Droits des Artisans : 13 janvier 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 22/02149

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Droits des Artisans : 13 janvier 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 22/02149

C8

N° RG 22/02149

N° Portalis DBVM-V-B7G-LMS5

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE – PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU VENDREDI 13 JANVIER 2023

Ch.secu-fiva-cdas

Appel d’une décision (N° RG 21/00242)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire d’ANNECY

en date du 05 mai 2022

suivant déclaration d’appel du 08 juin 2022

APPELANT :

M. [P] [M]

né le 19 octobre 1975 à [Localité 3]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Assia HARMLI, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS

INTIMEE :

La MDPH DE [Localité 4], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

comparante en la personne de Mme [E] [O], régulièrement munie d’un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président,

Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller,

M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,

DÉBATS :

A l’audience publique du 10 novembre 2022

Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller, en charge du rapport et M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président, ont entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoiries, assistés de M. Fabien OEUVRAY, Greffier, conformément aux dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s’y étant pas opposées ;

Puis l’affaire a été mise en délibéré au 13 janvier 2023, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L’arrêt a été rendu le 13 janvier 2023.

M. [P] [M] né le 19 octobre 1975, mensuisier ébéniste a demandé le 16 janvier 2020 à la Maison Départementale des Personnes Handicapées – MDPH – de [Localité 4] la Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé – RQTH – et l’attribution de l’Allocation aux Adultes Handicapés – AAH- après avoir été victime le 22 octobre 2019 d’un accident du travail ayant conduit à l’amputation de son index gauche et à une artrodèse de son majeur gauche.

Le 18 août 2020 la RQTH lui a été attribuée sans limitation de durée mais sa demande d’attribution de l’AAH a été rejetée au motif que s’il présentait bien des difficultés pouvant entraîner des limitations d’activité, ces difficultés avaient une incidence légère à modérée sur son autonomie sociale et professionnelle, correspondant à un taux d’incapacité inférieur à 50%, décision confirmée après recours par décision du 04 février 2021.

M. [M] a saisi la juridiction sociale d’Annecy qui par jugement du 05 mai 2022 :

– a déclaré son recours recevable,

– l’a débouté de l’intégralité de ses demandes,

– s’est déclaré incompétente pour confirmer ou infirmer la décision de la CDAPH valant rejet de la demande d’AAH,

– l’a condamné aux entiers dépens de l’instance,

– a rappelé l’exécution provisoire de sa décision.

Le 08 juin 2022 M. [M] a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié le 18 mai 2022 et au terme de ses conclusions déposées le 28 juillet 2022 reprises oralement à l’audience il demande à la cour :

– de déclarer son appel recevable et bien fondé,

– d’infirmer le jugement,

En conséquence et statuant à nouveau

– d’annuler la décision rendue par la Commission Départementale de l’Autonomie et des Personnes Handicapées – CDAPH – le 04 février 2021 lui refusant l’AAH,

A titre principal

– de juger qu’il présente un taux d’incapacité compris entre 50 et 79 % ainsi qu’une restriction substantielle et durable à l’accès à l’emploi ouvrant doit au versement de l’AAH,

– d’ordonner le versement de cette allocation de manière rétroactive à compter de la date de l’accident du 22 octobre 2019,

A titre subsidiaire

– d’ordonner la mise en place d’une consultation médicale pour se prononcer sur son taux d’incapacité,

En tout état de cause

– de prononcer l’exécution provisoire de la décision à intervenir,

– de condamner la MDPH de [Localité 4] à lui verser la somme de 2 000€ au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

Au terme de ses conclusions déposées le 20 octobre 2022 reprises oralement à l’audience la MDPH de [Localité 4] demande à la cour de confirmer le jugement.

En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile il est expressément référé aux dernières écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

SUR CE :

L’appelant soutient d’abord que les premiers juges ont commis une erreur de droit en se déclarant incompétents pour confirmer ou infirmer la décision de la CDPAH.

Mais en effet, si la juridiction sociale de l’ordre judiciaire a le pouvoir d’apprécier l’entière situation d’un justiciable au regard de ses droits aux prestations sociales, elle n’a pas le pouvoir d’apprécier la légalité interne ou externe d’un acte administratif unilatéral tel que la décision d’une CDAPH, organe de la MDPH ou de la MDA selon les cas, qui, en tant que services du département, ont le caractère d’établissements publics administratifs.

Selon les dispositions des articles L. 821-1-1 du code de l’action sociale et des familles dans sa version en vigueur du 28 décembre 2007 au 01 décembre 2019 et L. 821-2 du même code dans sa version en vigueur du 27 décembre 2006 au 29 décembre 2008 ici applicables, il est institué une garantie de ressources pour les personnes handicapées dont l’incapacité permanente est au moins égale à 80 %, composée de l’allocation aux adultes handicapés et d’un complément de ressources dont le montant est fixé par décret.

L’allocation aux adultes handicapés est également versée à toute personne qui remplit l’ensemble des conditions suivantes :

1° Son incapacité permanente, sans atteindre 80 %, est supérieure ou égale à 50 % ;

2° Elle n’a pas occupé d’emploi depuis une durée fixée par décret ;

3°La commission départementale de l’autonomie et des adules handicapés lui reconnaît, compte tenu de son handicap, une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi, précisée par décret.(…)

En l’espèce M. [P] [M], artisan menuisier, droitier, a perdu l’usage de deux doigts de la main gauche des suites de l’accident du travail du 22 octobre 2019, alors qu’il avait déjà eu le pouce gauche sectionné 15 ans auparavant.

Il indique n’avoir eu d’autre choix, devant le montant dérisoire de l’indemnité journalière qui lui a été versée du 22 octobre 2019 au 31 mai 2020 ( 12,06 € par jour ) que de reprendre péniblement son activité de menuisier dans un temps très réduit, alors que ses séquelles constituent un frein important puisque son activité est plus longue et plus difficile et l’expose à un risque très important de nouvel accident.

Le guide-barème pour l’évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées, annexé au code de l’action sociale et des familles, distinct du barème d’incapacité résultant des accidents du travail annexé au code de la sécurité sociale, et ici applicable, prévoit

V – DÉFICIENCES PAR ALTÉRATION DES MEMBRES

Inclus : amputation, raccourcissement ; dans le cas d’une lésion acquise, on prendra en compte l’atteinte du membre dominant, appréciée plus favorablement que celle de l’autre membre.

1 – DÉFICIENCE LÉGÈRE (TAUX : 1 À 20 P. 100)

Sans retentissement sur la vie sociale, professionnelle et domestique ou sur la réalisation des actes de la vie courante.

Exemple :- amputations partielles ou isolées des doigts ou des orteils, raccourcissement minime…

2 – DÉFICIENCE MODÉRÉE (TAUX : 20 À 40 P. 100)

Gênant la réalisation de certaines activités de la vie courante ou ayant un retentissement modéré sur la vie sociale, professionnelle ou domestique.

Exemple : – amputation d’un pouce, ou du gros orteil ou de plusieurs doigts ou orteils, de l’avant-pied, raccourcissement gênant (boiterie).

3 – DÉFICIENCE IMPORTANTE (TAUX : 50 À 75 P. 100)

Limitant la réalisation de certaines activités de la vie courante ou ayant un retentissement important sur la vie sociale professionnelle ou domestique.

Exemple : – amputation de jambe ou de cuisse (appareillée), ou de l’avant-bras, du coude ou de l’épaule, unilatérale côté non dominant.

4 – DÉFICIENCE SÉVÈRE (TAUX : 80 À 90 P. 100)

Rendant les déplacements très difficiles ou impossibles ou empêchant la réalisation d’un ou plusieurs actes essentiels.

Exemple : – désarticulation de hanche, d’épaule ou du coude dominant ; ou amputation bilatérale des membres supérieurs.

L’appelant a subi des suites de l’accident d’octobre 2019 l’amputation totale de son index gauche (main non dominante) et d’une partie de son majeur gauche, alors qu’il était déjà amputé de son pouce gauche des suites d’un accident antérieur.

Conformément au barème ci-dessus applicable, il en résulte une déficience modérée correspondant à un taux d’invalidité de 20 % au maximum, sans qu’il y ait besoin d’ordonner une mesure de consultation médicale.

La question de la restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi ne se pose donc pas puisqu’en tout état de cause le taux d’incapacité découlant de son handicap est inférieur à 50 % selon le guide barème.

À titre surabondant M. [M] a produit plusieurs attestations de membres de sa famille d’où il résulte qu’il doit être aidé dans son activité professionnelle indépendante, qu’il admet donc avoir reprise, fût-ce avec difficultés, ce qui démontre a contrario l’absence d’une telle restriction substantielle et durable ; il est ainsi apte à reprendre avec aménagement son activité antérieure de menuisier mais aussi toute autre activité professionnelle moins contraignante physiquement.

Le jugement sera en conséquence confirmé.

M. [M] devra supporter les entiers dépens de l’instance en application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt rendu contradictoirement et publiquement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement n° RG 21/00242 du pôle social du tribunal judiciaire d’Annecy.

Y ajoutant,

Déboute M. [P] [M] de sa demande de consultation médicale.

Condamne M. [P] [M] aux dépens.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. Jean-Pierre Delavenay, président et par Mme Chrystel Rohrer, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier Le président

 


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