Droits des Artisans : 24 octobre 2022 Cour d’appel de Colmar RG n° 21/01063

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Droits des Artisans : 24 octobre 2022 Cour d’appel de Colmar RG n° 21/01063

MINUTE N° 22/566

Copie exécutoire à :

– Me Patricia CHEVALLIER-GASCHY

– Me Guillaume HARTER

Le

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

TROISIEME CHAMBRE CIVILE – SECTION A

ARRET DU 24 Octobre 2022

Numéro d’inscription au répertoire général : 3 A N° RG 21/01063 – N° Portalis DBVW-V-B7F-HQLH

Décision déférée à la cour : jugement-ordonnance rendu(e) le 22 septembre 2020 par le tribunal judiciaire de MULHOUSE

APPELANTE :

Madame [K] [G] [J]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Patricia CHEVALLIER-GASCHY, avocat au barreau de COLMAR

INTIME :

Monsieur [P] [B]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Guillaume HARTER, avocat au barreau de COLMAR

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 modifié et 910 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 septembre 2022, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme MARTINO, Président de chambre, et Mme FABREGUETTES, Conseiller, chargés du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme MARTINO, Présidente de chambre

Mme FABREGUETTES, Conseiller

Monsieur FREY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme HOUSER

ARRET :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Annie MARTINO, président et Mme Anne HOUSER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE

Selon contrat à effet au 18 juillet 2018, Monsieur [P] [B] a donné à bail à Madame [K] [G] [J] un appartement sur trois étages dans un immeuble collectif situé [Adresse 1], moyennant paiement d’un loyer initial mensuel de 550 € et d’une provision sur charges de 120 €.

Par lettre recommandée du 24 juin 2019, Madame [K] [G] [J] a informé le bailleur de la résiliation du contrat au bénéfice d’un préavis abrégé d’un mois, pour cause de mutation professionnelle.

Un état des lieux de sortie, non signé par Madame [K] [G] [J], a été établi le 4 juillet 2019.

Un procès-verbal de constat a en conséquence été dressé par un huissier de justice le 5 juillet 2019.

Faisant valoir que des loyers sont restés impayés, que la locataire n’a pas justifié du motif de préavis réduit et est donc redevable de trois mois de loyer à ce titre et que des dégradations locatives ont été constatées, Monsieur [P] [B] a assigné Madame [K] [G] [J] le 26 mai 2020 devant le tribunal judiciaire de Mulhouse, aux fins de la voir condamner à lui payer la somme de 2200 € au titre des loyers impayés, majorée de 55 € au titre de la clause pénale, la somme de 1275 francs suisses, soit 1158,69 € au titre des frais de nettoyage, la somme de 7679,30 € au titre des réparations locatives ainsi que la somme de 200 € à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice moral lié à l’impossibilité de relouer rapidement son logement.

Madame [K] [G] [J] n’a pas comparu.

Par jugement réputé contradictoire du 22 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Mulhouse a :

-condamné Madame [K] [G] [J] à payer à Monsieur [P] [B] la somme de 2090 € au titre des impayés locatifs avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

-condamné Madame [K] [G] [J] à payer à Monsieur [P] [B] la somme de 3675,89 € au titre des réparations locatives,

-rejeté les autres demandes de Monsieur [P] [B],

-condamné Madame [K] [G] [J] aux dépens de l’instance,

-rappelé que l’exécution provisoire du jugement est de droit.

Madame [K] [G] [J] a interjeté appel de cette décision le 18 février 2021.

Par écritures notifiées le 18 mai 2022, elle conclut ainsi qu’il suit :

-déclarer recevable et bien fondé l’appel interjeté par Madame [K] [G] [J],

-déclarer l’appel incident mal fondé,

-le rejeter,

Faisant droit au seul appel principal,

-infirmer le jugement rendu le 22 septembre 2020 par le tribunal judiciaire de Mulhouse en ce qu’il a condamné Madame [K] [G] [J] à payer à Monsieur [B] la somme de 2090 € au titre des impayés locatifs et la somme de 3675,89 € au titre des réparations locatives, outre les entiers dépens,

Statuant à nouveau,

-dire que le logement délivré par Monsieur [B] à Madame [K] [G] [J], situé [Adresse 1] était indécent,

-dire que Monsieur [B] a manqué à ses obligations contractuelles en ne délivrant pas à Madame [K] [G] [J] un logement décent et en bon état de réparation et d’entretien,

-fixer la dette locative de Madame [K] [G] [J] à la somme de 621 €,

-débouter Monsieur [P] [B] de l’ensemble de ses demandes, y compris celles relatives aux réparations locatives,

-condamner Monsieur [P] [B] à payer à Madame [K] [G] [J] la somme de 5000 € en réparation du trouble de jouissance qu’elle a subi par la location d’un logement indécent et l’absence de volonté du propriétaire de réaliser les travaux nécessaires,

-condamner Monsieur [P] [B] à payer à Madame [K] [G] [J] la somme de 3500 € en réparation du préjudice moral,

-condamner Monsieur [P] [B] à restituer à Madame [K] [G] [J] la somme de 1100 € correspondant au dépôt de garantie qu’elle a versé lors de son entrée dans les lieux,

Et y ajoutant,

-condamner Monsieur [P] [B] à payer à Madame [K] [G] [J] la somme de 2000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile,

-condamner Monsieur [P] [B] en tous les dépens de première instance et d’appel.

Elle fait valoir que le bailleur s’était engagé à faire réaliser à bref délai les travaux de remise en état de l’appartement qui présentait de nombreux désordres, soit, la reprise des peintures, le rebouchage de trous dans les murs, la réfection du système électrique, la reprise de plusieurs portes et l’installation de portes manquantes, la mise en place d’un compteur électrique et d’un compteur d’eau individualisés, le remplacement d’une vitre brisée et l’installation d’une sonnette en état de fonctionnement ; que ces travaux n’ont cependant jamais été réalisés ; que courant décembre 2018, elle a constaté l’existence d’importantes infiltrations dans l’appartement, notamment dans sa chambre ; que le bailleur n’a pas réagi malgré multiples relances ; que de même, le chauffe-eau était régulièrement en panne, la contraignante à se doucher à l’eau froide en hiver ; qu’elle n’a pu justifier immédiatement de sa mutation lui ouvrant le bénéfice d’un préavis réduit, dont Monsieur [B] était cependant parfaitement informé en ce qu’elle travaillait avec sa compagne dans le même service ; qu’elle n’a pas signé l’état des lieux de sortie qu’elle contestait et qu’elle n’a pas été informée de ce que le bailleur avait fait procéder à un procès-verbal de constat, alors qu’elle était joignable par mail.

Elle soutient que l’état des lieux produit par l’intimé ne correspond pas à l’état réel de l’appartement qui lui a été remis, alors qu’il se trouvait dans le même état de dégradation que l’extérieur de l’immeuble, ainsi qu’en attestent des témoins ; qu’elle a informé le bailleur des désordres, et notamment des problèmes d’infiltration et d’humidité dans les murs qui s’effondraient, dès début décembre 2018 ; qu’elle s’est plainte le 25 mars 2019 de ce qu’elle n’avait plus d’eau chaude ; que Monsieur [B] n’ayant pas réagi, elle l’a mis en demeure de remédier aux désordres par lettre du 19 mai 2019 ; que l’intimé ne saurait contester l’état d’indécence du logement, les témoignages qu’il produit émanant de personnes qui n’ont pas personnellement constaté l’état du logement pendant qu’elle l’occupait ; qu’elle ne s’est jamais opposée à la réalisation de travaux de réfection qui auraient été prévus pour le 20 mars 2019 et souhaitait au contraire une réparation rapide des infiltrations qu’elle subissait.

Elle critique le jugement déféré en ce qu’il l’a condamnée à payer les loyers jusqu’au 24 septembre 2019, alors que le bailleur était parfaitement informé de la réalité de sa mutation professionnelle ; que de plus, au regard du caractère indécent du logement, elle n’avait pas à respecter un quelconque délai de préavis, de sorte qu’elle n’est redevable que du loyer de juin 2019 et de celui pour la période du 1er au 4 juillet 2019.

Elle réfute toute dégradation locative alors que le bailleur lui a délivré un appartement non entretenu et en mauvais état et qu’elle n’est pas responsable des nombreuses infiltrations qui ont perduré depuis décembre 2018 jusqu’à sa sortie des lieux, ainsi que des dommages causés par l’humidité ambiante ; qu’elle n’est pas tenue de payer les frais de débarrassage de meubles qu’elle avait laissés sur place pour qu’ils soient récupérés par un collègue, ce à quoi Monsieur [B] s’est opposé.

Elle soutient que l’état de l’appartement, dans lequel Monsieur [B] n’a effectué aucune réparation alors qu’il était informé de l’existence des désordres, a troublé sa jouissance paisible et lui a causé un préjudice de jouissance, ainsi qu’un préjudice moral justifiant l’allocation de dommages et intérêts ; qu’elle est de même fondée à obtenir restitution du dépôt de garantie versé lors de son entrée dans les lieux.

Par écritures notifiées le 28 avril 2022, Monsieur [P] [B] a conclu ainsi qu’il suit :

Sur l’appel principal,

-débouter Madame [K] [G] [J] de l’intégralité de ses fins et conclusions,

Sur appel incident,

-le déclarer recevable et bien fondé,

-y faire droit,

En conséquence,

-infirmer partiellement la décision dont appel,

Statuant à nouveau,

-condamner Madame [K] [G] [J] au paiement de la somme de 1745,90 € au titre des dégradations locatives affectant le salon- salle à manger,

-condamner Madame [K] [G] [J] au paiement de la somme de 700 € au titre des dégradations locatives affectant les boiseries,

-confirmer la décision entreprise pour le surplus,

En tout état de cause :

-condamner Madame [K] [G] [J] aux entiers frais et dépens des deux instances ainsi qu’au paiement de la somme de 2000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir qu’un état des lieux d’entrée a été dressé contradictoirement et signé par les parties le 30 juin 2018 ; que le logement était en parfait état et que Madame [K] [G] [J] en connaissait bien les caractéristiques, puisqu’elle se rendait régulièrement chez le précédent locataire qui était un de ses collègues ; que lorsqu’elle a obtenu sa mutation, Madame [K] [G] [J] a quitté le logement sans préavis, sans donner sa nouvelle adresse, sans régler les derniers mois de loyer et en laissant les lieux en mauvais état d’entretien ; que l’état extérieur de l’immeuble est sans rapport avec son confort intérieur ; que les attestations que l’appelante produit, qui émanent toutes d’amis, sont contradictoires et ne décrivent pas les mêmes désordres censés affecter l’immeuble ; qu’elles sont contredites par les propres mails de Madame [G] [J] et par son comportement ; qu’en effet, l’appelante ne s’est plainte que de l’humidité d’un mur, d’un dysfonctionnement de la sonnette et d’une absence d’eau chaude pendant un week-end en mars 2019 ; qu’il a toujours répondu promptement aux demandes de la locataire, sans que celle-ci fasse état du caractère prétendument indécent du logement ; qu’il a notamment remplacé le chauffe-eau la semaine même où il a été informé de son dysfonctionnement ; que seule une infiltration d’eau a eu lieu dans l’immeuble en raison du déplacement d’une tuile ; qu’il a fait appel à un artisan qui n’a pu intervenir immédiatement par temps de grand vent et s’est ensuite vu refuser l’accès à l’immeuble par Madame [G] [J] ; que le déplacement de cette tuile n’a entraîné, en cas de fortes pluies, que de l’humidité sur une bande de quelques dizaines de centimètres de large sur le mur d’une des chambres de la maison ; que Madame [G] [J] n’a au demeurant fait effectuer aucun constat du caractère indécent des lieux ni n’a fait appel aux services de la commune à cette fin.

Il maintient que l’appelante n’a pas justifié de ce qu’elle pouvait bénéficier d’un préavis d’un mois, alors qu’elle était en mesure de le faire ; qu’elle ne rapporte pas la preuve des désordres allégués.

Il soutient que la locataire a causé des dégradations et a rendu le logement dans un état sale ; qu’elle ne justifie nullement que les meubles abandonnés sur place auraient dû être repris par un de ses amis ; que le premier juge a à tort limité la remise en état des lieux alors que Madame [G] [J] est responsable des dégradations survenues pendant son occupation ; que l’état d’insalubrité du logement n’étant nullement établi, Madame [G] [J] ne peut prétendre à l’allocation de dommages et intérêts, non plus qu’à la restitution du dépôt de garantie.

MOTIFS

Sur le caractère décent du logement :

En vertu des dispositions de l’article 6 de la loi du 6 juillet 1989 dans sa version applicable au litige, le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation.

Le bailleur est obligé :

a) De délivrer au locataire le logement en bon état d’usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement ‘;

b) D’assurer au locataire la jouissance paisible du logement et’ de le garantir des vices ou défauts de nature à y faire obstacle ‘;

c) D’entretenir les locaux en état de servir à l’usage prévu par le contrat et d’y faire toutes les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l’entretien normal des locaux loués.

L’article 2 du décret 2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent prévoit par ailleurs que le logement doit notamment assurer le clos et le couvert, que la nature et l’état de conservation et d’entretien des matériaux de construction, des canalisations et des revêtements du logement ne présentent pas de risques manifestes pour la santé et la sécurité physique des locataires ; que les réseaux et branchements d’électricité et de gaz et les équipements de chauffage et de production d’eau chaude sont conformes aux normes de sécurité définies par les lois et règlements et sont en bon état d’usage et de fonctionnement.

L’état des lieux d’entrée signé par les parties le 30 juin 2018 révèle que la sonnette était à mettre en place ; que les murs du séjour-salle à manger et de deux chambres étaient en état passable ; que les murs des autres pièces étaient en bon état ; que les sols de deux des chambres et des WC étaient en état passable et celui des autres pièces en bon état ; que les sept prises électriques du salon-séjour étaient en état passable.

La locataire ayant signé et en conséquence approuvé cet état des lieux amiable ne peut arguer de l’attestation de Madame [C], qui se borne au demeurant à décrire l’état extérieur de l’immeuble collectif dont le caractère vétuste n’est pas contesté, ainsi que les autres attestations dont elle se prévaut, décrivant un logement dégradé, à la limite de l’insalubrité, au demeurant contredites par les témoignages versés aux débats par le bailleur, ne peuvent faire preuve contre l’état des lieux signé contradictoirement par les parties pour soutenir que l’état des lieux ne décrirait pas l’état réel du logement qu’elle a pris à bail, les mentions relatives au logement ne révélant aucun critère d’indécence lors de la prise d’effet du bail. Il est donc établi que l’état extérieur vétuste de l’immeuble n’entraînait aucun désordre à l’intérieur des locaux.

Pendant la durée du bail, par message du 2 décembre 2018, Madame [K] [G] [J] a informé Monsieur [B] de ce qu’un morceau du mur était tombé, qu’elle « avait touché et que c’était humide à l’intérieur », lui demandant d’agir rapidement.

Par courriel du 15 mars 2019, elle lui a indiqué que le mur de la chambre du premier étage s’écroulait tous les jours. Monsieur [B] a indiqué par mail du 18 mars 2019 qu’il ne trouvait aucune entreprise pour monter sur le toit, en raison du vent ; que le responsable de l’entreprise le tennait informé pour la suite avec une nacelle.

Par mail du 25 mars 2019, Madame [K] [G] [J] s’est plainte de ce qu’elle n’avait plus d’eau chaude chez elle depuis le week-end. Par mail du même jour, Monsieur [B] a précisé passer au plus vite le mercredi pour vérifier le chauffe-eau.

Il a affirmé par lettre du 18 juin 2019 sans être contredit, avoir fait procéder, dans la semaine de l’incident, au changement de cet appareil, remédiant ainsi au problème.

Enfin, par lettre recommandée avec avis de réception du 19 mai 2019, Madame [K] [G] [J] a dénoncé le caractère indécent du logement en raison de l’existence d’une fuite d’eau persistante depuis décembre 2018 au niveau du mur donnant sur l’extérieur dans la deuxième chambre du deuxième étage, dont l’origine est un défaut d’étanchéité du gros-‘uvre (mur et/ou toit). Elle a également rappelé être dans l’attente de la pose d’une sonnette et de lumière dans la chambre de son fils et a mis le bailleur en demeure de procéder aux travaux dans les plus brefs délais.

Il n’est pas contesté et il a été établi par expertise de l’assureur de la locataire que les dommages dans la chambre à coucher proviennent d’un défaut d’étanchéité de la couverture de l’immeuble dont des tuiles s’étaient déplacées.

Monsieur [B] justifie, par la production d’une attestation de Monsieur [H] [F], avoir mandaté ce dernier le 3 décembre 2018 pour une fuite sur le toit, due au déplacement d’une tuile, réparée par le témoin par l’intérieur de l’appartement en passant par une fenêtre, à défaut d’échelle suffisamment haute pour accéder au toit de l’extérieur. Le témoin précise avoir été recontacté le 15 mars 2019 par Monsieur [B] pour le même motif et n’avoir pu intervenir immédiatement en raison du vent ; qu’il est finalement intervenu le 22 mars 2019 en réparant la tuile fendue. Il précise que le placoplâtre et le papier peint du mur de la chambre étaient abîmés sur un mètre carré tout au plus.

S’il est ainsi établi que le logement n’assurait pas le clos et le couvert et que des dommages ont été causés, il convient de relever que les désordres n’ont affecté qu’un mur d’une chambre dans un appartement de 120 mètres carrés pour six pièces, occupé par la locataire et son fils ; que Madame [G] [J] n’a pas fait état, dans sa lettre recommandée, d’autres désordres affectant le logement, de nature à entraîner l’indécence des locaux, étant relevé que la raison de l’absence de lumière dans la chambre de son fils, dont elle ne s’était jamais plainte depuis le début du bail jusqu’au 19 mai 2019, n’est pas connue.

Pour le surplus, à défaut de critères d’indécence constatés lors de la prise à bail du logement, les attestations précitées dont se prévaut la locataire échouent à établir la réalité d’autres dysfonctionnement que ceux dénoncés par la locataire dans la lettre recommandée du 19 mai 2019 et qui seraient survenus pendant la durée du bail, qui n’a pas excédé un an.

Le préjudice de jouissance subi par la locataire du fait des infiltrations répétées, circonscrit à une partie d’une pièce, dont elle a souffert à compter de décembre 2018 jusqu’à son départ des lieux le 4 juillet 2019 et à la privation d’eau chaude pendant quelques jours, justifie dans ces conditions l’allocation de dommages et intérêts à hauteur de 1000 euros.

En l’absence de preuve d’un préjudice moral, injustifié au regard de l’état globalement satisfaisant du logement et des démarches effectuées par le bailleur pour remédier aux désordres dénoncés, l’appelante sera déboutée de sa demande de ce chef.

Sur l’arriéré locatif :

Aux termes des dispositions de l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire est obligé de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus.

L’article 15 de la même loi dispose que lorsqu’il émane du locataire, le délai de préavis applicable au congé est de trois mois. Ce délai est toutefois d’un mois en cas d’obtention d’un premier emploi, de mutation, de perte d’emploi ou de nouvel emploi consécutif à une perte d’emploi. Le locataire souhaitant bénéficier des délais réduits de préavis précise le motif invoqué et le justifie au moment de l’envoi de la lettre de congé. A défaut, le délai de préavis applicable à ce congé est de trois mois.

Il n’est en l’espèce pas contesté que Madame [K] [G] [J] ne s’est plus acquittée des loyers à compter de juin 2019.

Elle soutient n’être redevable que des termes de juin et jusqu’au 4 juillet 2019 au motif qu’ayant été mutée, elle devait bénéficier d’un préavis d’un mois.

C’est cependant à juste titre que le premier juge a retenu qu’elle était tenue du paiement du loyer jusqu’au 24 septembre 2019, pour un montant de 2090 euros. En effet, la lettre de congé qu’elle a adressée au bailleur, datée du 24 juin 2019, précise bien le motif du congé, à savoir qu’elle a été mutée, mais ne contient pas le justificatif, exigé au moment de l’envoi de la lette de congé par l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 précité. Il n’est nullement démontré que le bailleur avait connaissance de la réalité du motif invoqué et il sera relevé que la locataire avait la possibilité de justifier de sa mutation dès le 25 juin 2019 par la production des résultats de la commission administrative paritaire de mutation des adjoints administratifs du 17 au 21 juin 2019 entérinant sa mutation au tribunal de Saint-Pierre. Il est donc indifférent que l’arrêté emportant mutation n’ait été pris que le 9 juillet 2019 et que l’intéressée ait signé le 28 novembre 2019 la mention qu’elle en avait pris connaissance.

Par ailleurs, en l’absence d’indécence et de preuve de désordres graves affectant le logement dans son ensemble, Madame [G] [J] n’est pas fondée à se voir déchargée de tout préavis, l’appartement étant parfaitement habitable.

Le jugement déféré sera en conséquence confirmé quant à l’arriéré locatif.

Sur les réparations locatives :

Aux termes de l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire est obligé de répondre des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, à moins qu’il ne prouve qu’elles ont eu lieu par cas de force majeure, par la faute du bailleur ou par le fait d’un tiers qu’il n’a pas introduit dans le logement ; de prendre à sa charge l’entretien courant du logement, des équipements mentionnés au contrat et les menues réparations ainsi que l’ensemble des réparations locatives définies par décret en Conseil d’Etat, sauf si elles sont occasionnées par vétusté, malfaçon, vice de construction, cas fortuit ou force majeure.

Le procès-verbal de constat d’état des lieux de sortie dressé le 5 juillet 2019 par Maître [N], huissier de justice, relève que le sol du salon-salle à manger n’a pas été nettoyé après le déménagement ; que le parquet stratifié vernis comporte de nombreuses rayures ; que le placo plâtre comporte des marques de stylos et feutres ; que dans la cuisine, la partie basse du papier peint est déchirée ; que certaines lames du parquet sont disjointes et ébréchées à côté d’une fenêtre ; que le plan de travail est sale ; que le four n’a pas été nettoyé, non plus que le meuble évier ; que des trous dans le mur au-dessus de l’évier ont été rebouchés grossièrement ; qu’il y a des griffures sur le mur de l’escalier ; qu’il y a des trous et traces sur le mur du couloir à l’étage ; que la peinture de la chambre du premier étage est écaillée par endroit et qu’il y a des traces indélébiles sur le parquet stratifié vernis ; que la salle de bains est à récurer et qu’un carreau de la tablette de la baignoire est endommagé ; qu’il y a des traces sur le mur blanc de la pièce 3 au premier étage.

L’huissier relève de même que différents meubles (meuble télé, réfrigérateur) ont été laissés sur place.

La locataire ne justifie pas de ce que ces meubles devaient être enlevés par un de ses amis, de sorte que c’est à juste titre que le premier juge a alloué sur ce point une somme de 500 € au bailleur, sur la base d’une facture de 850 € incluant le débarrassage d’un canapé non mentionné dans l’état des lieux de sortie.

Il n’est pas contestable par ailleurs que le logement présentait de nombreuses traces de saleté lorsqu’il a été restitué, de sorte que la somme de 1158,69 € au titre de son nettoyage complet, selon facture de la société Euro-Clean GmbH versée aux débats en première instance, a été à juste titre mise à la charge de l’appelante.

Les murs du salon-salle à manger étant dans un état qualifié de passable à l’entrée dans les lieux, Monsieur [B] n’est pas fondé à solliciter paiement d’une somme de 1745,90 € au titre des frais de réfection de cette pièce, dont le montant a été limité en première instance à la somme de 100 € pour des rayures sur le sol.

De même, à défaut de production d’une facture de lessivage de la société Pastels Keller, Monsieur [B] ne justifie pas de ce que le montant réclamé au titre du nettoyage effectué par cette société ne fait pas double emploi avec la prestation de la société Euro-Clean, mise à la charge de la locataire.

L’état des lieux de sortie relève l’existence de dégradations sur les murs de la cuisine, imputables à la locataire alors qu’aucune anomalie n’était constatée à l’entrée dans les lieux, le premier juge a à bon escient mis à la charge de Madame [K] [G] [J] la somme de 1038,70 € au titre de leur réparation, outre la somme de 100 € au titre des frais de protection du sol.

Enfin, la somme allouée par le premier juge pour la réfection des murs des chambres à hauteur de 1878,50 €, tenant compte d’une vétusté de 15 %, sera diminuée à la somme de 1000 €, l’endommagement d’un des murs résultant d’infiltrations non imputables à la locataire.

Les réparations locatives s’élevant au total à la somme de 3897,39 € dont à déduire le montant du dépôt de garantie de 1 100 €, soit en définitive la somme de 2797,39 €, le jugement déféré sera infirmé quant au montant alloué au bailleur et la locataire sera déboutée de sa demande tendant à la restitution du dépôt de garantie.

Sur les frais et dépens :

Les dispositions du jugement déféré quant aux frais et dépens seront confirmées.

Les prétentions de Madame [G] [J] ne prospérant que partiellement, chacune des parties conservera la charge des dépens d’appel qu’elle aura engagés.

Pour les mêmes motifs, il ne sera pas fait droit aux demandes respectives des parties fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

INFIRME le jugement déféré quant au montant des réparations locatives,

Statuant à nouveau de ce chef,

CONDAMNE Madame [K] [G] [J] à payer à Monsieur [P] [B] la somme de 2797,39 € portant intérêts au taux légal à compter du jugement déféré,

CONFIRME le jugement déféré pour le surplus,

Y ajoutant,

CONDAMNE Monsieur [P] [B] à payer à Madame [K] [G] [J] la somme de 1000 € à titre de dommages-intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

DEBOUTE Madame [K] [G] [J] de ses demandes pour le surplus,

REJETTE les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE chacune des parties à supporter la charge de ses propres dépens.

Le Greffier,Le Président,

 


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