Droits des Artisans : 19 octobre 2022 Cour d’appel de Montpellier RG n° 19/08096

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Droits des Artisans : 19 octobre 2022 Cour d’appel de Montpellier RG n° 19/08096

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 19 OCTOBRE 2022

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 19/08096 – N° Portalis DBVK-V-B7D-OOAP

ARRET N°

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 08 NOVEMBRE 2019

TRIBUNAL D’INSTANCE DE BEZIERS

N° RG 1119001383

APPELANTE :

Madame [F] [B] [P] [K]

née le 24 Mai 1971 à [Localité 3] (77)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Vanessa MENDEZ substituant Delphine SOUBRA ADDE de la SCP GRAPPIN – ADDE – SOUBRA, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

INTIME :

Monsieur [T] [Z]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

assigné à personne le 12 mars 2020

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 SEPTEMBRE 2022,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marianne FEBVRE, Conseillère, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

Madame Marianne FEBVRE, Conseillère

Mme Cécile YOUL-PAILHES, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Henriane MILOT

ARRET :

– réputé contradictoire

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Henriane MILOT, Greffier.

*

**

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS DES PARTIES

A la suite de l’acquisition d’une maison à usage d’habitation, Madame [F] [K] a confié à Monsieur [T] [Z], artisan menuisier, la fourniture et la pose d’une fenêtre et porte d’entrée suivant devis du 28 novembre 2018 pour une somme 2.324,30 € TTC. Le 12 avril 2019, elle a réglé le solde de la facture qui n’était plus que de 2.229,22 € compte tenu d’une réduction du taux de TVA.

Cependant et peu de temps après l’intervention de l’artisan, Madame [K] a estimé qu’il y avait plusieurs malfaçons sur les travaux réalisés et elle a contacté son assureur de protection juridique en vue d’organiser une expertise amiable contradictoire.

Au vu du rapport d’expertise amiable établi par le cabinet PolyExpert le 10 juillet 2019, Madame [K] a fait assigner Monsieur [Z] le 10 septembre 2019 en résolution du contrat de louage d’ouvrage et indemnisation de divers préjudices subis.

Vu le jugement réputé contradictoire en date du 8 novembre 2019, par lequel le tribunal d’instance de Béziers l’a déboutée de l’intégralité de ses demandes et l’a condamnée aux dépens,

Vu la déclaration d’appel de Madame [K] en date du 17 décembre 2019,

Vu les dernières conclusions (n°3), en date du 26 avril 2022, par lesquelle l’appelante demande à la cour en substance de réformer le jugement du 8 novembre 2019 et de :

– prononcer la résolution du contrat de louage d’ouvrage pour inexécution suite aux différents désordres aux torts de Monsieur [Z],

– condamner ce dernier à lui payer les sommes suivantes :

– 2.229,22 € en restitution des sommes versées suite à la résolution du contrat de louage d’ouvrage,

– 2.500 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice matériel subi, en réparation des conséquences de l’inexécution, correspondant au coût des travaux de réfection à réaliser,

– 200 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,

– 1.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

ainsi qu’aux entiers dépens,

Vu l’absence de constitution d’avocat pour le compte de l’intimé malgré la signification, par actes en date des 12 mars et 18 juin 2020 de la déclaration d’appel, des premières conclusions et des conclusions n°2 ainsi que des 9 pièces visées au bordereau (actes régulièrement remis à son destinataire pour le premier et à personne présente à domicile pour le second, après avis et avant envoi de la lettre prévue à l’article 658 du code de procédure civile),

Vu l’ordonnance de clôture en date du 16 août 2022,

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère au jugement ainsi qu’aux conclusions écrites susvisées

MOTIFS

Monsieur [Z] a régulièrement été mis en cause par deux acte en date des 12 mars et 18 juin 2020, dont le premier remis à sa personne.

A défaut de constitution d’avocat par l’intimé, l’arrêt sera réputé contradictoire conformément aux dispositions de l’article 473 du même code.

L’article 472 précise que si le défendeur ne comparaît pas, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et fondée, au seul vu des pièces fournies par le demandeur.

En l’espèce, les demandes formées par Madame [K] à l’encontre de Monsieur [Z] sont régulières en la forme et recevables.

Elles peuvent donc être examinées au fond.

A cet égard, la cour rappelle qu’en vertu de l’article 1315 ancien devenu 1353 du code civil, il appartient à celui qui réclame exécution d’une obligation de la prouver conformément aux règles de preuve légalement admissibles, étant précisé que l’insuffisance de preuve est toujours retenue au détriment de celui qui a la charge de la preuve.

En l’espèce, se référant à deux arrêts, dont l’un rendu en chambre mixte et l’autre par la 2ème chambre de la Cour de cassation les 28 septembre 2012 et 13 septembre 2018 interdisant au juge de se fonder exclusivement sur une expertise réalisée à la demande de l’une des parties, le tribunal a constaté que la demanderesse se contentait de verser aux débats une pièce unique, à savoir le rapport d’expertise réalisé par un expert mandaté par sa propre compagnie d’assurance de protection juridique, rapport comportant de surcroît des photographies de piètre qualité.

Et il a rejeté les demandes de Madame [K] après avoir souligné qu’elle ne produisait pas d’éléments de preuve suffisants pour établir la réalité de l’inexécution imputable au défendeur alléguée.

Au soutien de son appel, Madame [K] produit désormais non seulement le rapport d’expertise amiable du 10 juillet 2019, mais également un constat d’huissier dressé le 3 mars 2020, des photographies prises en mars 2022 et un devis établi le 14 mars 2020, qui démontrent que les travaux facturés le 8 avril 2019 (fourniture et pose fenêtre et porte d’entrée bois montage artisanal) n’ont pas été réalisés selon les règles de l’art.

Le rapport d’expertise amiable établit en effet d’une part que l’artisan Monsieur [Z] a bien été invité à participer contradictoirement aux opérations par une lettre recommandée avec avis de réception qui lui a été distribué le 14 juin 2019 mais qu’il ne s’est pas présenté et, d’autre part, que l’on pouvait observer notamment que :

– au niveau de la porte d’entrée, celle-ci était difficile à ouvrir de l’intérieur, le joint au niveau du seuil était désolidarisé, celui qui assurait l’étanchéité avait été poinçonné et était incomplet sur certains endroits, certaines vis en partie basse de la porte n’étaient pas alignées et avaient détériorées le bois, il y avait des bavures de colle sur le vitrage de la porte et, au droit du vitrage, le bois était détérioré et l’étanchéité non assurée, enfin l’absence de joint entre la porte et le rajout en partie basse permettait à l’humidité de migrer entre ces deux éléments,

– concernant la fenêtre à l’étage : l’appui de la fenêtre en bois était trop bas par rapport à la maçonnerie existante, de sorte que l’artisan aurait dû mettre en place un rejingot, l’eau risquait de stagner voire migrer à l’intérieur de l’habitation en cas de forte pluie et le joint périphérique était fissuré.

Les constatations faites par l’expert au niveau de la porte d’entrée sont corroborées par le procès-verbal d’huissier qui met en évidence que le joint de cette porte est cassé dans l’angle supérieur droit de l’encadrement et mal fixé sur tout le pourtour de l’encadrement, qu’il n’avait pas été prévu de trous d’évacuation d’eau dans le seuil de l’encadrement, que la plaque de propreté de la serrure était déformée, que le seuil intérieur était resté à l’état brut sans habillage, qu’il y avait un jeu est apparent entre la face extérieure de la porte et la plinthe fixée en bas de porte et que celle-ci était affectée d’un faux aplomb et se refermait toute seule sous l’effet de la gravité.

Les photographies prises sur les lieux par Maître [G] et annexées à son constat sont aussi éloquentes des malfaçons relevées tandis que les photographies prises à l’initiative de Madame [K] confirment le manque d’étanchéité de la porte qui laisse manifestement entrer de l’eau dans l’habitation les jours de pluie.

Au vu de l’ensemble de ces éléments qui caractérisent un grave manquement de l’artisan à ses obligations, le jugement sera infirmé en ce qu’il a rejeté la demande de résolution du contrat pour défaut de conformité.

Par suite, la cour accueillera cette demande et condamnera Monsieur [Z] à restituer à Madame [K] la somme versée en exécution du contrat de louage d’ouvrage annulé.

S’agissant des dommages et intérêts, il convient d’observer que si le coût des réparations a pu être estimé à 2.500 € par l’expert mandaté par l’assureur de la demanderesse et à 2.927,63 € par un nouvel artisan, la somme reçue à titre de remboursement devra venir en déduction si bien que le préjudice matériel effectif de Madame [K] peut être estimé à la somme de 400 € correspondant à ce qu’elle devra débourser en complément pour les travaux de reprise, tandis que Monsieur [Z] devra également être condamné à lui payer une indemnité de 200 € en réparation de son préjudice moral.

Partie perdante au sens de l’article 696 du code de procédure civile, Monsieur [Z] supportera les entiers dépens de première instance et d’appel et sera condamné à payer à Madame [K] une indemnité au titre des frais par elle exposés dans le cadre de la présente procédure.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt réputé contradictoire et mis à la disposition des parties au greffe,

– Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

– Prononce la résolution aux torts de Monsieur [T] [Z] du contrat de louage d’ouvrage correspondant aux travaux facturés à Madame [F] [K] le 8 avril 2019 ;

– Condamne Monsieur [T] [Z] à payer à Madame [F] [K] les sommes suivantes :

– 2.229,22 € en restitution des sommes facturées et payées dans le cadre de ce contrat ;

– 400 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel subi ;

– 200 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral;

– 1.000 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamne Monsieur [T] [Z] aux entiers dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

 


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