Droits des Artisans : 15 décembre 2022 Cour d’appel de Nîmes RG n° 21/03202

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Droits des Artisans : 15 décembre 2022 Cour d’appel de Nîmes RG n° 21/03202

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 21/03202 – N��Portalis DBVH-V-B7F-IE7Y

ET – NR

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D’AVIGNON

19 juillet 2021 RG:17/01300

[C]

C/

S.A. AXA FRANCE IARD

CPAM DE VAUCLUSE

Caisse RSI

Grosse délivrée

le 15/12/2022

à Me Jacques TARTANSON

à Me Michel DISDET

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

1ère chambre

ARRÊT DU 15 DÉCEMBRE 2022

Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d’AVIGNON en date du 19 Juillet 2021, N°17/01300

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère, a entendu les plaidoiries, en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère faisant fonction de Présidente

Mme Séverine LEGER, Conseillère

M. Nicolas MAURY, Conseiller

GREFFIER :

Mme Audrey BACHIMONT, Greffière, lors des débats, et Mme Nadège RODRIGUES, Greffière, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l’audience publique du 17 Octobre 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 08 Décembre 2022 et prorogé au 15 Décembre 2022.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

APPELANT :

Monsieur [S] [C]

né le [Date naissance 2] 1958 à [Localité 10] – FRANCE [Localité 10]

[Adresse 4]

[Localité 8] / FRANCE

Représenté par Me Jacques TARTANSON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D’AVIGNON

INTIMÉES :

S.A. AXA FRANCE IARD,

Compagnie d’assurance AXA FRANCE IARD AXA FRANCE IARD, dont le siège social est situé [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal en exercice, demeurant ès qualités audit Siège

[Adresse 3]

[Localité 9]

Représentée par Me Michel DISDET de la SCP DISDET ET ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D’AVIGNON

CPAM DE VAUCLUSE

La CPAM de VAUCLUSE, dont le siège social est situé [Adresse 6], prise en la personne de son représentant légal en exercice, demeurant ès qualités audit Siège,

[Adresse 6]

[Localité 7] / FRANCE

Assignée à personne morale le 04 Octobre 2021

Sans avocat constitué

Caisse RSI

Le RSI, dont le Siège Social est situé [Adresse 5], pris en la personne de son représentant légal en exercice, demeurant ès qualités audit siège,

[Adresse 5]

[Localité 1] / FRANCE

Assigné à personne morale le 29 Septembre 2021

Sans avocat constitué

ARRÊT :

Arrêt réputé contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère faisant fonction de Présidente, le 15 Décembre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 17 janvier 2012, M. [S] [C], assuré auprès de la société Axa Assurances a été blessé lors d’un accident de la circulation impliquant le véhicule de M. [O] [T], assuré auprès de la société MMA.

Par ordonnance du 25 avril 2014, le juge des référés a ordonné la réalisation d’une expertise médicale confiée au Docteur [P] puis a condamné le responsable de l’accident et son assureur la société MMA à lui verser une somme de 4 766 euros à titre de provision à valoir sur l’indemnisation de son préjudice.

Dans le même temps, l’assureur de M. [C], la société Axa Assurances, a confié une expertise au cabinet Cunningham & Lindsey aux fins de déterminer les pertes d’exploitation occasionnées par l’accident à l’entreprise de M. [C], artisan menuisier.

Le cabinet Cunningham & Lindsey a déposé son rapport le 14 juin 2013.

Le Docteur [P] expert judiciaire a déposé son rapport définitif le 21 octobre 2014.

Par ordonnance du 5 août 2016, le juge des référés à nouveau saisi, a condamné la société Axa Assurances à verser à M. [C] une somme de 13 976,34 euros à titre de provision à valoir sur l’indemnisation de son préjudice économique ainsi qu’à la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

M. [C] a confié l’évaluation de son préjudice économique à M. [R] [Z] qui a rendu son rapport le 23 novembre 2016.

Par actes des 24 février et 5 avril 2017, M. [C] a fait citer la Caisse Primaire d’assurance maladie (CPAM) de Vaucluse, la société Axa Assurances et la Caisse Nationale du Régime Social des Indépendants devant le tribunal judiciaire d’Avignon aux fins d’obtenir réparation intégrale de son préjudice.

Par ordonnance du 27 avril 2018, le juge de la mise en état a ordonné une expertise comptable confiée à Mme [Y] [E] aux fins notamment de :

– dire si l’arrêt des activités professionnelles de M. [C] du 18 janvier au 17 octobre 2012 imputable à l’accident de circulation du 17 janvier 2012 aurait eu une incidence économique sur la reprise de son activité d’artisan menuisier et, dans l’affirmative, en chiffrer la durée et montant,

– déterminer le surcoût de l’emploi d’un salarié nécessaire au maintien de l’activité de M. [C] durant son arrêt de travail,

– donner toute précision sur la poursuite de son activité et, après avoir recueilli ses doléances, sur le montant de son préjudice économique et financier en lien direct et certain avec l’accident de la circulation du 17 janvier.

Mme [E], expert-comptable, a déposé son rapport le 3 octobre 2019.

Par jugement réputé contradictoire en date du 19 juillet 2021, le tribunal judiciaire d’Avignon a :

– fixé le préjudice corporel, hors déficit fonctionnel permanent, à la somme de 1 211,50 euros, déduction faite de provisions déjà versées d’un montant de 18 742,34 euros ;

– condamné, en conséquence, la société Axa à payer à M. [C] la somme de 1 211,50 euros,

– débouté M. [C] de sa demande au titre de l’incidence professionnelle et de la majoration du double des intérêts qui en découle ;

– débouté M. [C] de sa demande de dommages et intérêts au titre d’un préjudice moral ;

– débouté la société Axa de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Axa au paiement de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Axa aux dépens,

– ordonné l’exécution provisoire,

– déclaré le jugement opposable à la CPAM de Vaucluse et au RSI.

Par acte en date du 19 août 2021, M. [C] a interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance du 25 mai 2022, la procédure a été clôturée le 3 octobre 2022 et l’examen de l’affaire a été renvoyé à l’audience du 17 octobre 2022.

EXPOSE DES MOYENS ET PRÉTENTIONS

Dans ses dernières conclusions d’appelant, notifiées par voie électronique le 8 septembre 2022, M. [C] demande à la cour de :

– réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal judiciaire d’Avignon le 19 juillet 2021,

– dire et juger que le droit à indemnisation de M. [C], au visa des articles 1 à 5 de la loi du 5 juillet 1985 est plein et entier des suites de l’accident de la circulation en date du 17 janvier 2012, à l’encontre de la compagnie Axa et de M. [O] [T],

– condamner la compagnie Axa à lui verser en réparation de ses préjudices, les sommes suivantes :

au titre du déficit fonctionnel temporaire, la somme de : 1 005 euros,

au titre des souffrances endurées, la somme de : 4 000 euros,

au titre du déficit fonctionnel permanent, la somme de : 3 000 euros,

au titre de la perte d’exploitation, la somme globale de : 71 407,26 euros,

Telle qu’indiquée dans le rapport de M. [Z] du 31 décembre 2018, somme à réévaluer au jour du prononcé du jugement, du double du taux d’intérêt légal en application de l’article L211-13 du code des assurances,

au titre du préjudice économique qui en découle, compte tenu du handicap (à majorer du double des intérêts légaux) : 130 500 euros,

dommages et intérêts en réparation du préjudice moral : 5 000 euros,

au titre de l’article 700 du code de procédure civile : 5 000 euros,

– aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, s’agissant du préjudice extra-patrimonial, il fait essentiellement valoir s’agissant du déficit fonctionnel temporaire qu’il convient de prendre comme référence une indemnisation au minimum de 30 euros par jour. Il ajoute que les souffrances endurées doivent être chiffrées à une somme qui ne saurait être inférieure à 4 000 euros au regard de la longue évolution de la pathologie de la cheville et de ses douleurs morales. Afin, il estime que l’indemnisation du poste d’incapacité permanente doit être fixée à la somme globale de 3 000 euros.

S’agissant de la perte de gain professionnel actuel, il soutient que la position de l’expert [E] ne relève pas a priori d’un raisonnement pleinement accompli et seule la base de calcul de l’expert du cabinet Cunningham pour la période du 16 avril au 17 octobre 2012 doit être prise en compte. Il précise que l’expert judiciaire n’a pas vraiment apprécié les pièces comptables qui ont été portées à sa réflexion notamment pour constater l’existence d’une perte d’exploitation induite par l’arrêt de travail et une incidence professionnelle.

Il ajoute que dés lors qu’aucune offre prenant en compte la totalité des périodes d’arrêt de travail n’a été formulée par la compagnie Axa au titre du PGPF et du préjudice économique subi, les sommes allouées devront être majorées du double du taux d’intérêt légal en application des articles 211-9 et 211-14 du code des assurances.

Il fait valoir enfin, que le comportement d’Axa lui cause un préjudice moral indéniable.

Dans ses dernières conclusions aux fins de confirmation, notifiées par voie électronique le 21 octobre 2021, la société Axa Assurances demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, et de condamner M. [C] au paiement d’une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Elle soutient en résumé que M. [C] n’a pas repris son activité professionnelle et qu’il est donc radicalement impossible de chiffrer une quelconque incidence économique sur ses résultats après reprise.

Elle ajoute qu’il a abandonné l’idée de faire chiffrer un quelconque surcoût pour l’emploi d’un salarié de remplacement pendant sa période d’inactivité, au motif qu’il n’avait pas pu en trouver.

Elle souligne également qu’il a refusé de remettre à l’expert les éléments comptables nécessaires pour vérifier ses allégations, ne justifie donc d’aucun préjudice économique et ne rapporte pas plus la preuve de sa demande au titre de la perte de gains actuels.

Enfin, elle affirme qu’il n’est pas sérieusement possible à M. [C] de soutenir l’absence d’une offre puisqu’une offre lui a été faite.

Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et des prétentions des parties, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L’appel est limité à la liquidation du préjudice corporel de M.[C] et notamment au postes de préjudices suivant : la perte de gains professionnels actuels et futurs, l’incidence professionnelle (dénommé préjudice économique par M.[C]), le déficit fonctionnel temporaire, les souffrances endurées , le déficit fonctionnel permanent, et à la fixation d’un préjudice moral.

Il sera rappelé que M. [C] exerçait une activité d’artisan menuisier avant l’accident, qu’il était âgé de 54 ans au moment de l’accident et qu’il a été consolidé le 17 octobre 2012 selon les conclusions de l’expert judiciaire, date qui n’est pas contestée.

Il n’est pas contesté non plus que l’arrêt de travail imputable retenu par l’expert [P] couvre la période de l’accident au 17 octobre 2012.

Il a gardé un déficit fonctionnel permanent de 2% et n’a pas repris son activité professionnelle à la suite de l’arrêt d’activité imputable.

Il s’est fait radié du RCS le 30 juin 2014 et a été placé en invalidité le 1er juillet 2014.

Afin d’apprécier le préjudice professionnel et la perte de gains subis par M.[C] une expertise comptable confiée à Mme [E] qui a conclu que :

-sur la période d’arrêt imputable, elle n’était pas en mesure de confirmer l’application du prorata temporis à l’indemnité calculée dans le rapport du cabinet Cunningham et Linsey,

-sur l’indemnisation de reprise de l’activité, elle souligne que M.[C] n’ayant pas repris son activité il ne subissait aucun préjudice.

Dans ses conclusions récapitulatives M. [C] conteste les conclusions de l’expert [E] et indique qu’il n’a pu reprendre son activité professionnelle à l’issue de l’arrêt de travail imputable, n’a pu trouver de salarié de remplacement et que cet arrêt de travail a eu une incidence économique sur la reprise de son activité par la perte de ses clients assureurs qui représentaient 80% de son chiffre d’affaires.

Il demande la réparation d’une perte de revenus de 147,51 euros par jour sur la période du 17 janvier 2012 au 16 octobre 2012 et la somme de 20 209,45 euros au titre de l’incidence professionnelle recouvrant la perte de volume d’activité s’étalant sur une période de 9 mois pour retrouver un niveau normal d’activité professionnelle.

Il fait valoir que ces activités artisanales requièrent la capacité à rester debout, ce qu’il ne peut plus faire, et que son incapacité l’a contraint à la fermeture de son entreprise artisanale après avoir enregistré des pertes d’exploitation, situation confirmée par les expertises comptables amiables.

Il estime enfin que les appréciations des premiers juges sur les conclusions de l’expert médical sont insuffisantes à réparer les préjudices extra-patrimoniaux subis.

Les expertises médicale et comptable ordonnées serviront de base à l’indemnisation du préjudice subi mais non exclusivement. L’expertise extra-judiciaire et l’avis comptable produits aux débats qui apportent un éclairage sur l’activité de M.[C] serviront également à la liquidation du préjudice patrimonial de la victime.

Ces précisions étant apportées, le préjudice de M.[C] peut- être liquidé comme suit :

1- Sur le préjudice patrimonial

a) Le préjudice patrimonial temporaire

– les PGPA : ce poste vise à compenser les répercussions du dommage sur la sphère professionnelle de la victime et doit être évalué au regard de la preuve d’une perte effective de revenus. La durée et l’importance, généralement décroissante, de l’indisponibilité temporaire professionnelle sont à apprécier depuis la date du dommage jusqu’à la date de la consolidation.

Il convient de déduire des revenus dont la victime a été privée pendant cette indisponibilité professionnelle temporaire, le montant des indemnités journalières versées par son organisme de sécurité sociale.

Enfin, alors que le revenu de référence s’apprécie pour un salarié par rapport au salaire de l’année civile ayant précédé le fait générateur, le revenu de référence correspondant à l’exercice d’une activité libérale, artisanale ou commerciale est en principe calculé à partir de la moyenne des trois années antérieures afin de lisser les variations respectives des charges et des produits d’une année sur l’autre. Cependant, cette méthode n’a de sens que si l’activité considérée a atteint son régime de croisière.

En l’espèce, M.[C] demande la prise en considération de sa perte d’exploitation durant la maladie traumatique sur la base de la proposition du cabinet Cunningham et Lindsey prorata temporis.

La compagnie d’assurance Axa s’y oppose et demande à la cour de confirmer la décision de première instance qui a retenu comme perte d’exploitation l’unique somme proposée par Axa par le Cabinet Cunningham et Lindsey soit la somme de 13 276,34 euros déduction faite des indemnités journalières perçues (soit 17 976 euros de perte d’exploitation retenue).

Il n’est pas contesté que cette perte a été calculée pour la période du 18 janvier au 15 avril 2012. Or l’arrêt de travail imputable s’est prolongé jusqu’au 17 octobre 2012.

La perte d’exploitation mensuelle s’élève selon les données retenues par le cabinet Cunningham à la somme de 5 992 euros et la perte d’exploitation jusqu’au 17 octobre 2012 soit 9 mois s’élève à plus de 40 900 euros.

Peu importe que les revenus de l’activité artisanale déclarée dans les 3 dernières années soient inférieurs à ce montant comme le mentionne l’expert [E]. La compagnie Axa valide cette perte d’exploitation et son calcul même si elle ne souhaite pas qu’elle soit étendue à toute la période d’arrêt et ne propose aucune nouvelle base de calcul à celle qu’elle paraît acceptée pour les 3 premiers mois de l’année.

Ainsi en l’absence de tous autres éléments venant contredire ce qui a été précédemment accepté, il y a lieu de retenir cette seule base et de fixer la perte de gains actuels à la somme de 40 900 euros hors déduction des créances des organismes sociaux.

De cette somme doivent être déduites les indemnités journalières versées sur la période par :

– le RSI (RAM) : 11 668,29 euros,(pièce 26)

– la caisse Pro BTP : 4 305,21 euros (IJ versées jusqu’au 17 octobre 2012) (pièce 25),

soit un total 15 973,50 euros.

La part revenant à M.[C] au titre de la perte de gains professionnel actuel s’élève donc à la somme de 24 926,50 euros.

La décision de première instance sera infirmée de ce chef.

b) Les préjudices patrimoniaux permanents

– Incidence professionnelle

Ce chef de dommage a pour objet d’indemniser non la perte de revenus liée à l’invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d’une chance professionnelle, de l’augmentation de la pénibilité de l’emploi qu’elle occupe imputable au dommage, ou de l’obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d’une autre en raison de la survenance de son handicap, de la perte des droits à retraite que la victime va devoir supporter en raison de son handicap, ou de la dévalorisation sociale ressentie par la victime du fait de son exclusion définitive du monde du travail.

L’incidence professionnelle est indemnisée en fonction de l’analyse de chacune des composantes de ce poste et non à compter d’une perte annuelle de revenus ou d’un taux donné de déficit fonctionnel permanent.

En l’occurrence, le docteur [P] ne note aucune incidence professionnelle et considère que M. [C] est apte à reprendre son activité antérieure.

M. [C] invoque sa perte financière liée à la difficulté de reprise de l’activité après arrêt d’activité de 9 mois. Selon les explications de son conseiller M.[Z] expert d’assurance, la période de transition est de 9 mois environ et cette remise à niveau par la recherche de nouveaux clients, constituerait un préjudice indemnisable.

Toutefois, il est acquis que M.[C] n’a pas repris son activité au 17 octobre 2012 alors que l’expert [P] l’en déclarait apte à le faire. Il est également acquis qu’il a mis un terme à son activité à défaut de reprise et à défaut d’avoir pu embaucher un salarié de remplacement en 2014 ; enfin, l’expertise [P] énonce que d’autres problèmes de santé au genou et à l’épaule notamment qui ne sont pas imputables à l’accident se sont ensuite manifestés.

Comme à juste titre relevé par les premiers juges aucun élément versé aux débats ne permet de justifier qu’il n’avait pas d’autres choix que de cesser son activité professionnelle suite à son accident.

Il n’est dés lors pas établi la réalité d’une perte financière directement induite par l’accident après consolidation de l’état de santé de M.[C].

Enfin, M.[C] ne reprend pas en cause d’appel son argumentation d’une éventuelle perte de droits à la retraite.

Le jugement de première instance sera confirmé de ce chef.

-S’agissant de la perte financière ou économique en lien avec les frais d’un salarié de remplacement,

M.[C] qui ne rattache sa demande à aucun chef de préjudice effectif, n’est pas fondé non plus a réclamé une indemnisation au titre des frais de remplacement d’un salarié dés lors qu’il reconnaît lui même ne pas avoir engagé ce type de dépense à défaut d’avoir trouvé un salarié pour travailler à sa place.

Cette demande ne peut être que rejetée.

2- Le préjudice extra-patrimonial

a) Les préjudices extra-patrimoniaux temporaires

– Déficit fonctionnel temporaire

Ce poste de préjudice vise à indemniser la gêne dans les actes de la vie courantes pendant la maladie traumatique.

L’évaluation des troubles dans les conditions d’existence tient compte de la durée de l’incapacité temporaire, du taux de cette incapacité (totale ou partielle), des conditions plus ou moins pénibles de cette incapacité.

En l’espèce, M.[C] a subi une incapacité partielle de :

– 20% sur la période du 17 janvier au 17 mars 2012,

– 10% du 18 mars au 16 octobre 2012.

L’indemnisation accordée par les premiers juges à hauteur de 25 euros par jour qui prend en compte outre la durée, le caractère partiel de cette incapacité et mérite confirmation.

Ce poste de préjudice sera donc confirmé à la somme de 837,50 euros.

– Souffrances endurées

Ce poste prend en considération les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés supportés par la victime. Évalué à 2,5/7 par le docteur [P] il a donné lieu à l’allocation d’une somme de 3 300 euros par les premiers juges.

La compagnie d’assurance Axa s’oppose à la majoration de 1 700 euros sollicitée par M.[C]. Celle-ci se justifie néanmoins au regard de l’évolution post-traumatique de la cheville et des séances de rééducation nécessaire ainsi que des phénomènes douloureux.

Il sera alloué une somme de 4 000 euros demandée et la décision déférée sera infirmée en ce sens.

b) Les préjudices extra-patrimoniaux permanents

– Déficit fonctionnel permanent

Ce poste tend à indemniser la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel, ou intellectuel résultant de l’atteinte à l’intégrité anatomo-physiologique, à laquelle s’ajoute les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques, et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d’existence.

Il s’agit, pour la période postérieure à la consolidation, de la perte de qualité de vie, des souffrances après consolidation et des troubles ressentis par la victime dans ses conditions d’existence (personnelles, familiales et sociales) du fait des séquelles tant physiques que mentales qu’elle conserve.

Le taux du déficit fonctionnel est évalué par l’expert [P] à 2%.

Ce poste de préjudice sera fixé à la somme de 1 400 du point soit 2 800 euros.

La décision déférée sera infirmée de ce chef.

3- Sur la demande de doublement des intérêts

L’article L 211-13 du code des assurances fait obligation à l’assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d’un véhicule terrestre à moteur, de présenter à la victime d’un dommage une offre d’indemnité motivée dans le délai de trois mois à compter de la demande d’indemnisation qui lui est présentée lorsque la responsabilité n’est pas contestée et le dommage, entièrement quantifié. Lorsque la responsabilité est rejetée ou n’est pas clairement établie, ou lorsque le dommage n’a pas été entièrement quantifié, l’assureur doit, dans le même délai, donner une réponse motivée aux éléments invoqués dans la demande.

Lorsque l’accident a causé un dommage corporel, une offre d’indemnité comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice, y compris du préjudice matériel, et indiquant les créances de chaque tiers payeur doit être faite à la victime dans un délai maximal de huit mois à compter de l’accident. Cette offre peut être provisionnelle lorsque l’assureur n’a pas, dans les trois mois de l’accident, été informé de la consolidation de l’état de la victime et l’offre définitive d’indemnisation doit alors être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l’assureur a été informé de cette consolidation.

À défaut d’offre dans les délais impartis par l’article L.211-9 du code des assurances, le montant de l’indemnité offerte par l’assureur ou allouée par le juge, produit intérêt de plein droit au double du taux de l’intérêt légal, en application de l’article L. 211-13 du même code, à compter de l’expiration du délai et jusqu’au jour de l’offre ou du jugement devenu définitif.

En l’espèce, il n’est pas contesté par l’assureur qu’une offre a été faite à M.[C] le 19 mai 2015 (qui n’a pas exclu la perte de gains actuels mais a indiqué qu’elle était prise en charge par l’ACE assurance sans en préciser le montant). Cette offre est intervenue plus de 8 mois après l’accident du 17 janvier 2012 et plus de 5 mois après l’information par le rapport d’expertise [P] du 21 octobre 2014, de la consolidation.

Une provision a été versée à hauteur de 5 766 euros sans que la cour ne puisse déterminer à quelle date exacte cette proposition a été faite et par ailleurs, ce n’est qu’en 2016 que l’indemnisation de la perte de gains a été fixée et indemnisée par la compagnie Axa alors même que le rapport du cabinet Cunningham avait été déposée en décembre 2013.

En toute hypothèse, cette offre provisionnelle s’est révélée insuffisante au regard de l’évaluation totale du préjudice allouée, de même que l’offre définitive du 19 mai 2015.

En effet, le versement d’une provision ne dispense pas l’assureur de faire une offre et la pénalité doit être appliquer malgré le versement de provisions, si aucune offre conforme aux exigences légales n’a été faite. En faisant une offre définitive en mai 2015 et en sous-évaluant considérablement le préjudice de M.[C], la compagnie d’assurance Axa a fait une offre définitive tardive mais surtout manifestement insuffisante.

Il se déduit de l’ensemble de ces éléments que les sommes allouées en réparation du préjudice patrimonial de M.[C] porteront intérêts au double à compter du 21 mars 2015 (expiration du délai après information de la date de consolidation ) et jusqu’au jour de l’arrêt.

4- Sur le préjudice moral

M.[C] réclame enfin un préjudice moral distinct lié au comportement de son assureur qui aurait tardé à traiter sa situation et l’aurait ainsi empêché d’envisager de poursuivre son activité professionnelle.

Or s’il est exact que l’assureur Axa n’a pas été très réactif pour indemniser au mieux M.[C], rien ne permet de dire qu’il existe un lien direct et certain entre son absence de reprise d’activité professionnelle et le comportement de son assureur.

Par ailleurs, d’autres problèmes de santé rencontrés par M.[C] lors de la maladie traumatique et sans lien avec l’accident peuvent expliquer cette absence de reprise d’activité.

Par voie de conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a rejeté ce chef de demande.

* * *

Au total, le préjudice corporel de M.[C] s’élève à la somme totale de 48 537,50 euros.

Le montant d’indemnisation revenant à M. [C] s’établit ainsi à la somme 32 564 euros, hors provision déjà versées.

La Sa Axa France Iard sera condamnée à lui payer cette somme dont il convient de déduire les provisions déjà versées.

Elle sera également condamnée à lui payer les intérêts au double du taux de l’intérêt légal sur le montant de l’indemnité allouée au titre du préjudice patrimonial, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées soit 40 900 euros, à compter du 21 mars 2015 et jusqu’au jour de l’arrêt.

Enfin la décision sera déclaré commune et opposable aux organismes sociaux appelés à l’instance.

5- Sur les mesures accessoires

Partie perdante au principal, la SA Axa France Iard supportera la charge des dépens d’appel et sera déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles.

L’équité commande par ailleurs de la condamner à payer à M.[C] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Infirme le jugement déféré mais seulement en ce qu’il a :

-fixé le préjudice corporel, hors déficit fonctionnel permanent, à la somme de 1 211,50 euros, déduction faite de provisions déjà versées d’un montant de 18 742,34 euros ;

– condamné, la société Axa à payer à M. [C] la somme de 1 211,50  euros,

– débouté M. [C] de sa demande au titre de l’incidence professionnelle et de la majoration du double des intérêts qui en découle ;

Le confirme pour le reste ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Fixe le préjudice corporel de M.[S] [C] à la somme de 48 537,50 euros ;

Fixe la part d’indemnisation revenant à M. [S] [C] à la somme 32 564 euros, hors provision déjà versées ;

Condamne la SA AXA France Iard à payer à M.[S] [C] la somme 32 564 euros, hors provision déjà versées ;

La condamne à lui payer les intérêts au double du taux de l’intérêt légal sur le montant de l’indemnité allouée au titre du préjudice patrimonial, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées soit 40 900 euros, à compter du 21 mars 2015 et jusqu’au jour de l’arrêt ;

Déclare le présent jugement commun aux organismes sociaux appelés à l’instance ;

Condamne la SA AXA France Iard à supporter les dépens d’appel qui comprendront les frais d’expertise ;

La condamne à payer à M.[S] [C] la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

 


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