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27 avril 2004
Cour de cassation
Pourvoi n°
03-85.141
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-sept avril deux mille quatre, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller POMETAN, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l’avocat général COMMARET ;
Statuant sur les pourvois formés par :
– X… Thierry,
– Y… Tino,
contre l’arrêt de la cour d’appel de ROUEN, chambre correctionnelle, en date du 2 juin 2003, qui, pour association de malfaiteurs aggravée, vols et tentatives de vol aggravés, les a condamnés, le premier à 7 ans d’emprisonnement, le second à 5 ans d’emprisonnement, a prononcé à leur encontre 5 ans d’interdiction des droits civiques, civils et de famille, a décerné mandats d’arrêt, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 450-1 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
“en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Thierry X… et Tino Y… coupables d’association de malfaiteurs, en répression, les a condamnés respectivement à 7 ans et 5 ans d’emprisonnement, outre l’interdiction des droits civils et civiques pour une durée de 5 ans, et a prononcé sur les réparations civiles ;
“aux motifs que les opérations de surveillance effectuées aux alentours des garages démontrent d’une manière qui n’est pas contestable que Didier Z…, Thierry X… et Tino Y… ont délibérément formé un groupement en vue de la préparation et de la commission par certains de ses membres de délits contre les biens dont certains sont punis de 10 ans d’emprisonnement ; que les vols des véhicules, la location de garages pour dissimuler les véhicules volés, la présence dans ces garages d’armes, de cagoules, de paires de gants, de gyrophares, de coupes boulon, d’un ensemble chalumeau-bouteilles, la détention de bandes adhésives pour dissimuler les numéros d’immatriculation des véhicules sont des faits matériels caractérisant une préparation à la commission d’infractions contre les biens et concrétisent une association de malfaiteurs ; qu”il est constant que plusieurs membres de cette association ont participé au vol commis le 11 janvier 1995 à Blangy-Sur-Bresle au préjudice du magasin Super U, au vol commis à Corbie le 26 mars 1995 au préjudice de M. A…, au vol commis à Aumale le 19 mars 1995 au préjudice de Mme B…, au vol commis à Pont-de-l’Arche le 12 mars 1995 au préjudice de Mme C… ;
“alors, d’une part, que I’association de malfaiteurs n’est pénalement répréhensible qu’autant qu’est constatée l’existence d’une entente établie en vue de la préparation, concrétisée par un ou plusieurs faits matériels, d’une ou plusieurs infractions qualifiées crimes ou délits graves ; que la seule énumération par la cour d’appel des objets saisis dans les garages ne caractérise pas, à la charge des prévenus, l’existence d’une entente formée en vue de commettre des délits contre les biens au sens de l’article 450-1 du Code pénal ;
“alors, d’autre part, qu’à défaut d’avoir caractérisé la volonté des prévenus de s’affilier à l’entente reprochée en vue de commettre des délits contre les biens, la cour d’appel n’a pas justifié légalement sa décision” ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-1, 121-4, 121-5, 311-1, 311-4 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
“en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Thierry X… coupable de tentative de vol, en répression, l’a condamné à 7 ans d’emprisonnement, outre I’interdiction des droits civils et civiques pour une durée de 5 ans, et a prononcé sur les réparations civiles ;
“aux motifs que les déclarations circonstanciées de Michel D… mettant en cause Thierry X… et Didier Z…, corroborées par le témoignage de son épouse Marcelle D…, et le fait que Jean-Pierre E… a reconnu par ses dessins spécifiques la cagoule trouvée dans le garage 28 comme étant celle du conducteur du véhicule Mercedes sont suffisamment probants pour retenir, en dépit de leurs dénégations, ces derniers dans les liens de la prévention, la Cour relevant de surcroît à cet égard que Didier Z…, s’il ne reconnaît pas les faits, dénonce en revanche Thierry X… comme ayant participé à ceux-ci ;
“alors qu’en déduisant des déclarations des époux D… et de M. E… la culpabilité du prévenu du chef de tentative de vol, sans établir en quoi il aurait personnellement et effectivement participé à la réalisation d’un tel délit et, par suite, en quoi il devait en être tenu pour coauteur, la cour d’appel n’a pas justifié légalement sa décision” ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-1, 311-1, 311-4 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
“en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Thierry X… coupable de vol avec circonstance aggravante de violences, en répression, l’a condamné à 7 ans d’emprisonnement, outre l’interdiction des droits civils et civiques pour une durée de 5 ans, et a prononcé sur les réparations civiles ;
“aux motifs que les déclarations de Didier Z…, qui reconnaît avoir négocié un ticket gagnant de la Française des jeux provenant du vol commis à Corbie au préjudice de M. A… le 26 mars 1995 reproché à Thierry X…, et trouvé le matin à l’intérieur d’un de ses garages, dans un véhicule utilisé au cours de la nuit par Thierry X…, alors qu’il ne pouvait pour le moins ignorer les conditions dans lesquelles les membres de cette association de malfaiteurs perpétraient les vols, sont suffisamment circonstanciées et probantes pour retenir tant ce dernier que Thierry X… dans les liens de la prévention ;
“alors, d’une part, qu’en déduisant des déclarations de Didier Z… la culpabilité du prévenu du chef de vol, sans indiquer en quoi le fait pour Didier Z… d’avoir trouvé un ticket gagnant de la Française des Jeux et de l’avoir négocié démontrerait la participation personnelle et effective de Thierry X… au vol reproché, la cour d’appel n’a pas justifié légalement sa décision ;
“alors, d’autre part, qu’en ne caractérisant ni les violences imputées au prévenu, ni la nature des blessures qui en seraient résultées sur la personne de M. A…, la cour d’appel n’a pas justifié légalement sa décision” ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-1, 311-1, 311-4, 321-1 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
“en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Tino Y… coupable de vol aggravé par des violences et Thierry X… coupable de recel, en répression, les a condamnés respectivement à 5 ans et 7 ans d’emprisonnement, outre l’interdiction des droits civils et civiques pour une durée de 5 ans, et a prononcé sur les réparations civiles ;
“aux motifs que les déclarations particulièrement circonstanciées de Socrate F…, qui prêtait habituellement à Tino Y… son fourgon J 5, dénonçant Tino Y… comme un des participants au vol commis le 19 mars 1995 à Aumale au préjudice de Mme B…, sont corroborées par la présence d’un fourgon J 5 sur les lieux du vol et, à la différence sa rétractation nullement crédible au vu des explications qu’il donne pour la justifier, ses déclarations sont suffisamment probantes pour retenir Tino Y… dans les liens de la prévention ; que Thierry X…, trouvé en possession d’un ticket de jeu en provenance de ce vol et qui n’ignorait pas les conditions dans lesquelles les membres de cette association de malfaiteurs perpétraient d’une manière habituelle les vols dans les bars PMU, sera également retenu dans les liens de la prévention ;
“alors, d’une part, qu’en qualifiant les déclarations de Socrate F… de “déclarations particulièrement circonstanciées”, cependant qu’il ressort des énonciations de l’arrêt que, interrogé par les enquêteurs, celui-ci s’est contenté d’indiquer que Tino Y… lui avait proposé des tickets de jeu à gratter en lui indiquant les avoir “pris” dans un débit de tabac, et qu’il n’avait fait le rapprochement avec le vol commis au PMU d’Aumale qu’ultérieurement, sans que Tino Y… lui en ait jamais confirmé la véracité, la cour d’appel n’a pas justifié légalement sa décision ;
“alors, d’autre part, qu’en déduisant des déclarations de Socrate F… et de la présence sur les lieux de l’infraction d’un fourgon J 5 la culpabilité de Tino Y… du chef de vol, sans établir en quoi il aurait personnellement et effectivement participé à la réalisation d’un tel délit, la cour d’appel n’a pas justifié légalement sa décision ;
“alors, en outre, qu’en ne caractérisant ni les violences imputées au prévenu, ni la nature des blessures qui en seraient résultées sur la personne de Mme B…, la cour d’appel n’a pas justifié légalement sa décision ;
“alors, enfin, que l’élément intentionnel du délit de recel consiste dans la connaissance de l’origine frauduleuse des objets recelés ; qu”en déduisant la culpabilité de Thierry X… de sa connaissance du mode opératoire habituel des “membres de cette association de malfaiteurs”, sans constater qu’il aurait eu conscience de l’origine frauduleuse du ticket de jeu trouvé en sa possession, la cour d’appel a privé sa décision de base légale” ;
“Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-1, 311-1, 311-4 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
“en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Thierry X… coupable de vol, en répression, l’a condamné à 7 ans d’emprisonnement, outre l’interdiction des droits civils et civiques pour une durée de 5 ans, et a prononcé sur les réparations civiles ;
“aux motifs que les déclarations de Didier Z… dénonçant Thierry X… comme ayant participé au vol commis le 11 janvier 1995 à Blangy-sur-Bresle dans le magasin Super U au préjudice de M. G…, à l’occasion d’un périple effectué la nuit, au cours duquel de nombreux méfaits ont été commis par les occupants du véhicule Mercedes immatriculé 6979LK76, un vol qui occupera ses auteurs longtemps puisque la façade du magasin sera détruite, le coffre-fort arraché et les véhicules utilisés abandonnés, sont corroborées par les constatations effectuées par les gendarmes lors du contrôle à 8 heures 55, les individus au nombre de quatre, dont Thierry X…, qui s’apprêtaient à monter dans un véhicule R21, paraissant fatigués et sales ;
“alors qu’en déduisant des déclarations de Didier Z… et de l’air fatigué et sale de Thierry X… en cette nuit du 11 janvier 1995 sa culpabilité du chef de vol, sans établir en quoi il aurait personnellement et effectivement participé à la réalisation d’un tel délit et, par suite, en quoi il devait en être tenu pour coauteur, la cour d’appel n’a pas justifié légalement sa décision” ;
Sur le sixième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-1, 311-1, 311-4 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
“en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Thierry X… et Tino Y… coupables de vol, en répression, les a condamnés respectivement à 7 ans et 5 ans d’emprisonnement, outre l’interdiction des droits civils et civiques pour une durée de 5 ans, et a prononcé sur les réparations civiles ;
“aux motifs que, dans la soirée du 3 octobre 1995, Tino Y…, Thierry X… et Stéphane H… ont été vus quittant le garage 28 à 20 heures à bord de la BMW avec Patrice I… pour y revenir vers 4 heures 15 ; qu’entre temps des vols ont été commis au préjudice de Mme J… (véhicule volé), de la commune de Vieux Rouen sur Bresle (véhicule, taille-haies et tronçonneuse volés), de l’Entente sportive aumaloise (200 boissons gazeuses volées) et du garage Legrand (voiture dépanneuse de marque Unic volée), le vol de la voiture dépanneuse de marque Unic ayant été commis par quatre individus circulant à bord d”une BMW ; que le témoignage de M. K… permet d’affirmer que les prévenus ont bien commis le vol de la voiture dépanneuse de marque UNIC au préjudice du garage Legrand ;
“alors qu’en déduisant des déclarations de M. K… la culpabilité des prévenus du chef de vol, sans indiquer en quoi le fait pour M. K… d’avoir vu trois individus à bord de la dépanneuse dérobée, la dépanneuse étant précédée d’une voiture de marque BMW, démontrerait la participation personnelle et effective de Thierry X… et Tino Y… au vol reproché, la cour d’appel n’a pas justifié légalement sa décision” ;
Sur le septième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-1, 311-1, 311-4 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
“en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Thierry X… et Tino Y… coupables de vols, en répression, les a condamnés respectivement à 7 ans et 5 ans d’emprisonnement, outre l’interdiction des droits civils et civiques pour une durée de 5 ans, et a prononcé sur les réparations civiles ;
“aux motifs que les constatations et les investigations effectuées par les enquêteurs, notamment au cours des surveillances opérées aux alentours des garages, permettent d’affirmer que Tino Y… a bien participé aux vols des véhicules commis au préjudice de Jean-Jacques L…, Sandrine M…, épouse N…, Fabien O…, Huguette P…, épouse Q… ; que les constatations et les investigations effectuées par les enquêteurs, notamment au cours des surveillances opérées aux alentours des garages permettent d’affirmer qu’à l’exception du véhicule dérobé le 4 septembre 1995 au préjudice de M. R… pour lequel il n’existe aucune charge à l’encontre du prévenu, Thierry X… a bien participé aux vols de tous les autres véhicules qui lui sont reprochés ;
“alors, d’une part, qu’en déduisant des constatations des enquêteurs la culpabilité des prévenus des vols dénoncés, sans établir en quoi ils auraient personnellement et effectivement participé à la réalisation de ces délits, la cour d’appel n’a pas justifié légalement sa décision ;
“alors, d’autre part, qu’en ne caractérisant pas l’acte de dégradation constitutif de la circonstance aggravante retenue contre les prévenus s’agissant des vols perpétrés au préjudice de Fabien O… et d’Huguette P…, épouse Q…, la cour d’appel n’a pas justifié légalement sa décision” ;
Sur le huitième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-1, 311-1, 311-4 du Code pénal, 388, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
“en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Thierry X… coupable de vols, en répression, l’a condamné à 7 ans d’emprisonnement, outre l’interdiction des droits civils et civiques pour une durée de 5 ans, et a prononcé sur les réparations civiles ;
“aux motifs que les constatations et les investigations effectuées par les enquêteurs, notamment au cours des surveillances opérées aux alentours des garages permettent d’affirmer qu’à I’exception du véhicule dérobé le 4 septembre 1995 au préjudice de M. R… pour lequel il n’existe aucune charge à l’encontre du prévenu, Thierry X… a bien participé aux vols de tous les autres véhicules qui lui sont reprochés ;
“alors qu’en déduisant des constatations des enquêteurs la culpabilité du prévenu des vols dénoncés, sans établir en quoi il aurait personnellement et effectivement participé à la réalisation de ces délits, la cour d’appel n’a pas justifié légalement sa décision” ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l’arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s’assurer que la cour d’appel a, sans insuffisance ni contradiction caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu’intentionnel, les délits dont elle a déclaré les prévenus coupables, et a ainsi justifié l’allocation, au profit des parties civiles, des indemnités propres à réparer le préjudice en découlant ;
D’où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l’appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;
Sur le neuvième moyen de cassation, pris de la violation des articles 132-19, alinéa 2, 132-24 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
“en ce que l’arrêt attaqué a condamné Thierry X… et Tino Y… respectivement à 7 ans (en augmentant d’un an la peine prononcée en première instance ) et 5 ans d’emprisonnement ;
“aux motifs que, au vu de la nature et de la particulière gravité des faits commis, du degré d’implication de chacun des prévenus dans la commission de ces faits et des renseignements recueillis sur la personnalité de chacun d’eux, la Cour condamne Thierry X… à la peine de 7 ans d’emprisonnement, et Tino Y… à la peine de 5 ans d’emprisonnement ;
“alors qu’en s’abstenant de motiver spécialement la peine d’emprisonnement ferme au regard tant de la gravité des faits reprochés que de la personnalité de chacun des prévenus, la cour d’appel n’a pas justifié légalement sa décision au regard de l’article 132-24 du Code pénal” ;