès lors qu’elle tend aux mêmes fins que celles présentées en première instance.
Sur les demandes de M. [I] :
M. [I] demande la condamnation de la SAS Themaforte à lui payer une somme de 2 000 euros, au titre de la valeur de ses actions dans cette société ; il fait valoir que cette demande est fondée, dès lors que la présidente de la société a exprimé son accord sur son retrait, et sur la somme de 2 000 euros, correspondant à la valeur nominale de ses actions ; qu’elle est d’ailleurs recevable, l’autre associée Mme [F] étant représentée en sa qualité de dirigeante de la SAS Themaforte.
Le tribunal a déclaré cette demande irrecevable, au motif qu’elle n’avait pas été formée contre l’ensemble des parties concernées par un éventuel rachat des actions de M. [I], qui ne justifiait pas avoir mis en ‘uvre les règles prévues à l’article 11 des statuts, qui s’imposaient en cas de cession d’actions.
La demande de M. [I], faite par la voie d’une intervention à l’instance qui opposait les sociétés Themaforte et Alto Eventi, se rattache au litige initial par un lien suffisant, au sens de l’article 325 du code de procédure civile.
L’article 11 des statuts de la SAS Themaforte, ayant trait à la transmission des actions, prévoit une procédure d’agrément par la société elle-même, dans le cas d’une cession « à un tiers étranger de la société » ; en revanche la cession à des personnes qui ne ne sont pas des tiers à la société, au sens de cet article, n’est pas soumise à des conditions particulières ; l’article 11, hors le cas d’agrément, dispose que « la transmission des actions s’opère à l’égard de la société et des tiers par un virement du compte du cédant au compte du cessionnaire, sur production d’un ordre de virement établi sur un formulaire fourni ou agréé par la société », sans autre formalité.
Il ressort des échanges entre M. [I] et la présidente de la SAS Themaforte, en novembre et en décembre 2018, que M. [I] a fait connaître le 10 novembre 2018 son intention de « sortir du capital » et de se retirer de la société ; l’assemblée générale du 7 décembre 2018 a pris acte de ce retrait, et donné mandat à la présidente pour déterminer avec l’intéressé les conditions de son retrait ; M. [I] a confirmé son intention de retrait par une lettre recommandée du 20 décembre 2018, moyennant le versement de la valeur des actions qu’il avait versée, et Mme [F] présidente de la SAS Themaforte lui a répondu le 26 du même mois : « Concernant [vos actions] et votre sortie du capital, étant désormais fixée sur vos conditions de vente, je vous confirme mon accord sur le montant de deux mille euros correspondant à vos 50 actions au nominal » (pièces n° 26 à 31 de M. [I] et de la SASU Alto Eventi).
Ces échanges établissent que M. [I] et la SAS Themaforte se sont accordés pour la cession à celle-ci des 50 actions qui appartenaient à M. [I], comme le permet l’article L. 227-18 du code de commerce (qui prévoit la possibilité pour la société de racheter des actions, à un prix devant être fixé de l’accord des parties, sauf disposition contraire des statuts). La SAS Themaforte, acquéreuse, n’étant pas un tiers au sens de l’article 11 de ses statuts, et ceux-ci ne prévoyant aucune condition particulière à une cession réalisée dans un tel cas, M. [I] est recevable en son action, qu’il exerce envers la SAS Themaforte, seule partie qu’il était tenu de mettre en cause ; cette action apparaît du reste fondée, vu l’accord des parties sur l’objet de la vente et sur le prix. Le jugement sera réformé de ce chef, il sera fait droit à la demande de M. [I], en paiement de la somme de 2 000 euros, au titre de la valeur des actions.
C’est d’ailleurs par une juste appréciation des éléments qui lui étaient soumis, et par une motivation que la cour adopte expressément, que le tribunal a fait droit à la demande de M. [I] en paiement de la somme de 1 667,21 euros, fondée sur une facture émise le 24 octobre 2018 à l’adresse de la SAS Themaforte, pour des frais engagés dans l’intérêt de cette société : celle-ci ne formule, ni n’a jamais formulé aucune critique précise à l’encontre de cette demande, elle a d’ailleurs payé à ce titre un acompte de 1 000 euros (cf. sa lettre du 26 décembre 2018, pièce n°30 des intimés), admettant ainsi le principe et le montant de sa dette ; elle ne conteste pas, d’ailleurs, la qualité de M. [I] à présenter cette demande à titre personnel, alors pourtant que la facture a été émise par la SASU Alto Eventi. Le jugement sera encore confirmé sur ce point.
PAR CES MOTIFS :
Statuant après en avoir délibéré, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, mis à disposition des parties au greffe de la cour ;
Infirme le jugement déféré, en ce qu’il a jugé que la SAS Themaforte ne justifiait d’aucun intérêt à agir, et rejeté la demande de M. [I], en paiement d’une somme de 2 000 euros ;
Statuant à nouveau de ce dernier chef,
Condamne la SAS Themaforte à payer à M. [P] [I] une somme de 2 000 euros, au titre du prix de cession de ses actions dans la dite société ;
Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne la SAS Themaforte à payer à la SASU Alto Eventi et à M. [I] une somme globale de 2 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens d’appel ;
Rejette le surplus des demandes.
Le greffier, La présidente,