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21 janvier 2016
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n°
13/21439
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
8e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 21 JANVIER 2016
N° 2016/ 69
Rôle N° 13/21439
[T] [J]
[A] [F] épouse [J]
[D] [J]
C/
[O] [N] épouse [I]
Grosse délivrée
le :
à :
– Me Claude VAUDANO, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
– Me André FRANCOIS de la SCP FRANCOIS-CARREAU FRANCOIS TRAMIER DUFLOT, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de SALON-DE-PROVENCE en date du 04 Octobre 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 2013/1175.
APPELANTS
Monsieur [T] [J]
né le [Date naissance 4] 1954 à [Localité 2] (ALGERIE)
de nationalité Française,
demeurant [Localité 1]
représenté par Me Claude VAUDANO, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Madame [A] [F] épouse [J]
née le [Date naissance 2] 1955 à [Localité 5] (ALGERIE)
de nationalité Française,
demeurant [Localité 1]
représentée par Me Claude VAUDANO, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Monsieur [D] [J]
né le [Date naissance 3] 1978 à [Localité 3]
de nationalité Française,
demeurant [Localité 1]
représenté par Me Claude VAUDANO, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
INTIMÉE
Madame [O] [N] épouse [I]
née le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 4],
demeurant [Localité 1]
représentée par Me André FRANCOIS de la SCP FRANCOIS-CARREAU FRANCOIS TRAMIER DUFLOT, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 02 Décembre 2015 en audience publique. Conformément à l’article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Catherine DURAND, Conseiller, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Yves ROUSSEL, Président
Madame Catherine DURAND, Conseiller
Madame Anne CHALBOS, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Lydie BÉRENGUIER.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Janvier 2016
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Janvier 2016,
Signé par Monsieur Yves ROUSSEL, Président et Madame Lydie BÉRENGUIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Madame [O] [N] divorcée [I], propriétaire d’un fonds de commerce de papeterie, bazar, loto, dépôt de presse et gérance de débit de tabac sis à [Localité 1], a entrepris des pourparlers avec la SNC [S] et [D] [J] en formation, aux fins de cession du fonds au prix de 550.000 euros, qui n’ont pas abouti suite au refus de prêt notifié aux consorts [J] le 12 septembre 2007.
Aux termes de deux reconnaissances de dettes des 29 septembre 2008 et 10 octobre 2008 Madame [N] [I] a reconnu avoir reçu de Monsieur [J] [D], d’une part, la somme de 10.604 euros et, d’autre part, celle de 56.890 euros, soit au total 67.494 euros.
Ces deux reconnaissances de dette signées par Madame [N] précisaient que ces sommes seraient décomptées ‘du montant de la vente du fonds de commerce lors de la transaction’.
Par protocole d’accord non daté Madame [N] disait s’engager à céder la moitié de son fonds de commerce à Monsieur [D] [J] au prix de 126.000 euros, rappelant que Madame [M] [J] avait versé à Madame [N] pour le compte de [D] [J] la somme de 67.494 euros, à valoir sur le prix de cession, servant à payer les principaux fournisseurs. L’acte précisait par ailleurs que Madame [N] était seule responsable des dettes d’exploitation antérieures au 1er octobre 2008, toutes les charges postérieures de Madame [N] et de Monsieur [J] étant payées par l’exploitation et que la marge nette dégagée par l’exploitation aprés le 1er octobre 2008 serait partagée entre Madame [N] et Monsieur [J].
Ce protocole n’a pas été signé par ces parties, seul l’étant celui faxé au conseil de madame [N], Me [U], le 7 mai 2009, conclu au final entre Madame [N] et Monsieur [T] [J], relatant le prêt par [T] [J] à Madame [N] de la somme de 67.494 euros à valoir sur le prix de cession de 126.000 euros.
Cet acte précisait que la cession interviendrait ‘dès que la société SNC sera créée et dès que Madame [N] [O] obtiendra l’accord de la Société Générale pour le réaménagement des prêts contractés par elle seule pour le compte de l’exploitation’.
L’acte de cession n’est jamais intervenu.
Monsieur [D] [J] dit avoir été embauché par Madame [N] en qualité de vendeur par contrat de travail à durée déterminée et à temps partiel du 3 novembre 2008, à compter du 1er novembre 2008 jusqu’au 5 février 2009.
Dans un testament daté du 4 mai 2009, antérieur au protocole d’accord signé des deux parties, Madame [N] a reconnu être débitrice envers Monsieur [T] [J] de la somme de 67.500 euros au titre du prêt.
Par acte notarié du 13 mai 2011 Madame [N] a cédé le fonds de commerce à la SNC Le Bealet, représentée par Madame [B] [L], au prix de 500.000 euros, payé comptant sous condition de séquestre.
Madame [N] y déclarait ne pas employer de personnel pour l’exploitation du fonds.
Par exploit du 26 octobre 2012 Monsieur [T] [J], Madame [A] [F] épouse [J], Monsieur [D] [J] ont assigné en référé Madame [N] devant le président du tribunal de commerce de [Localité 4] en paiement provisionnel de la somme de 10.604 euros à [D] [J] et 124.390 euros aux époux [T] [J], demande rejetée par ordonnance du 21 décembre 2012 au motif d’une contestation sérieuse.
Par exploit du 6 février 2012 les consorts [J] ont alors assigné Madame [N] devant le tribunal de commerce de [Localité 4] en paiement des sommes de 67.494 euros à [D] [J], 67.500 euros aux époux [T] [J], 62.000 euros à titre de dommages et intérêts toutes causes confondues, tant à Monsieur [D] [J] qu’aux époux [T] [J], ainsi que de la moitié de la marge nette dégagée par l’exploitation du fonds de commerce.
Madame [N] a reconventionnellement demandé leur condamnation au paiement de la somme de 131.273, 80 euros correspondant selon elle à des sommes prélevées par ces derniers à des fins personnelles.
Par jugement du 4 octobre 2013 le tribunal de commerce a :
Dit Madame [N] recevable en sa demande reconventionnelle,
Débouté les consorts [J] de leurs demandes, fins et conclusions,
Dit qu’il y a bien une confusion entre les membres de la famille [J],
Dit que les montants de 67.474 euros et 67.500 euros ne sont pas retenus,
Dit que le montant de la créance des demandeurs s’élève à 67.494 euros,
Condamné Monsieur [T] [J], Madame [A] [F] épouse [J], Monsieur [D] [J] in solidum au paiement de la somme de 131.273,78 euros dont à soustraire celle de 67.494 euros soit un solde de 63.779,78 euros, ainsi que celle de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Par acte du 4 novembre 2013 Monsieur [T] [J], Madame [A] [F] épouse [J], Monsieur [D] [J] ont interjeté appel de cette décision.
Par conclusions responsives et récapitulatives déposées et notifiées le 12 novembre 2015, tenues pour intégralement reprises, Monsieur [T] [J], Madame [A] [F] épouse [J], Monsieur [D] [J] demandent à la cour de :
Infirmer partiellement le jugement attaqué,
Dire que les conclusions de 1ère instance de Madame [N] constituent un aveu judiciaire concernant le montant de 67.494 euros,
Dire que le fax de Me [U] du 12 janvier 2011 et le projet de protocole d’accord annexé ainsi que la reconnaissance de dette du 10 octobre 2008 annotée manuscritement par l’intimée constitue un aveu judiciaire pour la somme de 150.000 euros et à tout le moins de 91.494 euros,
Dire que la liste des mouvements bancaires des époux [J] du 24 septembre 2008 au 30 octobre 2009 et ceux de Madame [N] confirment le prêt à cette dernière d la somme de 123.167,31 correspondant aux reconnaissances de dettes des 29 septembre 2008, 10 octobre 2008 et 4 mai 2009,
Condamner Madame [N] au titre des prêts précités au paiement des sommes de 67.494 euros à [D] [J], 67.500 euros aux époux [T] [J] au titre des prêts,
La condamner au paiement de la somme de 124.000 euros aux époux [T] [J] correspondant à la différence entre le prix de vente promis par l’intimée et celui figurant dans l’acte de 13 mai 2011 ainsi que la somme de 180.889, 49 euros correspondant à la moitié de la marge nette dégagée par l’exploitation du fonds de commerce du 1er octobre 2008 au 13 mai 2011,
La condamner à communiquer touts documents comptables permettant de dégager la marge nette sous astreinte de 100 euros par jour de retard,
Subsidiairement,
Surseoir à statuer sur la marge nette en l’attente de la communication des documents comptables,
Ecarter des débats les pièces 23-1 à 23-4 et 24 produites par Madame [N],
Dire que la vente du fonds de commerce confirme l’absence de soumission de Madame [N] aux appelants,
Ecarter l’attestation de Madame [W] [N] soeur de Madame [O] [N],
Dire que les attestations de Mesdames [V], [K] et Monsieur [X], et les documents médicaux ne rapporte pas la preuve de l’abus de faiblesse allégué contre les concluants,
Dire qu’elles sont contredites par celles produites par les concluants,
Dire que les pièces communiquées par Madame [N] établies unilatéralement par elle, à l’exclusion de document comptable établissant les prélèvements prétendument indus leur sont inopposables, et ce d’autant plus qu’ils visent Monsieur [S] [J] non partie à l’instance,
Dire que le projet de protocole annexé au fax du 12 janvier 2011 ne vise aucune créance de Madame [N] sur les concluants à cette date après leur départ début janvier 2011,
Dire que les documents communiqués ne rapportent pas la preuve à la charge de Madame [N] du détournement de la somme de 131.273,78 euros,
Subsidiairement,
Prononcer la compensation entre les créances des parties,
Rejeter la demande d’expertise de l’intimée qui ne vise qu’à palier sa carence dans l’administration de la preuve,
Condamner Madame [N] à payer à chacun des appelants la somme de 6.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et demande abusive, celle de 6.000 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens.
Par conclusions déposées et notifiées le 2 octobre 2014, tenues pour intégralement reprises, Madame [O] [N] demande à la cour de :
Débouter les consorts [J] de leur appel,
Confirmer le jugement attaqué,
Subsidiairement,
Avant dire-droit,
Ordonner une expertise pour reconstituer les sommes perçues par les consorts [J],
Les condamner au paiement d’une somme de 4.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
L’affaire a été clôturée en l’état le 18 novembre 2015.
MOTIFS
Sur la créance des consorts [J] :
Attendu qu’en préambule il est précisé que si Madame [N] a été victime d’une agression l’ayant traumatisée et fragilisée sur le plan physique et psychique elle ne démontre pas avoir été victime de la part des consorts [J] d’un abus de faiblesse, n’ayant d’ailleurs déposé aucune plainte pénale pour des faits de cette sorte à leur encontre ;
Attendu en outre que les attestations qu’elle produit, émanant de membres de sa famille, d’amis et de clients, Mesdames [V], [K] et Monsieur [X], sont contredites par d’autres versées aux débats par les appelants émanant également de clients du fonds de commerce, ainsi que par celles rédigées par elle-même, son père et sa soeur dans le cadre d’un litige familial opposant Monsieur [D] [J] à son épouse, dont il résulte qu’elle était très contente du travail accompli par ce dernier pour son compte ; que divers clients ont par ailleurs témoigné de la bonne ambiance régnant dans le commerce et de la satisfaction affichée publiquement par Madame [N] de la présence de Monsieur [D] [J] à ses côtés ;
Attendu que l’abus de faiblesse invoqué n’est donc pas démontré alors qu’il apparait au demeurant que Madame [N] était en relations régulières avec son conseil de l’époque auquel elle a adressé les divers projets de protocoles par fax ;
Sur les prêts :
Attendu que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver en application de l’article 1315 du code civil ;
Attendu qu’il résulte des pièces produites que Madame [N] a envisagé de céder son fonds de commerce à des membres de la famille [J], d’abord en 2007 dans son intégralité au prix de 550.000euros, puis ultérieurement pour moitié au prix de 126.000 euros ;
Attendu qu’ayant été victime d’une grave agression fin 2007 et connaissant des difficultés dans l’exploitation de son commerce, divers accords ont été conclus avec des membres de la famille [J] prévoyant la cession à venir de la moitié du fonds de commerce et leur participation à l’exploitation du fonds de commerce ;
Attendu que [D] [J] a prêté à Madame [N] (reconnaissance de dettes des 29 septembre 2008 et 10 octobre 2008) la somme de 10.604 euros et celle de 56.890 euros, soit au total 67.494 euros ;
Attendu qu’il résulte en outre d’un contrat de travail à durée déterminée signé des parties le 3 novembre 2008 que Monsieur [D] [J] a été embauché à temps partiel par Madame [N] à compter du 1er octobre 2008 ; qu’une instance oppose actuellement les parties devant le conseil des prud’hommes de Martigues, déclaré compétent par un arrêt du 27 mars 2015 de la 9ème chambre B de la cour de céans pour connaitre des demandes de Monsieur [D] [J] en rappel de salaires et versement d’indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’existence d’un lien de subordination contestée par Madame [N] ayant été reconnue par la cour ;
Attendu qu’un projet de protocole de cession de la moitié du fonds de commerce, au bénéfice de Monsieur [D] [J] a été envisagé, notant que la somme de 67.494 euros avait été versée à Madame [N] par Madame [M] [J] pour le compte de son fils ;
Attendu qu’il n’a toutefois pas été signé entre Monsieur [D] [J] et Madame [N], celle-ci expliquant dans un fax adressé le 7 mai 2009 à son conseil, Me [U], avoir repris ce protocole et changé le nom de l’associé en accord avec Monsieur [T] [J], le notaire de celui-ci lui ayant indiqué que le testament rédigé le 4 mai 2009 par Madame [N], qui y exposait que Monsieur [T] [J] lui avait prêté la somme de 67.500 euros, était en contradiction avec ledit protocole ;
Attendu qu’au final le protocole a donc été signé entre Madame [N] et [T] [J], époux de Madame [M] [J] et père de [D] [J], Monsieur [T] [J] y étant alors désigné comme le prêteur de la somme de 67.494 euros ;
Attendu que ce protocole, qui modifie seulement le nom du cocontractant, les autres dispositions demeurant inchangées, n’est pas daté mais est joint au fax précité adressé le 7 mai 2009 par Madame [N] à son conseil ;
Attendu que les époux [J] soutiennent que deux prêts ont été consentis à Madame [N], le premier de 67.494 euros attesté par les deux reconnaissances de dettes de septembre et octobre 2008, le second de 64.500 euros ressortant des termes du testament ;
Attendu cependant que la seule mention dans le testament d’un prêt par Monsieur [T] [J] d’une somme de 67.500 euros, et non de 67.494 euros, ne suffit pas à démontrer la réalité de ce prêt, alors que Madame [N] explique avoir ainsi ‘arrondi’ la somme prêtée au tantième supérieur ;
Attendu que par ailleurs, Monsieur [D] [J] ayant consenti deux prêts à Madame [N], la mention de ‘sommes prêtées’ dans le testament ne démontre pas plus l’existence du prêt de 67.500 euros ;
Attendu que si Madame [N] y précise encore ‘A ma connaissance les sommes avancées correspondaient à un quart de la valeur du commerce’, le montant de 67.494 euros n’est pas en contradiction avec cette appréciation alors que le protocole de cession faxé le 7 mai 2009 fait état d’un prix de cession de 126.000 euros pour la moitié du fonds de commerce, soit donc d’une valorisation de 252.000 euros pour sa totalité ; que le quart de la valeur ressortant à 63.000 euros est d’un ordre de grandeur comparable à la somme de 67.494 euros ;
Attendu qu’en outre les consorts [J] ne n’établissent pas avoir réglé à Madame [N] une somme de 67.500 euros en 2008 et si la liste établie par leurs soins (pièce 25) des sommes remises en espèce ou en chèques à Madame [N] fait bien état du paiement des sommes de 58.690 euros et 10.604 euros n’y figure pas celle de 67.500 euros ;
Attendu enfin que la comparaison entre les relevés du compte bancaire des époux [J] et de celui de Madame [N] que les appelants versent aux débats, est insuffisante à prouver que toutes les sommes listées par les appelants ont été versées sur le compte de Madame [N], certaines sommes de montants non caractéristiques étant débitées sur leur compte antérieurement aux dates de remise sur le compte de cette dernière ;
Attendu qu’en tout état de cause n’y figure toujours pas celle de 67.500 euros ;
Attendu qu’il est justifié par contre, par la production du projet de protocole d’accord non suivi d’effet faxé le 12 janvier 2011 par le conseil de Madame [N] à celui des consorts [J], annoté de la main de Madame [N], que Monsieur [J] avait ‘versé un acompte de 67.494 euros’ puis ‘injecté 24.000 euros soit 91.494 euros’ ;
Attendu que ce montant de 91.494 euros figure de nouveau au bas de la copie de la reconnaissance de dette du 10 octobre 2008, annotée en 2011 par Madame [N], comme étant celui de la créance de Monsieur [J] ;
Attendu que Madame [N] a ainsi reconnu à deux reprises en 2011 devoir au total la somme de 91.494 euros aux consorts [J] comme ils le font justement valoir ;
Attendu que les appelants ne démontrent pas détenir à ce jour une créance d’un montant supérieur à l’égard de Madame [N] ;
Attendu enfin que la mention dans le grand livre de clôture, en opérations diverses, d’un apport de Monsieur [J] de 67.474 euros en septembre 2008, puis de deux apports en octobre de 56.890 euros et 10.604 euros, ne peut établir l’existence d’une créance supplémentaire de 67.474 euros à l’encontre de Madame [N], faute pour les consorts [J] de justifier là encore du paiement de cette somme de 67.474 euros, également absente de la liste détaillée des créances établie par les consorts [J] ;
Attendu qu’en conséquence Madame [N] est débitrice au titre des prêts de la somme de 67.494 euros à l’égard de Monsieur [D] [J] et de celle de 24.000 euros des époux [T] [J] ;
Sur la demande de paiement par Madame [N] de la somme de 124.000 euros :
Attendu qu’il était convenu que ces sommes viendraient en déduction du prix de vente de la moitié du fonds de commerce, vente qui n’est jamais intervenue ;
Attendu que les consorts [J] ne démontrent pas avoir mis en demeure Madame [N] de signer l’acte de cession, ni avoir constitué la SNC prévue à cette fin et ont cessé de participer à l’exploitation du fonds de commerce de Madame [N] début janvier 2011 ;
Attendu qu’ils ne peuvent utilement prétendre être créanciers de la différence entre la moitié du prix de vente du fonds de commerce intervenu en mai 2011 de 500.000 euros, donc 250.000 euros, et le prix de 126.000 euros fixé dans leur protocole d’accord pour l’achat de la moitié de ce fonds, pour demander la condamnation de Madame [N] au paiement d’une somme de 124.000 euros (250.000 – 126.000) à titre de dommages et intérêts ;
Attendu qu’ils ont été déboutés à bon droit de ce chef de demande par les premiers juges ;
Sur la demande au titre de la moitié de la marge nette :
Attendu que le protocole d’accord intervenu le 7 mai 2009 entre Madame [N] et Monsieur [T] [J] stipule ‘la marge nette dégagée par l’exploitation aprés le 1er octobre 2008 serait partagée entre Madame [N] et Monsieur [J], sauf que la part de Monsieur [J] sera diminuée par des sommes nettes qui lui seront versées au titre des salaires et les impôts qui auraient été payés par lui s’il avait perçu la moitié du bénéfice’ ;
Attendu que les conventions passées entre les parties doivent être exécutées de bonne foi ;
Attendu que cette clause instaurant une participation au profit de Monsieur [T] [J] à l’exploitation du fonds de commerce s’applique entre les parties, nonobstant l’illégalité invoquée de la société de fait qui aurait existé entre les parties selon Madame [N], dont l’existence est contestée par les consorts [J] ;
Attendu que Madame [N], qui reconnait dans ses écritures que les bénéfices de l’exploitation ont augmenté de ‘manière substantielle’ à partir de 2009 grâce à l’investissement de Monsieur [J], ne peut utilement justifier son refus de déférer à une sommation de communiquer des documents comptables aux motifs qu’elle conteste que ‘cette situation illicite puisse faire l’objet d’un apurement comptable avec le concours de la justice’ ;
Attendu que la marge nette correspond au bénéfice net tel que reporté au poste ‘résultat de l’exercice’ du compte ‘capitaux propres’, et non au résultat fiscal ;
Attendu que les bilans joints aux déclarations d’impôt sur le revenu BIC de Madame [N] versés aux débats permettent de statuer sur la demande présentée ;
Attendu qu’il en résulte qu’en 2008 ce bénéfice net est de 68.331 euros, en 2009 de 153.064 euros, en 2010 de 148.866 euros ;
Attendu que Madame [N] admet parfaitement avoir réalisé ces bénéfices nets ;
Attendu que Monsieur [J] ayant cessé de participer à l’exploitation du fonds de commerce début janvier 2011, il ne peut prétendre à aucune somme au titre de l’exercice 2011 ;
Attendu que pour les trois derniers mois de 2008 la moitié de la marge nette est de 17.082,64 euros, que pour 2009 elle est de 76.532 euros, que pour 2010 elle est de 74.433 euros, soit au total 148.047,64 euros ;
Attendu qu’il n’est pas prétendu ni démontré que Monsieur [T] [J] ait été le salarié de Madame [N] ;
Attendu que Madame [N] est débitrice à son égard de la somme de 148.047,64 euros, étant noté que dans le projet de protocole non suivi d’effet car non signé des consorts [J], faxé le 12 janvier 2011 par le conseil de Madame [N] à celui des consorts [J], celle-ci disait s’engager à lui verser 150.000 euros sur le prix de cession de 500.000 euros du fonds de commerce ;
Sur la demande reconventionnelle de Madame [N] :
Attendu que Madame [N] fait valoir que les consorts [J] se sont ‘servis’ régulièrement dans les caisses de la société, et que les dépenses personnelles opérées par le trois (les deux fils et leur père) se sont élevées à la somme de 131.273,78 euros ;
Attendu qu’elle demande la confirmation du jugement ayant condamné Monsieur [T] [J], Madame [A] [F] épouse [J], Monsieur [D] [J] in solidum au paiement de la somme de 131.273,78 euros, dont à soustraire celle de 67.494 euros, soit un solde de 63.779,78 euros ;
Attendu qu’au soutien de sa demande reconventionnelle elle verse aux débats de multiples pièces regroupées sous les numéros 23-1 à 23-4 et 24 ;
Attendu que les consorts [J] demandent le rejet de ces pièces 23-1 à 23-4 et 24 faisant valoir que le bordereau de communication ne liste pas de manière détaillée chacune des pièces figurant sous les numéros précités mais les désignent sous des intitulés vagues ‘n° 23 Documents justificatifs des débours consorts [J] imputés sur le fonds de commerce d’octobre 2008 à janvier 2011, pièce décomposée conformément à la demande des consorts [J] sous les numéros 23-1 à 23-4, n° 24, Détail des prélèvements hors trésorerie effectués par les consorts [J] à titre personnel pendant la période d’exploitation litigieuse’ ;
Attendu que l’absence d’individualisation et de numérotation de chacun des nombreux feuillets communiqués sous le numéro 23, les numéros 23-1 à 23-4 et le numéro 24 ne permet pas de déterminer les pièces communiquées contradictoirement alors que les pièces communiquées sous les numéros 23-1 à 23-4 sont manuscritement numérotées de 23-01 à… 23-224
Attendu au surplus que celles-ci constituées d’un récapitulatif de dépenses ‘[J]’ listées par Madame [N] précisant pour chacune leur nature (restaurant, carburant, prélèvement personnel…), de multiples tableaux, toujours établis par Madame [N], accompagnés de photocopies de tickets de caisse, ne permettent pas d’imputer certainement ces dépenses à une personne déterminée ;
Attendu qu’en tout état de cause il n’est pas démontré que ces dépenses ont été réalisées à l’insu et contre le gré de Madame [N] ;
Attendu qu’il n’y a pas lieu d’ordonner l’expertise sollicitée par Madame [N] pour ‘reconstituer les sommes perçues par les consorts [J]’, en interrogeant notamment les commerçants et prestataires sur l’affectation précise des dépenses inscrites en compatibilité comme elle le demande, l’expertise ne pouvant pallier la carence des parties dans l’administration de la preuve ;
Attendu que Madame [N] est en conséquence déboutée de sa demande reconventionnelle ;
Attendu que le jugement est réformé sur ce point ;
Attendu en conséquence que Madame [N] est condamnée à payer à Monsieur [D] [J] la somme de 67.494 euros, aux époux [T] [J] la somme de 24.000 euros et à Monsieur [T] [J], seul bénéficiaire du protocole d’accord du 7 mai 2009 celle de 148.047,64 euros ;
Attendu que le caractère abusif de la résistance opposée par Madame [N] au paiement des sommes réclamées par les appelants, de manière parfois désordonnée, n’étant pas démontré, il n’y a pas lieu de condamner Madame [N] au paiement de dommages et intérêts de ce chef ;
Attendu que Madame [O] [N] est condamnée au paiement d’une indemnité de 1.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Attendu que Madame [N] qui succombe au principal est condamnée aux entiers dépens ;
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement attaqué en ce qu’il a dit que les montants de 67.474 euros et 67.500 euros ne sont pas retenus,
Le réforme pour le surplus,
Statuant à nouveau,
Condamne Madame [O] [N] à payer à :
Monsieur [D] [J] la somme de 67.494 euros en remboursement de prêts,
Aux époux [T] [J] la somme de 24.000 euros en remboursement de prêts,
Monsieur [T] [J], seul bénéficiaire du protocole d’accord du 7 mai 2009, celle de 148.047,64 euros au titre de la moitié de la marge nette lui revenant,
Déboute les époux [T] [J] de leur demande de condamnation de Madame [N] au paiement de la somme de 124.000 euros et de celle de 6.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
Déboute Madame [N] de sa demande reconventionnelle et d’instauration d’expertise pour reconstituer les sommes perçues par les consorts [J],
Déboute Monsieur [D] [J] et les époux [T] [J] du surplus de leurs demandes, fins et conclusions,
Condamne Madame [O] [N] à verser aux appelants d’une indemnité de 1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne Madame [O] [N] aux entiers dépens, ceux d’appel étant recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT