Droits de la partie civile : 9 septembre 2011 Cour d’appel de Paris RG n° 07/12580

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Droits de la partie civile : 9 septembre 2011 Cour d’appel de Paris RG n° 07/12580
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9 septembre 2011
Cour d’appel de Paris
RG n°
07/12580

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 11

ARRET DU 09 SEPTEMBRE 2011

(n°216, 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 07/12580

Décision déférée à la Cour : jugement du 5 juin 2007 – Tribunal de commerce de BOBIGNY – RG n°2006F01054

APPELANTE

Mme [G] [V]

[Adresse 1]

[Localité 9]

représentée par la SCP DUBOSCQ – PELLERIN, avoué à la Cour

assistée de Me François DUMOULIN substituant Me Jean-Claude BENHAMOU, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque PB 196

INTERVENANT VOLONTAIRE

M. [O] [N], agissant en sa qualité de commissaire à l’exécution du plan de Mme [G] [V]

[Adresse 5]

[Localité 8]

représenté par la SCP DUBOSCQ – PELLERIN, avoué à la Cour

assisté de Me François DUMOULIN substituant Me Jean-Claude BENHAMOU, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque PB 196

INTIMEES

S.A. EUROPEENNE DE CAUTIONNEMENT ‘EDC’, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 3]

[Localité 6]

S.A. SEITA – ALTADIS DISTRIBUTION, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 4]

[Localité 7]

représentées par la SCP MENARD – SCELLE-MILLET, avoué à la Cour

assistées de Me Martine GHIO, avocat au barreau de PARIS, toque C 1664

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 mai 2011, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Fabrice JACOMET, Président, chargé d’instruire l’affaire, lequel a été préalablement entendu en son rapport, en présence de M. Bernard SCHNEIDER, Conseiller

MM. Fabrice JACOMET et Bernard SCHNEIDER ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Fabrice JACOMET, Président

M. Bernard SCHNEIDER, Conseiller

Mme Dominique SAINT-SCHROEDER, Conseiller, désignée par ordonnance du Premier Président pour compléter la Cour

Greffier lors des débats : Mlle Carole TREJAUT

ARRET :

Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

Signé par M. Bernard SCHNEIDER, Conseiller ayant délibéré, le Président étant empêché, et par Mlle Carole TREJAUT, Greffier, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue au vu des précédents arrêts rendus les 20 11 2009 et 18 03 2011.

Il suffit, pour une compréhension de l’objet du litige, de rappeler que :

– les époux [U] se sont mariés le [Date mariage 2] 1982, sans avoir fait précéder leur union d’un contrat de mariage, Madame [V] ayant introduit une procédure de divorce, une ordonnance de non conciliation a été rendue le 02 02 2005 et le jugement de divorce a été prononcé le 10 01 2006, Monsieur [U] n’ayant pas constitué avocat et ayant été assigné selon les dispositions de l’article 659 du code de procédure civile,

– Monsieur [U] avait acquis un fonds de commerce de papeterie librairie avec adjonction d’un bureau de tabac, il a cessé d’exercer la direction du fonds de commerce et démissionné de ses fonctions de gérant du bureau de tabac en juin 2005,

– Madame [V] a repris l’exploitation du fonds de commerce et a demandé à être désignée comme gérante du bureau de tabac ; l’autorisation lui a été donnée par lettre du 30 08 2005 et le 06 09 2005, Madame [V] a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés,

– Le 28 09 2005, la SA EUROPEENNE DE CAUTIONNEMENT (EDC) a donné son cautionnement pour les livraisons de tabacs à Madame [V] et avait pris un nantissement sur le fonds de commerce,

– en mai et juin 2005, la SA SEITA ALTADIS DISTRIBUTION avait livré du tabac pour une valeur de 54 719,89 € et un crédit de stocks avait été consenti à hauteur de 15 006 € dont elle a réclamé le paiement à Madame [V] ,

– faute de paiement, la SA SEITA ALTADIS DISTRIBUTION et la SA EDC ont assigné Madame [V] en paiement respectivement de la somme de 26 345,89 € et de celle de 43 522 €.

Par le jugement déféré du 05 06 2007, le tribunal de commerce de BOBIGNY a condamné Madame [V] à payer ces sommes, avec intérêt au taux légal à compter du 07 07 2006 outre celle de 800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, l’exécution provisoire étant ordonnée.

En cause d’appel, Madame [V] a été admise au redressement judiciaire, le 21 09 2007, un plan ayant été arrêté et M° [N] ayant été désigné commissaire à l’exécution du plan et les deux sociétés précitées ont déclaré leur créance le 23 10 2007.

M° [N], intervenant volontaire, et Madame [V], appelante, ont conclu à l’infirmation du jugement et à la condamnation des sociétés en cause à leur payer la somme de 4000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile tandis que les sociétés intimées ont conclu à la confirmation du jugement.

Par son précédent arrêt du 20 11 2009, la cour a notamment retenu que :

– la communauté a cessé d’exister à la date du 02 02 2005, Madame [V] en reprenant les dettes de l’indivision post-communautaire relativement au fonds de commerce postérieurement au départ de son mari n’a fait qu’exercer les obligations d’un indivisaire sans commettre aucune fraude aux droits des créanciers, que par application de l’article 262 du code civil, les époux étaient réputés mariés à l’égard des tiers jusqu’au 11 04 2006,

– une société de fait ne peut exister dans le cadre de la communauté légale, qui ne peut pas plus exister dans la gestion d’un débit de tabacs, les époux étant tout au plus gérants du fonds de commerce, et Madame [V], collaboratrice de son mari dans la gestion du débits de tabac,

– Madame [V] n’a pas fraudé les droits des sociétés précitées et ne s’est pas enrichie à leur détriment,

– la dette de tabac litigieuse est née du chef de Monsieur [U] et Madame [V] ne peut en être tenue que sous réserve que les commandes de tabacs par Monsieur [U] ont été faites en mai et juin 2005à une date où tant entre eux qu’à l’égard des tiers, les époux étaient mariés.

Au vu de ces motifs, la cour, avant dire droit, la clôture étant révoquée, et les dépens réservés, a invité les parties à conclure sur l’application de la règle selon laquelle le paiement des dettes dont chaque époux est tenu, pour quelque cause que ce soit, pendant la communauté, peut toujours être poursuivi, sur les biens communs et, en l’espèce, sur les biens dépendant de l’indivision post-communautaire.

Par dernières conclusions du 07 04 2011, [G] [V] appelante, et M° [N], es qualités, intervenant volontaire, ont demandé à la cour d’infirmer le jugement, de débouter les sociétés SEITA ALTADIS et EDC de toutes leurs demandes, subsidiairement, de limiter la contribution de Madame [V] à la seule moitié de la dette litigieuse, par application de l’article 1483 du code civil, en tout état de cause, de condamner solidairement ces sociétés à leur payer chacune la somme de 4000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à régler les entiers dépens.

Par dernières conclusions du 18 04 2011,les sociétés SEITA ALTADIS DISTRIBUTION et EDC, intimées, demandent à la cour de confirmer le jugement, dire qu’il y a lieu de fixer au passif de madame [V] la somme de 26 345,89 € au profit de la société SEITA ALTADIS DISTRIBUTION et celle de 43 522 € au profit de la société EDC, condamner M° [N] à payer une somme de 4000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à régler les dépens.

SUR CE

Considérant que [G] [V] et M° [N], pour critiquer le jugement sur les condamnations prononcées contre Madame [V] :

– excipent de l’absence de dettes personnelles et nées personnellement de son fait relativement à la créance invoquée, et prétendent que cette dernière ne saurait être tenue à la reprise des dettes du précédent exploitant du fonds et contestent toute existence d’une société de fait entre Madame [V] et son conjoint et toute acquisition du stock de tabac en fraude des droits des créanciers,

– contestent tout enrichissement sans cause,

– sur l’interrogation de la cour aux termes de son arrêt du 20 11 2009, prétendent que :

° eu égard aux termes de l’ordonnance de non conciliation du 02 02 2005, retenant que la cohabitation avait cessé à cette date, la dette invoquée ne s’analyse pas en une dette de la communauté et ne peut être poursuivie sur les biens dépendant de l’indivision post communautaire, qu elle ne saurait en tout état de cause être tenue de régler cette dette née du seul chef de son mari, et qui n’a pas été contractée dans l’ intérêt du ménage,

° l’action tend à sa condamnation à titre personnel à payer une créance personnelle de son ex conjoint, née du chef de son exploitation personnelle, postérieurement à l’ordonnance de non conciliation et à la séparation des époux, non souscrite au titre des dépenses du ménage ou dans son intérêt, étant précisé que cette créance n’a pas été fixée à l’encontre de Monsieur [U] faute pour les intimés d’avoir agi contre lui,

° à la date des commandes, il n’existait pas d’indivision post communautaire, qui n’a pu naître que du jugement de divorce, les dispositions de l’article 815-17 du code civil n’ayant pas vocation à s’appliquer alors que Monsieur [U] ne saurait être supposé avoir reçu mandat des autres coindivisaires

° cette dette personnelle de Monsieur [U] découle d’une fraude manifeste de l’époux débiteur au sens de l’article 1413 du code civil,

° à supposer que cette dette puisse être poursuivie sur les biens communs, la contribution de Madame [V] sera fixée à la moitié par l’application de l’article 1483 du code civil, sans que puisse lui être opposée l’absence de partage qui n’est pas de son fait mais découle de la fuite de son ex mari,

° vainement, les intimées leur reprochent de contourner les dispositions de la loi du 26 07 2005,

Considérant que les sociétés intimées répliquent que :

– rien ne s’oppose à l’existence d’une société crée de fait ou à l’apparence d’une société créée de fait entre conjoints communs en biens, le régime matrimonial étant indifférent tandis que les époux dont l’un exploite un débit de tabac peuvent s’associer dans une SNC

– la fraude consiste à faire comme si le fonds ne constituait pas le gage des créanciers de l’exploitation,

– avec raison le tribunal a retenu l’enrichissement sans cause,

– sur l’interrogation posée par la cour aux termes de son arrêt du 20 11 2009 :

° à compter du 02 02 2005,le fonds de commerce faisait partie d’une indivision post communautaire, étant observé que les commandes ont été livrées entre le quatre mai et le trois juin 2005 et constituent donc une dette de l’indivision et non une dette de la communauté née du chef de l’ un des conjoints, Madame [V] étant coobligée au paiement de la dette par application de l’article 815- 17 du code civil tandis que n’ayant fait procéder à aucun partage, elle est redevable de la totalité de la dette,

° la mention de la dissolution du mariage a pour objet de protéger les tiers, en l’espèce ils sont fondés à ne pas s’en prévaloir, puisque la situation matrimoniale leur est indifférente en sorte qu’il y a lieu de s’en tenir à la réalité de la situation matrimoniale sans s’en tenir à l’apparence,

° en l’espèce, lors de la commande de tabac, le fonds faisait partie d’une indivision post communautaire, cette commande étant faite dans l’intérêt de l’indivision pour le compte de tous les indivisaires et Madame [V] étant redevable de la dette par application de l’article 815-17 du code civil,

° si la cour retenait que le divorce n’est opposable qu’à compter de la publicité, il s’agirait alors d’une dette de la communauté de sorte que si par application de l’article 1483 du code civil, chacun des époux ne peut être poursuivi que pour la moitié des dettes qui étaient entrées en communauté du chef de son conjoint, il y a lieu d’écarter cette règle par application de l’alinéa 2 de cet article puisque Madame [V] a poursuivi l’exploitation de son conjoint sans procéder au partage de l’indivision post communautaire ;

Considérant qu’il résulte du précédent arrêt du 20 11 2009, que la cour a relativement aux créances dont s’agit, écarté les argumentations tirées, d’une part, de l’existence d’une société créée de fait entre [G] [V] et son ancien époux, d’autre part, celle d’une fraude commise par cette dernière aux droits des créanciers tant parce qu’elle aurait dissimulé sa qualité d’épouse lors de la reprise du fonds et sa désignation comme gérante du débit de tabac, que parce qu’elle aurait frauduleusement acquis le tabac en cause au nom de son mari, et enfin, celle d’ un enrichissement sans cause pour avoir vendu ce tabac ;

Considérant que cet arrêt a encore retenu que jusqu’à la date du 11 04 2006, les époux étaient réputés mariés à l’égard des tiers, que la dette en cause est née du seul chef de l’ancien époux de Madame [V], qui ne peut en être tenue, que sous réserve de l’application éventuelle des règles applicables aux régimes matrimoniaux sur laquelle il a interrogé les parties ;

Considérant qu’il résulte tant des motifs explicites de cet arrêt que de l’analyse faite par la cour qu’elle a formellement écarté l’application des règles de l’indivision et notamment de l’article 815-17 du code civil, et que la question de savoir si Madame [V] est ou non tenue de la dette en cause dépend de l’application des dispositions tant de l’article 1413 que de l’article 14 83 du code civil ;

Considérant que selon l’article 1413 du code civil, le paiement des dettes dont chaque époux est tenu, pour quelque cause que ce soit, pendant la communauté, peut toujours être poursuivi sur les biens communs, à moins qu’il n’y ait eu fraude de l’époux débiteur et mauvaise foi du créancier et sauf récompense à la communauté s’il y a lieu ;

Considérant que selon l’article 1483 du code civil :

– chacun des époux ne peut être poursuivi que pour la moitié des dettes qui étaient entrées en communauté du chef de son conjoint,

– après le partage et sauf le cas de recel, il n’en est tenu que jusqu’à concurrence de son émolument pourvu qu’il y ait eu inventaire et à charge de rendre compte tant du contenu de cet inventaire que de ce qui lui est échu par le partage ainsi que du passif déjà acquitté ;

Considérant qu’au vu des pièces produites et eu égard tant aux motifs de l’arrêt du 20 11 2009 que de ceux du précédent arrêt, et par application des dispositions combinées des articles 262, 1413 et 1483 du code civil, les créances dont se prévalent les sociétés en cause ont pour origine une dette entrée dans la communauté du chef seul de l’ex époux, laquelle peut être poursuivie sur les biens dépendant de l’indivision post communautaire, dont fait partie le fonds de commerce en ce inclus l’exploitation du débit de tabacs repris par Madame [V], mais que cette dernière, aucun partage n’ayant eu lieu, ne peut être poursuivie, conformément au premier alinéa de l’article 1483 du code civil que pour la moitié des dettes entrées dans la communauté du chef de son ex conjoint, sans que les sociétés en cause puissent pour faire échec à cette limitation utilement soutenir que les biens communs constituent le gage des créanciers de la communauté, puisque cette circonstance vise la contribution à la dette et non l’obligation à la dette, et que ces sociétés se sont abstenues de poursuivre l’ex époux de [G] [V] du chef duquel la dette est née ;

Considérant qu’eu égard à la procédure de redressement judiciaire dont fait l’objet [G] [V], il y a seulement lieu à fixation de créance, étant observé que le cours des intérêts, dont il n’est pas utilement contredit, qu’ils ont commencé à courir le 07 07 2006, est arrêté à la date de la publication du jugement d’ouverture de la procédure collective du 21 09 2007 au BODAAC ;

Considérant que, par voie de conséquence, sont fixées au passif du redressement judiciaire de [G] [V], la créance de la SA SEITA ALTADIS DISTRIBUTION pour un montant de 13172,94 € (26345,89 / 2), la créance de la SA EDC pour un montant de 21761 € (43522 / 2) avec intérêts au taux légal, dont le cours est arrêté, à la date de publication du jugement du 21 09 2007 au BODAAC à compter du 07 07 2006 ;

Considérant que les conditions d’application de au titre de l’article 700 du code de procédure civile ne sont pas réunies tant en première instance qu’en appel, le jugement étant donc réformé sur l’application de cet article ;

Considérant que Madame [V], en présence de M° [N], es qualités, est condamnée aux dépens d’appel, ceux de première instance à la charge de cette dernière étant inscrits au passif du redressement judiciaire de [G] [V] ;

PAR CES MOTIFS

Statuant au vu des précédents arrêts du 20 11 2009 et du 18 03 2011,

Infirme le jugement ;

Fixe au passif du redressement judiciaire de [G] [V] la créance de la SA SEITA ALTADIS DISTRIBUTION pour un montant de 13172,94 € (26345,89 / 2), la créance de la SA EDC pour un montant de 21761 € (43522 / 2) avec intérêts au taux légal dont le cours est arrêté à la date de publication du jugement du 21 09 2007 au BODAAC à compter du 07 07 2006, et les dépens de première instance ;

Rejette le surplus des demandes ;

Condamne [G] [V] aux dépens d’appel ;

Admet la SCP MENARD – SCELLE-MILLET au bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier P/ le Président empêché

 


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