Accusations diffamatoires : protection fonctionnelle des agents publics

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Accusations diffamatoires : protection fonctionnelle des agents publics
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A la suite de ces différents entretiens, à l’occasion desquels la cheffe d’établissement a par ailleurs mis en garde les élèves concernés sur le risque diffamatoire de tels propos, le caractère infondé et inexact des accusations a été reconnu par les élèves et aucune action pénale, civile ou disciplinaire n’a été engagée à l’encontre M. B pour les faits qui avaient été dénoncés. En outre, l’intéressé ne démontre pas qu’il aurait été particulièrement affecté sur le plan psychologique du fait de cet incident. Dans ces conditions, alors que le chef d’établissement a mis en œuvre les mesures nécessaires pour assurer la protection du requérant, indépendamment de l’engagement d’une procédure disciplinaire à l’encontre des élèves, le recteur de l’académie de Toulouse n’a pas entaché sa décision d’une erreur de droit ou d’appréciation en refusant la demande de protection fonctionnelle présentée par M. B.

Aux termes de l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 : ” Les fonctionnaires bénéficient, à l’occasion de leurs fonctions, d’une protection organisée par la collectivité publique dont ils dépendent, conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales () La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l’occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté “. Il résulte de ces dispositions que, lorsqu’un agent public est mis en cause par un tiers à raison de ses fonctions, il incombe à la collectivité publique dont il dépend de le couvrir des condamnations civiles prononcées contre lui, dans la mesure où une faute personnelle détachable du service ne lui est pas imputable, de lui accorder sa protection dans le cas où il fait l’objet de poursuites pénales, sauf s’il a commis une faute personnelle, et, à moins qu’un motif d’intérêt général ne s’y oppose, de le protéger contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont il est l’objet.

 

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Tribunal administratif de Toulouse, 4ème Chambre, 8 mars 2023, 2106342

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 29 octobre 2021, M. C B, doit être regardé comme demandant au tribunal :

1°) d’annuler la décision par laquelle le recteur de l’académie de Toulouse a implicitement rejeté sa demande en date du 30 juin 2021 tendant à l’octroi de la protection fonctionnelle ;

2°) d’enjoindre au recteur de l’académie de Toulouse de lui octroyer la protection fonctionnelle.

Il soutient que la décision litigieuse méconnaît les dispositions de l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 dès lors qu’il a été victime d’atteintes volontaires à sa dignité, son intégrité et sa probité.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 janvier 2023, le recteur de l’académie de Toulouse conclut, à titre principal, au non-lieu à statuer et à l’irrecevabilité de la requête et, à titre subsidiaire, au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

– il n’y a plus lieu à statuer du fait des démarches menées par le chef d’établissement, l’État a épuisé sa compétence au regard des faits invoqués ;

– la requête est irrecevable dès lors qu’il n’appartient pas au juge administratif d’adresser des injonctions à une autorité administrative dans le cadre d’un recours pour excès de pouvoir ;

– aucun des moyens de la requête n’est fondé.

Un mémoire présenté pour M. B, par Me Weyl, le 10 février 2023, par lequel le requérant sollicite en outre la mise à la charge de l’État du paiement d’une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et que le tribunal ordonne la suppression de mentions supposées diffamatoires de certaines phrases du mémoire en défense, n’a pas été communiqué.

Une note en délibéré a été produite le 17 février 2022 pour M. B.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

– la loi n° 83- 634 du 13 juillet 1983 ;

– la loi du 29 juillet 1881 ;

– le décret n°88-145 du 15 février 1988 ;

– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

– le rapport de M. A,

– les conclusions de M. Farges, rapporteur public,

– et les observations de M. B.

Considérant ce qui suit

:

1. M. B, professeur d’éducation physique et sportive (EPS) est affecté, depuis le 1er septembre 2015 au collège Germaine Tillion à Aussone (31). Par un courrier du 30 juin 2021, réceptionné par le rectorat de l’académie de Toulouse le 5 juillet 2021, l’intéressé a sollicité l’octroi de la protection fonctionnelle en raison des accusations mensongères et calomnieuses dont il s’estime victime de la part de quatre élèves et d’une assistante d’éducation (AED). Par la présente requête, M. B sollicite l’annulation de la décision implicite née du silence gardé par le recteur de l’académie de Toulouse sur sa demande.

Sur les conclusions aux fins de non-lieu à statuer :

2. La circonstance que le rectorat aurait pris les mesures effectives pour assurer la protection de M. B, ce qui renvoie à l’examen du fond de la légalité de la décision en litige, ne saurait rendre sans objet la requête de sorte que les conclusions du rectorat aux fins de non-lieu à statuer ne peuvent qu’être rejetées.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

3. Aux termes de l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 : ” Les fonctionnaires bénéficient, à l’occasion de leurs fonctions, d’une protection organisée par la collectivité publique dont ils dépendent, conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales () La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l’occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté “. Il résulte de ces dispositions que, lorsqu’un agent public est mis en cause par un tiers à raison de ses fonctions, il incombe à la collectivité publique dont il dépend de le couvrir des condamnations civiles prononcées contre lui, dans la mesure où une faute personnelle détachable du service ne lui est pas imputable, de lui accorder sa protection dans le cas où il fait l’objet de poursuites pénales, sauf s’il a commis une faute personnelle, et, à moins qu’un motif d’intérêt général ne s’y oppose, de le protéger contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont il est l’objet.

4. M. B soutient qu’il a fait l’objet d’attaques au sens de l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 de la part de quatre élèves et d’une assistante d’éducation (AED). Il ressort des pièces du dossier que l’intéressé a formé une demande de protection fonctionnelle auprès du recteur de l’académie de Toulouse par courrier en date du 30 juin 2021 réceptionné par les services du rectorat le 5 juillet 2021, afin de faire cesser les ” accusations mensongères et calomnieuses ” dont il fait l’objet, d’obtenir ” réparation du préjudice et des torts subis ” et d’assurer sa défense contre les atteintes dont il s’estime victime. Il ressort également des pièces du dossier que, les 15 et 16 octobre 2020, trois élèves auraient indiqué à la cheffe d’établissement qu’il ” filmerait les élèves dans les vestiaires et porterait sa main au niveau de son pantalon ” et le 28 janvier 2021, une élève aurait déclaré qu’il la regardait ” bizarrement ” pendant les cours d’EPS et qu’il adopterait un comportement proche du voyeurisme à son égard. Informée de ces propos, une assistante d’éducation (AED) aurait dit à une de ses collègues, devant l’élève concernée et une de ces camarades, que ce n’était pas la première fois qu’elle entendait ce genre de propos concernant l’intéressé. Il ressort toutefois des rapports rédigés par la cheffe d’établissement à destination des services du rectorat en date des 11 février 2021 et 3 octobre 2022, qu’elle a immédiatement averti le requérant des faits qui lui étaient reprochés et a procédé à des entretiens avec les élèves concernés et l’intéressé. Il ressort également de ces rapports que les autres professeurs d’EPS du collège ont été entendus, et qu’un courrier en date du 12 février 2021 a été envoyé aux parents d’élèves et intitulé ” précisions et clarifications concernant la discipline EPS “. A la suite de ces différents entretiens, à l’occasion desquels la cheffe d’établissement a par ailleurs mis en garde les élèves concernés sur le risque diffamatoire de tels propos, le caractère infondé et inexact des accusations a été reconnu par les élèves et aucune action pénale, civile ou disciplinaire n’a été engagée à l’encontre M. B pour les faits qui avaient été dénoncés. En outre, l’intéressé ne démontre pas qu’il aurait été particulièrement affecté sur le plan psychologique du fait de cet incident. Dans ces conditions, alors que le chef d’établissement a mis en œuvre les mesures nécessaires pour assurer la protection du requérant, indépendamment de l’engagement d’une procédure disciplinaire à l’encontre des élèves, le recteur de l’académie de Toulouse n’a pas entaché sa décision d’une erreur de droit ou d’appréciation en refusant la demande de protection fonctionnelle présentée par M. B.

5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée en défense, qu’il y a lieu de rejeter les conclusions de M. B tendant à l’annulation de la décision contestée ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions qu’il présente à fin d’injonction et celles présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. En outre, les écritures en défense de l’administration ne dépassant le cadre de ce qu’autorise la confrontation contradictoire des parties, il n’y a pas lieu de faire droit aux demandes de M. B de suppressions de mentions du mémoire en défense qui ne présentent pas de caractère diffamatoire.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. C B et au ministre de l’Éducation nationale et de la jeunesse.

Copie en sera adressée au recteur de l’académie de Toulouse.

Délibéré après l’audience du 16 février 2023 à laquelle siégeaient :

M. Sorin, président,

M. Hecht, premier conseiller,

Mme Pétri, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 mars 2023.

Le président-rapporteur,

T. A

L’assesseur le plus ancien dans l’ordre du tableau,

S. HECHT

La greffière,

S. SORABELLA

La République mande et ordonne au ministre de l’Éducation nationale et de la jeunesse, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme :

La greffière en chef,

 


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