Droits des Artisans : 7 mars 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/05008

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Droits des Artisans : 7 mars 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/05008

1ère Chambre

ARRÊT N°70/2023

N° RG 20/05008 – N° Portalis DBVL-V-B7E-Q77I

Mme [Z] [N]

C/

M. [I] [A] [P]

Mme [W] [F]

M. [F] [A] [T] [Y]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 07 MARS 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Aline DELIÈRE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 05 décembre 2022 devant Madame Véronique VEILLARD, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 07 mars 2023 par mise à disposition au greffe après prorogation du délibéré annoncé au 07 février 2023 à l’issue des débats

****

APPELANTE :

Madame [Z] [N]

née le 02 Mars 1957 à [Localité 11] (29)

[Adresse 10]

[Localité 6]

Représentée par Me Alexandre QUEMENER, avocat au barreau de BREST

INTIMÉS :

Monsieur [I] [A] [P]

né le 21 Mars 1989 à [Localité 6] (29)

[Adresse 8]

[Localité 3]

Représenté par Me René GLOAGUEN de la SCP GLOAGUEN & PHILY, avocat au barreau de BREST

Madame [W] [F]

née le 24 Février 1993 à [Localité 6] (29)

[Adresse 8]

[Localité 3]

Représentée par Me René GLOAGUEN de la SCP GLOAGUEN & PHILY, avocat au barreau de BREST

Monsieur [F] [A] [T] [Y]

né le 15 Août 1979 à [Localité 9] (91)

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Marc BERTHELOT de la SELARL LE STIFF, avocat au barreau de BREST

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant acte authentique du 23 octobre 2015 au rapport de maître [O], notaire associée à [Localité 7]), Mme [F] et M. [P] (ci-après les consorts [P]-[F]) ont fait l’acquisition auprès de M. [Y] au prix de 175.000 € d’une propriété sise [Adresse 8] à [Localité 3] cadastrée section SW n° [Cadastre 4] et n° [Cadastre 5] édifiée d’une maison d’habitation. M. [Y] avait lui-même acquis ce bien de Mme [N] le 15 juin 2007 au prix de 242.000 € l’acte ayant été reçu en la même étude notariale.

A l’occasion de travaux débutés en novembre 2015 consistant notamment en l’ouverture de la contre-cloison du pignon supportant la cheminée d’agrément en vue de la pose d’un IPN, les consorts [P]-[F] découvraient les désordres suivants :

– isolation thermique endommagée,

– fils électriques fondus,

– conduit de fumée mal raccordé.

Ils constataient par ailleurs depuis leur acquisition des infiltrations d’eau en sous-sol.

Le cabinet Cunningham et Lindsey, mandaté par la MAAF leur assurance de protection juridique, organisait des opérations d’expertise amiable et rendait un rapport le 30 mai 2016 aux termes duquel les désordres dans le séjour indiquaient clairement un départ d’incendie en lien avec les défauts de raccordement de l’insert.

Suivant acte d’huissier délivré le 8 septembre 2016, les consorts [P]-[F] assignaient M. [Y] en référé expertise devant le tribunal de grande instance de Brest, en présence de Mme [N] appelée à la cause par M. [Y].

Par ordonnance en date du 7 novembre 2016, le juge des référés désignait M. [K] en qualité d’expert, lequel déposait son rapport le 3 mars 2018.

Aucun règlement amiable n’ayant pu aboutir, les consorts [P]-[F] ont, par actes d’huissier délivrés le 3 septembre 2018, fait assigner M. [Y] et Mme [N] devant le tribunal de grande instance de Brest (devenu tribunal judiciaire à compter du 1er janvier 2020) aux fins de condamnation au paiement des travaux de reprise.

Par jugement contradictoire du 16 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Brest a :

– débouté M. [Y] de sa demande de nullité du rapport d’expertise,

– condamné M. [Y] à payer aux consorts [P]-[F] les sommes de :

– 1.909,09 € HT augmentée de la TVA applicable au jour du jugement au titre des travaux de reprise des infiltrations dans la cave,

– 4.004 € HT augmentée de la TVA applicable au jour du jugement au titre des travaux de reprise des infiltrations dans le studio et des problèmes de structure,

– 1.080 € au titre du préjudice de jouissance,

– condamné M. [Y] à payer à Mme [F] la somme de 1.000 € au titre de son préjudice moral,

– déclaré irrecevable l’action les consorts [P]-[F] dirigée contre Mme [N],

– déclaré recevable l’appel en garantie de M. [Y] dirigé contre Mme [N],

– condamné Mme [N] à garantir M. [Y] au titre des condamnations prononcées à son encontre au titre des travaux de reprise des infiltrations dans le studio et des problèmes de structure,

– condamné Mme [N] à garantir M. [Y] à hauteur de 66 % des condamnations prononcées à son encontre au titre du préjudice de jouissance, du préjudice moral, des frais irrépétibles et des dépens,

– condamné M. [Y] à payer à Mme [F] et M. [P] la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté les parties du surplus de leurs demandes,

– condamné M. [Y] aux dépens comprenant les frais d’expertise judiciaire,

– ordonné l’exécution provisoire.

Mme [N] a interjeté appel de ce jugement le 16 octobre 2020 en ce qu’il a d’une part déclaré recevable l’appel en garantie de M. [Y] dirigé contre elle et l’a condamnée à le garantir à 100 % au titre des condamnations relatives aux travaux de reprise des infiltrations dans le studio et des problèmes de structure et à 66% au titre du préjudice de jouissance, du préjudice moral, des frais irrépétibles et des dépens et, d’autre part, l’a déboutée du surplus de ses demandes. Les consorts [P]-[F] ont interjeté appel incident par leurs conclusions n° 1 notifiées par RPVA le 12 avril 2021.

M. [Y] a interjeté appel incident par ses conclusions n° 1 notifiées par RPVA le 12 avril 2021.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Mme [N] expose ses demandes et moyens dans ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 28 novembre 2022 auxquelles il est renvoyé en application de l’article 455 alinéa 1 du code de procédure civile.

Elle demande à la cour de :

– infirmer le jugement ayant déclaré recevable l’appel en garantie de M. [Y] dirigé contre elle et l’ayant condamnée à le garantir au titre des condamnations relatives aux travaux de reprise des infiltrations dans le studio et des problèmes de structure et à hauteur de 66% au titre du préjudice de jouissance, du préjudice moral, des frais irrépétibles et des dépens et, d’autre part, l’a déboutée du surplus de ses demandes,

– par conséquent,

– déclarer irrecevables les demandes de M. [Y] et des consorts [P]-[F] dirigées contre elle,

– déclarer irrecevables les demandes des consorts [P]-[F] à son encontre au titre de l’obligation de délivrance conforme,

– constater que les consorts [P]-[F] et M. [Y] ne rapportent pas la preuve de leurs préjudices,

– débouter les consorts [P]-[F] et M. [Y] de leurs demandes dirigées contre elle,

– condamner les consorts [P]-[F] et M. [Y] solidairement ou l’un à défaut de l’autre à lui payer :

– la somme de 5.000 € au titre du préjudice subi par elle,

– la somme de 3.000 € au titre des frais irrépétibles, exposés en 1ère instance et en référé,

– en tout état de cause,

– confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré irrecevables les consorts [P]-[F] et les a déboutés avec M. [Y] du surplus de leurs demandes,

– condamner les consorts [P]-[F] et M. [Y] solidairement ou l’un à défaut de l’autre à lui payer la somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel,

– condamner les mêmes aux entiers dépens de 1ère instance, d’appel en ce compris, les frais d’expertise.

M. [Y] expose ses demandes et moyens dans ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 25 novembre 2022 auxquelles il est renvoyé en application de l’article 455 alinéa 1 du code de procédure civile.

Il demande à la cour de :

– juger que les conditions de sa responsabilité de plein droit au titre de la garantie décennale du constructeur ne sont pas réunies,

– juger qu’il n’avait pas connaissance des vices affectant la structure,

– déclarer irrecevables les demandes des consorts [P]-[F] à son encontre au titre de l’obligation de délivrance conforme,

– débouter en conséquence Mme [P] et M. [F] de toutes leurs demandes en ce qu’elles sont dirigées contre lui,

– subsidiairement,

– confirmer le jugement en ce qu’il a retenu la responsabilité de plein droit de Mme [N] en qualité de constructeur,

– condamner Mme [N] à le garantir de toutes les condamnations, pour l’ensemble des chefs d’indemnisation retenus, qui seraient susceptibles d’être prononcées à son encontre,

– débouter Mme [N] de ses demandes à son encontre,

– en tout état de cause,

– condamner les consorts [P]-[F] in solidum avec Mme [N] à lui payer la somme de 5.000 € au titre des frais irrépétibles,

– condamner les mêmes in solidum aux dépens de première instance et d’appel.

Les consorts [P]-[F] exposent leurs demandes et moyens dans leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 4 novembre 2022 auxquelles il est renvoyé en application de l’article 455 alinéa 1 du code de procédure civile.

Ils demandent à la cour de :

– confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a débouté M. [Y] de sa demande de nullité du rapport et l’a condamné à leur verser la somme de 1.909,09 € HT augmentée de la TVA applicable au jour du jugement, au titre des travaux de reprise des infiltrations dans la cave, et celle de 4.004 € augmentée de la TVA applicable au jour du jugement, au titre des travaux de reprise des infiltrations dans le studio et des problèmes de structure,

– réformer la décision en ce qu’elle les a déboutés de leurs autres demandes,

– statuant à nouveau,

– à titre principal :

– débouter Mme [N] et M. [Y] de leurs demandes,

– juger que M. [Y] a engagé sa responsabilité civile décennale de plein droit au titre des désordres affectant le sous-sol de la maison litigieuse,

– juger que M. [Y] a engagé sa responsabilité sur le fondement de la garantie des vices cachés au titre des désordres affectant le séjour de la maison litigieuse,

– juger que Mme [N] a engagé sa responsabilité sur le fondement de la garantie des vices cachés au titre des désordres constatés par l’expert judiciaire,

– à titre subsidiaire :

– juger que M. [Y] a engagé sa responsabilité sur le fondement de la garantie des vices cachés au titre des désordres affectant le sous-sol de la maison litigieuse,

– juger que Mme [N] a engagé sa responsabilité sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun au titre des désordres constatés par l’expert judiciaire,

– à titre infiniment subsidiaire, au titre de la responsabilité de Mme [N] :

– juger qu’elle a manqué à son obligation de délivrance conforme,

– à titre infiniment subsidiaire, au titre de la responsabilité de M. [Y] :

– juger qu’il a engagé sa responsabilité pour manquement à son obligation de délivrance conforme,

– à titre infiniment plus subsidiairement encore, au titre de la responsabilité de M. [Y] :

– juger qu’il a engagé sa responsabilité sur le fondement du dol au titre des désordres constatés par l’expert judiciaire,

– plus subsidiairement encore, au titre de la responsabilité de M. [Y] :

– juger qu’il a engagé sa responsabilité civile contractuelle de droit commun au titre des désordres constatés par l’expert judiciaire,

– en conséquence :

– condamner in solidum M. [Y] et Mme [N] au paiement des sommes de :

– 5.913,09 € HT en réparation des dommages constatés au sous-sol de la maison,

– 5.683,35 € HT en réparation des dommages constatés dans le séjour de la maison,

– 450 € par mois en réparation du préjudice de jouissance à compter du mois de février 2007 jusqu’à parfaite exécution des condamnations à intervenir,

– 5.000 € en réparation du préjudice moral subi,

– condamner in solidum M. [Y] et Mme [N] au paiement de la somme de 5.000 € au titre des frais irrépétibles exposés en référé et en première instance,

– condamne in solidum M. [Y] et Mme [N] au paiement de la somme de 5.000 € au titre des frais irrépétibles d’appel,

– condamner in solidum M. [Y] et Mme [N] aux dépens exposés en première instance comprenant les frais d’expertise judiciaire et les dépens de référé,

– condamner in solidum M. [Y] et Mme [N] aux dépens d’appel.

MOTIFS DE L’ARRÊT

À titre liminaire, il convient de rappeler que l’office de la cour d’appel est de trancher le litige et non de donner suite à des demandes de ‘constater’, ‘dire’ ou ‘dire et juger’ qui ne constituent pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions au sens des articles 4, 5 et 954 du code de procédure civile mais la reprise des moyens censés les fonder.

1) Sur la demande de confirmation du jugement ayant rejeté la demande de nullité du rapport d’expertise judiciaire de M. [K]

Les consorts [P]-[F] demandent que le jugement entrepris soit confirmé en ce qu’il a rejeté le moyen de nullité du rapport d’expertise opposée en première instance par M. [Y].

Mme [N] n’a pas interjeté appel de ce chef de jugement.

M. [Y] indique renoncer à recourir en nullité contre le rapport d’expertise de M. [K].

Aussi, la cour n’étant saisie d’aucune demande d’infirmation du rejet de la demande de nullité du rapport d’expertise judiciaire dira en conséquence n’y avoir lieu à statuer de ce chef.

2) Sur les demandes dirigées contre M. [Y], vendeur

2.1) Sur l’action en garantie décennale portant sur les travaux de dallage dans la partie ‘cave’ du sous-sol

Il sera rappelé que Mme [Z] [N] a fait construire le pavillon en 1989. Celui-ci a été édifié sur un vide sanitaire enterré sur ses 4 côtés.

Avant la revente à M. [Y] en 2007, Mme [N] a transformé ce vide sanitaire en sous-sol. Pour obtenir une hauteur d’exploitation suffisante, elle a fait creuser le sol, lequel s’est trouvé positionné à un niveau inférieur de celui des assises des fondations de la maison. Puis, elle a fait daller la partie correspondant au garage et celle située immédiatement à droite, que M. [F] [Y] transformera en pièce à musique. Ce sous-sol est par ailleurs séparé par un mur porteur intérieur ou ‘mur de refend’ contre lequel M. [Y] a coulé une banquette en béton sur sa partie principale. Pour accéder à ce sous-sol, Mme [N] a fait dégager la terre en pignon et fait percer le mur afin de réaliser une entrée de garage.

Ainsi, lors de l’acquisition de la maison le 15 juin 2007 par M. [F] [Y], la partie restante du sous-sol dénommée ‘cave’ disposait encore d’un sol en terre battue. M. [Y] a retiré ladite terre battue, puis a réalisé une dalle en béton sans couche drainante ni film d’étanchéité.

En raison de leur nature, ces travaux de dallage de la cave constituent un ouvrage au sens des dispositions de l’article 1792 du code civil.

Les premiers juges ont retenu la responsabilité décennale de M. [Y] estimant que, ainsi que l’a relevé le rapport d’expertise, les infiltrations compromettent le stockage et rendent la cave impropre à sa destination, ce que conteste M. [Y] qui considère que la réalité et la gravité des infiltrations ne sont pas établies, que l’expert a qualifié le problème d’infiltration de ‘minime’ comme relevant d’une simple défectuosité avant d’estimer, en se fondant sur des photographies remises par les consorts [P]-[F] après les constatations opérées contradictoirement sur place, que ce problème présentait en réalité un caractère de gravité rendant cette cave impropre à sa destination. M. [Y] prétend en outre que le problème d’humidité préexistait à la réalisation de ses travaux.

Il résulte en réalité du rapport d’expertise du 3 mars 2018 que l’expert précise en page 37 de son rapport qu’il ‘avait fait un premier commentaire a minima par rapport à ce qui avait été constaté lors de l’expertise à savoir : le problème constaté est minime, (‘) une simple défectuosité’. Il précise néanmoins que ‘depuis il a été confirmé ce [qu’il] craignait’, relevant l’existence d’infiltrations par le sol et à la jonction du dallage.

L’expert a en effet précisé qu’il ‘avait noté un début de remonté d’eau’ et ‘qu’il y avait de grandes chances que le problème s’amplifie’ (p. 20). Ce constat a effectivement été confirmé par la suite par une photographie envoyée par M. [P], qui ne fait qu’étayer les craintes qu’avait émises l’expert lors de ses constatations sur place et en présence des parties, à l’occasion desquelles il avait déjà relevé les prémices d’infiltrations possibles (p. 20 et p. 46). Du reste, ces constatations sont aussi confirmées par les conclusions du rapport d’expertise amiable contradictoire établi le 30 mai 2016 par M. [J] de la société Cunningham Lindsey France, lesquelles faisaient déjà état d’infiltrations d’eau à la base des murs extérieurs du sous-sol, principalement dans une des caves. M. [K] note de plus que M. [J] avait relevé dans son rapport que M. [Y] avait procédé lui -même à l’abaissement du sol dans la cave ‘ en enlevant la terre battue ‘ avant d’y couler la dalle, ce qui n’avait pas été contesté par celui-ci.

S’agissant de la date d’apparition du problème d’humidité affectant la partie cave, M. [K] relève dans son rapport d’expertise qu’il est ‘certain que ce problème a toujours existé depuis l’exécution du dallage par M. [Y]’ (p. 37). Celui-ci est en effet réalisé de façon très sommaire et posé directement sur la terre au même niveau que les fondations et sans joint de dilatation, alors que les règles de l’art exigent que le dallage soit d’une certaine épaisseur, exécuté sur une couche drainante et doit comporter un film polyane remontant dans sa hauteur.

Le problème d’infiltration d’eau provoqué par les défauts affectant le dallage posé par M. [Y] empêche le stockage et rend la cave impropre à sa destination.

C’est donc à bon droit que les premiers juges ont retenu la responsabilité de M. [Y] au titre de la garantie décennale du constructeur et l’ont condamné à verser aux consorts [P]-[F] la somme de 1.909,09 € HT augmentée de la TVA applicable au jour du jugement au titre des travaux de reprise des infiltrations dans la cave.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

2.2) Sur l’action en garantie des vices cachés portant sur les infiltrations dans les parties ‘garage’ et ‘studio’ du sous-sol et sur les problèmes de structure

L’article 1641 du code civil dispose que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus.

L’article 1643 du même code prévoit que le vendeur est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n’ait stipulé qu’il ne sera obligé à aucune garantie.

Enfin, l’article 1645 du code civil énonce que si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur.

Les premiers juges ont retenu la responsabilité de M. [Y] sur le fondement de la garantie contre les vices cachés s’agissant du problème d’infiltration d’eau et du problème généralisé de structure affectant le sous-sol.

Il résulte du rapport d’expertise judiciaire que les problèmes d’infiltration d’eau et le problème généralisé de structure sont dus aux travaux réalisés par Mme [N] qui n’a pas tenu compte des contraintes existantes en faisant réaliser, à l’occasion de la transformation du vide sanitaire en garage, un dallage plus bas que celui des fondations de la maison.

L’expert relève que ces vices importants rendent le sous-sol impropre à sa destination, le bâtiment pouvant être mis en péril dans son ensemble et le stockage étant rendu impossible du fait des infiltrations.

Si ces travaux d’ouverture et d’aménagement du vide sanitaire en sous-sol ont bien été réalisés par Mme [N] avant 2007 et préexistaient à l’acquisition de la maison par M. [Y] le 15 juin 2007, il reste que c’est M. [Y] qui a réalisé une semelle de béton pour consolider le mur de refend du sous-sol et une banquette en béton armé dans la pièce de droite en périphérie des murs ainsi qu’un colmatage à la jonction de la dalle et des fondations dans cette même pièce.

La réalisation de ces travaux de consolidation signe la parfaite connaissance par M. [Y] des vices de structure qui affectaient le sous-sol de sa maison.

L’expert précise que si ces travaux ont amélioré la situation, ils n’ont toutefois été réalisés que partiellement, la banquette n’ayant pas été réalisée sur tout le linéaire du mur de refend. De fait, les infiltrations ont continué entre la fondation et le dallage.

A l’égard des problèmes d’infiltration d’eau, M. [Y] soutient les avoir signalés aux consorts [P]-[F] avant la vente en leur indiquant qu’il existait un phénomène d’humidité par infiltration, notamment lors d’épisodes de forte pluie. Il affirme en outre que M. [P] a visité la pièce à droite du garage, qualifiée de ‘studio’ dans le jugement, sans la moquette qui la recouvrait lors de ses précédentes visites.

Cependant, M. [Y] ne démontre pas avoir spécifiquement fait état d’infiltrations affectant le sous-sol, infiltrations qui divergent par leur nature et leur ampleur d’un simple phénomène d’humidité résiduelle prévisible s’agissant d’un sous-sol. La présence d’un déshumidificateur au moment de la visite de la maison par les consorts [P]-[F], qui de surcroît a eu lieu en période estivale, est insuffisante à démontrer la connaissance de l’existence d’un tel problème d’infiltration généralisée. De même, il n’est pas établi que la visite au mois d’octobre 2015 par M. [P] de cette partie du sous-sol, alors que la moquette avait été enlevée, ait été de nature à faire prendre conscience aux acquéreurs de l’existence d’infiltrations. Et il est encore vain pour M. [Y] de prétendre que l’humidité dans un sous-sol semi-enterré n’avait rien d’anormal car si tel avait dû être le cas, aucune moquette n’y aurait été installée puis enlevée au moment de la dernière visite, ce revêtement étant en effet parfaitement incompatible avec la présence d’humidité.

A l’égard du problème affectant la structure, les premiers juges ont à juste titre relevé qu’il n’est pas établi ni même allégué que les consorts [P]-[F] en aient eu connaissance au moment de la vente. En effet, l’acte de vente établi en 2015 ne mentionne pas l’existence, à l’origine de la maison, d’un vide sanitaire, alors qu’il y est fait référence dans l’acte de vente de 2007, document dont il n’est pas soutenu qu’il ait été remis aux acheteurs. En outre, la présence d’une semelle de consolidation sur le mur de refend et d’une banquette en béton armé dans la pièce de droite était de nature à faire croire aux acquéreurs, profanes en la matière, que le sous-sol était d’origine et donc stable, l’expert ayant du reste indiqué que ces travaux avaient contribué à améliorer la situation. Le problème structurel affectant le sous-sol n’était donc pas apparent au jour de la vente.

Par ailleurs, M. [Y] n’a pas informé les acquéreurs de ce que ce sous-sol n’était pas d’origine, ce qu’il n’ignorait pourtant pas ayant de son côté réalisé les travaux de décaissement de la terre battue et de dallage dans la cave puis des travaux de consolidation du mur de refend et de la périphérie et alors que les infiltrations ont perduré.

Le problème d’infiltrations et le problème affectant la structure du sous-sol sont donc des vices cachés existant au jour de la vente et qui rendent le sous-sol impropre à son usage. L’expert les qualifie de ‘vices graves affectant le gros ‘uvre et susceptibles de mettre le bâtiment en péril’.

M. [Y] se prévaut d’une clause de non garantie des vices cachés stipulée dans l’acte de vente.

M. [Y] n’a certes pas la qualité de professionnel de l’immobilier ou de la construction mais il ne peut néanmoins prétendre sans se contredire qu’il n’avait pas connaissance du problème d’infiltration alors que dans le même temps, il soutient en avoir averti les consorts [P]-[F].

Enfin, les consorts [P]-[F] estiment que M. [Y] aurait dû être condamné au titre de la responsabilité décennale du constructeur pour avoir mis en ‘uvre des travaux incomplets et insuffisants pour assurer la solidité de la structure et prévenir les infiltrations d’eau. Toutefois, la responsabilité de M. [Y] ne peut être engagée sur ce fondement dès lors que d’une part ces travaux de réparation, même s’ils sont partiels et n’ont pas empêché la persistance des infiltrations, ont, ainsi que le note l’expert judiciaire, amélioré la stabilité de la structure et que, d’autre part, ils ne sont pas à l’origine des désordres initiaux ni ne les ont aggravés.

C’est à juste titre que les premiers juges ont écarté la responsabilité décennale de M. [Y] du chef de ces travaux.

Sous le bénéfice de ces observations, la clause exonératoire des vices cachés sera écartée et le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné M. [Y] à verser aux consorts [P]-[F] la somme de 4.004 € HT augmentée de la TVA applicable au jour du jugement au titre des travaux de reprise des infiltrations dans le studio et de reprise des problèmes de structure, sans qu’il y ait lieu à examiner le fondement subsidiaire du manquement à l’obligation de délivrance conforme.

2.3) Sur l’action en garantie des vices cachés portant sur les désordres concernant le fonctionnement de la cheminée dans le séjour

Il résulte du rapport d’expertise du 3 mars 2018 qu’au démontage de la cloison du mur pignon du séjour supportant la cheminée avec insert, il a été mis en évidence que l’isolant en polystyrène collé sur le mur derrière la cloison avait fondu, qu’au droit du boisseau métallique, ce mur présentait des traces de suie, qu’il n’y avait pas de raccordement pour joindre le boisseau métallique avec le boisseau en terre cuite. L’expert précise que le boisseau métallique aurait dû remonter jusqu’en sortie de souche, que l’incendie dans la cloison de doublage s’est produit par retombée des parties incandescentes sur l’isolant et qu’il a engendré un arrêt de fonctionnement de la prise électrique située à proximité.

Les premiers juges ont estimé qu’il n’était pas établi que M. [Y] avait connaissance de ces vices au jour de la vente.

Si l’expert a en effet indiqué ne pouvoir dater la survenue de l’incendie, il a toutefois été en mesure de conclure que les problèmes concernant l’isolation thermique, la cheminée et le fil électrique fondu existaient au moment de la vente passée avec les consorts [P]-[F] et étaient forcément connus par l’une des parties Mme [N] ou M. [Y].

L’expert reprend par ailleurs à son compte les constatations du rapport d’expertise amiable de M. [J] de la société Cunningham et Lindsey du 30 mai 2016 qui ont mis en évidence que l’absence d’étanchéité du raccordement de l’insert sur le conduit de fumée a pu laisser échapper des dégagements d’oxyde de carbone et des dégagements d’odeur qui auraient dû alerter les occupants sur les dysfonctionnements de l’insert tandis que M. [Y] déclarait pendant ces mêmes opérations d’expertise n’être pas au courant et n’avoir jamais eu de problème de fonctionnement de son insert qu’il avait utilisé comme chauffage principal tous les hivers et ce pendant 8 années d’occupation des lieux.

Or, ainsi que le relèvent pertinemment les consorts [P]-[F], de deux choses l’une :

– soit M. [Y] a utilisé régulièrement l’insert pendant ces 8 années d’occupation et dans ce cas, il n’a pu que constater les dysfonctionnements de ce dernier car l’absence d’étanchéité du raccordement de l’insert sur le conduit de fumée au niveau du plafond du salon ‘ dont il est rappelé qu’elle datait d’avant son acquisition ‘ ne pouvait que produire des dégagements d’oxyde de carbone se répandant nécessairement dans les pièces d’habitation, ce qui ne pouvait que l’avoir alerté sur le dysfonctionnement de l’insert, et ce d’autant qu’il a été constaté lors des opérations d’expertise que l’installation était dépourvue de ventilation,

– soit M. [Y] a fait de fausses déclarations et n’a en réalité jamais utilisé l’insert car il en connaissait les non-conformités et risques d’usage, ce qui est corroboré par le fait qu’il ne justifie que d’un seul certificat de ramonage et d’entretien réalisé seulement quelques semaines avant la vente.

M. [Y] n’a du reste pas conclu sur ce désordre en cause d’appel et il peut être relevé qu’il ne produit aucun élément de nature à corroborer l’utilisation qu’il allègue de l’insert à titre de chauffage principal pendant près de 8 années (par exemple des factures de ramonage annuel, d’approvisionnement en bois, un schéma du circuit de distribution de la chaleur de l’insert dans la maison, des attestations faisant état de l’utilisation de ladite cheminée, etc’).

Ainsi, quelle que soit l’hypothèse retenue, il se déduit des constatations expertales que l’incendie a eu lieu avant la vente à M. [Y] en 2007 et que le défaut de raccordement du conduit de cheminée a engendré des dégagements d’oxyde de carbone pendant le temps d’occupation de la maison par M. [Y] qui avait dès lors nécessairement connaissance au moment de la vente aux consorts [P]-[F] en 2015 de ces désordres affectant l’insert.

La connaissance par le vendeur du vice affectant le séjour étant établie, la clause exonératoire de responsabilité stipulée à l’acte de vente sera écartée.

Le jugement infirmé sur ce point.

2.4) Sur le montant des reprises de travaux dans le séjour

Les travaux de reprise de l’installation de cheminée, sans le prix d’un insert, de reprise de la cloison de doublage et de l’électricité affectée par l’incendie ont été chiffrés par l’expert judiciaire à la somme de 5.683,35 € HT.

Aucun moyen opposant à ce chiffrage n’a été formulé de sorte qu’il y sera fait droit.

Ainsi, la cour condamne M. [Y] à payer aux consorts [P]-[F] ladite somme de 5.683,35 € HT au titre des travaux de reprise dans le séjour.

3) Sur les demandes dirigées contre Mme [N], venderesse précédente

3.1) Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action en garantie des vices cachés

Les consorts [P]-[F], sous-acquéreurs, recherchent la responsabilité de Mme [N], auteur de M. [Y], sur le fondement de la garantie des vices cachés en rappelant que le sous-acquéreur est recevable à exercer cette action contre le vendeur originaire, qu’ils ont eux-mêmes eu connaissance des vices au moment du dépôt du rapport d’expertise du 3 mars 2018, qu’ayant assigné Mme [N] le 3 septembre 2018, leur action n’est pas prescrite à son encontre comme ayant été intentée moins de 2 ans à compter de la découverte des vices et dans le délai butoir de l’article 2232 du code civil ayant commencé au jour de la vente [N]-[Y] du 15 juin 2007.

Mme [N] conclut à la confirmation du jugement qui a déclaré cette action prescrite.

En droit, le sous-acquéreur d’un bien immobilier peut exercer l’action en garantie des vices cachés contre le vendeur précédent à condition de prouver que le vice était antérieur à la vente précédente. L’article 2224 du code civil dans sa version applicable à l’espèce fait courir le point de départ du délai de prescription au jour à compter duquel le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. L’article 1648 du même code impartit un délai de 2 ans à compter de la découverte du vice pour agir. Enfin, le délai de prescription de droit commun prévu par le code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008 était fixé à 30 ans par l’article 2262 ancien du code civil. Pour les ventes postérieures, c’est le délai butoir de l’article 2232 limité à 20 ans à compter de la vente qui s’applique, la cour de cassation ayant précisé que ce délai butoir ne s’appliquait pas aux situations où le droit était né avant son entrée en vigueur.

En l’espèce, la vente [N]-[Y] a été conclue le 15 juin 2007 ouvrant le délai de prescription de 30 ans aux consorts [P]-[F] tandis que ceux-ci ont eu connaissance des désordres dans leur ampleur définitive au jour du dépôt du rapport d’expertise le 3 mars 2018, de sorte qu’ayant assigné Mme [N] le 3 septembre 2018, leur action en garantie des vices cachés dirigées contre elle moins de 2 ans après la découverte des vices et avant l’expiration du délai de 30 ans n’est pas prescrite et sera déclarée recevable.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

3.2) Sur le fond

Ainsi qu’il l’a ci-dessus été rappelé, les travaux de transformation du vide-sanitaire en sous-sol ont été réalisés par Mme [N], qui les situe en 2001.

L’expert judiciaire a mis en évidence un décaissement du sol dudit sous-sol à un niveau inférieur aux fondations de la maison d’habitation, qui a généré un phénomène d’infiltrations importantes et a porté atteinte à la structure au point d’en compromettre la solidité.

Il a également été mis en évidence que le défaut de raccordement du boisseau de la cheminée avec insert était antérieur à la vente [N]-[Y] et que cet équipement était, eu égard à son état, devenu impropre à sa destination en raison des émanations d’oxyde de carbone qu’il dégageait.

Ainsi, les vices relatifs à la structure du sous-sol et au raccordement défectueux du conduit de cheminée étaient-ils bien antérieurs à la vente [N]-[Y] du 15 juin 2007 tandis qu’ils étaient cachés pour les acquéreurs mais connus des vendeurs successifs et que ce n’est qu’à compter du 3 mars 2018 que les consorts [P]-[F] n’en ont eu connaissance dans leur ampleur définitive et dans leur nature, leur permettant ainsi d’agir utilement.

Les consorts [P]-[F] sont dès lors bien fondés à rechercher la responsabilité de Mme [N] sur le fondement des vices cachés, sans que la clause d’exonération desdits vices souscrite dans la vente [N]-[Y] puisse leur être opposée.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

Sous le bénéfice de ces observations, il convient de condamner Mme [N], in solidum avec M. [Y], à verser aux consorts [P]-[F] les sommes de :

– 4.004 € HT augmentée de la TVA applicable au jour du jugement au titre des travaux de reprise des infiltrations dans le studio et de reprise des problèmes de structure,

– 5.683,35 € HT augmentée de la TVA applicable au jour du jugement au titre des travaux de reprise dans le séjour,

sans qu’il y ait lieu à examiner les fondements subsidiaires.

4) Sur les préjudices complémentaires

4.1) Sur le préjudice de jouissance

Les premiers juges ont évalué le préjudice de jouissance subi par les consorts [P]-[F] en raison de l’impropriété du sous-sol à son usage à 20 € par mois à compter du 24 février 2016 jusqu’à la date du jugement intervenu le 16 septembre 2020, soit 54 mois, portant la somme totale due à 1.080 €.

Mme [F] et M. [P] sollicitent de la cour qu’elle réforme le jugement et leur alloue la somme de 450 € par mois au titre du préjudice de jouissance à compter du 24 février 2016 jusqu’à la date du jugement.

M. [Y] et Mme [N] demandent à ce qu’ils soient déboutés de cette demande faute de prouver l’existence d’un quelconque préjudice.

Il a été établi précédemment que le sous-sol est affecté de vices cachés le rendant impropre à sa destination. Les consorts [P]-[F] ont donc bien subi un préjudice de jouissance. Ils produisent un avis de valeur locative de leur bien, l’estimant entre 850 et 900 € par mois, pour la maison et aussi le terrain. Le préjudice de jouissance qu’ils subissent est limité à l’impossibilité d’utiliser le sous-sol et ne concerne pas les pièces à vivre. Il consiste en une impossibilité d’utiliser le sous-sol comme pièce de rangement tout autant que comme pièce de garage.

Le préjudice sera justement réévalué à hauteur de 80 € par mois pour un total de 54 mois, soit une somme de 4.320 €.

Le jugement sera infirmé sur ce point et M. [Y] condamné à payer aux consorts [P]-[F] ladite somme.

4.2) Sur le préjudice moral

Les premiers juges ont estimé que Mme [F] avait subi un préjudice moral à hauteur de 1.000 € en raison de lésions eczématiformes des bras, des mains et des membres inférieurs et que M. [P] ne justifiait pas avoir subi un quelconque préjudice moral.

Les consorts [P]-[F] sollicitent de la cour qu’elle réforme le jugement et leur alloue la somme de 5.000 € au titre de leur préjudice moral.

M. [Y] et Mme [N] sollicitent qu’ils soient déboutés de cette demande faute de prouver l’existence d’un quelconque préjudice.

Mme [F] et M. [P] produisent un certificat médical établi le 28 janvier 2017 par le Dr [M] qui atteste de ce que les lésions affectant Mme [F] ‘se seraient aggravées depuis un an suite à un stress déclenché par des problèmes au niveau de leur maison’. Mme [F] justifie donc bien d’un préjudice particulier lié au stress et aux difficultés rencontrées dans le cadre de la présente procédure.

Le préjudice sera justement réévalué à hauteur de 3.000 €.

Le jugement sera infirmé sur ce point et M. [Y] condamné à payer à Mme [F] ladite somme.

M. [P] ne justifie en revanche pas avoir subi un quelconque préjudice moral.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

5) Sur le recours en garantie de M. [Y] contre Mme [N]

5.1) Sur la prescription

Les premiers juges ont estimé l’action en garantie exercée par M. [Y] contre Mme [N] sur le fondement de la garantie décennale recevable et bien-fondée et l’ont condamnée à garantir M. [Y] en totalité au titre des travaux de reprise relatifs aux infiltrations dans le studio et aux problèmes de structure et à hauteur des deux tiers au titre des préjudices de jouissance, du préjudice moral, des frais irrépétibles et des dépens.

Mme [N] sollicite de la cour l’infirmation du jugement sur ce point. Elle soutient que l’action en garantie est irrecevable comme prescrite dès lors que les travaux ont été achevés au plus tard en 2001. Elle indique que l’action en garantie est mal fondée dès lors que M. [Y] a opéré des travaux de reprise qui couvrent ses propres travaux et que le sous-sol n’est affecté d’aucune impropriété à sa destination.

M. [Y] sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a retenu que Mme [N] est tenue de le garantir en totalité au titre des travaux de reprise relatifs aux infiltrations dans le studio et aux problèmes de structure. Il demande la même garantie totale pour les condamnations au titre du préjudice de jouissance, du préjudice moral, des frais irrépétibles et des dépens. Il soutient que Mme [N] échoue à démontrer que les travaux qu’elle a réalisés dans le sous-sol l’ont été avant février 2007 et que ses propres travaux ne peuvent être qualifiés de travaux de reprise.

En l’espèce, il est établi de façon certaine que les travaux de transformation du vide-sanitaire ont été réalisés par Mme [N] avant le mois de mars 2007, le constat d’état parasitaire établi à cette période mentionnant l’existence d’un sous-sol composé notamment d’un garage et d’une cave.

Il convient de distinguer la date d’ouverture du vide sanitaire et la date de sa transformation en sous-sol avec notamment la réalisation du dallage.

L’expertise judiciaire a en effet établi que c’est la transformation du vide-sanitaire en sous-sol qui est à l’origine du problème structurel et des infiltrations qui affectent le dallage.

La déclaration de travaux visée dans l’acte de vente conclu entre Mme [N] et M. [Y] est datée du 21 juillet 1999 et est relative à une ouverture sur vide-sanitaire. Mme [N] indique que cette déclaration était valable deux ans, soit jusqu’au 21 juillet 2001. Elle ajoute dans ses conclusions que M. [R], artisan qu’elle n’est pas parvenue à retrouver pour obtenir son témoignage, a réalisé les travaux d’ouverture du vide-sanitaire. Le décaissement autour de la maison puis le nivellement du vide sanitaire pour la transformation en cave par dallage ont en revanche été faits par M. [M], artisan qu’elle n’est pas non plus parvenue à retrouver. Elle produit des relevés de compte datant de mars 2001 qui font état, le 1er mars 2001 et le 15 mars 2001, de sommes inscrites au débit de son compte bancaire, pour un montant respectivement de 2.431 € et de 2.000 €. Une mention manuscrite indiquant ‘[R]’ figure sur la même ligne sur les relevés de compte. Mme [N] produit en outre deux photographies horodatées en octobre 2001 qui laissent à voir l’image d’un chantier au sous-sol de la maison litigieuse pour l’une et l’image en extérieur de Mme [N] à côté d’un tracteur et d’une bétonneuse pour l’autre. Enfin, Mme [N] produit trois attestations de témoins, émanant pour deux d’entre elles de ses filles et pour l’autre de son frère.

Mme [S] [B] atteste ainsi le 19 janvier 2021 qu’elle entreposait son véhicule dans le ‘vide-sanitaire ouvert en 2001’. Elle ajoute que Mme [N] entreposait son matériel professionnel dans le vide sanitaire où celle-ci avait installé son plan de travail et qu’en 2002, elle a organisé une fête ayant pris place dans le vide-sanitaire.

Mme [V] [B] indique quant à elle le 27 janvier 2021 ‘avoir été présente lors des travaux d’ouverture par la société ‘L’Hostes de [Localité 3] en 2001’.

M. [G] [N] atteste quant à lui le 28 janvier 2021 de ce que : ‘en 2001 a été ouvert le vide-sanitaire et fait une dalle en béton’.

De ces différents éléments, il s’infère que les travaux d’ouverture du vide-sanitaire semblent bien avoir été réalisés durant l’année 2001. Pourtant, il subsiste un doute quant à l’époque de l’aménagement effectif du vide-sanitaire en sous-sol, à l’origine des vices l’affectant. Les photographies produites prouvent que le vide-sanitaire était bien ouvert en octobre 2001 mais pas que son aménagement effectif a été réalisé à la même époque. Mme [N] indique que c’est M. [R] qui a réalisé les travaux d’ouverture du vide-sanitaire et les sommes inscrites au débit de son compte bancaire en mars 2001 pourraient effectivement avoir servi à le rémunérer, les montants pouvant correspondre à des frais de travaux. Elle ne produit en revanche pas de relevés de compte faisant état de dépenses au profit de M. L’Hostes dont elle dit pourtant qu’il a réalisé les travaux d’aménagement du vide-sanitaire en sous-sol. De plus, l’acte de vente qu’elle a conclu avec M. [Y] indique que ‘le vendeur déclare qu’il a lui-même réalisé les travaux relatifs à cette extension sans l’intervention d’entreprise extérieure’. Les attestations qu’elle produit indiquent que le vide-sanitaire a été ouvert en 2001, mais seul M. [G] [N], frère de Mme [N] et dont le témoignage est donc soumis à caution, fait référence à la pose d’une dalle en béton à l’occasion de ces travaux.

En conséquence, si Mme [N] établit bien que les travaux d’ouverture du vide-sanitaire ont été réalisés en 2001, elle n’établit toutefois pas de façon certaine que les travaux d’aménagement du sous-sol ont été réalisés au même moment, la seule certitude étant qu’ils ne sont pas postérieurs à mars 2007. Elle ne rapporte donc pas la preuve que l’action en garantie exercée par M. [Y] est intentée hors délai, puisque moins de dix ans se sont écoulés entre la fin présumée des travaux, à savoir février 2007, et la date à laquelle Mme [N] a été assignée en intervention forcée à la procédure de référé, le 6 octobre 2016, l’assignation ayant interrompu le délai de la garantie décennale.

L’action est donc recevable comme il a été jugé en première instance.

5.2) Sur la garantie

Comme indiqué précédemment, la responsabilité de M. [Y] ne peut être engagée au titre de la garantie décennale en raison des travaux de réparation qu’il a entrepris pour consolider la structure du sous-sol et pour faire cesser les infiltrations d’eau.

L’expert judiciaire a de plus indiqué que ce sont les travaux entrepris par Mme [N] qui ont provoqué le désordre structurel affectant le sous-sol ainsi que les infiltrations d’eau, les travaux entrepris par M. [Y] ayant contribué à améliorer la situation. Ils n’ont donc pas eu pour effet de couvrir ceux de Mme [N].

De même, les vices affectant la structure du sous-sol et provoquant les infiltrations d’eau sont de nature à le rendre impropre à sa destination.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a condamné Mme [N] à garantir M. [Y] en totalité au titre des travaux de reprise relatifs aux infiltrations dans la partie du sous-sol dénommée studio et des problèmes de structure.

S’agissant des désordres affectant le conduit de cheminée et le mur cloison, il a été ci-dessus retenu que M. [Y] connaissait ces vices au moment de la vente de la maison le 23 octobre 2015 aux consorts [P]-[F].

M. [Y] n’établit pas qu’il ne les connaissait pas au moment de son acquisition auprès de Mme [N] le 15 juin 2007. Faute de justification pertinente, sa demande de garantie dirigée contre Mme [N] au titre des condamnations pour les travaux de reprise de la cheminée et du mur cloison sera rejetée.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

M. [Y] étant en revanche seul responsable des vices affectant la partie cave du sous-sol, c’est à bon droit que les premiers juges ont retenu que M. [Y] ne serait pas garanti sur ce point par Mme [N] et qu’enfin, il serait garanti à hauteur seulement des deux tiers au titre des préjudices de jouissance, du préjudice moral, des frais irrépétibles et des dépens.

Le jugement sera confirmé sur ces points.

6) Sur la demande de dommages et intérêts de Mme [N]

Mme [N] sollicite la condamnation de M. [Y] et des consorts [P]-[F] solidairement ou l’un à défaut de l’autre à lui verser la somme de 5.000 € au titre du préjudice moral qu’elle a subi en raison de l’action en justice exercée contre elle.

Comme il a été dit en première instance, Mme [N] ne rapporte pas la preuve de ce que les consorts [P]-[F] auraient agi dans l’intention de lui nuire.

Il en est de même s’agissant de l’assignation en intervention forcée exercée à son égard par M. [Y].

Par conséquent, la demande de dommages-intérêts de Mme [N] sera rejetée.

7) Sur les dépens et les frais irrépétibles

Succombant, M. [Y] et Mme [N] supporteront in solidum la charge les dépens d’appel.

Le jugement sera infirmé s’agissant des dépens de première instance qui seront pareillement mis à la charge de M. [Y] et Mme [N] in solidum.

Enfin, eu égard aux circonstances de l’affaire, il n’est pas inéquitable de condamner M. [Y] et Mme [N] à payer aux consorts [P]-[F] la somme de 4.000 € au titre des frais irrépétibles exposés par eux dans la présente instance d’appel et qui ne sont pas compris dans les dépens.

Les demandes de M. [Y] et Mme [N] de ce chef seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Constate qu’elle n’est saisie d’aucune demande d’infirmation du chef du rejet de la demande de nullité du rapport d’expertise judiciaire déposé le 3 mars 2018 par M. [K], expert judiciaire,

Dit en conséquence n’y avoir lieu à statuer de ce chef,

Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Brest du 16 septembre 2020 en ce qu’il a :

– déclaré recevable l’appel en garantie de M. [Y] dirigé contre Mme [N],

– condamné M. [Y] à payer aux consorts [P]-[F] la somme de 1.909,09 € HT augmentée de la TVA applicable au jour du jugement au titre des travaux de reprise des infiltrations dans la cave,

– condamné Mme [N] à garantir M. [Y] des condamnations prononcées à son encontre au titre des travaux de reprise des infiltrations dans le studio et des problèmes de structure,

– condamné Mme [N] à garantir M. [Y] à hauteur des 66 % des condamnations prononcées à son encontre au titre du préjudice de jouissance, du préjudice moral, des frais irrépétibles et des dépens,

– débouté M. [P] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral,

L’infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Déclare recevable l’action des consorts [P]-[F] dirigée contre M. [Y] et contre Mme [N],

Condamne M. [F] [Y] et Mme [Z] [N] in solidum à payer aux consorts [I] et [W] [P]-[F] les sommes de :

– 4.004 € HT augmentée de la TVA applicable au jour du jugement au titre des travaux de reprise des infiltrations dans le studio et des problèmes de structure,

– 5.683,35 € HT augmentée de la TVA applicable au jour du jugement au titre des travaux de reprise dans le séjour,

Y ajoutant,

Condamne M. [F] [Y] à payer aux consorts [I] et [W] [P]-[F] la somme de 4.320 € au titre du préjudice de jouissance,

Condamne M. [F] [Y] à payer à Mme [W] [F] la somme de 3.000 € au titre de son préjudice moral,

Condamne M. [F] [Y] et Mme [Z] [N] in solidum aux dépens de première instance comprenant les frais d’expertise judiciaire et aux dépens d’appel,

Condamne M. [F] [Y] et Mme [Z] [N] in solidum à payer aux consorts [P]-[F] les sommes de 3.000 € au titre des frais irrépétibles de première instance et de 4.000 € au titre des frais irrépétibles d’appel,

Rejette le surplus des demandes.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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