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En vertu des dispositions de l’article 41 de la loi du 29 juillet 1881 reproduites à l’article L. 741-2 du code de justice administrative, les tribunaux administratifs peuvent, dans les causes dont ils sont saisis, prononcer, même d’office, la suppression des écrits injurieux, outrageants ou diffamatoires.
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Tribunal administratif de Toulouse, 5ème Chambre, 4 avril 2023, 1901062
Vu la procédure suivante :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 26 février 2019, le 21 novembre 2019, le 3 décembre 2019 et le 5 janvier 2023, M. B C demande au tribunal dans le dernier état de ses écritures :
1°) d’annuler le titre de pension du 17 décembre 2018 ;
2°) de condamner l’Etat à lui verser une somme de 15 000 euros en réparation de ses préjudices ;
3°) d’enjoindre à l’administration de lui délivrer les décisions modifiant sa position statutaire à partir de 1991 et impliquant son recrutement par les sociétés France Télécom puis Orange, ou, à défaut, de procéder à la reconstitution de sa carrière depuis 1993 en tant que fonctionnaire de l’Etat au grade d’inspecteur principal et de lui concéder un titre de pension conforme à ce statut et mentionnant l’administration dont il relève.
Il soutient que :
– le titre de pension est illégal dès lors que son rattachement hiérarchique à la société Orange et la mention de son appartenance au corps des inspecteurs de France Télécom sont erronés ; il demeure fonctionnaire d’Etat et n’est pas placé sous l’autorité de la société Orange ;
– la date de son départ à la retraite au 1er février 2019 lui a été imposée, alors qu’il était en droit de demander à être admis à la retraite après sa date d’anniversaire afin de bénéficier d’une retraite plus avantageuse ;
– il est en droit d’obtenir une pension pour invalidité imputable au service ;
– l’Etat a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en le maintenant dans une position irrégulière au sein des sociétés France Télécom puis Orange ;
– son maintien au sein des sociétés France Télécom puis Orange lui a causé des préjudices en termes de perte de rémunération, de perte de chance d’obtenir une promotion, d’atteinte à sa dignité et de souffrances endurées par lui-même, par son conjoint et ses enfants ;
– le mémoire en défense de la société Orange du 21 octobre 2019 doit être écarté comme tardif.
Par des mémoires en défense enregistrés le 21 octobre 2019, le 19 décembre 2019 et le 26 janvier 2023, la société Orange, représentée par Me Bost, conclut au rejet de la requête, à la suppression des passages injurieux, outrageants ou diffamatoires contenus dans les écritures du requérant, et à ce qu’une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. C au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
– la requête est tardive ;
– les conclusions indemnitaires sont irrecevables en l’absence de décision préalable ;
– les moyens soulevés par M. C ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 5 novembre 2019, le ministre des comptes et de l’action publique conclut au rejet de la requête.
Il indique s’associer aux observations de la société Orange.
Un mémoire enregistré le 8 février 2023 présenté par M. C n’a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
– la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
– la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;
– la loi n° 96-660 du 26 juillet 1996 ;
– la loi n° 2003-1365 du 31 décembre 2003 ;
– le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
– le décret n° 91-103 du 25 janvier 1991 ;
– le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de Mme Soddu, rapporteure,
– et les conclusions de Mme Nègre-Le Guillou, rapporteure publique.
:
1. Par arrêté du 17 décembre 2018 du service des retraites de l’Etat, une pension de retraite pour invalidité a été concédée à M. C, inspecteur de l’administration des postes et télécommunications, à compter du 1er février 2019. Par sa requête, M. C demande au tribunal d’annuler ce titre de pension et de condamner l’Etat à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation de ses préjudices. Il doit également être regardé comme demandant au tribunal d’enjoindre à l’Etat de le placer dans une situation légale et réglementaire conformément à son statut de fonctionnaire de l’Etat et d’en tirer les conséquences, s’agissant notamment de son titre de pension.
Sur la recevabilité des écritures en défense :
2. La circonstance que la société Orange a produit son mémoire en défense le 21 octobre 2019, postérieurement au délai qui lui avait été indiqué par le greffe du tribunal, lors de la communication de la requête introductive d’instance le 12 mars 2019, est sans influence sur la recevabilité de ses écritures, dès lors qu’elles ont été enregistrées avant la clôture de l’instruction et qu’elles ont été communiquées au requérant. Par suite, M. C n’est pas fondé à demander au tribunal d’écarter le mémoire en défense enregistré le 21 octobre 2019.
Sur les conclusions à fin d’annulation :
3. En premier lieu, l’article 1er de la loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et de France Télécom a créé les exploitants publics La Poste et France Télécom. Aux termes de l’article 29 de cette loi, dans sa rédaction applicable : ” Les personnels de La Poste et de France Télécom sont régis par des statuts particuliers, pris en application de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droit et obligations des fonctionnaires et de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat, qui comportent des dispositions spécifiques dans les conditions prévues aux alinéas ci-après, ainsi que dans les conditions de l’article 29-1 “. Aux termes de l’article 29-1 de la même loi, dans sa rédaction applicable : ” 1. Au 31 décembre 1996, les corps de fonctionnaires de France Télécom sont rattachés à l’entreprise nationale France Télécom et placés sous l’autorité de son président qui dispose des pouvoirs de nomination et de gestion à leur égard. Les personnels fonctionnaires de l’entreprise nationale France Télécom demeurent soumis aux articles 29 et 30 de la présente loi. ()”. L’article 44 de ladite loi dispose, dans sa rédaction applicable : ” Les personnels en activité affectés au 31 décembre 1990 dans les emplois d’un service relevant de la direction générale de la poste ou de la direction générale des télécommunications sont placés de plein droit respectivement sous l’autorité du président du conseil d’administration de La Poste ou de celui de France Télécom à compter du 1er janvier 1991, sans changement de leur position statutaire. “.
4. La loi du 26 juillet 1996 relative à l’entreprise nationale France Télécom a transformé la personne morale de droit public France Télécom en une entreprise nationale. L’article 5 de cette loi a modifié l’article 29-1 de la loi du 2 juillet 1990 et rattaché les corps de fonctionnaires de France Télécom à l’entreprise nationale France Télécom, les plaçant sous l’autorité du président de cette entreprise, qui dispose des pouvoirs de nomination et de gestion à leur égard. La loi du 31 décembre 2003 relative aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom a soumis France Télécom aux dispositions applicables aux sociétés anonymes sous réserve des dispositions particulières de la loi du 2 juillet 1990. Aux termes de l’article 29-2 de la loi du 2 juillet 1990 résultant de la loi du 31 décembre 2003, les pouvoirs nécessaires à la nomination et à la gestion des fonctionnaires présents dans l’entreprise, à l’exception du prononcé de sanctions disciplinaires du quatrième groupe, ont été confiés au président de France Télécom durant la période transitoire liée à la présence de fonctionnaires dans l’entreprise.
5. Les fonctionnaires en service au ministère chargé de la poste et des télécommunications antérieurement à la réforme effectuée par la loi du 2 juillet 1990 ont été intégrés d’office dans de nouveaux corps, dits de ” reclassement “, créés au sein de La Poste et de France Télécom, par l’effet de décrets statutaires pris pour l’application de la loi du 2 juillet 1990. Ces décrets ont modifié ou remplacé et abrogé les décrets statutaires qui régissaient auparavant les corps des fonctionnaires de l’ancienne administration des postes et télécommunications. Des décrets ultérieurs ont fixé les statuts particuliers de nouveaux corps dits de ” reclassification “. Les fonctionnaires appartenant aux corps de ” reclassement ” ont eu le choix d’opter pour l’intégration, selon une procédure spécifique, dans les nouveaux corps de ” reclassification ” ou de demeurer dans les corps et grades dits de ” reclassement “. Ainsi, les anciens corps de fonctionnaires du ministère chargé de la poste et des télécommunications ont été supprimés après l’entrée en vigueur de la loi du 2 juillet 1990, et les fonctionnaires issus de l’ancienne administration des postes et télécommunications ont été intégrés dans un corps de ” reclassement “, puis, le cas échéant sur leur demande, dans un corps de ” reclassification “.
6. Il résulte de l’article 29 de la loi du 2 juillet 1990 visée ci-dessus que les fonctionnaires en fonction au sein de la société Orange conservent leur qualité de fonctionnaire et demeurent soumis au statut général de la fonction publique. Par ailleurs, les fonctionnaires ne peuvent invoquer aucun droit acquis au maintien de leur statut, lequel peut être modifié à tout moment, dans le respect des dispositions législatives en vigueur. Les dispositions transitoires de l’article 44 de la loi du 2 juillet 1990 n’interdisaient pas que soient modifiées ultérieurement les règles statutaires applicables aux corps de fonctionnaires auxquels ces personnels ont continué d’appartenir après le 1er janvier 1991.
7. Il résulte tout d’abord de l’instruction que M. C a été nommé dans le corps des inspecteurs des postes et télécommunications le 10 décembre 1980 et a été intégré d’office dans le corps des inspecteurs de France Télécom par le décret du 25 janvier 1991 relatif au statut particulier du corps des inspecteurs de La Poste et du corps des inspecteurs de France Télécom, lequel est, à la date de la décision attaquée, régi par le décret n° 2011-1679 du 29 novembre 2011. La circonstance qu’aucun acte individuel n’a procédé à l’intégration de M. C est sans influence sur la légalité de sa situation, dès lors que celle-ci résulte de l’application des dispositions législatives et réglementaires énoncées ci-dessus. Par suite, M. C n’est pas fondé à soutenir que le titre de pension serait illégal du fait, d’une part de l’absence d’acte individuel procédant à son intégration et d’autre part, de mention de sa qualité de fonctionnaire de l’Etat.
8. Ensuite, il résulte des dispositions des articles 29 et 29-1 de la loi du 2 juillet 1990, que les fonctionnaires de l’Etat en service à France Télécom sont soumis à l’autorité du président de France Télécom, lequel dispose, à ce titre, du pouvoir de les recruter, de les nommer et de les gérer, sans qu’il y ait lieu de distinguer à cet égard selon qu’ils ont ou non demandé leur intégration dans les nouveaux corps de France Télécom dits de ” reclassification “, créés par les décrets n° 93-514 à 93-519 du 25 mars 1993. Ainsi qu’il a été dit au point précédent, M. C étant placé dans une situation statutaire et règlementaire au sein de France Télécom, devenue la société Orange, le président de cette société tenait des dispositions précitées de l’article 29-2 de la loi du 2 juillet 1990 le pouvoir de prendre les actes de gestion relatifs à la situation administrative du requérant, notamment celui de prononcer son admission à la retraite. Par suite, M. C n’est pas fondé à soutenir que son admission à la retraite aurait été décidée par une autorité incompétente.
9. Enfin, M. C soutient que le décret du 25 janvier 1991 serait entaché d’une rétroactivité illégale. L’intégration d’office des fonctionnaires des anciens corps de l’administration de la poste et des télécommunications dans les corps de ” reclassement ” a été effectuée en conséquence des décrets statutaires pris après l’intervention de la loi du 2 juillet 1990 et pour son application, l’intégration de ces fonctionnaires au 1er janvier 1991 étant nécessaire pour assurer la continuité de leur carrière, dès lors que la loi du 2 juillet 1990 prévoit, en son article 44, que ” les personnels en activité affectés au 31 décembre 1990 dans les emplois d’un service relevant de la direction générale de la poste ou de la direction générale des télécommunications sont placés de plein droit respectivement sous l’autorité du président du conseil d’administration de La Poste ou de celui de France Télécom à compter du 1er janvier 1991 “, et en son article 29, que ” les personnels de La Poste et de France Télécom sont régis par des statuts particuliers “. Dès lors, ce moyen doit être écarté.
10. En deuxième lieu, aux termes de l’article 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite : ” Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l’incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d’une invalidité ne résultant pas du service et qui n’a pu être reclassé dans un autre corps en application de l’article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d’office ; dans ce dernier cas, la radiation des cadres est prononcée sans délai si l’inaptitude résulte d’une maladie ou d’une infirmité que son caractère définitif et stabilisé ne rend pas susceptible de traitement, ou à l’expiration d’un délai de douze mois à compter de sa mise en congé si celle-ci a été prononcée en application de l’article 36 (2°) de l’ordonnance du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires ou à la fin du congé qui lui a été accordé en application de l’article 36 (3°) de ladite ordonnance. L’intéressé a droit à la pension rémunérant les services prévue au 2° du I de l’article L. 24 du présent code, sous réserve que ses blessures ou maladies aient été contractées ou aggravées au cours d’une période durant laquelle il acquérait des droits à pension. Par dérogation à l’article L.16 du même code, cette pension est revalorisée dans les conditions fixées à l’article L. 341-6 du code de la sécurité sociale. “. Aux termes de l’article 47 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l’organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d’aptitude physique pour l’admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires : ” Le fonctionnaire ne pouvant, à l’expiration de la dernière période de congé de longue maladie ou de longue durée, reprendre son service est () / soit admis à la retraite après avis de la commission de réforme. Pendant toute la durée de la procédure requérant soit l’avis du comité médical, soit l’avis de la commission de réforme, soit l’avis de ces deux instances, le paiement du demi-traitement est maintenu jusqu’à la date de la décision de reprise de service ou de réintégration, de reclassement, de mise en disponibilité ou d’admission à la retraite. “.
11. Il résulte de l’instruction que M. C a été placé d’office en congé de longue durée pour la période du 19 octobre 2016 au 18 juillet 2018. Le comité médical l’ayant reconnu définitivement inapte à l’exercice de ses fonctions à l’issue de cette période, M. C a été admis à la retraite à compter du 1er février 2019. Du fait de cette inaptitude définitive ainsi constatée, le requérant, qui avait épuisé ses droits à congé, ne peut utilement soutenir que la société Orange aurait dû attendre sa date anniversaire afin de lui permettre de bénéficier d’une pension de retraite plus avantageuse.
12. En troisième lieu, M. C soutient qu’il aurait dû partir à un grade et un indice supérieurs à ceux figurant sur son titre de pension, qu’il n’a pu bénéficier d’un avancement au contraire de certains agents publics relevant d’autres ministères, et qu’il a par conséquent été victime d’une rupture d’égalité. Toutefois, le requérant ne produit à l’appui de ce moyen aucun élément de nature à justifier la perte de chance d’obtenir une promotion ainsi alléguée, ni de la rupture d’égalité dont il s’estime victime. Dès lors, ce moyen doit être écarté.
13. En quatrième et dernier lieu, aux termes de l’article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite : ” Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l’incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d’infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées soit en service, () et qui n’a pu être reclassé dans un autre corps en application de l’article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d’office à l’expiration d’un délai de douze mois à compter de sa mise en congé si cette dernière a été prononcée en application des 2° et 3° de l’article 34 de la même loi ou à la fin du congé qui lui a été accordé en application du 4° du même article. ” Aux termes de l’article L. 28 du même code : ” Le fonctionnaire civil radié des cadres dans les conditions prévues à l’article L. 27 a droit à une rente viagère d’invalidité cumulable avec la pension rémunérant les services. ” Aux termes de l’article 63 de la loi du 11 janvier 1984 relative à la fonction publique de l’Etat : ” Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d’altération de leur état physique, inaptes à l’exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l’adaptation du poste de travail n’est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d’un autre corps s’ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. () ” Aux termes de l’article 1er du décret du 30 novembre 1984 pris pour l’application de l’article 63 de la loi du 11 janvier 1984 : ” Lorsqu’un fonctionnaire n’est plus en mesure d’exercer ses fonctions, de façon temporaire ou permanente, et si les nécessités du service ne permettent pas un aménagement des conditions de travail, l’administration, après avis du médecin de prévention, dans l’hypothèse où l’état de ce fonctionnaire n’a pas rendu nécessaire l’octroi d’un congé de maladie, ou du comité médical si un tel congé a été accordé, peut affecter ce fonctionnaire dans un emploi de son grade, dans lequel les conditions de service sont de nature à permettre à l’intéressé d’assurer les fonctions correspondantes “.
14. Il résulte de ces dispositions qu’une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec l’exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu’un fait personnel de l’agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l’aggravation de la maladie du service.
15. Aux termes de l’article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : ” Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel () “. Aux termes de l’article 11 de cette loi : ” I.-A raison de ses fonctions et indépendamment des règles fixées par le code pénal et par les lois spéciales, le fonctionnaire ou, le cas échéant, l’ancien fonctionnaire bénéficie, dans les conditions prévues au présent article, d’une protection organisée par la collectivité publique qui l’emploie à la date des faits en cause ()/ IV.- La collectivité publique est tenue de protéger le fonctionnaire contre les atteintes volontaires à l’intégrité de la personne, les violences, les agissements constitutifs de harcèlement, les menaces, les injures, les diffamations ou les outrages dont il pourrait être victime sans qu’une faute personnelle puisse lui être imputée. Elle est tenue de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté () “.
16. Il appartient à l’agent public qui soutient avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement moral, lorsqu’il entend contester le refus opposé par l’administration dont il relève à une demande de protection fonctionnelle fondée sur de tels faits de harcèlement, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d’en faire présumer l’existence. Il incombe à l’administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d’apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu’il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d’instruction utile.
17. M. C se prévaut de difficultés de santé, caractérisées par des troubles cardiaques et psychiatriques, en lien avec une situation de harcèlement, d’intimidation morale et physique dont il estime avoir été victime. Toutefois, les éléments qu’il produit à l’appui de sa requête, constitués par le certificat d’un médecin cardiologue du 21 septembre 2000, indiquant qu’il ” doit éviter toute situation de stress, notamment professionnel “, une convocation pour une consultation de cardiologie le 21 décembre 2017, un arrêt de travail pour dépression portant sur la période du 19 décembre 2002 au 10 janvier 2003, un extrait de courrier d’un médecin neurologue mentionnant une hospitalisation en août 2011 et le rapport d’une assistante sociale de la société Orange du 25 novembre 2013 mentionnant qu’il est en arrêt maladie depuis le mois de juillet 2013 et qu’il se trouve ” en grande souffrance due à sa situation professionnelle “, la survenance d’un ” burn out ” en 2011, et une hospitalisation en neurologie du 16 au 21 août 2011 à la suite d’un accident ischémique transitoire, suivie d’arrêts maladie jusqu’à la fin du mois d’octobre 2011, ne permettent pas en eux-mêmes, alors qu’il résulte de l’instruction que M. C présente notamment des antécédents d’insuffisance mitrale, de laisser présumer l’existence d’un harcèlement moral ayant conduit à la reconnaissance de son inaptitude définitive à compter du 19 juillet 2018.
18. M. C se prévaut également de l’arrêt du 30 septembre 2022 par laquelle la Cour d’appel de Paris l’a reconnu victime de faits constitutifs de harcèlement moral au cours des années 2008 et 2009. Toutefois, cet élément ne permet pas non plus de laisser présumer l’existence, dix ans après les faits constatés par le juge pénal, d’une situation de harcèlement moral ayant conduit à son inaptitude définitive en juillet 2018.
19. Les éléments ainsi avancés, pris isolément ou dans leur ensemble, ne permettent pas de présumer l’existence d’un harcèlement moral. Dès lors, M. C n’est pas fondé à soutenir qu’il aurait dû être admis à la retraite pour invalidité imputable au service.
20. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu’il soit besoin d’examiner les fins de non-recevoir opposées en défense, que les conclusions de M. C à fin d’annulation doivent être rejetées.
Sur les conclusions indemnitaires :
21. Aux termes de l’article R. 421-1 du code de justice administrative : ” La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / Lorsque la requête tend au paiement d’une somme d’argent, elle n’est recevable qu’après l’intervention de la décision prise par l’administration sur une demande préalablement formée devant elle “.
22. M. C demande au tribunal de condamner l’État à lui verser une indemnité de 15 000 euros en réparation de ses préjudices. Il résulte toutefois de l’instruction que ses conclusions indemnitaires n’ont pas été précédées d’une demande préalable d’indemnisation auprès de l’administration. Par suite, ainsi que le fait valoir la société Orange, les conclusions à fin d’indemnisation présentées par M. C doivent être rejetées comme irrecevables.
23. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. C doit être rejetée, en ce compris ses conclusions à fin d’injonction.
Sur les conclusions reconventionnelles à fin de suppression de passages injurieux, outrageants ou diffamatoires :
24. En vertu des dispositions de l’article 41 de la loi du 29 juillet 1881 reproduites à l’article L. 741-2 du code de justice administrative, les tribunaux administratifs peuvent, dans les causes dont ils sont saisis, prononcer, même d’office, la suppression des écrits injurieux, outrageants ou diffamatoires.
25. Le passage de la requête de M. C enregistrée le 26 février 2019 commençant par les mots ” Ces méthodes de management () ” et se terminant par les mots ” () totalitaires. ” (page 9 de la requête), les passages du mémoire de M. C enregistré le 21 novembre 2019 commençant par les mots ” Il convient de rappeler () ” et se terminant par les mots ” () viol ” (page 6), ceux commençant par les mots ” Il convient de préciser () ” et se terminant par ” () les effectifs de la SA ” (page 7), ceux commençant par ” Orange n’a cessé de continuer () ” et se terminant par ” () but recherché ” (page 8), et les passages du mémoire de M. C enregistré le 5 janvier 2023 commençant par les mots ” Ces pratiques illustrent () ” et se terminant par les mots ” () voir à se suicider ” (page 2), ceux commençant par les mots ” Le maintien de force () ” et se terminant par ” () viol manifeste ” (page 2), présentent un caractère injurieux et diffamatoires. Par suite, il y a lieu d’en prononcer la suppression.
Sur les frais liés au litige :
26. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la société Orange présentées sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 1er : La requête de M. C est rejetée.
Article 2 : Le passage de la requête de M. C enregistrée le 26 février 2019 commençant par les mots ” Ces méthodes de management () ” et se terminant par les mots ” () totalitaires. ” (page 9 de la requête), les passages du mémoire de M. C enregistré le 21 novembre 2019 commençant par les mots ” Il convient de rappeler () ” et se terminant par les mots ” () viol ” (page 6), ceux commençant par les mots ” Il convient de préciser () ” et se terminant par ” () les effectifs de la SA ” (page 7), ceux commençant par ” Orange n’a cessé de continuer () ” et se terminant par ” () but recherché ” (page 8), et les passages du mémoire de M. C enregistré le 5 janvier 2023 commençant par les mots ” Ces pratiques illustrent () ” et se terminant par les mots ” () voir à se suicider ” (page 2), ceux commençant par les mots ” Le maintien de force () ” et se terminant par ” () viol manifeste ” (page 2), sont supprimés.
Article 3 : Les conclusions de la société Orange présentées sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. A C, à la société Orange et au ministre de l’action et des comptes publics.
Délibéré après l’audience du 21 mars 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Héry, présidente,
Mme Soddu, première conseillère,
Mme Biscarel, conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 avril 2023.
La rapporteure,
N. SODDU
La présidente,
F. HÉRY La greffière,
M. D
La République mande et ordonne au ministre l’action et des comptes publics en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme :
La greffière en chef,