Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 11
ARRET DU 21 AVRIL 2023
(n° , 9 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/16941 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CEML5
Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Juillet 2021 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Bobigny – RG n° 19/03142
APPELANTES
S.A.R.L. VELIACOM
[Adresse 1]
[Adresse 4]/ [Localité 8]
S.A.R.L. VELIACOM INVEST
[Adresse 1]
[Adresse 4]/ [Localité 8]
représentées par Me David BENAROCH, avocat au barreau de PARIS, toque : E0477
INTIMES
Monsieur [M], [H] [T] [F]
[Adresse 2]
[Localité 5]
né le 23 Novembre 1969 à Portugal
représenté par Me Bruno REGNIER de la SCP CHRISTINE LAMARCHE BEQUET- CAROLINE REGNIER AUBERT – BRUNO R EGNIER, AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050
assistée de Me Ismaël BOUTBOUL, avocat
S.A.S. LOCAM – LOCATION AUTOMOBILES MATERIELS La société LOCAM – LOCATION AUTOMOBILES MATERIELS SAS au capital de 11.520.000 ¿ immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Saint Etienne sous le numéro B 310 880 315 ayant son siège [Adresse 6], agissant poursuite et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège
[Adresse 6]
[Localité 3]
N° SIRET : 310 .88 0.3 15
représentée par Me Guillaume MIGAUD de la SELARL ABM DROIT ET CONSEIL AVOCATS E.BOCCALINI & MIGAUD, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC129
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Mme Marion PRIMEVERT, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Denis ARDISSON, Président de chambre
Mme Marion PRIMEVERT, Conseillère,
Mme Marie-Sophie L’ELEU DE LA SIMONE, Conseillère,
Qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : M.Damien GOVINDARETTY
ARRÊT :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Denis ARDISSON, Président de chambre et par Damien GOVINDARETTY, Greffier présent lors de la mise à disposition.
Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties en application de l’article 455 du code de procédure civile.
Il sera succinctement rapporté que M. [M] [H] [T] [F] est artisan, spécialisé dans le secteur des travaux de maçonnerie générale et gros ‘uvre de bâtiment (pièce 1) et exerce son activité à [Localité 7] (93).
La sarl Veliacom a pour activité la commercialisation, l’installation et la maintenance de matériels et réseaux téléphonique, et spécialement l’installation, la configuration et la gestion de standards téléphoniques auprès des entreprises et la délivrance d’un service d’opérateur
La sarl Veliacom Invest est spécialisée dans le courtage en location financière et propose aux professionnels de louer leur équipement bureautique et/ou informatique et leur matériel de télécommunications : elle donne en location le matériel de télécommunication à ses clients puis le cède avec délégation immédiate et temporaire du contrat de location à Locam.
Invoquant la signature par M. [M] [H] [T] [F] de trois bons de commande avec Véliacom le 14 février 2018 pour la fourniture de matériels notamment postes sans fil et téléphones portables pour un loyer trimestriel de 597€ HT pendant 21 trimestres, la fourniture de lignes téléphoniques avec des forfaits de communication pendant 24 mois, et un contrat d’entretien, et d’un contrat de location avec Veliacom Invest du même jour pour financer ces contrats, et l’absence de règlement des factures, Veliacom a procédé à la résiliation du contrat d’entretien invoqué par courrier du 31 octobre 2018 et sollicité en outre le paiement d’une indemnité de résiliation anticipée. Invoquant la même opération, Locam a adressé à M. [M] [H] [T] [F] une mise en demeure le 6 juillet 2018 d’avoir à payer la somme de 17.406,07€ comprenant 1.507,02€ de loyers impayés, une clause de résiliation à hauteur de 14.316,69€, et deux clauses pénales de respectivement 150,70€ et 1.431,66€.
***
Vu le jugement du tribunal judiciaire de Bobigny du 29 juillet 2021 qui a :
– Déclaré recevable l’action de Monsieur [M] [H] [T] [F] à l’encontre des sociétés Veliacom et Veliacom Invest.
– Prononcé la nullité du contrat principal de location et d’entretien du 14 février 2018 pour défaut de consentement de Monsieur [M] [H] [T] [F] artisan;
– Condamné Monsieur [M] [H] [T] [F] artisan à restituer à la société Locam les matériels (les trois téléphones Panasonic TGP 600) dans le délai d’un mois à compter de la signification du jugement,
– Débouté la société Locam et les sociétés Veliacom et Veliacom Invest de toutes leurs demandes en paiement dirigés à l’encontre de Monsieur [M] [H] [T] [F] artisan,
– Prononcé, par suite de la nullité du contrat de location principal, la nullité du contrat de vente du 22 mars 2018, objet de la facture FC 1159 (installation Autocommutateur panasonic sans numéro de série et 3 TGP 600).
– Condamné la société Veliacom Invest à payer à la société Locam la somme de 12.370,92 euros au titre de la restitution du prix de vente du matériel précité.,
– Condamné la société Locam à restituer le matériel objet de la facture FC 1159 (installation Autocommutateur panasonic sans numéro de série et 3 TGP 600) à la société Veliacom Invest ;
– Condamné la société Locam et les sociétés Veliacom Invest et Veliacom à payer chacune à Monsieur [M] [H] [T] [F] la somme de 1.000 euros à titre d’indemnité de procédure sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– Dit n’y avoir lieu à prononcer l’exécution provisoire du présent jugement,
– Condamné la société Locam et les sociétés Veliacom Invest et Veliacom à payer les entiers dépens de l’instance,
– Rejeté au surplus les autres demandes.
La sarl Veliacom et la sarl Veliacom Invest ont, par acte du 27 septembre 2021, interjeté appel de ce jugement.
***
Vu les denières conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 19 mai 2022 par la sarl Veliacom et la sarl Veliacom Invest qui demandent à la cour de :
Vu l’article 1103 du Code civil,
Vu les pièces versées aux débats ;
– juger recevable l’appel formé par la société Veliacom et la société Veliacom Invest ;
– le declarer bien-fondé ;
– infirmer le jugement de première instance rendu par le tribunal judiciaire de bobigny en date du 29 juillet 2021 en ce qu’il a :
* Déclaré recevable l’action de Monsieur [M] [H] [T] [F] artisan à l’encontre des sociétés Veliacom et Veliacom Invest ;
* Prononcé la nullité du contrat principal de location et d’entretien du 14 février 2018 pour défaut de consentement de Monsieur [M] [H] [T] [F] artisan ;
* Condamné Monsieur [M] [H] [T] [F] artisan à restituer à la société Locam les matériels (les trois téléphones Panasonic TGP 600) dans le délai d’un mois à compter de la signification du jugement ;
* Débouté la société Locam et les sociétés Veliacom et Veliacom Invest de toutes leurs demandes en paiement dirigées à l’encontre de Monsieur [M] [H] [T] [F] artisan,
* Prononcé, par suite de la nullité du contrat de location principal, la nullité du contrat de vente du 22 mars 2018, objet de la facture FC 1159 (installation Autocommutateur panasonic sans numéro de série et 3 TGP 600)
* Condamné la société Veliacom Invest à payer à la société Locam- la somme de 12.370,92 euros au titre de la restitution du prix de vente du matériel précité ;
* Condamné la société Locam à restituer le matériel objet de la facture FC 1159 (installation Autocommutateur panasonic sans numéro de série et 3 TGP 600) à la société Veliacom Invest ;
* Condamné la société Locam et les sociétés Veliacom Invest et Veliacom à payer les entiers dépens de l’instance,
Statuant à nouveau,
– JUGER que Monsieur [M] [H] [T] [F] ne rapporte pas la preuve de ce que son épouse Madame [F] ne bénéficiait pas d’une délégation de signature l’autorisant à signer le bon de commande « matériel », le bon de commande « VGA et licence IP » et le contrat d’entretien de l’installation téléphonique auprès de la société Veliacom ;
– JUGER que Monsieur [M] [H] [T] [F] ne rapporte pas la preuve de ce que son épouse Madame [F] ne bénéficiait pas d’une délégation de signature l’autorisant à signer le contrat de location de l’installation téléphonique auprès de la société Veliacom Invest ;
– JUGER qu’en tout état de cause, en application de la théorie du mandat apparent, il existait au moment de la signature des contrats, des circonstances autorisant les sociétés Veliacom et Veliacom Invest à ne pas vérifier les pouvoirs de Madame [F], épouse de Monsieur [M] [H] [T] [F] ;
En conséquence,
– JUGER que le bon de commande « matériel », le bon de commande « VGA et licence IP » et le contrat d’entretien de l’installation téléphonique conclus entre Monsieur [M] [H] [T] [F] et la société Veliacom ne sont pas nuls pour défaut de consentement, et sont au contraire parfaitement valides ;
– JUGER que le contrat de location de l’installation téléphonique conclu entre Monsieur [M] [H] [T] [F] et la société Veliacom Invest n’est pas nul pour défaut de consentement, et est au contraire parfaitement valide ;
– débouter Monsieur [M] [H] [T] [F] de l’ensemble de ses demandes formées à l’encontre des sociétés Veliacom et Veliacom Invest dans le cadre de la présente procédure d’appel ;
– CONFIRMER le jugement de première instance rendu par le Tribunal judiciaire de BOBIGNY en date du 29 juillet 2021 en ce qu’il n’a pas fait droit aux demandes de Monsieur [T] [F] de prononcer la nullité du contrat de location et du contrat d’entretien pour défaut de contenu certain ;
– CONFIRMER le jugement de première instance rendu par le Tribunal judiciaire de BOBIGNY en date du 29 juillet 2021 en ce qu’il n’a pas fait droit aux demandes de Monsieur [T] [F] de prononcer la caducité des contrats du 14 février 2018 pour défaut d’exécution ;
– condamner Monsieur [M] [H] [T] [F] à verser à la société Veliacom la somme de 874,80 € au titre de l’indemnité contractuelle et forfaitaire de résiliation anticipée du contrat d’entretien ;
– condamner Monsieur [M] [H] [T] [F] à verser à la société Veliacom et à la société Veliacom Invest somme de 2.500 € à chacune au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– condamner Monsieur [M] [H] [T] [F] aux entiers dépens.
Par ses dernières conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 4 octobre 2022 et son bordereau récapitulatif du 10 mars 2022, la sas Locam demande à la cour de :
Vu les dispositions des articles 1163, 1168, 1103, 1104 et 1343-2 du Code civil,
Vu la jurisprudence,
Vu les pièces versées aux débats,
– JUGER la société Locam recevable et bien fondée en toutes ses demandes, fins et conclusions.
Au contraire,
– JUGER Monsieur [M] [H] [T] [F] tant irrecevable que mal fondé en toutes ses demandes, fins et conclusions et l’en débouter.
En conséquence,
– REFORMER le Jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,
– condamner Monsieur [M] [H] [T] [F] au paiement de la somme de 17.406,07 € et ce avec intérêts au taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage (article L 441-6 du Code de commerce) et ce à compter de la date de la mise en demeure soit le 06.07.2018.
– ORDONNER l’anatocisme des intérêts en application des dispositions de l’article 1343-2 du Code civil.
A titre subsidiaire,
– CONSTATER la responsabilité contractuelle de Monsieur [M] [H] [T] [F].
– condamner Monsieur [M] [H] [T] [F] au paiement de la somme de 17.406,07 € et ce avec intérêts au taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage (article L 441-6 du Code de commerce) et ce à compter de la date de la mise en demeure soit le 06.07.2018.
En tout état de cause,
– ORDONNER la restitution par Monsieur [M] [H] [T] [F] du matériel objet du contrat et ce, sous astreinte par 50 euros par jour de retard à compter de la date de la décision à intervenir.
– condamner Monsieur [M] [H] [T] [F] au paiement de la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.
– condamner Monsieur [M] [H] [T] [F] aux entiers dépens de la présente instance.
***
Par ses dernières conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 07 juin 2022, M. [M] [H] [T] [F] demande à la cour de :
Vu les articles 331 et suivant du Code de procédure civile.
Vu les articles 1103 et suivants du Code civil.
Vu les articles 1128 et suivants du Code civil.
Vu l’article 1169 du code civil.
Vu l’article 1231-5 du Code civil.
Vu l’article 514 ancien du code de procédure civile.
Vu les pièces versées aux débats
– Confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a
Déclaré recevable l’action de Monsieur [M] [H] [T] [F] artisan
à l’encontre des sociétés Veliacom et Veliacom Invest, Prononcé la nullité du contrat principal de location et d’entretien du 14 février 2018 pour défaut de consentement de Monsieur [M] [H] [T] [F] artisan ;
Débouté la société Locam- LOCATION AUTOMOBILES MATERIELS SAS et les sociétés Veliacom et Veliacom Invest de toutes leurs demandes en
paiement dirigées à l’encontre de Monsieur [M] [H] [T] [F] artisan,
Prononcé, par suite de la nullité du contrat de location principal, la nullité du contrat de vente du 22 mars 2018, objet de la facture FC 1159 (installation Autocommutateur panasonic sans numéro de série et 3 TGP 600 ),
Condamné la société Veliacom Invest à payer à la société Locam la somme de 12 370,92 euros au titre de la restitution du prix de vente du matériel précité,
Condamné la société Locam à restituer le matériel objet de la facture FC 1159 (installation Autocommutateur panasonic sans numéro de série et 3 TGP 600) à la société Veliacom Invest.
Condamné la société Locam et les sociétés Veliacom Invest et Veliacom à payer chacune à Monsieur [M] [H] [T] [F] la somme de 1000 euros à titre d’indemnité de procédure sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– Infirmer le jugement de première instance en ce qu’il a condamné Monsieur [M] [H] [T] [F] artisan à restituer à la société Locam les matériels (les trois téléphones Panasonic TGP 600) dans le délai d’un mois à compter de la signification du jugement,
STATUANT A NOUVEAU
– débouter la société Locam, la société Veliacom Invest et la société Veliacom de toutes leurs demandes.
A titre subsidiaire
– PRONONCER la nullité des contrats avec la société Locam, la société Veliacom et la société Veliacom Invest du 14 février 2018 pour contrepartie dérisoire.
– PRONONCER la nullité du contrat de location du 14 février 2018 et du contrat d’entretien du 14 février 2018 pour défaut de contenu certain.
– débouter la société Locam, la société Veliacom Invest et la société Veliacom de toutes leurs demandes.
A titre très subsidiaire
– PRONONCER la caducité des contrats du 14 février 2018 pour défaut d’exécution.
– débouter la société Locam, la société Veliacom Invest et la société Veliacom de toutes leurs demandes.
– débouter la société Locam de sa demande de dommages et intérêts et de toutes ses autres demandes.
– débouter la société Locam de toutes ses demandes du fait de son comportement fautif.
– DIMINUER les sommes réclamées par la société Locam au titre de la clause pénale à de plus justes proportions.
– condamner la société Veliacom Invest à payer à Monsieur [T] [F] la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile .
condamner la société Veliacom à payer à Monsieur [T] [F] la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– condamner la société Locam à payer à Monsieur [T] [F] la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile .
– condamner la société Veliacom, la société Veliacom Invest et la société Locam aux entiers dépens.
***
Vu l’ordonnance de clôture du 12 janvier 2023,
***
A titre liminaire, la cour relève qu’aucun moyen n’est articulé sur la recevabilité de l’action de l’une ou l’autre partie de telle sorte que contrairement à ce que présente le dispositif des conclusions de Locam qui demandent de « Juger Monsieur [M] [H] [T] [F] tant irrecevable que mal fondées », cette demande est sans objet.
SUR CE, LA COUR,
1. Sur les contrats invoqués
En vertu de l’article 9 de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, les contrats conclus après le 1er octobre 2016 sont soumis à la loi nouvelle. En l’espèce les contrats invoqués par les appelantes, datés du mois de février 2018, sont ainsi soumis aux dispositions du code civil postérieures à cette ordonnance.
Aux termes de l’article 1128 du code civil, sont nécessaires à la validité d’un contrat :
1° Le consentement des parties ;
2° Leur capacité de contracter ;
3° Un contenu licite et certain.
Il résulte des contrats et bon de commande produits et il n’est pas contesté, que ceux-ci :
– ne comportent aucune identification du client signataire dans les encadrés réservés à cet effet, si ce n’est le tampon humide de l’artisan « [M] [F] »,
– comportent une signature qui n’est pas celle de M. [F], dont il rapporte un exemplaire sur sa carte d’identité (pièce 2) et sur une adhésion au prélèvement pour les impôts (pièce 7).
Aux termes de l’article 1156 du code civil, l’acte accompli par un représentant sans pouvoir ou au-delà de ses pouvoirs est inopposable au représenté, sauf si le tiers contractant a légitimement cru en la réalité des pouvoirs du représentant, notamment en raison du comportement ou des déclarations du représenté.
Lorsqu’il ignorait que l’acte était accompli par un représentant sans pouvoir ou au-delà de ses pouvoirs, le tiers contractant peut en invoquer la nullité.
L’inopposabilité comme la nullité de l’acte ne peuvent plus être invoquées dès lors que le représenté l’a ratifié.
D’une part, les appelantes ne peuvent, sans renverser la charge de la preuve, soutenir que M. [F] ne rapporte pas la preuve que le signataire des contrats, qu’elles estiment être son épouse, ne bénéficiait pas d’une délégation de signature, l’absence d’une telle délégation constituant une preuve négative, impossible à rapporter.
D’autre part, s’agissant de l’invocation d’un mandat apparent, la cour relève que l’identité de signature entre celle apposée sur les contrats et celle de Mme [F], comme notamment agrandies page 10 des conclusions de Locam, n’a rien d’évidente, et que les appelantes ne produisent aucun autre élément pour rapporter une quelconque similitude que cette comparaison de faible qualité.
Enfin, la croyance légitime de Veliacom en la réalité des pouvoirs du représentant, notamment en raison de son comportement ou des déclarations du représenté, n’est pas établie dès lors que :
– aucune des circonstances entourant la signature desdits contrats et bon de commande n’est rapportée, les appelantes ne procédant que par affirmations quand elles indiquent que « Mme [F], épouse de M. [F], s’est présentée comme agissant pour le compte de M. [F] », qu’elle « usait d’ailleurs du cachet professionnel de M. [F] », et que « Locam s’est vu remettre un relevé d’identité bancaire de l’entreprise de M. [F] » alors d’ailleurs qu’aucune somme n’a jamais été prélevée,
– le mail de Mme [F] du 13 avril 2018 répondant à une demande de documents pour « l’installation de votre Box » par un « technicien Orange » ne constitue ni la ratification du contrat par M. [F], ni un comportement de nature à rendre légitime la croyance en un mandat dès lors que ce mail est postérieur à la signature des contrats, et que ses termes sont particulièrement généraux pour ne pas permettre à l’interlocuteur de faire le lien entre l’intervention d’un technicien de la société Orange et un contrat de location financière nouvellement signé ; au demeurant, aucun élément n’établit la réalité d’aucune intervention dans les locaux de l’entreprise de M. [F] pour établir une ligne ou installer une box,
– enfin, en qualité de professionnel de la « commercialisation » de solutions téléphoniques, Veliacom est tenue, comme l’a à juste titre relevé le tribunal, de vérifier la qualité du signataire des contrats qu’elle présente. A ce titre, Veliacom ne rapporte aucune vérification ni aucune diligence de ce chef de sa part, au moment de la signature des contrats alors même que ses propres allégations de signature par Mme [F] devaient attirer son attention puisque que le tampon de l’entreprise était au nom de M. [M] [F]. Le montant de l’engagement, représenté à ce jour par le total des demandes des appelantes, de plus de 17.000€, obligeait plus encore Veliacom à s’assurer du mandat du signataire. Aucun élément n’est rapporté de ce chef.
La ratification du contrat n’est pas plus rapportée par la signature apposée sur le procès-verbal de livraison et de conformité du 22 mars 2018, qui ne correspond pas à celle de M. [F] (pièce 8 Veliacom).
Aucune disposition du code civil n’imposait par ailleurs à M. [F] de porter plainte pour démontrer son absence de consentement aux actes allégués.
Locam qui indique que M. [F] n’a pas contesté la facture qu’elle lui a adressée le 22 mars 2018 (pièce 4) et l’échéancier envoyé le 16 avril 2018 (pièce 5) ne rapporte à aucun moment la preuve de la réception ni de l’envoi de ces deux courriers, simples. Quant aux mises en demeure adressées par lettre recommandée avec avis de réception, M. [F] conteste les devoir dans la présente instance.
Il résulte de ce qui précède que c’est à juste titre que le tribunal a retenu que les contrats présentés par Veliacom étaient nuls pour défaut de consentement de M. [F]. Les contrats de location étant nuls, alors qu’ils s’inscrivent dans une opération incluant une location financière avec laquelle ils sont ainsi interdépendants, et en application de l’article 1186 du code civil, les contrats assurant leur financement et l’entretien des matériels sont caduques dès lors que l’un de leurs éléments essentiels, en l’espèce leur objet, disparaît. Le jugement sera ainsi confirmé de ces chefs, les restitutions entre Locam et Veliacom Invest devant ainsi être confirmées.
En revanche, faute de rapporter la délivrance des matériels à M. [F] comme il vient d’être dit à propos du procès-verbal de livraison et de conformité du 22 mars 2018, le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné M. [F] à la restitution des matériels à Locam et cette dernière sera déboutée de ses demandes de ce chef.
2. Sur les dépens et frais irrépétibles
Le jugement étant confirmé pour l’essentiel de ses dispositions, il le sera également pour ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Statuant de ce chef en appel, Veliacom, Veliacom Invest et Locam, déboutées de l’ensemble de leurs demandes, seront condamnées in solidum aux dépens en application de l’article 696 du code de procédure civile et en conséquence, et condamnées à payer à M. [F], chacune, la somme de 2.500€ au titre des frais irrépétibles engagés en première instance et en appel en application de l’article 700 du même code.
PAR CES MOTIFS
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a condamné Monsieur [M] [H] [T] [F] artisan à restituer à la société Locam les matériels (les trois téléphones Panasonic TGP 600) dans le délai d’un mois à compter de la signification du jugement,
INFIRME le jugement en ce qu’il a condamné Monsieur [M] [H] [T] [F] artisan à restituer à la sas Locam les matériels (les trois téléphones Panasonic TGP 600) dans le délai d’un mois à compter de la signification du jugement,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
DÉBOUTE la sas Locam de ses demandes au titre de la restitution des matériels objets des contrats,
CONDAMNE in solidum la sarl Veliacom, la sarl Veliacom Invest et la sas Locam aux dépens de l’appel,
CONDAMNE la sarl Veliacom, la sarl Veliacom Invest et la sa Locam à payer à M. [M] [H] [T] [F], chacune, la somme de 2.500 euros (deux mille cinq cent euros) au titre des frais irrépétibles de l’article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT