RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 12
ARRÊT DU 17 Mars 2023
(n° , 5 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : S N° RG 19/09262 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CASJR
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Septembre 2019 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MEAUX RG n° 18/00242
APPELANT
Monsieur [U] [H]
[Adresse 1]
[Localité 5]
représenté par Me Sabrina ADJAM, avocat au barreau de PARIS, toque : G0690
INTIMEE
URSSAF – ILE DE FRANCE
Division des recours amiables et judiciaires
[Adresse 7]
[Localité 3]
représentée par Mme [J] [Z] en vertu d’un pouvoir spécial
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 27 Janvier 2023, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur Gilles BUFFET, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Sophie BRINET, Présidente de chambre
Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre
Monsieur Gilles BUFFET, Conseiller
Greffier : Madame Alice BLOYET, lors des débats
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– prononcé
par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
-signé par Madame Sophie BRINET, Présidente de chambre et Madame Claire BECCAVIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur l’appel interjeté par M. [U] [H] d’un jugement rendu le 2 septembre 2019 par le tribunal de grande instance de Meaux, dans un litige l’opposant à l’Urssaf Ile de France (Urssaf).
FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
M. [U] [H] était affilié à la caisse du RSI du 1er septembre 2007 au 3 janvier 2017 comme artisan en sa qualité d’associé-gérant majoritaire de la société [8]
Une mise en demeure du 6 avril 2016 de payer la somme de 6.647 euros, dont 558 euros de majorations de retard, au titre des cotisations et majorations de retard concernant les 2ème trimestre 2014 et 1er trimestre 2016, a été envoyée à M. [U] [H], lequel en a accusé réception le 14 avril 2016.
Une seconde mise en demeure du 6 décembre 2016 de payer la somme de 13.484 euros, dont 690 euros de majorations de retard, au titre du 4ème trimestre 2016, a été également adressée à M. [U] [H]. Envoyée sous pli recommandé à l’adresse suivante : « SARL [8], [Adresse 2] », la mise en demeure a été présentée par la poste le 10 décembre 2016 mais, bien qu’avisé, son destinataire ne l’a pas réclamée.
Se prévalant de l’absence de paiement par le cotisant, l’Urssaf a établi une contrainte le 10 avril 2018 pour un montant de 19.901 euros, dont 1.248 euros de majorations de retard, laquelle a été signifiée à M. [U] [H] par exploit d’huissier du 25 avril 2018, au [Adresse 2]. L’acte a été remis à M. [U] [H] en personne.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 avril 2018, M. [U] [H] a formé opposition contre cette contrainte devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Meaux.
Par jugement du 2 septembre 2019, le tribunal de grande instance de Meaux a déclaré recevable l’opposition à contrainte émise le 26 avril 2018, validé la contrainte émise le 10 avril 2018 et signifiée le 25 avril 2018 au titre des 2ème trimestre 2014, 1er et 4ème trimestres 2016, pour un montant ramené à 14.417 euros sous réserve des majorations de retard complémentaires, condamné M. [U] [H] à payer à l’Urssaf la somme de 250 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, rappelé que les frais de recouvrement afférents à la délivrance de la contrainte validée resteront à la charge de M. [U] [H], constaté que le jugement demeure sans dépens et débouté M. [U] [H] de l’ensemble de ses demandes.
Le jugement a été notifié à M. [U] [H] le 8 septembre 2019, lequel en a interjeté appel par déclaration du 12 septembre 2019.
Aux termes de ses conclusions écrites soutenues oralement par son avocat, M. [U] [H] demande à la cour de :
– infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Meaux le 2 septembre 2019,
– déclarer nulle la contrainte émise le 10 avril 2018 et signifiée le 25 avril 2018 au titre des 2ème trimestre 2014, 1er et 4ème trimestre 2016, pour un montant ramené à 14.417 euros,
– débouter l’Urssaf de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– en tout état de cause, condamner l’Urssaf à payer à M. [U] [H] la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
M. [U] [H] fait valoir qu’il n’a jamais reçu les mises en demeure, étant précisé qu’il n’habitait plus au [Adresse 2] à [Localité 4] mais au [Adresse 1] à [Localité 5], de sorte que ces mises en demeure doivent être considérées comme non avenues et que la contrainte doit être annulée. L’Urssaf ne donne aucun élément permettant de connaître le montant des cotisations dont le paiement est poursuivi.
La contrainte ne permet pas à M. [U] [H] de comprendre la nature, la cause et l’étendue de son obligation à paiement. Ces sommes n’étaient pas dues, M. [U] [H] n’ayant pas reçu d’appel de cotisations par le RSI pour les années 2014 et 2016. Il rappelle, à cet égard, que la mise en demeure mentionnant la nature, le montant des cotisations réclamées ainsi que la période à laquelle elle se rapporte, est un préalable obligatoire à toute poursuite et que la contrainte ne fait que référence aux mises en demeure sans qu’elles soient annexées et que si les montants des cotisations et majorations de retard sont indiqués de manière globale, le détail des périodes auxquelles elles se rapportent n’est pas indiqué de manière précise, si bien qu’elle apparaît insuffisamment motivée. M. [U] [H] ajoute que les montants réclamés sont erronés.
L’Urssaf demande à la cour de confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Meaux du 2 septembre 2019 et de condamner M. [U] [H] au paiement de la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
L’Urssaf fait valoir que les mises en demeure litigieuses ont été valablement notifiées à M. [U] [H] qui n’a pas réclamé la seconde auprès des services postaux, l’adresse renseignée sur les mises en demeure étant valide. La contrainte reproduit les numéros des mises en demeure contestées, lesquelles détaillent les différentes cotisations et contributions sociales, les sommes réclamées, avec l’indication des majorations et des pénalités de retard ainsi que les périodes concernées, de sorte que l’assujetti avait connaissance de la nature, la cause et l’étendue de son obligation. La contrainte, qui renvoie aux mises en demeure et qui reprend les éléments essentiels de la demande de cotisations et majorations, est donc suffisamment motivée. La créance de l’Urssaf est certaine, liquide et exigible. M. [U] [H] ne démontre pas le caractère infondé de la créance de l’Urssaf.
SUR CE,
Il résulte des dispositions des articles L. 244-2 et R. 244-1 du code de sécurité sociale que toute action ou poursuite est obligatoirement précédée d’un avertissement ou d’une mise en demeure adressée par lettre recommandée qui précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s’y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.
Selon la jurisprudence constante, la mise en demeure qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d’avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti et la contrainte délivrée à la suite de la mise en demeure restée sans effet doivent permettre à l’intéressé d’avoir connaissance de la nature, de la cause et de l’étendue de son obligation. A cette fin, il importe qu’elles précisent, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elles se rapportent, sans que soit exigée la preuve d’un préjudice. (soc 19 mars 1992, pourvoi n° 88-11.682 , Bull V no 204).
Selon l’article R. 133-3 du code de sécurité sociale, si la mise en demeure ou l’avertissement reste sans effet au terme du délai d’un mois à compter de sa notification, les directeurs des organismes créanciers peuvent décerner, dans les domaines mentionnés aux articles L. 161-1-5 ou L. 244-9, une contrainte comportant les effets mentionnés à ces articles. La contrainte est notifiée au débiteur par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception ou lui est signifiée par acte d’huissier de justice. La contrainte est signifiée au débiteur par acte d’huissier de justice ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. A peine de nullité, l’acte d’huissier ou la notification mentionne la référence de la contrainte et son montant, le délai dans lequel l’opposition doit être formée, l’adresse du tribunal compétent et les formes requises pour sa saisine.
La motivation de la contrainte, qui répond aux mêmes exigences que celles issues de la jurisprudence résultant de l’arrêt du 19 mars 1992 (soc. 19 mars 1992, no 88-11.682, Bull V no 204), peut être opérée par référence à la mise en demeure (soc., 4 octobre 2001, pourvoi n° 00-12.757, Bull. 2001, V, n° 298), voire à plusieurs mises en demeure (civ.2e, 17 septembre 2015, pourvoi n° 14-24.718 ; soc., 20 décembre 2001, pourvois no 00-12.750 à 0012.753, 00-12.756 et 00-12.757 ; soc., 31 janvier 2002, pourvoi no 00-15.269).
L’Urssaf communique les mises en demeure litigieuses des 6 avril et 6 décembre 2016.
Il est observé que M. [U] [H] a personnellement reçu la première mise en demeure qui lui a été envoyée par l’Urssaf le 6 avril 2016 à l’adresse de sa société, [Adresse 2], ayant signé l’accusé de réception correspondant.
Concernant la seconde mise en demeure du 6 décembre 2016 adressée à cette même adresse, l’avis de réception rempli par la poste, qui indique une date de présentation le 10 décembre 2016, porte la mention « pli avisé et non réclamé ». Il s’ensuit que les services de la poste avaient toujours connaissance que cette adresse était celle de M. [U] [H]et que celui-ci n’a pas été cherché la mise en demeure qui lui a été adressée.
Enfin, la réalité de la domiciliation de M. [U] [H] au [Adresse 2] à [Localité 4] est d’autant plus caractérisée que la contrainte émise le 10 avril 2018 a été signifiée à cette adresse et délivrée à personne.
Aussi, il appartenait à M. [U] [H] d’être diligent et d’aller chercher auprès des services de la poste la mise en demeure émise le 6 décembre 2016, ne pouvant imputer sa propre turpitude à l’Urssaf qui justifie avoir délivré les mises en demeure à une adresse valide.
Par ailleurs, les mises en demeure détaillent de manière précise la nature et le montant des cotisations réclamées ainsi que les périodes auxquelles elles se rapportent.
A cet égard, il est rappelé que la mise en demeure n°0060053801 désigne différentes catégories de cotisations et contributions sociales, ainsi que les majorations correpondantes, précisant leurs montants : en majorations de retard pour le 2me trimestre 2014 et en cotisations, contributions et majorations de retard pour le 1er trimestre 2016, tandis que la seconde mise en demeure n°0060294118 mentionne également les cotisations, contributions et majorations de retard et leurs montants au titre du 4ème trimestre 2016.
Aussi, les mises en demeure ont permis à M. [U] [H] d’avoir connaissance de la nature, de la cause et de l’étendue de l’obligation réclamée par l’Urssaf.
Concernant la contrainte contestée, celle-ci fait référence aux deux mises en demeure précitées, rappelle les périodes concernées, le montant des cotisations et contributions, ainsi que celui des majorations de retard.
La contrainte, éclairée par les mises en demeure auxquelles elle renvoie, apparaît suffisamment motivée, le cotisant ne pouvant se méprendre sur les causes du paiement réclamé par l’Urssaf. Aussi, la contrainte est valable et M. [U] [H] débouté de sa demande de nullité.
M. [U] [H] fait valoir qu’il s’est acquitté de la somme globale de 8.324,33 euros et de la régularisation de l’année 2013 pour un montant total de 3.716 euros.
Or, les versements dont il fait état auprès de la SCP [6], huissiers de justice, ne concernent que les cotisations des 1er trimestre 2014, 2ème trimestre 2014 (la mise en demeure du 6 avril 2016 et la contrainte litigieuse ne concernent que les majorations de retard correspondantes), 1er, 2ème, 3ème et 4ème trimestre 2013. Il est cependant rappelé que la contrainte litigieuse porte sur des cotisations et contributions autres afférentes au 1er et 4ème trimestre 2016.
M. [U] [H] ne justifie aucunement que les montants figurant sur la contrainte seraient erronés.
Par conséquent, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.
Partie succombante, M. [U] [H] sera condamné aux dépens d’appel et à payer à l’Urssaf 1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
DECLARE l’appel recevable,
CONFIRME le jugement rendu le 2 septembre 2019 par le tribunal de grande instance de Meaux en toutes ses dispositions,
CONDAMNE M. [U] [H] aux dépens d’appel,
CONDAMNE M. [U] [H] à payer à l’Urssaf Ile de France 1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
La greffière La présidente