Droits des Artisans : 18 octobre 2022 Cour d’appel de Riom RG n° 17/02071

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Droits des Artisans : 18 octobre 2022 Cour d’appel de Riom RG n° 17/02071

COUR D’APPEL

DE RIOM

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

Du 18 octobre 2022

N° RG 17/02071 – N° Portalis DBVU-V-B7B-E3DR

-PV- Arrêt n° 469

[U] [S], [B] [V] épouse [S] / [M] [L] épouse [R]

Jugement au fond, origine Tribunal de Grande Instance de CUSSET, décision attaquée en date du 24 Juillet 2017, enregistrée sous le n° 14/01080

Arrêt rendu le MARDI DIX HUIT OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :

M. Philippe VALLEIX, Président

M. Daniel ACQUARONE, Conseiller

Mme Laurence BEDOS, Conseiller

En présence de :

Mme Céline DHOME, greffier lors de l’appel des causes et Mme Marlène BERTHET, greffier lors du prononcé

ENTRE :

M. [U] [S]

et Mme [B] [V] épouse [S]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentés par Maître Paul CHATEAU de la SCP SCP D’AVOCATS CHATEAU, avocat au barreau de CUSSET/VICHY

Timbre fiscal acquitté

APPELANTS

ET :

Mme [M] [L] épouse [R]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Maître Barbara GUTTON PERRIN de la SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND et par Maître Michel BENICHOU de la SCP BENICHOU, PARA & TRIQUET-DUMOULIN, avocat au barreau de GRENOBLE

Timbre fiscal acquitté

INTIMEE

DÉBATS : A l’audience publique du 29 août 2022

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 18 octobre 2022 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, après prorogé du délibéré initialement prévu le 11 octobre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par M. VALLEIX, président et par Mme BERTHET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [U] [S] et Mme [B] [V] épouse [S] sont propriétaires depuis 1981 d’un ensemble immobilier bâti et non bâti dénommé Le Manoir du Plaix, qu’ils occupent à titre de résidence principale et qui est situé sur le territoire de la commune de [Localité 2] (Allier). Un des pignon de leur manoir est accolé au mur d’une propriété immobilière voisine appartenant à Mme [M] [L] épouse [R] et constituant son habitation principale. Les deux propriétés immobilières sont donc en contiguïté. Une longue situation conflictuelle et litigieuse oppose M. et Mme [S] à Mme [R] depuis plusieurs années dans les circonstances notamment ci-après rappelées :

– par un précédent jugement définitif du 26 mars 2007 du tribunal de grande instance de Cusset, M. et Mme [S] ont notamment obtenu, en lecture d’un rapport d’expertise judiciaire, la condamnation sous astreinte de Mme [R] à faire entièrement démolir la partie nord en ruine d’une partie de son bâti adossé dans des conditions de nuisances au pignon susmentionné de leur manoir (sans mitoyenneté), à en faire évacuer les gravats et décombres et à réhabiliter ce bâti avec l’assistance d’un professionnel du bâtiment, outre paiement de la somme de 2.029,82 € en réparation de leur préjudice matériel et de celle de 10.000,00 € en réparation de leur préjudice de jouissance ;

– ces travaux n’ayant pas été effectués, M. et Mme [S] ont notamment obtenu, par jugement définitif du 25 février 2010 du Juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Cusset, la condamnation de Mme [R] à leur payer la somme principale de 42.200,00 € au titre de la liquidation de l’astreinte précédemment mentionnée ;

– à la suite du commencement d’exécution de ces travaux incombant à Mme [R] en cours d’année 2012, le Président du tribunal de grande instance de Cusset a ordonné à la demande de cette dernière par ordonnance de référé du 27 juin 2012 une mesure d’expertise judiciaire afin de déterminer si les travaux ainsi engagés répondaient ou non à l’injonction, cette mesure d’instruction ayant été confiée à M. [J] [I], Architecte-expert près la cour d’appel de Riom ;

– après avoir rempli sa mission, l’expert judiciaire commis a établi son rapport le 14 mai 2013, celui-ci écrivant notamment : « (‘) / Les travaux de démolition et de réfection de couverture nous apparaissent avoir été correctement réalisés et sont de nature à faire cesser tous risques de désordres à la propriété [S], mais il reste à statuer sur les ouvrages suivants : 1- récupération des eaux pluviales de la toiture [S], après démolition / (‘) / 2- Reprises sur le mur Ouest [S] / (‘) / 3-raccordement de descente pluviale en façade Ouest / (‘) » ;

– arguant que les travaux de la reprise de l’évacuation des eaux pluviales sur leur pignon ouest incombaient à Mme [R] et que celle-ci ne les avait pas totalement effectués, M. et Mme [S] ont, par acte d’huissier de justice signifié le 1er août 2014, assigné Mme [R] devant le Juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Cusset à des fins à nouveau de liquidation de cette astreinte, cette dernière juridiction ayant par jugement du 9 avril 2015 décliné sa compétence d’attribution au sujet de cette demande.

Prenant à son tour l’initiative procédurale, Mme [R] a, par acte d’huissier de justice signifié le 19 août 2014, assigné M. et Mme [S] devant le tribunal de grande instance de Cusset qui, suivant un jugement n° RG-14/01080 rendu le 24 juillet 2017, a :

– rejeté les demandes formées par Mme [R] tendant à effectuer des travaux de reprise de maçonnerie et de toiture sur le fonds de M. et Mme [S], concernant le faux aplomb du mur ;

– condamné in solidum M. et Mme [S] à payer au profit de Mme [R] :

* la somme de 2.000,00 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice occasionné par des agissements de stockage illégal de divers livres, cartons et journaux sur le fonds de cette dernière ;

* celle de 2.000,00 € en réparation du trouble de jouissance occasionné par la pose d’une chaîne pour limiter l’accès à la propriété de cette dernière et pour non-respect de la taille des végétaux dépendant de leur fonds ;

* les intérêts de retard au taux légal sur les deux condamnations pécuniaires susmentionnées à compter de la décision ;

– ordonné à M. et Mme [S] :

* de couper toutes les branches surplombant sa propriété sur l’ensemble de ses limites au moins une fois par an et pour la première fois avant le 1er novembre 2017 ;

* d’arracher un noisetier poussant contre le mur en limite séparative au niveau de la clôture nord des deux propriétés, avant le 1er novembre 2017 ;

– rejeté les demandes formées par M. et Mme [S] aux fins de prise en charge de travaux de réparation en toiture, d’évacuation des eaux pluviales sur la façade ouest, de crépissage d’un mur et d’obturation d’une porte ;

– rejeté une demande d’expertise judiciaire formée par l’ensemble des parties;

– rejeté toutes les autres demandes des parties ;

– condamné M. et Mme [S] à payer au profit de Mme [R] une indemnité de 1.000,00 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire de la décision ;

– condamné M. et Mme [S] aux dépens de l’instance, en ce compris les frais et dépens afférents à la procédure de référé et à la mesure d’expertise judiciaire (incluant sapiteur) susmentionnées, avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP Huguet-Barge- Moure- Fuzet, avocats au barreau de Cusset/Vichy.

Par déclaration formalisée par le RPVA le 31 août 2017, le conseil de M. et Mme [S] a interjeté appel du jugement susmentionné.

Suivant un arrêt rendu avant dire droit le 6 juillet 2021, la cour d’appel de Riom a :

– confirmé la condamnation de M. et Mme [S] au paiement envers Mme [R] de la somme de 2.000,00 € en réparation du préjudice consécutif au stockage illégal de biens sur le fonds de cette dernière ;

– infirmé le jugement de première instance pour le surplus et, statuant à nouveau ;

– condamné in solidum M. et Mme [S] à payer au profit de Mme [R] la somme de 1.000,00 € en réparation du trouble de jouissance occasionné par la pose d’une chaîne pour limiter l’accès à la propriété de cette dernière ;

– ordonné, avant dire droit au fond sur les autres demandes des parties, une mesure d’expertise judiciaire confiée à M. [T] [K], Architecte-expert près la cour d’appel de Riom ;

– réservé les dépens de première instance et d’appel ainsi que les demandes présentées au titre des frais irrépétibles.

Après avoir rempli sa mission, l’expert judiciaire commis a établi son rapport le 1er décembre 2021.

‘ Par dernières conclusions d’appelant notifiées par le RPVA le 9 juin 2022, M. [U] [S] et Mme [B] [V] épouse [S] ont demandé de :

‘ au visa des articles 544, 686 et suivants et 2224 du Code civil ainsi que des rapports d’expertise judiciaire de M. [I] et de M. [K] ;

‘ réformer le jugement du 24 juillet 2017 du tribunal de grande instance de Cusset sauf à le confirmer en ce qu’il a débouté Mme [R] de sa demande tendant à les condamner à effectuer des travaux de maçonnerie sur leurs murs et de réparation sur leur toit ;

‘ débouter Mme [R] de toutes ses demandes ;

‘ juger que le coût des travaux de réparation en toiture de l’évacuation des eaux pluviales sur leur façade ouest, de crépissage de leur mur et d’obturation de leur porte doit être supporté par Mme [R] et condamner en conséquence cette dernière à leur payer la somme de 3.767,58 € correspondant au coût de ces travaux ;

‘ condamner Mme [R] à leur payer la somme de 10.000,00 € en réparation de leur préjudice de jouissance consécutif au mauvais entretien de son terrain contigü ;

‘ condamner Mme [R] à réaliser, dans un délai d’un an à compter de la décision d’appel, des travaux de reconstruction portant sur leur bâtiment sur cave situé au bas de leur mur ouest, dans le respect par ailleurs des préconisations particulières suivantes : d’une part « faire un gobetis à la chaux sur la partie du mur non crépi ainsi que le rebouchage de l’emplacement d’une ancienne poutre », et d’autre part « faire une reconstruction totalement indépendante du mur de la maison [S] » ;

‘ juger que le coût des travaux de reprise de la fissuration du mur du premier étage de la maison de Mme [R], évalué par l’expert judiciaire M. [K] à la somme de 2.700,00 €, sera partagé par moitié entre d’une part M. et Mme [S] et d’autre part Mme [R] ;

‘ condamner Mme [R] à leur payer une indemnité de 5.000,00 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

‘ condamner Mme [R] aux entiers dépens de l’instance, avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de Me Paul Chateau, Avocat au barreau de Cusset/Vichy.

‘ Par dernières conclusions d’intimé et d’appel incident notifiées par le RPVA le 12 août 2022, Mme [M] [L] épouse [R] a demandé de :

‘ confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. et Mme [S] de l’intégralité de leurs demandes ;

‘ confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a ordonné à M. et Mme [S] de couper toutes les branches surplombant sa propriété sur l’ensemble des limites de celle-ci au moins une fois par an, d’arracher le noisetier poussant contre le mur en limites séparatives du mur de clôture nord, d’élaguer les végétaux débordant sur le mur sud à l’entrée de son terrain, de couper les arbres et les branches d’arbres dépassant sur sa propriété et de couper les arbres qui ne sont pas plantés à 2 m de la limite du mur de leur propriété, à compter de la décision à intervenir et sous astreinte définitive de 500,00 € par jour de retard ;

‘ réformer le jugement entrepris en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes formées à l’encontre de M. et Mme [S] ;

‘ condamner solidairement M. et Mme [S], à compter de la décision à intervenir et sous astreinte de 500,00 € par jour de retard, à :

* réparer les murs en très mauvais état général de clôture côté sud et côté ouest en limite de propriété ainsi que le mur pignon ouest et boucher toutes les fissures apparues sur ce mur ;

* réparer le mur de clôture côté sud de leur propriété à l’entrée de leur terrain, éclaté, bondé par endroits et penchant vers le sol, procéder au rebouchage des trous existants sur ce mur conformément à la préconisation de l’expert M. [I] ayant préconisé la démolition et la réfection de ce mur dans sa totalité ;

* procéder aux réparations concernant la poutre de la charpente provenant de la maison de M. et Mme [S] et pénétrant dans leur maison ;

‘ ordonner une mesure d’expertise judiciaire sur le pignon commun avec l’immeuble de M. et Mme [S] afin d’évaluer la gravité des fissures qui se seraient étendues depuis l’expertise de M. [K], ainsi que pour évaluation des dommages subis sur les murs de clôture nord et sud ;

‘ condamner M. et Mme [S] à reconstruire les murs de clôture jouxtant la propriété, en l’occurrence les murs de clôture sud, le mur de clôture ouest et le mur pignon ouest, à compter de la décision à intervenir et sous astreinte de 500,00 € par jour de retard ;

‘ condamner solidairement M. et Mme [S] à leur payer une indemnité de 5.000,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

‘ condamner solidairement M. et Mme [S] aux entiers dépens de l’instance devant comprendre les dépens de première instance, le coût de l’expertise judiciaire de M. [I] et de son sapiteur, celui de l’expertise judiciaire de M. [K] ainsi que les dépens de la procédure d’appel, avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de la SELARL LEXAVOUÉ, en la personne de Me Barbara Gutton, Avocat au barreau de Clermont-Ferrand.

Par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, les moyens développés par chacune des parties à l’appui de leurs prétentions respectives sont directement énoncés dans la partie MOTIFS DE LA DÉCISION.

Après évocation de cette affaire et clôture des débats lors de l’audience civile collégiale du 29 août 2022 à 14h00, au cours de laquelle cette affaire a été évoquée, chacun des conseils des parties a réitéré et développé ses moyens et prétentions précédemment énoncés. La décision suivante a été mise en délibéré au 11 octobre 2022, prorogée au 18 octobre 2022, par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient préalablement de rappeler les dispositions de l’article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, suivant lesquelles « La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif [des conclusions] et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion. ». Dans ces conditions, les prétentions qui sont directement énoncées dans le corps des conclusions sans pour autant figurer dans le dispositif de ces mêmes conclusions ne seront pas examinées.

1/ En ce qui concerne la reconstitution de l’évacuation des eaux pluviales et la reprise des travaux en façade du mur ouest du bâti de M. et Mme [S]

Déboutés en première instance sur ce point, M. et Mme [S] réitèrent en cause d’appel leur demande tendant à juger que le coût des travaux de réparation en toiture de l’évacuation des eaux pluviales de leur façade ouest, de crépissage de leur mur partiellement mis à nu par les travaux susmentionnés de démolition ainsi que d’obturation de leur ancienne porte dégagée par ces mêmes travaux de démolition doit être supporté par Mme [R]. Ils réclament en conséquence à cette dernière le remboursement de la somme de 3.767,58 € correspondant au coût total de ces travaux. Ils précisent en effet avoir d’ores et déjà fait réaliser ces travaux.

La toiture de l’appentis de Mme [R], que celle-ci a été judiciairement contrainte de démolir et qui était précédemment adossée à ce pignon, constituait le dispositif d’évacuation des eaux pluviales de ce versant ouest de l’immeuble de M. et Mme [S]. Ces derniers considèrent donc que c’est à Mme [R] qu’il incombe de reconstituer la récupération des eaux pluviales depuis cette partie du versant de leur toiture. Par voie de conséquence, ils estiment que leur voisine ne pouvait après ces travaux de démolition laisser le mur extérieur de leur maison exposé aux intempéries et devait donc mettre en place un revêtement afin de le protéger. Il en est de même selon eux d’une ancienne porte de passage dégagée par ces travaux de démolition et qui a dû de ce fait être obturée. La somme de 3.767,58 € réclamée inclut ainsi la reprise de la gouttière, les frais de crépissage du pignon et l’obturation de cette ancienne porte de passage.

L’article 544 du Code civil, toujours existant dans sa mouture originelle de 1804, dispose que « La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements. ». En l’occurrence, il est désormais acquis et définitif que Mme [R] n’a pas fait de son droit de propriété un usage conforme aux lois et aux règlements dans la mesure où elle a laissé son propre bâti se dégrader dans des conditions dommageables vis-à-vis du bâti contigu de M. et Mme [S], contraignant notamment ces derniers à rechercher et obtenir par décision de justice la démolition forcée de cet ouvrage en ruine. Elle doit donc désormais également assumer toutes les conséquences de ce trouble de voisinage ayant nécessité l’enlèvement à ses frais de cet ouvrage défectueux, ces conséquences incluant nécessairement la reconstitution d’un dispositif d’évacuation des eaux pluviales, la pérennisation des éléments de maçonnerie ainsi mis à nu par cette démolition et l’obturation d’une ancienne porte de passage, jusque-là condamnée, entre les deux fonds.

Le jugement de première instance sera en conséquence infirmé en ce qu’il a rejeté cette demande formée par M. et Mme [S]. Statuant à nouveau sur ce point, la Cour, considérant que ce poste de remboursement est suffisamment justifié dans son montant, condamnera Mme [R] à payer au profit de M. et Mme [S] la somme de 3.767,58 € en réparation de ce poste de préjudice.

2/ En ce qui concerne les demandes de mise en conformité des empiétements végétaux depuis le fonds de M. et Mme [S]

M. et Mme [S] ne disconviennent pas de leurs obligations légales résultant, d’une part de la taille périodique de leurs arbres et branches d’arbres surplombant le fonds de Mme [R] ainsi que de l’entretien de tous leurs végétaux susceptibles de se répandre sur le fond de Mme [R], et d’autre part de l’arrachage de leur noisetier poussant à une distance trop proche du mur en limite séparative du mur de clôture nord. Le jugement de première instance sera en conséquence confirmé sur ces deux points.

En revanche, Mme [R] ne justifie d’aucun préjudice particulier du fait que ces quelques surplombs et empiétements végétaux ou du noisetier ayant poussé trop près de la limite des deux fonds. Depuis l’établissement, à la demande de Mme [R], des constats d’huissier de justice des 22 août et 13 novembre 2014, du 15 octobre 2015, des 13 avril et du 6 septembre 2018 et du 3 mars 2021, M. et Mme [S] justifient avoir fait faire le nécessaire à ce sujet et avoir donc fait cesser toute situation illicite. Ils produisent à cet effet une facture du 31 mai 2022 d’enlèvement de ces végétaux (après taille de trois haies) du 31 mai 2022 moyennant un coût de 800,00 €. Dans ces conditions, le jugement de première instance sera infirmé en ce qu’il a intégré le non-respect de la taille des végétaux dans l’allocation de dommages-intérêts concernant également la réparation de la pose de la chaîne limitant l’accès à sa propriété.

En cause d’appel, Mme [R] ne formule aucune réclamation pécuniaire à ce titre, se bornant à demander la confirmation des interdictions d’empiétements végétaux sous astreinte. La mauvaise volonté supposée de M. et Mme [S] n’étant pas établie à ce sujet, la demande d’astreinte formée par Mme [R] sera rejetée.

3/ En ce qui concerne la demande de réparation ou de reconstruction des murs de clôture, du pignon et de la poutre de M. et Mme [S]

Le mur pignon ouest de M. et Mme [S] a déjà fait l’objet d’un crépissage, ainsi que cela a été précédemment mentionné. La demande de Mme [R] tendant à ce que les fissures apparues sur ce mur soient rebouchées devient dès lors sans objet.

Le mur ancien servant de clôture sud a fait l’objet de la part de M. et Mme [S] d’un programme de réparation par le moyen d’un crépissage empêchant désormais des chutes de particules, étant précisé que l’expert judiciaire M. [I] n’a jamais préconisé sa destruction mais sa simple restauration en le crépissant et que ce mur ne présente pas de danger du fait de sa faible hauteur. Selon l’expert judiciaire M. [K], il ne présente pas de danger particulier en dépit d’un dévers très ancien et d’un crépi mal accroché et n’accuse pas de signes d’aggravation du fait de travaux de reprise réalisés en 2015 ayant permis de stabiliser cet élément de clôture. Ses deux seuls point de faiblesse constatés par M. [K] concernent d’une part un défaut de liaison avec la maison de M. et Mme [S], exclusif donc de tous dommages potentiels envers le fonds de Mme [R], et la présence d’un bouquet de noisetiers dont les racines traversent l’ouvrage et qui a été depuis lors enlevé par M. et Mme [S].

Il en est de même du muret de clôture côté ouest qui ne présente aucun signe de nécessité de réparation urgente selon l’expert judiciaire M. [I], l’expert judiciaire M. [K] préconisant de son côté de simples travaux confortatifs pour assurer sa pérennité. De plus, ce mur a été dégagé de la végétation qui l’envahissait selon le dernier rapport d’expertise judiciaire du 1er décembre 2021 de M. [K]. M. et Mme [S] ont d’ailleurs exprimé leur accord pour réaliser ces travaux dans l’année, ce qu’ils justifient avoir fait en cours de procédure par un artisan sur une longueur de 40 m de ce mur séparatif moyennant un coût de 3.000,00 € suivant une facture du 26 mai 2022 acquittée à même date.

Selon le dernier rapport d’expertise de M. [K], l’apparition de l’extrémité de la poutre signalée au droit d’un éclatement d’enduit, porteuse du plancher de la maison de M. et Mme [S], n’occasionne aucune poussée sur le mur de Mme [R] ni aucune descente de charge de cet élément de charpente ou du reste de la charpente de M. et Mme [S]. Cette fissuration d’enduit au niveau de cette extrémité de poutre est simplement consécutive selon cet expert judiciaire a une charge ponctuelle ayant été occasionnée à cette charpente. Cet expert judiciaire explique par ailleurs cet éclatement de crépi à cet endroit-là en raison du fait qu’il y a eu une couche d’enduit sur un enduit existant plus ancien, avec manque d’adhérence alors qu’il y avait au niveau de la poutre une épaisseur d’enduit. Mme [R] a d’ailleurs précisé à ce sujet à cet expert judiciaire elle était en train de rénover cette pièce et qu’il y aurait à cet endroit un doublage du mur.

Dans ces conditions, la demande formée par Mme [R] à l’encontre de M. et Mme [S] aux fins de condamnation sous astreinte de ces derniers à procéder à la réparation des murs de clôture côté sud et côté ouest, à celle du mur pignon ouest ainsi qu’à la poutre sera rejetée.

En conséquence des motifs qui précèdent, les demandes formées par Mme [R] aux fins de condamnation sous astreinte de M. et Mme [S] à procéder à la reconstruction des murs de clôture côté sud et côté ouest et du mur pignon ouest seront rejetées.

4/ Sur les autres demandes

Aucun élément nouveau ne justifie l’organisation d’une nouvelle mesure d’expertise judiciaire sur les ouvrages litigieux de clôture entre les deux fonds. Ce chef de demande de Mme [R] sera en conséquence rejeté.

M. et Mme [S] ne contestent pas que Mme [R] a effectué récemment un nettoyage en profondeur de son terrain, ne versant pas aux débats d’éléments particuliers permettant d’objectiver le trouble de voisinage dont ils font état pendant les plusieurs années qui ont précédé ce nettoyage du fait d’un manque d’entretien de ce terrain. Leur demande de dommages-intérêts formée à hauteur de 10.000,00 € en allégation de préjudice de jouissance sera en conséquence rejetée.

Mme [R] ne conteste pas devoir refaire une construction en surplomb de l’ancienne cave qu’elle a mise à nu du fait des travaux de démolition litigieux. M. et Mme [S] ne présentent d’ailleurs aucune réclamation particulière à ce sujet, se bornant à solliciter que ces travaux de reconstruction se fassent dans le respect des préconisations particulières suivantes : d’une part « faire un gobetis à la chaux sur la partie du mur non crépi ainsi que le rebouchage de l’emplacement d’une ancienne poutre », et d’autre part « faire une reconstruction totalement indépendante du mur de la maison [S] ».

En l’occurrence, cette demande apparaît sans objet dans la mesure où l’entrepreneur du bâtiment dûment qualifié et assuré qui accomplira ces travaux doit conserver l’ensemble de sa liberté méthodologique quant aux choix constructifs et budgétaires qu’il proposera ultérieurement à ce sujet au maître d’ouvrage. Par ailleurs il est d’évidence que la nouvelle construction ainsi projetée par Mme [R] ne devra en aucune manière s’adosser ou se reposer sur le bâti contigu de M. et Mme [S].

Il n’est pas établi que la fissuration apparue sur le mur de la maison de M. et Mme [S] soit davantage consécutive aux descentes de charges de l’une des maisons plutôt que de l’autre. La proposition de M. et Mme [S] tendant à prendre à sa charge la moitié du coût des travaux de reprise de cette fissuration, telle qu’estimée par l’expert judiciaire M. [K] à la somme de 2.700,00 €, apparaît dès lors satisfactoire.

Chacune des parties succombant dans ses prétentions, l’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de l’une ou l’autre d’entre elles, que ce soit en première instance ou en cause d’appel.

Pour les mêmes motifs, les entiers dépens de première instance et d’appel seront mis à la charge pour moitié, d’une part de M. et Mme [S] et d’autre part de Mme [R], en ce compris les frais et dépens afférents à la procédure de référé et aux deux mesures d’expertise judiciaire susmentionnées.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, STATUANT PUBLIQUEMENT ET CONTRADICTOIREMENT.

INFIRME le jugement n° RG-14/01080 rendu le 24 juillet 2017 par le tribunal de grande instance de Cusset dans l’instance opposant Mme [M] [L] épouse [R] à M. [U] [S] et Mme [B] [V] épouse [S], en ce qu’il a :

– REJETÉ les demandes formées par M. et Mme [S] aux fins de prise en charge par Mme [R] des travaux de reconstitution du dispositif d’évacuation des eaux pluviales de la façade ouest de leur bâti, de crépissage de leur mur pignon et d’obturation de leur ancienne porte ;

– STATUÉ sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et sur la charge des dépens de première instance incluant la procédure de référé et la première mesure d’expertise judiciaire susmentionnées.

CONFIRME ce même jugement en ce qu’il a ORDONNÉ à M. et Mme [S] de couper toutes les branches surplombant sa propriété sur l’ensemble de ses limites au moins une fois par an et pour la première fois avant la date du 1er novembre 2017 et d’arracher un noisetier poussant contre le mur en limite séparative au niveau de la clôture nord des deux propriétés, avant la date du 1er novembre 2017 ;

CONSTATE que par arrêt du 6 juillet 2021, la cour d’appel de Riom a déjà statué sur:

– la confirmation de ce même jugement en ce qu’il a condamné in solidum M. et Mme [S] à payer au profit de Mme [R] la somme de 2.000,00 € à titre de dommages-intérêts en réparation du stockage illégal de divers biens sur le fonds de cette dernière ;

– la condamnation in solidum M. et Mme [S] à payer au profit de Mme [R] la somme de 1.000,00 € à titre de dommages-intérêts en réparation du trouble de jouissance occasionnée par la pose d’une chaîne sur le fonds de cette dernière.

Statuant à nouveau.

CONDAMNE Mme [R] à payer au profit de M. et Mme [S] la somme de 3.767,58 € à titre de remboursement de leur coût de travaux de réparation de l’évacuation des eaux pluviales de la façade ouest de leur bâti, de crépissage de leur mur et d’obturation de leur ancienne porte de passage.

REJETTE la demande d’astreinte formée par Mme [R] à l’encontre de M. et Mme [S] en ce qui concerne l’interdiction d’invasion des végétaux du fonds de ces derniers sur son propre fonds.

REJETTE la demande formée par Mme [R] à l’encontre de M. et Mme [S] aux fins de condamnation sous astreinte de ces derniers à procéder à la réparation ou à la reconstruction des murs de clôture côté sud et côté ouest, à celle du mur pignon ouest ainsi qu’à la poutre.

REJETTE la demande d’organisation d’une nouvelle mesure d’expertise judiciaire formée par Mme [R].

REJETTE la demande formée par M. et Mme [S] aux fins de condamnation de Mme [R] à leur payer la somme de 10.000,00 € à titre de dommages-intérêts en allégation de préjudice de jouissance.

CONSTATE que M. et Mme [S] s’engagent à prendre à leur charge la moitié de la somme de 2.700,00 € correspondant au coût des travaux de reprise de la fissuration apparue sur le mur du premier étage de la maison de Mme [R].

REJETTE l’ensemble des demandes de défraiement formé par chacune des parties au visa de l’article 700 du code de procédure civile, tant en première instance qu’en cause d’appel.

REJETTE le surplus des demandes des parties.

CONDAMNE, d’une part pour moitié M. et Mme [S] et d’autre part pour autre moitié Mme [R], aux entiers dépens de première instance et d’appel incluant les frais et dépens afférents à la procédure de référé et aux deux mesures d’expertise judiciaire susmentionnées, avec application sur déclaration de droit des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit des avocats constitués.

Le greffier, Le Président,

 


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