N°22/04239
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Cour d’Appel
de Pau
ORDONNANCE
CHAMBRE SPÉCIALE
Référé du
1er décembre 2022
Dossier N°
N° RG 22/01947 – N° Portalis DBVV-V-B7G-IIOH
Objet:
Demande relative à l’octroi, l’arrêt ou l’aménagement de l’exécution provisoire
Affaire :
[S] [K]
C/
[N] [D]
Nous, [B] [T], Premier Président de la cour d’appel de Pau,
Après débats à l’audience publique du 13 octobre 2022,
Avons prononcé la décision suivante à l’audience du 1er décembre 2022 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
Avec l’assistance de Madame GABAIX-HIALE, Greffier
ENTRE :
Madame [S] [K]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Demanderesse au référé ayant pour avocat Me Camille LACAZE, avocat au barreau de PAU
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/002029 du 27/05/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de PAU)
Suite à un jugement rendu par le Juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de PAU, en date du 17 Février 2022, enregistrée sous le n° 21/00134
ET :
Madame [N] [D]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Défenderesse au référé ayant pour avocat Me Stéphanie SOPENA, avocat au barreau de PAU, substituée par Me LABORDE
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par acte de la Selas Alliance Atlantique Pyrénées, huissiers de justice à Pau en date du 4 juillet 2022, [S] [K] qui a été condamnée à évacuer les locaux d’habitation sis [Adresse 2] que lui a donné en location [N] [D] et à lui payer certaines sommes en exécution du bail par jugement prononcé le 17 février 2022 par le tribunal judiciaire de Pau demande au premier président de ce siège au visa des articles 514 et suivants du code de procédure civile d’en arrêter l’exécution provisoire, cette juridiction statuant ce que de droit sur les dépens.
Pour ce faire, elle expose qu’elle justifie de moyens sérieux d’annulation ou de réformation de la décision attaquée en ce sens, d’une part, que le congé pour motif légitime et sérieux, motivé par la réalisation à venir d’importants travaux d’amélioration et de rénovation rendant impossible son maintien dans les lieux que lui a fait délivrer la bailleresse est frauduleux puisque [N] [D] est animée par le seul souci d’accroître la rentabilité de ce logement, d’autre part que la procédure d’insalubrité en cours afférente à ce bien caractérise la mauvaise foi du bailleur à l’origine de la délivrance d’un congé et enfin que les devis produits aux débats par la défenderesse devant le premier juge ne justifient pas la réalité des travaux visés pour avoir été soit pour l’un établi sans déplacement de l’artisan, soit pour être incomplet, soit pour avoir été établi un an après la délivrance du congé, soit avoir été sollicité auprès d’un artisan qui a un lien affectif avec la bailleresse.
Elle ajoute que l’exécution de la décision entreprise aurait des conséquences manifestement excessives qui sont apparues postérieurement à la décision de première instance eu égard à la nature de la mesure ordonnée, à savoir son expulsion, qui par ailleurs a dégradé son état de santé, évoquant en outre la précarité de sa situation financière.
[N] [D] conclut à titre principal à l’irrecevabilité de la demande de [S] [K] à défaut de démontrer l’existence de faits qui se seraient révélés postérieurement au prononcé du jugement dont s’agit, une mesure d’expulsion ne caractérisant pas en elle-même une conséquence manifestement excessive alors qu’elle ne justifie ni de la précarité de sa situation matérielle, bénéficiant de deux emplois et d’un avantage en nature, ni de la dégradation de son état de santé survenue postérieurement au prononcé du jugement du 17 février 2022 ; elle sollicite à titre subsidiaire, le rejet de la demande de [S] [K] les conditions édictées par l’article 514-1 du code de procédure civile n’étant pas réunies, le congé qu’elle lui a fait délivrer est valable ainsi que l’analyse le premier juge, la réalité des travaux exécutés dans un logement vide étant établie, l’état d’insalubrité des lieux n’étant pas caractérisé ; en tout état de cause, [S] [K] sera condamnée à lui payer la somme de 1500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Celle-ci réitère son argumentation et ses demandes, conteste les allégations de [N] [D], rétorque que la défenderesse a reconnu devant le premier juge que le congé contesté a été délivré dans un souci de meilleure rentabilité du logement dont s’agit alors par ailleurs qu’elle répète que la dégradation de son état de santé résulte du prononcé du jugement querellé et qu’elle justifie de ses revenus mensuels qui s’élèvent à 863,33 € en 2021 et 841,55 € en 2022 ; elle affirme enfin que la défenderesse n’a pas exécuté la décision dont s’agit mettant à sa charge le paiement de certaines sommes.
Cette dernière explique la non-exécution de la décision querellée suite à la demande du conseil de la défenderesse dans l’attente du prononcé de l’ordonnance du premier président ; elle souligne également que [S] [K] dispose de revenus tirés de son activité salariée, conteste la force probante des certificats médicaux produits aux débats alors qu’il n’y a pas de corrélation entre la délivrance du congé et la procédure du service communal d’hygiène et de santé.
SUR QUOI
Il sera rappelé qu’en application de l’article 514-3 du code de procédure civile, l’arrêt de l’exécution provisoire assortissant une décision de première instance frappée d’appel par le premier président est subordonné à la double démonstration d’un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et de circonstances manifestement excessives qu’entraînerait son exécution.
Par ailleurs, à défaut d’émission en première instance par la partie qui a comparu d’observations sur l’exécution provisoire, la recevabilité de sa demande est conditionnée outre par l’établissement des deux conditions précitées, par la justification de la survenance de circonstances manifestement excessives postérieurement au prononcé de la décision attaquée.
En la cause, il ressort des écritures de [S] [K] en date du 25 novembre 2021 développées devant le premier juge, que celle-ci n’a pas discuté l’exécution provisoire.
Il convient de souligner qu’une mesure d’expulsion ne constitue pas en elle-même une conséquence manifestement excessive, résultant de la simple application de la décision attaquée.
En outre, la demanderesse ne justifie ni même n’allègue une dégradation de sa situation matérielle postérieurement au prononcé de la décision entreprise.
Bien plus, elle a perçu au titre de son activité auprès de ces deux employeurs, la SARL AOS et la SAS STPMR un revenu total mensuel en 2021 de 863,33 € et 841,33 € en 2022, soit un salaire identique.
Enfin, le certificat médical en date du 16 mars 2022 soit postérieur au prononcé de la décision querellée du Docteur [J] ne saurait caractériser une conséquence manifestement excessive pour être uniquement descriptif de l’état de santé de [S] [K] évoquant une dégradation de sa situation sanitaire, mais sans en préciser la cause.
S’agissant du certificat établi par le même praticien non daté, au terme duquel « l’état de santé psychologique de Madame [K] s’est considérablement dégradé depuis le jugement du 17 février 2022 du juge des contentieux qui valide le congé délivré le 25 septembre 2020 lequel dit que Madame [K] est occupante sans droit ni titre depuis le 30 avril 2021 et lui ordonne de libérer les lieux. Le sevrage thérapeutique qui était prévu n’est plus possible vu l’état de santé de Madame [K] » ne saurait non plus constituer la conséquence excessive précitée pour ne pas être étayée par des éléments médicaux mieux circonstanciés.
Dès lors, les prétentions de celle-ci seront déclarées irrecevables.
Pour résister à l’action diligentée par [S] [K], [Z] [D] a été contrainte d’exposer des frais irrépétibles qui lui seront remboursés à hauteur de la somme de 1500 €.
PAR CES MOTIFS
Nous, premier président, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Déclarons irrecevable l’action de [S] [K],
Condamnons [S] [K] à payer à [N] [D] la somme de 1500 € (mille cinq cents euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamnons [S] [K] aux entiers dépens.
Le Greffier, Le Premier Président,
Sandrine GABAIX-HIALE Rémi LE HORS