JN/SB
Numéro 23/2072
COUR D’APPEL DE PAU
Chambre sociale
ARRÊT DU 15/06/2023
Dossier : N° RG 19/00408 – N° Portalis DBVV-V-B7D-HE62
Nature affaire :
Autres demandes d’un organisme, ou au profit d’un organisme
Affaire :
[R] [V]
C/
[5]
Grosse délivrée le
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 15 Juin 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l’audience publique tenue le 15 Mars 2023, devant :
Madame NICOLAS, Président
Madame SORONDO, Conseiller
Madame PACTEAU, Conseiller
assistées de Madame LAUBIE, Greffière.
Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.
dans l’affaire opposant :
APPELANTE :
Madame [R] [V]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 4]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/000381 du 25/01/2019 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de PAU)
Comparante assistée de Maître MACERA, avocat au barreau de BAYONNE
INTIME :
[5]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Comparant en la personne de Madame [N], munie d’un pouvoir
sur appel de la décision
en date du 05 OCTOBRE 2018
rendue par la COMMISSION DEPARTEMENTALE D’AIDE SOCIALE DES PYRENEES-ATLANTIQUES DE [Localité 3]
RG numéro : 235831
FAITS ET PROCÉDURE
La Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH), par décision du 14 juin 2016, annulant et remplaçant une décision du 26 mai 2016 prise dans les mêmes termes, au vu d’un plan de compensation, a alloué à Mme [R] [V] (la bénéficiaire), au titre de la prestation de compensation du handicap (PCH), les postes suivants :
-service prestataire : 621,95 € mensuels, à compter du 1er février 2016 jusqu’au 31 janvier 2020, pour un besoin mensuel évalué à 35 heures et 29 minutes,
-aide technique : 426,65 € ponctuels, à compter du 1er novembre 2014 jusqu’au 31 octobre 2017,
-logement : 24,50 € ponctuels, à compter du 1er novembre 2014 jusqu’au 31 octobre 2024.
Le Président du [5], a :
– suite à la première décision du 26 mai 2016 de la MDPH, et par arrêté du 6 juin 2016, notifié à la bénéficiaire, que le montant des sommes à lui verser serait celui retenu par la décision du 26 mai 2016 de la MDPH,
-par un nouvel arrêté du 4 juillet 2016, reprenant les mêmes termes que le précédent arrêté du 6 juin 2016, rendu suite à la décision modificative de la MDPH du 14 juin 2016, notifié à la bénéficiaire, que le montant des sommes à verser, serait le suivant :
-service prestataire : 630,48 € mensuels, à compter du 1er février 2016 jusqu’au 31 janvier 2020, outre rappel de 322,70€ correspondant aux mois d’avril, mai et juin 2016 pour le service prestataire,
-aide technique : 426,65 € ponctuels, à compter du 1er novembre 2014 jusqu’au 31 octobre 2017,
-logement : 24,50 € ponctuels, à compter du 1er novembre 2014 jusqu’au 31 octobre 2024.
La bénéficiaire a contesté l’arrêté du Président du Conseil Départemental du 4 juillet 2016, ainsi qu’il suit :
a)-le 7 septembre 2016, devant la commission départementale d’aide sociale (CDAS ) des Pyrénées Atlantiques, saisie d’une demande de « rectification », de cet arrêté, afin de :
-se voir octroyer paiement d’arriérés de PCH du 1er novembre 2014 au 1er février 2016, soit la somme de 9457,20 €, représentant 15 mensualités de 630,48 € chacune,
-voir procéder à la rectification du montant des remboursements des aides techniques ( relatives à un porte gobelet antidérapant et des barres d’appui),
– voir procéder à la rectification de cet arrêté, au motif qu’il affirmerait à tort qu’elle aurait bénéficié d’une avance sur prestation,
-lui donner acte de sa demande de PCH en urgence déposée en mai 2015, et infirmer la décision ayant rejeté cette demande.
La CDAS, après un sursis dans l’attente de la décision du tribunal du contentieux de l’incapacité, et au vu du jugement de cette juridiction en date du 15 mai 2017 , a, par décision du 5 octobre 2018, maintenu la décision du président du conseil départemental des Pyrénées Atlantiques du 4 juillet 2016, et rejeté le recours de la bénéficiaire.
b)-le 9 janvier 2019, en saisissant la présente cour( qui s’est substituée à compter du 1er janvier 2019 à la commission centale d’aide sociale par application du décret 2018-772 du 4 septembre 2018 ), d’un appel de la décision de la commission départementale d’aide sociale des Pyrénées Atlantiques du 5 octobre 2018.
Selon avis de convocation en date du 11 juin 2021, contenant calendrier de procédure, les parties ont été convoquées à l’audience du 23 septembre 2021, à laquelle elles ont comparu.
La présente cour a:
‘par arrêt du 21 octobre 2021, au vu des articles 131-1 et suivants du code de procédure civile, ordonné une mesure de médiation, renvoyant l’affaire à l’audience du 3 mars 2022, reportée successivement à la demande des parties au 2 juin 2022, puis au 23 novembre 2022,
‘par arrêt du 15 décembre 2022, ordonné péremptoirement le renvoi de l’affaire à l’audience du 15 mars 2023, à laquelle les parties ont comparu.
PRETENTIONS DES PARTIES
Selon ses dernières conclusions intitulées « mémoire en appel », transmises par RPVA le 3 mars 2023, reprises oralement à l’audience de plaidoirie, et auxquelles il est expressément renvoyé, Mme [R] [V] conclut à :
– l’infirmation de la décision rendue par la commission départementale d’aide sociale des Pyrénées atlantiques du 5 octobre 2018, portant rejet du recours présenté le 7 septembre 2016, contre l’arrêté du président du conseil départemental du 4 juillet 2016,
-l’homologation du protocole transactionnel signé le 18 mai 2022,
Et statuant à nouveau, demande à la cour :
-à titre principal,
1-de condamner le Conseil Départemental à lui verser dans le délai de 15 jours, sous peine d’astreinte de 20 € par jour de retard :
-2,61 € au titre du porte gobelet antidérapant,
-24,45 €, au titre des barres d’appui,
-1533,82 € au titre de l’aide humaine rétroactivement attribuée,
-9457,20 €, somme qui aurait dû être mise en paiement de novembre 2014 à janvier 2016,
2-de condamner le Conseil Départemental à lui attribuer un crédit de 921 heures d’aide humaine à utiliser dans le délai de six ans à compter de l’arrêt à intervenir,
3-de déclarer que le département a commis une erreur d’appréciation en rejetant tacitement la demande d’attribution de PCH en urgence formulée en 2015,
4-d’ordonner la rectification de l’arrêté modificatif en ce qu’il affirme de manière erronée que Mme [V] a bénéficié d’une avance sur prestation de compensation précédemment attribuée,
5-de laisser les dépens de la procédure de première instance et d’appel, à la charge du conseil départemental, et de le condamner à lui payer 2000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
À titre subsidiaire, de prononcer la dispense totale du remboursement de l’indu demandé par le président du conseil départemental dans l’arrêté du 23 mars 2018.
Selon ses conclusions visées par le greffe le 6 février 2023, reprises oralement à l’audience de plaidoirie, et auxquelles il est expressément renvoyé, le [5], conclut à la confirmation des décisions rendues par la commission départementale d’aide sociale en date du 5 octobre 2018, à la condamnation de l’appelante à lui payer 2000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’à supporter les entiers dépens de première instance et d’appel.
SUR QUOI LA COUR
Observation préalable
La demande d’homologation du protocole transactionnel signé le 18 mai 2022, ne fait l’objet d’aucune contestation et il y sera fait droit.
I/ Sur la saisine de la cour
La CDAS, par la décision du 5 octobre 2018, a maintenu la décision contestée du président du [5], en date du 4 juillet 2016, allouant à l’appelante au titre de la prestation de compensation du handicap (PCH), les postes suivants :
-service prestataire : 630,48 € mensuels, à compter du 1er février 2016 jusqu’au 31 janvier 2020, outre rappel de 322,70€ correspondant aux mois d’avril, mai et juin 2016 pour le service prestataire,
-aide technique : 426,65 € ponctuels, à compter du 1er novembre 2014 jusqu’au 31 octobre 2017,
-logement : 24,50 € ponctuels, à compter du 1er novembre 2014 jusqu’au 31 octobre 2024.
La cour, à l’audience de plaidoirie, a mis dans les débats, la question de la recevabilité des demandes, et recueilli les observations des parties à ce titre.
En application des dispositions des articles 564, 565 et 566 du code de procédure civile, et sous les réserves qui y sont énoncées, les nouvelles prétentions sont irrecevables en appel.
De même, sont irrecevables les demandes indéterminées, ou ne contenant aucune véritable prétention.
Tel est le cas de certaines des prétentions de l’appelante, s’agissant des prétentions par lesquelles l’appelante demande à la cour :
-de déclarer que le département a commis une erreur d’appréciation en rejetant tacitement la demande d’attribution de PCH en urgence formulée en 2015,
-d’ordonner la rectification de l’arrêté modificatif (du 13 novembre 2017) en ce qu’il affirme de manière erronée que Mme [V] a bénéficié d’une avance sur prestation de compensation précédemment attribuée,
-à titre subsidiaire, de prononcer la dispense totale du remboursement de l’indu demandé par le président du conseil départemental dans l’arrêté du 23 mars 2018.
II/ Sur la demande de remboursement de la somme de 2,61 € au titre du porte gobelet antidérapant
La décision contestée a refusé le paiement de frais relatifs à un porte gobelet, au motif qu’en application de l’article R245-67 du code de l’action sociale et des familles, le Conseil Départemental n’opérait versement, que sur production de justificatifs des dépenses, alors qu’aucune facture n’était versée à la procédure s’agissant du porte gobelet.
L’appelante expose désormais par ses écritures en page 8, que :
-le porte gobelet antidérapant a été acquis pour un montant total de 10,80 € TTC, frais de port inclus,
-la CDAPH, a attribué pour cet achat, la somme de 7,50 €,
– le département ne lui a versé que la somme de 4,89 €,
– c’est la différence de 2,61 € (7,50 € -4,89 €), qui fait l’objet de la présente réclamation.
L’intimé, pour s’opposer à la demande, fait valoir que :
-la CDAPH, selon plan de compensation résultant de sa décision notifiée le 14 juin 2016, a prévu un remboursement de 7,50 €,
-si l’appelante indique que le tarif maximum pouvant être attribué, s’élevait à la somme de 10 €, ce tarif n’est qu’indicatif, dès lors que le remboursement doit s’effectuer sur la base du coût réel,
– le département a versé la somme de 4,90 € TTC, en excluant les frais de port, dont la prise en charge n’était pas prévue par le plan, et relève d’un choix d’approvisionnement qui ne peut être opposé au département,
-le devis produit par l’appelante dans ses dernières conclusions sous sa pièce numéro 14, comporte des contradictions, et ne peut donc être pris en compte, en ce qu’il est en date du 3 septembre 2018, alors qu’il mentionne une date de commande du 15 juin 2016.
Sur ce,
L’article R245-67 al 1 du code de l’action sociale et des familles prévoit que pour les éléments relevant du 2°, 3°, 4° et 5° de l’article L. 245-3, les versements ponctuels sont effectués sur présentation de factures, étant rappelé que selon l’article L245-3 du même code:
« La prestation de compensation peut être affectée, dans des conditions définies par décret, à des charges :
1° Liées à un besoin d’aides humaines, y compris, le cas échéant, celles apportées par les aidants familiaux ;
2° Liées à un besoin d’aides techniques, notamment aux frais laissés à la charge de l’assuré lorsque ces aides techniques relèvent des prestations prévues au 1° de l’article L. 160-8 du code de la sécurité sociale ;
3° Liées à l’aménagement du logement et du véhicule de la personne handicapée, ainsi qu’à d’éventuels surcoûts résultant de son transport ;
4° Spécifiques ou exceptionnelles, comme celles relatives à l’acquisition ou l’entretien de produits liés au handicap ;
5° Liées à l’attribution et à l’entretien des aides animalières. A compter du 1er janvier 2006, les charges correspondant à un chien guide d’aveugle ou à un chien d’assistance ne sont prises en compte dans le calcul de la prestation que si le chien a été éduqué dans une structure labellisée et par des éducateurs qualifiés selon des conditions définies par décret. Les chiens remis aux personnes handicapées avant cette date sont présumés remplir ces conditions.»
Force est de constater que la pièce numéro 14 produite par l’appelante, comporte des éléments contradictoires, dès lors que son intitulé la désigne comme un « devis » en date du « 3 septembre 2018 », alors qu’elle porte une mention manuscrite, avec tampon et signature de la société émettrice, indiquant qu’il s’agit d’une « commande validée et réglée par l’appelante le 15 juin 2016 ».
Par ailleurs, ce « devis », est relatif à un gobelet antidérapant pour un coût de 4,90€TTC, auquel s’ajoutent des frais de port et diverses taxes (taxe produit ; taxe transport), qui représentent plus que le coût TTC du gobelet, et portent la facture à un total de 10,80 €.
En remboursant à l’appelante, la somme de 4,90 €, l’intimé lui a remboursé le coût du gobelet TTC justifié selon facture, soit l’intégralité de la dépense, en conformité avec les dispositions de l’article R245-67 du code de l’action sociale et des familles, sans qu’il n’y ait lieu à majoration, au titre de frais de transport et taxes qui relèvent du choix de l’appelante, du mode d’acheminement de cet élément d’aide technique.
III/ Sur la demande de remboursement de la somme de 24,45 €, au titre de barres d’appui
Cette demande de paiement de la somme de 24,45 €, porte en réalité sur des barres d’appui relatives à deux logements distincts, selon le détail suivant:
‘ deux barres d’appui, d’un coût de 25,50€, préconisées pour le logement occupé en 2016, prises en charge à 75% de leur coût, et pour lesquelles l’appelante réclame paiement des 25% restants, soit la somme de 11,45 €,
‘barre à fixer au mur dans le logement occupé en 2017, pour un coût de 13€, n’ayant pas donné lieu à prise en charge et dont l’appelante réclame paiement à concurrence de la somme de 13 €.
La réclamation de la somme de 13€, en ce qu’elle concerne une situation née postérieurement (2017)à la décision contestée (2016), est nécessairement exclue du champ de la contestation, et est donc irrecevable.
S’agissant de la réclamation de la somme de 11,45 €, les parties divergent sur le taux de prise en charge de cette dépense, de 100% selon l’appelante, en considération qu’il s’agit de charges d’aménagement du logement, et de 75% selon l’intimé en considération qu’il s’agit d’une aide technique.
L’appelante produit sous sa pièce 34 un guide d’aide à la decision concernant l’attribution et le calcul de la PCH Logement, dont l’article II.3.10.3 , s’agissant des barres d’appui, précise que:
« Est considéré comme aménagement du logement tout matériel fixé au cadre bâti et dont l’installation, la désinstallation et la réinstallation font habituellement intervenir un artisan. Ces deux conditions sont cumulatives. Si un équipement spécifiquement conçu pour une personne handicapée ou âgée ne répond pas à ces deux conditions, il s’agit d’une aide technique ».
Le plan de compensation du 11 mai 2016 intègre cette dépense de 24,50 € dans les aménagements du logement et préconise une prise en charge à 100%.
L’appelante justifie sous ses pièces 43, de l’accord donné par le propriétaire des lieux, pour fixation desdites barres dans la salle de bain, avec percement du carrelage, et produit également les messages destinés à des intervenants pour une installation à réaliser par un professionnel.
Ces éléments permettent de retenir qu’il s’agit d’une charge d’aménagement du logement, et qu’en conséquence, le taux applicable à la prise en charge de cette dépense est de 100%, conformément au plan de compensation.
La pièce 15 relative à des commandes passées en juin 2016 produite par l’appelante au titre de la facture justificative de sa dépense à ce titre, (qui ne se confond pas avec la même pièce N° 15 page 2, relative à une commande de barres d’appui du 18 octobre 2017), permet d’identifier la dépense alléguée, en ce qu’il y est fait état d’une barre de relèvement pour un coût de 25,50 €.
Le tableau récapitulatif des règlements effectués par le conseil départemental en 2016, démontre que cette dépense n’a été prise en charge qu’à concurrence de 75 %.
(En effet, la facture produite fait état d’une barre de relèvement pour un coût de 25,50 € ainsi que d’une barre d’appui pour un coût de 19,90 €, soit une dépense totale de 45,40 €, prise en charge de façon globale par le conseil départemental à concurrence de 34,05€, représentant 75 % du total).
La demande est fondée.
L’intimé sera condamné à payer à l’appelante, la somme de 11,45 € qu’elle réclame, sans que le prononcé d’une astreinte ne soit justifié.
IV/ Sur la demande de paiement rétroactif de la prestation de compensation du handicap au titre de l’aide humaine
Concernant l’aide humaine, attribuée au titre de la prestation de compensation du handicap, il sera rappelé en préalable, que l’article D245-34 du code de l’action sociale et des familles, fixe la date d’ouverture des droits au premier jour du mois du dépôt de la demande.
Au cas particulier, l’appelante a formé une demande de prestation de compensation du handicap le 19 novembre 2014.
Cette demande a :
-dans un premier temps, été rejetée par décision de la CDAPH du 11 mai 2015, décision contestée devant le tribunal du contentieux de l’incapacité de Bordeaux,
-sur réitération, été accordée, par décision du 26 mai 2016 de la CDAPH, à compter du 1er février 2016 jusqu’au 30 janvier 2020, à concurrence de 35 heures 29 minutes par mois.
Par jugement du 11 août 2017, le tribunal du contentieux de l’incapacité de Bordeaux, a notamment jugé que la prestation de compensation du handicap attribuée à l’appelante, selon décision notifiée le 14 juin 2016, doit prendre effet à la date de la demande, soit le 1er novembre 2014, pour une durée de six ans, soit jusqu’au 31 octobre 2020.
Le présent recours concerne la contestation de la décision du président du conseil départemental, en date du 4 juillet 2016, accordant au titre de l’aide humaine, sous l’intitulé « -service prestataire », la somme de 630,48 € mensuels, à compter du 1er février 2016.
Cette contestation comporte trois branches, s’agissant des trois demandes qui vont être examinées dans l’ordre retenu par la cour ainsi qu’il suit.
4-1/ Sur la demande de paiement de la somme de 9457,20 €, pour la période de novembre 2014 à janvier 2016
Il est constant que les besoins en aide humaine ont été reconnus à l’appelante, par la CDAPH, à raison de 35 heures mensuelles, au tarif horaire de 17,77, à compter du 1er février 2016 , soit la somme de 621,95 euros par mois, revalorisée à celle de 630,48 €par la décision contestée rendue par le président du conseil départemental, le 4 juillet 2016.
Le tribunal du contentieux de l’incapacité, a fixé le point de départ du droit à cette prestation, au 1er novembre 2014.
L’appelante fait valoir que ne lui a été versée à ce titre, que la somme de 630,48 €, pour la première fois au mois de juillet 2016.
Elle demande à titre rétroactif, pour la période du 1er novembre 2014, au 31 janvier 2016, soit pendant 15 mois, la somme de 9457,20 €, selon les mêmes bases de calcul, à savoir : 15 x 630,48€.
Le Conseil départemental, pour s’y opposer, renvoie au mémoire en défense qu’il a conclu dans le cadre d’une affaire examinée à la même audience de plaidoirie, et enregistrée sous le numéro de rôle 19-407, qu’il reprend oralement, par lequel, après avoir rappelé le circuit des décisions en matière de prestation de compensation du handicap, au visa des articles D 245-25, D245-31, R 245-37 du code de l’action sociale et des familles, il fait valoir en substance que :
-la prestation de compensation du handicap est une prestation en nature, (article L2 45-1 du code de l’action sociale et des familles), c’est-à-dire destinée au financement de dépenses engagées par la personne, ou au financement direct de services, au contraire des prestations en espèces assimilées à des revenus de remplacement,
-le département, après vérification des conditions administratives, des conditions relatives aux ressources, permettant de fixer le taux de prise en charge, et les conditions de mise en place de l’aide humaine, prend un arrêté pour la mise en paiement de la prestation, sur la base du barème national en vigueur (article R245-37) ou du barème départemental en vigueur pour les services d’aide à domicile tarifés par le département,
– l’aide ménagère, si elle peut se cumuler avec la PCH, ne se confond pas avec cette dernière, car elle est destinée à financer des heures de ménage, courses etc., alors que l’élément aide humaine de la PCH, est attribué pour compenser les actes essentiels de la vie ou une surveillance régulière,
– ainsi, les factures réglées au titre de prestations d’aide ménagère, ne peuvent être considérées comme ayant été réglées au titre de l’aide humaine prévue par la PCH.
Sur ce,
L’article L245-1 I du code de l’action sociale et des familles, dans sa version applicable à la cause, (en vigueur du 16 octobre 2015 au 8 mars 2020), dispose que :
« toute personne handicapée résidant de façon stable et régulière en France métropolitaine, dont l’âge est inférieur à une limite fixée par décret et dont le handicap répond à des critères définis par décret, a droit à une prestation de compensation qui a le caractère d’une prestation en nature qui peut être versée, selon le choix du bénéficiaire, en nature ou en espèces ».
Aux termes de l’article L. 245-3, 1º, du même code, la prestation de compensation peut être affectée, dans des conditions définies par décret, à des charges liées à un besoin d’aides humaines, y compris, le cas échéant, celles apportées par les aidants familiaux.
Aux termes de l’article L. 245-4 du même code, l’élément de la prestation relevant du 1º de l’article L. 245-3 est accordé à toute personne handicapée soit lorsque son état nécessite l’aide effective d’une tierce personne pour les actes essentiels de l’existence ou requiert une surveillance régulière, soit lorsque l’exercice d’une activité professionnelle ou d’une fonction élective lui impose des frais supplémentaires.
Selon l’article L. 245-12 du même code, dans sa rédaction issue de la loi nº 2015-1776 du 28 décembre 2015, applicable au litige, l’élément mentionné au 1º de l’article L. 245-3 peut être employé, selon le choix de la personne handicapée, à rémunérer directement un ou plusieurs salariés, notamment un membre de la famille, ou à rémunérer un service prestataire d’aide à domicile, ainsi qu’à dédommager un aidant familial qui n’a pas de lien de subordination avec la personne handicapée. La personne handicapée remplissant des conditions fixées par décret peut employer un ou plusieurs membres de sa famille, y compris son conjoint, son concubin ou la personne avec qui elle a conclu un pacte civil de solidarité.
En application de ces dispositions, et au vu de la décision du tribunal du contentieux de l’incapacité en date du 11 août 2017, qui fixe au 1er novembre 2014, le point de départ de l’aide humaine de compensation du handicap attribuée à l’appelante, et sa durée à six ans, le conseil départemental admet le principe du paiement de sommes à ce titre, à la condition que l’appelante justifie des dépenses exposées au titre de l’aide humaine du 1er novembre 2014 au 31 janvier 2016.
Pour la période objet de la réclamation( 1er novembre 2014 au 31 janvier 2016), il ne conteste pas l’absence de paiement, ainsi qu’il résulte du tableau qu’il produit sous sa pièce n°4, lesdits paiements ne débutant qu’en avril 2016.
Au cas particulier, la demande de paiement émane de l’appelante, et c’est à elle de démontrer la réalité de la dépense dont elle demande la prise en charge, si bien que son moyen tiré du fait qu’il s’agirait d’un contrôle a posteriori qui serait irrecevable pour cause de prescription, faute d’avoir été exercé dans le délai de prescription de 2 ans, est inopérant.
De même, il n’est pas question de suspension du paiement de la PCH, puisque lors de la décision contestée, ce droit n’a été admis qu’à compter du 1er février 2016, et que ce n’est que par une décision ultérieure du TCI que ce droit a été admis à compter du 1er novembre 2014, si bien que la jurisprudence invoquée par l’appelante ne trouve pas à s’appliquer.
Enfin, les tableaux produits par l’appelante au soutien de sa demande font état de dépenses qui sont toutes postérieures au 31 janvier 2016, et donc à la période litigieuse, si bien qu’elles ne sauraient fonder les demandes de paiement portant sur des dépenses exposées du 1er novembre 2014 au 31 janvier 2016.
La demande est jugée non fondée.
4-2/ Sur la demande de paiement de la somme de 1533,82 € au titre de l’aide humaine rétroactivement attribuée
Le conseil départemental observe pour s’y opposer que cette demande, actuellement réclamée à concurrence de 1533,82 €, était précédemment réclamée pour la somme de 6021,95 €, n’est soutenue par aucune justification comptable ou formule de calcul, si bien qu’il ne peut être répondu à cette demande.
La cour de même, constate que les écritures de l’appelante ne lui permettent pas d’identifier à quoi correspond cette réclamation, si ce n’est qu’y est comprise une somme de 295,78€, réglée en 2015, et que la facture produite à ce titre, sous la pièce n° 33 de l’appelante( attestation fiscale), établit qu’elle concerne des prestations d’aide ménagère, qui ne se confondent pas avec l’aide humaine telle que définie par l’article L. 245-4 du même code, déjà cité, et qu’en outre, rien ne permet d’affecter cette dépense à des prestations postérieures au 1er novembre 2014, date de la reconnaissance de son droit à PCH.
La demande est jugée non fondée.
4-3/ Sur la demande d’attribution d’un crédit de 921 heures d’aide humaine à utiliser dans un délai de 6 ans
Cette demande tend aux mêmes fins que celle examinée au paragraphe 4-1 de la présente décision, mais sous une autre forme, raison pour laquelle elle n’a pas été retenue comme irrecevable au titre des demandes nouvelles, par application de l’article 565 du code de procédure civile, selon lequel « Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent ».
Elle repose sur le même raisonnement, à savoir qu’un crédit d’heures au titre de l’aide humaine comprise dans la PCH serait dû à l’appelante, à raison d’heures non consommées en 2014 (70 heures), 2015 (258,55 heures) et 2016(44,39 heures).
Elle est de même jugée non fondée, en ce qu’elle fait doublon avec la précédente, jugée non fondée, étant observé en outre qu’elle ne repose sur aucun visa textuel, se contentant de renvoyer à une notion de « lissage », sans autre précision.
La demande est jugée non fondée.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
La disparité dans la situation respective des parties justifie qu’il ne soit pas prononcé de condamnation au bénéfice de l’intimé, nonobstant le fait que l’appelante succombe de l’essentiel de ses prétentions.
L’appelante succombe pour l’essentiel et dans une proportion permettant de juger qu’elle supportera les dépens, lesquels seront à recouvrer aux formes de l’aide juridictionnelle.
PAR CES MOTIFS :
La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,
Homologue le protocole transactionnel signé le 18 mai 2022 par les parties,
Déclare irrecevables les demandes par lesquelles l’appelante demande à la cour :
-de déclarer que le département a commis une erreur d’appréciation en rejetant tacitement la demande d’attribution de PCH en urgence formulée en 2015,
-d’ordonner la rectification de l’arrêté modificatif (du 13 novembre 2017) en ce qu’il affirme de manière erronée que Mme [V] a bénéficié d’une avance sur prestation de compensation précédemment attribuée,
-à titre subsidiaire, de prononcer la dispense totale du remboursement de l’indu demandé par le président du conseil départemental dans l’arrêté du 23 mars 2018,
Déclare irrecevable la réclamation par laquelle l’appelante demande à la cour la somme de 13€, au titre de l’aide technique,
Confirme la décision du président du conseil départemental des Pyrénées Atlantiques du 4 juillet 2016, sauf en ce qu’elle a considéré que les barres d’appui, d’un coût de 25,50€, préconisées pour le logement occupé en 2016, constituaient une aide technique prise en charge à 75%, alors qu’au titre de charges d’aménagement du logement, ce coût devait être couvert à 100 %,
Et statuant à nouveau de ce seul chef, condamne le [5] à payer à Mme [V] la somme de 11,45 €,
Déboute en conséquence Mme [V] de ses demandes en :
-remboursement de la somme de 2,61 € au titre du porte gobelet antidérapant,
– paiement rétroactif de la prestation de compensation du handicap au titre de l’aide humaine, en ses trois branches, à savoir :
– paiement de la somme de 9457,20 €, pour la période de novembre 2014 à janvier 2016,
-paiement de la somme de 1533,82 € ,
-attribution d’un crédit de 921 heures d’aide humaine à utiliser dans un délai de 6 ans,
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme [V] aux dépens, à recouvrer aux formes de l’aide juridictionnelle.
Arrêt signé par Madame NICOLAS, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,