AFFAIRE : N° RG 21/01294
N° Portalis DBVC-V-B7F-GX2X
Code Aff. :
ARRET N°
C.P
ORIGINE : Décision du Pôle social du Tribunal Judiciaire de CAEN en date du 06 Avril 2021 – RG n° 17/00643
COUR D’APPEL DE CAEN
2ème chambre sociale
ARRÊT DU 11 MAI 2023
APPELANT :
Monsieur [L] [V]
[Adresse 7]
[Localité 2]
Représenté par Me Monique BINET, avocat au barreau de CAEN
INTIMEE :
Caisse Primaire d’Assurance Maladie du Calvados
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Mme [O], mandatée
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme CHAUX, Présidente de chambre,
M. LE BOURVELLEC, Conseiller,
M. GANCE, Conseiller,
DEBATS : A l’audience publique du 02 mars 2023
GREFFIER : Mme GOULARD
ARRÊT prononcé publiquement le 11 mai 2023 à 14h00 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Mme CHAUX, présidente, et Mme GOUARD, greffier
La cour statue sur l’appel régulièrement interjeté par M. [L] [V] d’un jugement rendu le 6 avril 2021 par le tribunal judiciaire de Caen dans un litige l’opposant à la caisse primaire d’assurance maladie du Calvados.
FAITS et PROCEDURE
Dans le cadre du contrôle effectué par les services de la caisse primaire d’assurance maladie du Calvados (la caisse) portant sur l’activité de M. [L] [V], en sa qualité de taxi conventionné,des anomalies de facturations sont apparues, que la caisse a porté à sa connaissance par courrier du 30 novembre 2016.
Le 30 décembre 2016, M. [V] a formulé des observations en réponse.
Le 17 janvier 2017, il a saisi la commission locale de concertation des taxis, laquelle s’est déclarée favorable à la résiliation de la convention le liant à la caisse pour une période de six mois dont trois mois avec sursis estimant que les griefs qui lui sont reprochés constituent des manquements graves et répétés. Cette sanction a pris effet du 1er mai 2017 au 31 juillet 2017.
Le 23 mars 2017, la caisse a notifié à M. [V], sur le fondement de l’article L 133-4 du code de la sécurité sociale, un indu d’un montant de 29 989,10 euros pour les motifs suivants: véhicules non conventionnés, kilométrages erronés, non – respect de la convention et transports non justifiés.
Le 19 mai 2017, M. [V] a contesté cet indu devant la commission de recours amiable, laquelle par décision du 18 juillet 2017 l’a ramené à 28 531,22 euros, l’indu afférent aux kilomètres erronés ayant été annulé.
Le 18 octobre 2017, M. [V] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Caen pour contester cette décision.
Par jugement du 6 avril 2021, le tribunal judiciaire de Caen, auquel a été transféré le contentieux de la sécurité sociale à compter du 1er janvier 2019, a:
– confirmé la décision de la commission de recours amiable de la caisse du 18 juillet 2017, relative au maintien de l’indu notifié le 19 mai 2017, pour un montant ramené à 28 531,22 euros, au titre d’anomalies de facturation pour la période du 1er janvier au 30 juin 2016,
– condamné en conséquence M. [L] [V], artisan taxi, à payer à la caisse la somme de 28 531,22 euros en restitution de l’indu au titre d’anomalies de facturation, pour la période du 1er janvier au 30 juin 2016,
– ordonné l’exécution provisoire,
– condamné M. [V] aux dépens.
Par déclaration du 6 mai 2021, M. [V] a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses conclusions n°1 déposées et soutenues oralement à l’audience par son conseil, M. [V] demande à la cour de:
– réformer le jugement déféré dans toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
– annuler le montant de l’indu s’élevant à 28 531,22 euros,
– débouter la caisse primaire d’assurance maladie de l’ensemble de ses demandes.
Par conclusions du 2 février 2023, déposées et soutenues oralement à l’audience par sa représentante, la caisse demande à la cour de:
– déclarer le recours de M. [V] recevable,
Au fond,
– confirmer le jugement déféré,
– déclarer l’action engagée par la caisse primaire d’assurance maladie du Calvados, au titre de l’article L 133-4 du code de la sécurité sociale, régulière et dire que c’est à bon droit que M. [V] a été condamné à lui reverser la somme de 28531,22 euros, par jugement du 6 avril 2021.
Il est renvoyé aux écritures des parties s’agissant de la présentation des moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.
SUR CE, LA COUR
L’article L 332-5 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, dispose :
‘ Les frais de transport sont pris en charge sur la base, d’une part, du trajet et du mode de transport les moins onéreux compatibles avec l’état du bénéficiaire et, d’autre part, d’une prescription médicale établie selon les règles définies à l’article L 162-4-1, notamment celles relatives à l’identification du prescripteur, y compris lorsque ce dernier exerce en établissement de santé.
Les frais d’un transport effectué par une entreprise de taxi ne peuvent donner lieu à remboursement que si cette entreprise a préalablement conclu une convention avec un organisme local d’assurance maladie. Cette convention, conclue pour une durée au plus égale à cinq ans, conforme à une convention type établie par décision du directeur général de l’Union des caisses d’assurance maladie après avis des organisations professionnelles nationales les plus représentatives du secteur, détermine, pour les prestations de transport par taxi, les tarifs de responsabilité qui ne peuvent excéder les tarifs des courses de taxis résultant de la réglementation des prix applicable à ce secteur et fixe les conditions dans lesquelles l’assuré peut être dispensé d’avance des frais. Elle peut également prévoir la possibilité de subordonner le conventionnement à une durée d’existence préalable de l’autorisation de stationnement.
L’organisme social d’assurance maladie refuse les demandes de conventionnement des entreprises de taxis lorsque le nombre de véhicules faisant l’objet d’une convention dans le territoire excède un nombre fixé par le directeur général de l’agence régionale de santé pour le territoire concerné sur le fondement de critères tenant compte des caractéristiques démographiques, géographiques et d’équipement sanitaire du territoire ainsi que du nombre de véhicules affectés au transport de patients. Les modalités d’application du présent alinéa sont fixées par décret en Conseil d’Etat.’
La caisse se fonde sur la convention locale conclue entre les entreprises de taxis et les organismes locaux d’assurance maladie du Calvados applicable du 1er avril 2009 au 31 mars 2014.
1) Sur le véhicule immatriculé [Immatriculation 4] qui n’était plus en service depuis septembre 2013 et qui a été utilisé pour des transports réalisés en 2014 ( dossiers [J], [N], [E], [T], [I], [U], [S], [P], [D], [C] et [Y])
L’article 3 de la convention susvisée, dispose que :
– ‘ la présente convention n’est conclue que pour les véhicules :
exploités de façon effective et continue en taxi conformément à une autorisation de stationnement créée depuis plus de deux ans avant la date de signature de la présente convention […] Et pour lesquels les justificatifs suivants ont été fournis: la liste de ces véhicules et conducteurs figure dans l’annexe I de la présente convention.’
L’article 4 de la convention dispose:
‘Seul ouvre droit à remboursement de l’assurance maladie, le transport effectué avec un conducteur et un véhicule déclarés dans l’annexe I de la présente convention.
Toute modification des éléments figurant dans l’état récapitulatif figurant en annexe I fait l’objet d’une information écrite adressée à la caisse dans les 15 jours calendaires suivant le premier jour du changement effectif, le cachet de la poste faisant foi. Les justificatifs correspondants sont joints à cette information. […..]
La rétrocession de course n’est prise en compte que si la course correspondante est réalisée par un véhicule de transport assis professionnalisé faisant l’objet d’une convention signée, sur le fondement de l’article L 322-5 du code de la sécurité sociale entre un organisme d’assurance maladie et l’entreprise qui l’exploite.’
En l’espèce, la caisse reproche à M. [V] d’avoir continué d’utiliser le véhicule immatriculé [Immatriculation 4] pour effectuer des transports alors qu’il n’était plus autorisé à le faire depuis le 1er septembre 2013, soulignant qu’il n’a été autorisé à réaliser des transports avec le véhicule [Immatriculation 9] qu’à compter du 17 mars 2014, date de son conventionnement sous réserve d’une facturation conforme.
M. [V] soutient que son épouse, qui était alors gravement malade, s’est trompée de numéro d’immatriculation lors de l’édition des factures litigieuses en inscrivant [Immatriculation 4] au lieu de [Immatriculation 9] et qu’il a avisé la caisse d’un changement de véhicule à compter du 1er septembre 2013 avec la nouvelle immatriculation [Immatriculation 9].
Les premiers juges ont à juste titre retenu, au vu des pièces versées aux débats, que M. [V] n’avait cédé son véhicule [Immatriculation 4] que le 11 février 2014 à la société [8] et qu’il avait informé la caisse, par courrier, non signé mais daté du 28 février 2014, d’un changement de véhicule qui serait intervenu en septembre 2013 ([Immatriculation 4] remplacé par [Immatriculation 9]), courrier dont la caisse n’ a accusé réception que par lettre datée du 17 mars 2014, lui adressant par la même le logo à apposer sur la vitre latérale arrière droite du nouveau véhicule.
La pièce 42 dont se prévaut M. [V], mais qui ne mentionne aucun numéro d’immatriculation de véhicule, n’est pas susceptible de justifier que M. [V] aurait effectué des transports de personnes, pour la [12] et le conseil général avec le véhicule [Immatriculation 4] sur la période d’août 2013 à février 2014, l’empêchant d’utiliser ce véhicule pour les transports dont la caisse sollicite le remboursement.
Il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a retenu que la caisse ne pouvait rembourser les transports réalisés en 2014 au profit des assurés [J], [N], [E], [T], [I], [U], [S], [P], [D], [C] et [Y] au moyen d’un véhicule qui n’était plus conventionné depuis le 1er septembre 2013, de sorte que l’indu de 22 560,98 euros est justifié.
2) Sur le non respect de la convention (dossiers [A], [W], [P])
S’agissant des dossiers [A] et [W], la caisse reproche à M. [V] l’absence de signature de l’annexe, l’absence d’attestation de présence, des surcharges sur la date de prescription ou une absence de renseignements administratifs de l’assuré sur la prescription médicale de transport.
La convention prévoit la nécessité de fournir l’imprimé 128.40.010 pré- rempli par l’entreprise de taxi, puis signé par l’assuré, son représentant ou un représentant de la structure de soins, le jour de la réalisation du dernier transport facturé.
La cour, à l’instar des premiers juges, constate,s’agissant des dossiers [A] et [W], qu’aucune des annexes produites n’est signée des assurés, en violation notamment de l’article 2 de l’annexe 4 de la convention et qu’en outre, plusieurs transports ont été facturés sans acte de présence.
En conséquence, l’indu notifié d’un montant de 2984,40 euros doit être confirmé.
Concernant le dossier [P], il est établi, au vu des pièces versées aux débats, que la prescription médicale de transport du 2 janvier 2014 n’était valable que six mois et non sept comme le soutient M. [V].
En conséquence, les transports réalisés sur la période du 7 juillet 2014 au 28 août 2014, soit postérieurement au 2 juillet 2014, ne pouvaient faire l’objet d’un remboursement de la part de la caisse.
L’indu de 324 euros doit donc être confirmé.
3) Sur les transports non justifiés
Dossier [F]
La convention précise que ‘ le transport doit faire l’objet d’une prescription médicale préalablement établie, justifiant l’usage du moyen de transport assis professionnalisé’.
En l’espèce, il s’agissait de transporter l’enfant [G] [F] de son domicile au [Adresse 6] à [Localité 3].
C’est à juste titre que les factures afférentes ont été rejetées, le mode de transport n’étant pas inscrit sur la prescription médicale de transport, en violation des dispositions de la convention.
Ainsi que l’ont retenu les premiers juges, les actes de présence de l’enfant [G] ne se substituent pas à ces prescriptions
En conséquence, l’indu de 2064,60 euros doit donc être maintenu.
Dossier [B]
Il ressort des pièces du dossier que la prescription indiquait clairement la destination de l’assuré mais que l’attestation de présence ne précisait pas l’endroit où l’enfant s’était rendu.
En conséquence, l’indu de 302,40 euros doit être maintenu.
Dossier [X]
Alors que la prescription prévoyait un transport à partir du domicile ou de l’école, situés à [Localité 5], vers le CMPEA d'[Localité 10], il est établi que M. [V] partait systématiquement de [Localité 11] au lieu de [Localité 5].
La prescription n’ayant pas été respectée, les transports ont été indûment remboursés par la caisse.
L’indu de 294,84 euros doit être confirmé.
Il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a confirmé la décision de la commission de recours amiable et condamné M. [V] à rembourser à la caisse la somme de 28 531,22 euros en restitution de l’indu au titre d’anomalies de facturation , pour la période du 1er janvier au 30 juin 2016.
M. [V] qui succombe sera condamné aux dépens d’appel, le jugement déféré l’ayant condamné aux dépens de première instance étant également confirmé.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Confirme le jugement déféré,
Condamne M. [L] [V] aux dépens d’appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
E. GOULARD C. CHAUX