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En application de l’article L 311-1 du code rural et de la pêche maritime, ‘sont réputées agricoles toutes les activités correspondant à la maîtrise et à l’exploitation d’un cycle biologique de caractère végétal ou animal et constituant une ou plusieurs étapes nécessaires au déroulement de ce cycle ainsi que les activités exercées par un exploitant agricole qui sont dans le prolongement de l’acte de production ou qui ont pour support l’exploitation. Les activités de cultures marines et d’exploitation de marais salants sont réputées agricoles, nonobstant le statut social dont relèvent ceux qui les pratiquent. Il en est de même des activités de préparation et d’entraînement des équidés domestiques en vue de leur exploitation, à l’exclusion des activités de spectacle. Il en est de même de la production, et le cas échéant, de la commercialisation, par un ou plusieurs exploitants agricoles, de biogaz, d’électricité et de chaleur par la méthanisation, lorsque cette production est issue pour au moins 50% de matières provenant d’exploitations agricoles, au prorata de la participation de l’exploitant agricole dans la structure exploitant et commercialisant l’énergie produite. Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret’.
Conformément à l’article L 411-1 du code rural et de la pêche maritime, toute mise à disposition à titre onéreux d’un immeuble à usage agricole en vue de l’exploiter pour y exercer une activité agricole définie à l’article L. 311-1 est régie par les dispositions relatives aux statuts du fermage et du métayage. Cette disposition est d’ordre public.
Ainsi, pour déterminer la nature juridique du contrat, il convient de s’attacher aux termes mêmes du contrat, et plus particulièrement à la clause de destination des biens loués, et non uniquement à l’usage que le preneur en fait, en tenant compte de la volonté commune des parties.
Enfin, lorsque l’accord des parties dissimule une convention sous des apparences ne correspondant pas à la réalité, les juges doivent restituer à l’opération sa qualification avec toutes les conséquences qui en découlent.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 21/00939 – N° Portalis DBVH-V-B7F-H7BO
CS
TRIBUNAL PARITAIRE DES BAUX RURAUX DE NIMES
29 janvier 2021
RG :51-17
S.A.R.L. REYRANGLADE
C/
Société FORESTALIA RENOVABLES
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
2ème chambre section B
ARRÊT DU 09 MAI 2023
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal paritaire des baux ruraux de NIMES en date du 29 Janvier 2021, N°51-17
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Corinne STRUNK, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre
Mme Corinne STRUNK, Conseillère
M. André LIEGEON, Conseiller
GREFFIER :
Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l’audience publique du 14 Mars 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 09 Mai 2023.
Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.
APPELANTE :
S.A.R.L. REYRANGLADE
immatriculée au RCS de NIMES sous le n° 775 871 668
représentée par son gérant en exercice
[Adresse 12]
[Adresse 12]
Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LEXAVOUE NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Julien FORGET de la SELARL TERRESA, Plaidant, avocat au barreau de LYON
INTIMÉE :
Société FORESTALIA RENOVABLES SL
prise en la personne de son dirigeant en exercice domicilié audit siège
[Adresse 8]
[Adresse 14]
[Adresse 14] (ESPAGNE)
Représentée par Me Julien DUMOLIE de la SELARL CABINET DEBEAURAIN & ASSOCIÉS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Statuant en matière de baux ruraux après convocation des parties par lettres simples et lettres recommandées avec avis de réception du 13 avril 2022.
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre, le 09 Mai 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.
EXPOSE DU LITIGE :
La société Forestalia est une société de droit espagnol dont les activités sont liées aux énergies renouvelables, comprenant notamment la fabrication de biomasse bois dans le domaine des bio-énergies par l’utilisation de déchets verts (feuillages), qu’elle propose ensuite à la vente.
Pour ce faire, elle produit de la biomasse issue d’arbres de différentes essences, en particulier des eucalyptus et des peupliers, dont elle réalise la plantation, ce qui nécessite d’importantes superficies de terres agricoles.
Au cours de l’année 2015, elle s’est ainsi rapprochée de la SARL La Reyranglade, représentée par M. [F] [Y], pour conclure un « contrat de prestation de services » consistant en la mise à disposition de parcelles sur les communes de [Localité 15] et de [Localité 10], pour réaliser la plantation d’arbres.
Ce contrat était conclu pour une durée de 15 ans et prévoyait notamment la mise à disposition d’un ensemble de parcelles représentant 395ha 04a 47ca moyennant le règlement d’une redevance à la société La Reyranglade d’un montant de 600 euros par an et par hectare réglable pour 50% du montant annuel par hectare au 1er janvier de chaque année et pour 50% du montant global annuel par hectare au 1er juillet de chaque année .
Par courrier du 16 août 2017, la société La Reyranglade mettait en demeure la société Forestalia de lui régler la somme de 142.216,09 euros selon une facture n°170112-120G à l’échéance du 1er juillet 2017. Une nouvelle mise en demeure était adressée le 6 septembre 2017 pour le règlement de trois autres factures.
Par requête du 21 septembre 2017, la société Forestalia Renovables SL a saisi le Tribunal paritaire des baux ruraux pour voir requalifier le contrat de prestation de services en bail rural sur le fondement de l’article L 411-1 du code rural et de voir dire que le bail est d’une durée de 9 années complètes et consécutives, ainsi que de voir fixer les fermages conformément aux arrêtés préfectoraux avec la désignation préalable d’un expert judiciaire afin de proposer le fermage.
Concomitamment, sur saisine de la société Forestalia Renovables SL, le juge des référés de [Localité 13] a, par une ordonnance rendue le 21 février 2018, homologué l’accord transactionnel établi entre les parties aux termes duquel:
– la société Forestalia Renovables SL s’est engagée à payer les factures EDF et ASA, et de mise à disposition des terres en cours et à venir;
– le GFA [Y] Frères, le GFA du Mas de la Vinasse et la SARL La Reyranglade se sont engagés à laisser libre accès au domaine et aux parcelles, au logement de fonction, d’assurer le fonctionnement du système d’irrigation, pompes et fournitures d’électricité, de laisser les clés et télécommandes à disposition de Forestalia.
Par la suite, sur saisine de la société Forestalia Renovables SL, le juge des référés de [Localité 13] a, par une ordonnance rendue le 11 juillet 2018, a :
-condamné la société La Reyranglade à laisser pénétrer la société Forestalia Renovables SL dans le domaine et dans le logement de fonction qui y est implanté, et ce, sous astreinte de 100 euros par infraction constatée ;
-condamné le GFA [Y] Frères, le GFA du Mas de la Vinasse et la SARL La Reyranglade à remettre par l’intermédiaire de Me [U], huissier de justice à [Localité 7], les clés des quatre stations de pompage internes à la propriété et la clé de la station de pompage du bord du Rhône dans un délai de 4 mois ;
-ordonné une expertise judiciaire confiée à M. [A] [Z], chargé notamment de décrire les parcelles plantées et louées, y compris les jeunes plants en attente de mise en terre, leur état, les dégâts constatés….
Par une décision avant dire-droit rendue le 31 juillet 2019, le tribunal paritaire des baux ruraux de Nîmes a :
-ordonné la réouverture des débats à l’audience du 18 avril 2019 ;
-ordonné à la société La Reyranglade de produire les documents ou éléments établissant l’existence d’une convention l’autorisant à exploiter comme « agriculteur » les parcelles dont sont propriétaires selon l’annexe 4 du contrat de prestation de services le GFA [Y] Frères et le GFA de la Vinasse ;
-ordonné à la société La Reyranglade de mettre en cause dans la présente instance les deux GFA ;
-décidé de surseoir à statuer sur les demandes jusqu’à la date de l’audience.
Sur appel de cette décision interjeté par la société La Reyranglade ainsi que le GFA [Y] et le GFA la Vinasse, la cour constatait, dans un arrêt du 12 novembre 2019, l’irrecevabilité de l’appel au motif que la décision attaquée est un jugement avant-dire droit, et condamnait les appelants au paiement d’une somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement contradictoire du 29 janvier 2021, le tribunal paritaire des baux ruraux de Nîmes a :
-constaté que la société La Reyranglade est propriétaire des parcelles concernées par le contrat de prestation de services à effet au 3 septembre 2015 et mises à la disposition de la société Forestalia Renovable SL ;
-dit mettre hors de cause le GFA [Y] Frères et le GFA Mas de la Vinasse ;
-requalifié le contrat dénommé « contrat de prestations de services » à effet au 3 septembre 2015, qui a été conclu entre la société Forestalia Renovable SL et la société La Reyranglade, en bail rural par application de l’article L 411-1 du code rural ;
-dit que la société Forestalia Renovable SL est titulaire d’un bail rural portant sur les parcelles appartenant à la société La Reyranglade d’une superficie de 395ha 04a 47ca déterminées à l’annexe 3 du contrat prenant effet rétroactivement au 3 septembre 2015, date de prise d’effet du contrat requalifié pour une durée de 9 années et arrivant à échéance le 3 septembre 2024 ;
-ordonné une expertise judiciaire confiée à M. [S] [D] aux fins de proposer un fermage conforme à l’article L 411-11 ainsi qu’aux minima et maxima préfectoraux;
-ordonné à la société La Reyranglade de permettre à la société Forestalia Renovables SL d’obtenir un contrat d’abonnement et de fourniture d’électricité à son nom, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de l’expiration du délai de recours du présent jugement ;
-ordonné à la société La Reyranglade de lui remettre l’ensemble des clés des quatre stations de pompage comportant la station de pompage principale dans le Rhône et celles internes à la propriété sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l’expiration du délai de recours;
-condamné la société La Reyranglade à payer la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, réservant une éventuelle demande supplémentaire après expertise, et à payer les dépens de l’instance, qui comprendront les frais de constats d’huissier des 15 septembre 2017, 20 octobre 2017, 15 février 2018, 6 juin 2018 et 19 septembre 2018;
-dit n’y avoir lieu à exécution provisoire de la décision.
Ce jugement a été notifié par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 26 février 2021 et reçu au greffe de la cour le 27 février 2021.
Suivant lettre recommandée avec accusé de réception en date du 4 mars 2021 et reçue au greffe de la cour le 8 mars 2021, la société La Reyranglade a interjeté appel du jugement rendu en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a mis hors de cause le GFA [Y] et LE GFA de la Vinasse.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 10 mars 2023, la société La Reyranglade, appelante, demande à la cour, au visa des articles L 331-2 et L.411-1 du code rural ainsi que des articles 70, 564 et 567 du code de procédure civile, de :
-réformer le jugement entrepris sauf en ce qu’il a mis hors de cause le GFA [Y] et LE GFA de la Vinasse;
Et statuant à nouveau,
-rejeter la pièce adverse n°31;
-dire et juger recevable l’appelante en ses demandes subsidiaires et reconventionnelles en nullité ou résiliation du bail et condamnation de l’intimée au paiement de dommages et intérêts et remise en état des lieux du fait de cette nullité ou résiliation;
-dire et juger recevables et opposables les pièces n°20, 22, 46, 49 et 50;
A titre principal,
-dire que l’article L 311-1 du code rural ne vise pas l’activité de production de biomasse ;
-juger que l’activité, objet du contrat et résultant de son exécution, consiste en une activité d’exploitation forestière exclue du champ d’application du statut du fermage,
-juger qu’en tout état de cause :
les obligations mises à la charge de l’agriculteur dans le contrat de prestation de services démontrent qu’il appartient à la société appelante d’exploiter les parcelles, objet des plantations d’eucalyptus ;
qu’eu égard aux dispositions contractuelles la société Forestalia Renovables SL n’a pas vocation à intervenir sur le cycle biologique des plantations réalisées:
que la société Forestalia Renovables SL n’a ni effectué directement, ni ordonné et financé l’intervention des prestataires de services pour la réalisation des installations d’irrigation et la plantation des arbres;
la société Forestalia Renovables SL ne justifie pas avoir directement exercé sur les immeubles, objets du contrat, des actes d’exploitation agricole au sens des dispositions des articles L 311-1 et L 411-1 du code rural ;
que la société intimée n’avait, de par son objet statutaire, pas qualité pour conclure un bail rural ni exercer une quelconque activité agricole ;
que la société appelante assure une parfaite exploitation du site, mettant tout en ‘uvre à cet effet, tant du point de vue personnel que des matériels ;
que le contrat ne prévoit pas la concession d’une jouissance exclusive des parcelles à la société intimée ;
-dire et juger en conséquence que le contrat de prestation de services conclu entre les parties ne peut être requalifié en contrat de bail à ferme soumis au statut du fermage ;
-dire que le contrat de prestations de services signé entre les parties doit s’appliquer selon ses seules dispositions contractuelles ;
A titre subsidiaire,
-requalifier le contrat en contrat d’intégration au sens des dispositions des articles L 326-6 et suivants du code rural entre la société Forestalia Renovables SL, en qualité d’industriel, et la société la Reyranglade, en qualité d’agriculteur ;
A titre infiniment subsidiaire, et si la cour confirme la qualification de bail rural :
-juger que le consentement de l’appelante était vicié par les man’uvres dolosives de la société intimée ;
-juger que la société intimée n’a pas capacité eu égard à son objet social, ni à exercer une activité de production agricole, ni à exercer une activité soumise à autorisation administrative sans obtention préalable ;
En conséquence,
-prononcer la nullité du contrat de bail rural ;
-condamner la société intimée à lui verser à titre de dommages et intérêts, l’ensemble des sommes représentatives des coûts qu’elle a engagés pour un montant correspondant à l’ensemble des factures émises jusqu’à la date de décision de la cour ;
-ordonner à la société intimée de remettre à ses frais, les parcelles, objet du litige, en leur état initial en arrachant l’ensemble des plantations sous un délai de 3 mois suivant le rendu de l’arrêt et passé ce délai sous indemnité de 1 000 euros par jour de retard et à supporter les coûts qui seraient engagés par elle pour cette remise en état ;
A défaut de prononcé de la nullité du contrat,
-prononcer la résiliation du bail pour cession prohibée ;
-ordonner en conséquence à la société intimée de remettre à ses frais, les parcelles, objet du litige, en leur état initial en arrachant l’ensemble des plantations sous un délai de 3 mois suivant le rendu de l’arrêt et passé ce délai au versement d’une indemnité de 1000 euros par jour de retard et à supporter les coûts qui seraient engagés par elle pour cette remise en état ;
En tout état de cause,
-débouter la société intimée de toutes ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires outre appel incident;
-condamner la société intimée à restituer l’ensemble des clés des stations de pompage;
-condamner la société intimée aux entiers dépens de première instance et d’appel comprenant le coût des constats d’huissier des 5 octobre 2017, 5 septembre 2019 et 16 juin 2021, et à régler la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de son appel, et à titre liminaire, la société La Reyranglade explique qu’aux termes du contrat de services, l’intimée était chargée exclusivement de la plantation et de la récolte tandis que pour sa part, elle devait exploiter les parcelles notamment en assurant leur culture et leur irrigation, ce qui n’a d’ailleurs jamais été contestée par la société Forestalia Renovables SL, qui a respecté son obligation de paiement.
Ce n’est qu’à partir de 2017 que les relations se sont dégradées et que l’intimée a considéré que l’exploitation des parcelles n’incombait pas à la société La Reyranglade alors qu’elle avait jusqu’à cette date régler les factures sans aucune réserve. C’est dans ce contexte que l’appelante a refusé l’accès des parcelles à la société Forestalia Renovables SL pour toutes autres interventions que celles prévues au contrat à savoir la plantation et la récolte. L’appelante explique le revirement de position de la société Forestalia Renovables SL par des éléments d’ordre économique et non juridique.
A cet égard, la société La Reyranglade expose que la société Forestalia Renovables SL avait conclu un contrat pour céder l’ensemble de la biomasse produite, sur le site en cause, à la centrale thermique de [Localité 11]. Cependant, sur jugement rendu le 8 juin 2017 par le tribunal administratif de Marseille, l’autorisation d’exploiter cette centrale a été annulée occasionnant pour l’intimée des pertes, qui ne sauraient lui être imputées.
Cela est si vrai que les premiers impayés interviennent à compter de l’été 2017 pour être suivis de la saisine du tribunal paritaire des baux ruraux pour tenter de faire supporter pour partie ses pertes économiques à l’appelante par l’obtention de la requalification du contrat en bail rural.
Elle affirme par ailleurs que l’absence de nouvelles plantations n’est en rien liée à une quelconque obstruction de sa part quant à l’accès aux parcelles, mais s’explique par l’absence d’installation d’une 5ème station de pompage économiquement impossible.
En réponse à l’argumentation développée par l’intimée, elle dénonce de nombreuses inexactitudes et indique que l’ordonnance de référé du 21 février 2018 ne lui a jamais fait obligation de laisser les clés des stations de pompage de sorte qu’elle n’a jamais fait obstruction aux décisions de justice. Sur la deuxième ordonnance, elle affirme que la remise des clés a été constatée par exploit d’huissier dressé le 6 septembre 2018.
Elle conteste par ailleurs le fait que l’intimée n’aurait pas procédé à la plantation de l’ensemble des superficies louées dans la mesure où 337 ha ont été plantées sur une surface totale de 395 ha. Enfin, sur les coupures d’électricité, elle les explique par les fortes précipitations survenues en septembre 2017.
En premier lieu, sur les incidents de procédures, elle sollicite le rejet de pièces non traduites qui au dernier stade de la procédure ne concerne plus que le document n°31.
Elle conclut en faveur de la recevabilité des demandes reconventionnelles qui se rattachent aux prétentions originaires, à savoir la contestation de la requalification du contrat litigieux et de ses conséquences. Par ailleurs, l’exception de nullité soulevée pour la première fois en appel est également recevable conformément à une jurisprudence constante.
Sur la recevabilité des pièces produites en appel, la société La Reyranglade considère pour la pièce n°50 que l’attestation produite se montre respectueuse des dispositions des articles 202 et suivants du code de procédure civile. S’agissant des procès-verbaux de constat d’huissier, elle sollicite le rejet d’une telle demande dans la mesure où elle conteste la qualité de preneur à l’intimée.
Au fond et à titre principal, sur la qualification de bail rural retenue par la première juridiction, elle dénonce une erreur de droit contestant pour sa part la réalisation par la société Forestalia Renovables d’actes d’exploitation agricole dans l’exécution du contrat.
En effet, seule une exploitation forestière peut être constatée sur les parcelles considérées rappelant que l’article L 411-1 du code rural ne s’applique pas aux concessions et conventions portant sur l’utilisation des forêts ou bien soumis au régime forestier, ce qui est le cas de la production de biomasse.
Elle dénonce par ailleurs l’absence de lien entre la PAC et le statut de fermage considérant qu’aucune conséquence juridique ne peut être tirée de la perception d’aides dans le cadre de la PAC.
Par ailleurs, elle souligne que la société Forestalia Renovables SL confond la production de biomasse avec celle de biogaz visée par l’article L 311-1 du code rural, qui est inapplicable au cas d’espèce. Sur ce point, elle considère que l’activité de production de biogaz pour être agricole doit être réalisée par un exploitant agricole ou une structure détenue majoritairement par des exploitants agricoles, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Dès lors, l’activité de production de biomasse n’est pas une activité agricole au sens de l’article L 311-1 du code rural.
Elle ajoute que la plantation de peupliers, dont l’exploitation poursuit un but industriel, est considérée par la jurisprudence comme une plantation forestière ne pouvant se voir appliquer le statut du fermage. Elle considère donc que les parcelles cadastrées [Cadastre 9], [Cadastre 6], [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 4] à [Cadastre 5] ne peuvent bénéficier d’un bail rural.
La même conclusion s’impose pour les plantations d’eucalyptus, qui relèvent d’une exploitation forestière. L’appelant souligne que l’absence de récolte durant ces 6 années conforte l’existence d’une exploitation forestière et exclut la notion de ‘taillis à très courte rotation’. Sur ce point, le défaut de récolte ne lui est pas imputable, mais s’explique par l’absence de débouchés.
La requalification en bail rural est également exclue en l’absence d’exploitation agricole au sens sur l’article L411-1 du code rural, et de dispositions contractuelles exprimant cette volonté de la part des parties, les obligations contractuelles incombant à chacune des parties étant clairement déterminées par les articles 4 et 5.
Il n’est pas plus justifié de l’existence d’actes d’exploitation agricole émanant de la société Forestalia Renovables SL qui ont été réalisés par ses soins comme en témoignent les factures réglées par l’intimée (traitement phytosanitaire, irrigation, entretien des parcelles, broyage’). S’agissant des factures émises par la Sarl d’Alain produites par la société Forestalia Renovables SL, elle assure qu’elles correspondent à des travaux de plantations uniquement. Elle souligne enfin que cette exploitation persiste en dépit du litige qui les oppose.
Elle s’interroge pour conclure sur la valeur probante de ces factures, dont l’examen démontre qu’elles sont émises au nom de la société Forestalia France, alors que cette société n’est pas partie au contrat de prestation de services, tout comme celles d’ailleurs qu’elle a émises en exécution du dit contrat. Il s’ensuit que ces factures ne peuvent justifier l’exercice d’une activité agricole par Forestalia Renovables SL.
Par ces factures, l’intimée reconnaît qu’aucun acte d’exploitation n’est directement assumé ni même financé par elle, puisque les travaux de plantation et d’installation d’irrigation ont été exécutés par la société D’Alain et une société espagnole pour le compte d’un tiers, la société Forestalia France, alors même que de son côté, elle a assuré des actes d’exploitation post plantation consistant à l’entretien, le broyage, les traitements phytosanitaires….qu’elle démontre au moyen de diverses factures.
S’agissant du mauvais état des plantations d’eucalyptus, il n’est pas lié à un défaut d’exploitation des parcelles par l’appelante mais s’explique par l’état du sol, la qualité et l’état des plants, ou à la modification de l’écoulement des eaux des parcelles. L’appelante dénonce également une mauvaise stratégie de la part de Forestalia, qui n’a pas suivi les mises en garde d’experts.
Pour finir sur cette question, la société La Reyranglade dénonce l’incapacité juridique de la société intimée de réaliser des activités agricoles et de conclure un bail rural jusqu’au 10 mars 2021, puisque son objet social ne lui permettait pas. Il s’ensuit que l’intimée n’avait pas la capacité juridique pour conclure un bail rural à la date du 3 septembre 2015. Elle expose en dernier lieu sur cette question son incapacité à réaliser une activité agricole pour défaut d’autorisation administrative de sorte qu’elle n’aurait pas pu conclure un bail rural portant sur une surface de 395 ha.
A défaut, si l’exercice d’une activité agricole est retenu, l’appelante souligne l’absence de jouissance exclusive pour le preneur, l’appelante ayant exploité les parcelles libres pour son propre compte. Or, la conclusion d’un bail rural soumis au statut du fermage suppose la concession d’une jouissance exclusive au profit du preneur.
A titre subsidiaire, elle réclame la reconnaissance d’un contrat d’intégration en application de l’article L 326-6 du code rural eu égard à la qualité des parties et la nature des prestations contractuelles.
A titre infiniment subsidiaire et si la qualification de bail rural est retenue, elle conclut en faveur de la nullité du contrat se prévalant :
– au visa de l’article 1108 du code civil d’un vice du consentement dans la mesure où son intention n’a jamais été de contourner le statut du fermage ni de consentir la jouissance exclusive de ses terres en propriété à l’intimée pour qu’elle exploite une activité agricole. Elle se réfère pour l’essentiel à la documentation faite par la société Forestalia Renovables SL de son activité, qui a bien été produite au moment de la signature du dit acte en dépit des allégations de la société intimée ;
– du défaut de capacité de l’intimée pour conclure un bail rural, l’activité de production agricole n’étant pas prévue dans son objet social;
– de l’incapacité de la société Forestalia Renovables SL à réaliser cette activité pour défaut d’autorisation administrative.
Dans cette hypothèse, elle demande le paiement des coûts engagés jusqu’à la date de l’arrêt ainsi que la remise en état des parcelles.
Pour finir, l’appelante réclame la résiliation du bail rural aux torts exclusifs de l’intimée pour cession prohibée en application des articles L 411-31 et 441-35 du code rural considérant que ce bail a été cédé à la société Forestalia France jusqu’en août 2017.
Elle réclame enfin le rejet de la demande relative à la restitution des clés qui ont déjà été remises comme l’a constaté l’huissier de justice le 19 septembre 2018.
Aux termes de ses conclusions notifiées le 13 mars 2023, la société Forestalia Renovables SL, en sa qualité d’intimée et d’appelant sur incident, demande à la cour, au visa des articles L 411-1, L 411-11, L 411-12 du code rural et l’article 12 du code de procédure civile, de :
-déclarer irrecevables et inopposables les pièces adverses n° 20, 22, 46, 49 et 50;
-déclarer irrecevables comme étant nouvelles les demandes présentées par la société La Reyranglade au visa de l’article 564 du code de procédure civile, à savoir :
* la nullité du bail au visa de l’article L 331-6 du code rural ou des articles 1109 et 1116 du code civil;
* la résiliation du bail au visa de l’article L 411-35 du code rural;
* les demandes tendant à solliciter la condamnation de l’intimée à verser l’ensemble des sommes représentatives des coûts engagés par la société La Reyranglade pour un montant correspondant à l’ensemble des factures émises jusqu’à la date de l’arrêt de la cour;
* les demandes tendant à la condamner à remettre les parcelles dans leur état initial et en procédant à l’arrachage des plantations sous une indemnité de 1.000 euros par jour de retard;
-plus généralement, débouter l’appelante de l’ensemble de ses demandes;
-confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf à rajouter à la mission d’expert les années 2018, 2019, 2020, 2021 et 2022;
-y ajoutant, condamner l’appelante à rembourser les frais de constats d’huissier des 16 juillet 2019, 17 juillet 2019 et 21 juillet 2020;
-débouter l’appelante de son appel et de l’intégralité de ses demandes;
-la condamner aux entiers dépens en cause d’appel ainsi qu’à la somme de 7.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses écritures, et sur les incidents de procédure, elle affirme avoir produit des pièces traduites en français en sorte que le grief adressé par l’appelante n’est plus d’actualité.
Elle réclame le prononcé de l’irrecevabilité des demandes en nullité du bail présentées au visa des articles L 331-6 du code rural et 1109 puis 1116 du code civil, de résiliation du bail ou de remise en état des parcelles et enfin celles relatives au coût des sommes engagées par l’appelante, en application de l’article 564 du code de procédure civile, car s’agissant de nouvelles prétentions présentées pour la première fois en appel.
Sur le rejet des pièces, elle le justifie par les conditions dans lesquelles ont été établis les divers procès-verbaux dressés par l’huissier de justice dans la mesure où elle ne l’a pas autorisé à pénétrer dans les lieux loués.
Sur la question de son incapacité juridique à réaliser des actes d’exploitation agricole ou de conclure des contrats à cette fin jusqu’au 10 mars 2021, date de modification de l’objet social, elle répond que la profession du preneur est indifférente à l’application du statut du fermage.
Au fond, la société Forestalia Renovables SL sollicite la requalification du contrat dénommé ‘contrat de prestation de services’ en bail rural considérant que le contrat du 3 septembre 2015 est un bail à ferme déguisé destiné à se soustraire au statut du fermage. Elle expose qu’à la suite de la saisine du tribunal paritaire des baux ruraux, la société La Reyranglade s’est opposée à son entrée dans la propriété louée au moyen d’actes de menaces et de violences, situation qui persiste malgré les procédures engagées en référé.
Pour justifier de cette requalification, elle se prévaut du préambule du contrat, qui porte sur une activité de production et de fourniture de biomasse, de la liste des parcelles mises à disposition dans l’annexe 3, le paiement d’une redevance fixe de 600 euros par hectare et par an, étant rappelé qu’elle a réalisé la plantation et la production outre que la revente de la production de biomasse est réalisée à son strict bénéfice.
Elle dénonce par ailleurs l’obstruction persistante de la société La Reyranglade malgré les décisions de justice, celle-ci persistant à maintenir coupée l’électricité faisant fonctionner les pompes d’irrigation.
Elle conteste de plus l’existence d’une exploitation forestière, considérant que son activité consiste au prélèvement de feuillages et de tiges provenant de peupliers et d’eucalyptus en vue de leur transformation en biomasse, qui correspond ainsi à une production à courte rotation, qui est le propre d’une activité agricole conformément à l’article L 311-1 du code rural.
La preuve est que cette activité est éligible à la PAC, que l’appelante perçoit à cet égard des primes PAC et que le contrat mentionne expressément les cycles de production. De nombreux termes du contrat et l’activité rappellent les dispositions de l’article L 311-1 du code rural. Le caractère agricole des plantations à courte rotation est pour elle indéniable.
Elle avance, par ailleurs, réunir les conditions posées par l’article L 411-1 du code rural :
-avec la mise à disposition du foncier d’une superficie de 395 ha 04a 47 ca sur lequel sont réalisées les plantations des peupliers et eucalyptus, confirmées par l’intitulé des factures émises par l’appelante;
-la maîtrise de la production en amont par la plantation et l’entretien des plants et en aval par la revente de la biomasse;
-la rédaction des dispositions contractuelles, qui se réfèrent de manière explicite à l’activité agricole exercée uniquement par l’intimée.
Pour le surplus, elle estime que la fourniture de l’eau n’est que l’accessoire indispensable à la location des terres. De même, elle n’a jamais sollicité l’appelante pour une mission de conseil. Elle souligne de plus que les factures produites par la société La Reyranglade ne correspondent pas à des travaux de culture mais permettant la mise à disposition de terres en état de recevoir des plantations sans traces de cultures antérieures, étant précisé que les parcelles étaient avant le bail à ferme exploitées en rizière.
L’intimée conteste enfin la valeur probante et la pertinence du constat d’huissier produit par l’appelante indiquant que celui-ci a été réalisé alors qu’elle venait d’être chassée par la société la Reyranglade et qui lui était fait interdiction d’accéder à la propriété. Elle rappelle que les pompes d’irrigation ont cessé de fonctionner à compter du mois d’octobre 2017.
Pour finir, l’intimée justifie de l’effectivité de son exploitation par l’existence de l’emploi d’un personnel propre pour assurer l’exploitation du site dont la présence est attestée par les nombreux procès-verbaux d’huissier dressés de 2017 à 2020, le recours à des prestataires de services comme la société D’Alain portant sur des travaux de plantation, de préparation des sols, de désherbage et d’entretien contestant à ce titre l’implication de la société la Reyranglade à des travaux de mise en place des plants ou d’entretien. S’agissant des travaux d’irrigation, elle en assurait la gestion jusqu’à son éviction.
Sur la jouissance exclusive des parcelles, elle considère que l’occupation de certaines parcelles par l’appelante pour y cultiver de la luzerne est contraire aux dispositions contractuelles, qui ne prévoient aucun partage quant à l’utilisation des parcelles. Elle explique que si toutes les plantations n’ont pas été effectuées, c’est uniquement en raison de l’opposition manifestée par l’appelante, qui l’a empêchée de procéder à la plantation de 50.000 plants qui devait être effectuée en septembre 2017.
Sur la demande en requalification en contrat d’intégration au sens de l’article L 326-6 du code rural, elle la conteste indiquant que ce contrat lie un producteur agricole à une société commerciale ou industrielle ce qui n’est pas le cas en l’espèce, l’appelante ne réalisant aucun acte de production.
Enfin, elle soutient que les textes n’ont jamais prévu que la reconnaissance d’un bail rural soit soumise au contrôle des structures, tel que le revendique l’appelante.
Les conséquences de cette requalification tiennent en la fixation d’un fermage conforme avec effet au 3 septembre 2015, au rejet de charges supplémentaires qui ne peuvent augmenter le fermage, à la durée du bail, à la remise des clés des différentes stations de pompage.
En réponse au moyen relatif au dol, elle souligne l’absence de preuve de manoeuvres dolosives de sa part ayant conduit la société La Reyranglade à la signature du contrat alors même que les parties étaient assistées d’un conseil pour la rédaction de l’acte litigieux.
Sur la demande de résiliation du bail pour cession prohibée, elle affirme que la société Forestalia Renovables est la seule et unique titulaire du bail, ainsi que l’exploitant des parcelles étant précisé que le bailleur ne démontre nullement l’abandon de l’exploitation au profit de la société Forestalia France.
L’affaire a été retenue à l’audience du14 mars 2023.
Il est expressément renvoyé aux conclusions déposées par les parties pour un exposé complet de leurs moyens et prétentions.
MOTIFS :
I. Sur la procédure :
– Sur le rejet de la pièce n° 31 à la demande de la Sarl Reyranglade :
L’appelante réclame à la cour d’écarter la pièce 31 au motif que ce document correspond à une traduction partielle d’une pièce originale non produite de manière intégrale rappelant à cet égard que le juge est fondé à écarter comme élément de preuve un document écrit en langue étrangère faute de production en langue française ou de traduction par une personne assermentée.
La pièce 31 correspond à la traduction partielle du contrat de vente et d’installation du système d’irrigation étant précisé que le document originel n’est pas produit de sorte qu’il sera fait droit à la demande de rejet présentée par l’appelant en l’absence de toute possibilité de vérifier l’authenticité de cette traduction.
– Sur le rejet des pièces 20, 22, 46, 49 et 50 à la demande de Forestalia Renovables SL :
L’intimée réclame le rejet de ces pièces qui correspondent à des procès-verbaux de constat d’huissier réalisés sans qu’elle ait donnée l’autorisation à son cocontractant de pénétrer sur les parcelles listées au contrat.
En l’état, si le contrat litigieux prévoit la possibilité pour la société Forestalia Renovables d’exploiter les parcelles visées à l’annexe 3, aucune mention portée à la convention ne fait interdiction à ‘l’agriculteur’ de pénétrer sur lesdites parcelles alors que celui-ci peut être chargé de la réalisation de certaines prestations à la demande du prestataire.
Cette prétention sera donc rejetée.
– Sur la recevabilité des demandes nouvelles :
L’article 564 du code de procédure civile énonce qu’à peine d’irrecevabilité relevée d’office, « les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait».
L’article 565 du même code indique que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.
La cour de cassation considère que ne sont pas nouvelles et partant sont recevables, les demandes qui tendent aux mêmes fins que celles présentées devant les premiers juges même si leur fondement juridique est différent (com 19 juin 2019 n°18-11.798). Il importe peu de changer de moyens y compris de présenter un fondement juridique différent, seul le but recherché importe (civ 3e, 4 mai 2000 n° 98-14.014).
Il résulte de l’application combinée des articles 564, 565 et 566 du code de procédure civile que les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions, sauf si ces dernières tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge ou si ces prétentions étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises au premier juge et en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément.
En appel, la société Forestalia Renovables SL soulève l’irrecevabilité des demandes présentées par la société La Reyranglade au visa de l’article 564 du code de procédure civile, qu’elle considère comme étant nouvelles à savoir:
-la nullité du bail au visa de l’article L 331-6 du code rural ou des articles 1109 et 1116 du code civil;
-la résiliation du bail au visa de l’article L 411-35 du code rural;
-les demandes tendant à solliciter la condamnation de l’intimée à verser l’ensemble des sommes représentatives des coûts engagés par la société La Reyranglade pour un montant correspondant à l’ensemble des factures émises jusqu’à la date de l’arrêt de la cour;
-les demandes tendant à la condamner à remettre les parcelles dans leur état initial et en procédant à l’arrachage des plantations sous une indemnité de 1.000 euros par jour de retard;
En l’état, ces demandes ne sauraient être qualifiées de nouvelles car étant la conséquence de la requalification de la convention litigieuse en bail rural.
Il convient dès lors de constater la recevabilité de ces prétentions et de dire que le moyen soulevé par l’intimée sera, en conséquence, écarté.
– Sur la recevabilité de l’exception de nullité :
Il est constant que la demande tendant à l’annulation d’un contrat est une exception de nullité qui est recevable pour la première fois en cause d’appel puisqu’elle tend à faire échec à la requalification du contrat contesté en bail rural.
Cette demande est donc recevable en appel.
II. Sur la demande de requalification du « contrat de prestation de services » en bail rural :
En application de l’article L 311-1 du code rural et de la pêche maritime, ‘sont réputées agricoles toutes les activités correspondant à la maîtrise et à l’exploitation d’un cycle biologique de caractère végétal ou animal et constituant une ou plusieurs étapes nécessaires au déroulement de ce cycle ainsi que les activités exercées par un exploitant agricole qui sont dans le prolongement de l’acte de production ou qui ont pour support l’exploitation. Les activités de cultures marines et d’exploitation de marais salants sont réputées agricoles, nonobstant le statut social dont relèvent ceux qui les pratiquent. Il en est de même des activités de préparation et d’entraînement des équidés domestiques en vue de leur exploitation, à l’exclusion des activités de spectacle. Il en est de même de la production, et le cas échéant, de la commercialisation, par un ou plusieurs exploitants agricoles, de biogaz, d’électricité et de chaleur par la méthanisation, lorsque cette production est issue pour au moins 50% de matières provenant d’exploitations agricoles, au prorata de la participation de l’exploitant agricole dans la structure exploitant et commercialisant l’énergie produite. Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret’.
Conformément à l’article L 411-1 du code rural et de la pêche maritime, toute mise à disposition à titre onéreux d’un immeuble à usage agricole en vue de l’exploiter pour y exercer une activité agricole définie à l’article L. 311-1 est régie par les dispositions relatives aux statuts du fermage et du métayage. Cette disposition est d’ordre public.
Ainsi, pour déterminer la nature juridique du contrat, il convient de s’attacher aux termes mêmes du contrat, et plus particulièrement à la clause de destination des biens loués, et non uniquement à l’usage que le preneur en fait, en tenant compte de la volonté commune des parties.
Enfin, lorsque l’accord des parties dissimule une convention sous des apparences ne correspondant pas à la réalité, les juges doivent restituer à l’opération sa qualification avec toutes les conséquences qui en découlent.
En l’espèce, au cours de l’année 2015, la société Forestalia Renovables SL a signé avec la société La Reyranglade un « contrat de prestation de services » consistant en la mise à disposition de parcelles sur les communes de [Localité 15] et de [Localité 10] pour réaliser la plantation d’arbres.
Si les parties ont qualifié ledit contrat de ‘prestation de services’, la juridiction n’est nullement tenue par les termes choisis et doit restituer à l’opération prévue à la convention sa qualification exacte notamment en appréciant les clauses contractuelles à la lumière des articles L 311-1 et L411-1 du code rural et de la pêche maritime.
Il est exposé en préambule du dit contrat que ‘ la société Forestalia Renovables SL a pour activité la production et la fourniture de biomasse pour le secteur industriel et tertiaire… Elle s’est rapprochée d’agriculteurs et/ou propriétaires de terres agricoles en France en vue d’établir une relation durable de collaboration pour produire de la biomasse’.
Ce contrat a été conclu pour une durée de 15 ans, qui correspond à 7 cycles de production, et porte les informations suivantes:
-la mise à disposition au profit de la société Forestalia Renovables SL, dit le ‘prestataire’, d’un ensemble de parcelles représentant 395ha 04a 47ca, listées à l’annexe 3 de la convention, moyennant le règlement d’une redevance à la société La Reyranglade d’un montant de 600 euros par an et par hectare réglable pour 50% du montant annuel par hectare au 1er janvier de chaque année et pour 50% du montant global annuel par hectare au 1er juillet de chaque année ;
-la durée du premier cycle de production, entre la plantation et la première récolte, est d’une durée de trois ans, et pour les cycles suivants, d’une récolte à une autre, est de deux ans;
-les parcelles doivent être utilisées pour accueillir des plants d’eucalyptus et de peupliers fournis par la société Forestalia Renovables SL ;
-l’implantation de tout le matériel d’irrigation, la fourniture des plants et les plantations d’arbres sur les 395 hectares incombent à la société Forestalia, les arbres restant également sa propriété ;
-le prestataire sera exclusivement chargé de la récolte, qui interviendra la troisième année pour le premier cycle de production, et la deuxième année pour les cycles de production suivants; il assurera également le transport et le stockage des produits récoltés dans les locaux prévus à cet effet;
-la société Forestalia devait supporter les frais de production, les aléas culturaux et commerciaux, les factures d’électricité correspondant à la consommation permettant de faire fonctionner les pompes d’irrigation ainsi que les cotisations des différentes ASA.
Cette convention définit les obligations opposables à la société La Reyranglade, dénommée ‘l’agriculteur’, comme suit:
-il doit cultiver les plants sur les parcelles de terre listées dont l’agriculteur a la jouissance pour en être le propriétaire ou locataire (article 5.1)
-il doit garantir au prestataire l’absence d’obstacle juridique à l’utilisation de ces parcelles, notamment si ces parcelles font l’objet d’un bail rural (en particulier autorisation du bailleur);
-la première année d’exécution du contrat, l’agriculteur pourra réaliser les travaux suivants, si le prestataire lui demande:
* désherber totalement les terres …;
* réaliser un passage de sous-soleuse;
* labourer les terres entre 25 et 40 cm de profondeur selon les prescriptions du prestataire;
* affiner les 25 premiers centimètres par un passage de herse rotative;
– après les opérations d’implantation des cultures, et si le prestataire lui demande, il devra:
* réaliser régulièrement un sarclage mécanique entre les lignes de plantation dès que la végétation menace le bon développement des boutures…
* réaliser ou faire réaliser un traitement phytosanitaire sur les plantations en cas d’attaque importante de ravageurs ou de maladie compromettant le rendement des cultures, le traitement phytosanitaire sera choisi d’un commun accord…;
-il est chargé de mettre à disposition des pompes pour que le prestataire dispose d’une quantité d’eau et d’un débit d’eau nécessaire pour irriguer les cultures sur l’ensemble des terres (station de pompage du Rhône);
-il met gratuitement,à disposition du prestataire un bureau et un logement, et l’autorise à utiliser les installations de conditionnement existantes ou à en construire de nouvelles, qui resteront acquises à l’agriculteur en fin de bail ;
-il prendra à sa charge la fourniture et l’installation des câbles électriques pour assurer l’alimentation des points de pompage.
L’agriculteur s’engage à réaliser ou faire réaliser l’ensemble des prestations susvisées dans les règles de l’art, avec tout le soin que l’on peut attendre d’un professionnel du secteur.
Enfin, l’annexe 2 prévoit que les prestations réalisées par l’agriculteur, ainsi que la fourniture du carburant, d’électricité, de l’engrais, des produits phytosanitaires, de l’eau, des cotisations des ASA sont facturées par l’agriculteur au prestataire au prix coûtant sans marge pour les produits sur la base d’une facture semestrielle avec justificatif des produits qu’il a réglés, et s’agissant des services, sur la base d’une facture semestrielle établie à partir des heures de travail réalisées.
Le bail rural suppose la réunion de quatre éléments à savoir la mise à disposition à titre onéreux d’un immeuble agricole avec pour destination voulue d’y exercer une activité agricole définie à l’article L 311-1.
Le critère de la mise à disposition de terres agricoles implique nécessairement que les terres soient exclusivement données en jouissance au preneur.
En l’occurrence, à la lecture du contrat, les parties ont convenu de la mise à disposition à titre onéreux de parcelles à usage agricole, telles qu’énumérées à l’annexe 3, représentant une surface de 395ha 04a 47ca, moyennant le paiement d’une redevance fixe à la société La Reyranglade d’un montant de 600 euros par an et par hectare , soit une somme annuelle de 237.026,82 euros HT telle qu’elle résulte des factures produites aux débats pour les années 2016 et 2017.
L’article 5 de la convention laisse entendre que l’exploitation de ces terres est exclusivement consentie à la société Forestalia Renovables SL puisque la société Reyranglade doit garantir au ‘prestataire’ l’absence d’obstacle juridique à l’utilisation des parcelles. Il n’est par ailleurs nullement prévu au contrat que l’appelante assure une exploitation agricole concurrente sur lesdites parcelles.
Il est donc justifié de la mise à disposition de terres agricoles de manière exclusive au bénéfice de la société Forestalia Renovables SL et ce à titre onéreux.
S’agissant de l’existence d’une activité agricole, les parcelles sont destinées à recevoir la plantation d’eucalyptus et de peupliers pour produire de la biomasse bois par l’utilisation de déchets verts (feuillages) qu’elle propose ensuite à la vente. La biomasse représente les produits composés d’une matière végétale agricole ou forestière susceptible d’être employée comme combustible en vue d’utiliser son contenu énergétique et n’est pas de ce fait assimilable avec la production de biogaz visée par l’article L 311-1 du code rural, comme indiqué par l’appelant.
Cela étant, le seul fait, que l’activité de biomasse ne soit pas expressément mentionnée à l’article susvisé, ne suffit pas à l’exclure du bénéfice de la qualification d’activité agricole.
La plantation d’eucalyptus et de peupliers en vue de produire des déchets verts caractérise un cycle de production débutant par la plantation et se terminant par la récolte suivie de sa vente, et peut de ce fait être qualifiée d’activité agricole, car elle correspond à la maîtrise et à l’exploitation d’un cycle biologique court de caractère végétal.
Elle ne peut être qualifiée d’activité forestière, comme le soutient l’appelante, car l’objet de la convention ne porte pas en effet sur la production de bois en vue de procéder à son abattage et à sa commercialisation, opération qui implique un cycle de production beaucoup plus long.
L’existence d’une activité agricole est donc justifiée.
Sur la qualité de l’intimée, la société La Reyranglade dénonce l’incapacité juridique de la société Forestalia Renovables SL de réaliser des activités agricoles. Cet argument est inopérant puisque la profession du preneur est en elle-même indifférente à l’existence d’un bail rural. Il a ainsi été jugé qu’il n’est pas indispensable que le preneur soit agriculteur de profession, ni que l’agriculture soit son activité principale.
Ceci étant, la question de l’existence d’actes d’exploitation agricole émanant directement de la société Forestalia Renovables SL se pose. Pour obtenir la requalification du contrat en bail rural, il est nécessaire en effet de démontrer que celui, qui a à sa disposition des terres à vocation agricole et ce à titre onéreux, assure l’exploitation exclusive des dites parcelles en assurant la direction effective et autonome de l’activité agricole.
Il résulte en effet des dispositions de l’article L 411-35 du code rural et de la pêche maritime que le cessionnaire du bail, doit, comme tout repreneur, se consacrer immédiatement à l’exploitation du bien et participer aux travaux sur les lieux de façon effective et permanente.
Il s’en déduit que pour revendiquer la qualité de preneur dans le cadre d’un bail rural, il est nécessaire de justifier de l’exercice d’une activité agricole, qui suppose l’exploitation directe du bien et la participation aux travaux agricoles sur les lieux de façon effective et permanente.
Or, la société Forestalia Renovables SL ne justifie pas de l’exploitation du fonds dans les conditions susvisées.
A cet égard, la propriété des plantations ainsi que le droit de plantation et de récolte ne peuvent suffire à qualifier le contrat en bail rural dans la mesure où rien ne démontre que la société Forestalia Renovables SL ait participé aux travaux agricoles de façon effective et permanente.
En effet, la convention fait reposer sur l’agriculteur la charge des travaux agricoles avec possibilité de déléguer l’entretien des parcelles ou de sous-traiter ces missions à un tiers.
Aux termes du contrat litigieux, si le ‘prestataire’ assume la fourniture des plants, la plantation et la récolte, aucune disposition contractuelle ne lui confie de manière exclusive l’entretien des parcelles.
Ainsi, l’article 5.2 de la convention intitulé ‘travail du sol avant la plantation’ dispose que ‘la première année d’exécution du contrat, l’agriculteur pourra réaliser les travaux suivants si le prestataire lui demande: désherber totalement les terres …; réaliser un passage de sous-soleuse; labourer les terres entre 25 et 40 cm de profondeur selon les prescriptions du prestataire; affiner les 25 premiers centimètres par un passage de herse rotative’. De même, les parties ont prévu la possibilité pour ‘l’agriculteur’, si le ‘prestataire’ en fait la demande, la réalisation, ‘ après les opérations d’implantation des cultures,…de réaliser régulièrement un sarclage mécanique entre les lignes de plantation dès que la végétation menace le bon développement des boutures…de réaliser ou faire réaliser un traitement phytosanitaire sur les plantations en cas d’attaque importante de ravageurs ou de maladie compromettant le rendement des cultures, le traitement phytosanitaire sera choisi d’un commun accord…’.
Or, il est justifié par la société Reyranglade de la réalisation de travaux agricoles relatifs à la préparation des terres agricoles et à des travaux d’entretien comme en attestent les quatre factures produites aux débats qui ont été émises les 6 novembre 2015, 5 janvier 2016, 19 décembre 2016 et 1er juillet 2017 (pièces 15 à 18) et qui font état des prestations suivantes :
– traitement, passage griffon rizière, pelle mécanique, passage rotovator, réalisation d’une 3ème station de pompage.
Par ailleurs, pour justifier d’actes d’exploitation directe, l’intimée produit une attestation du PDG de la société Forestalia renovables SL, M. [O] [M] (pièce 49 intimée) témoignant de l’emploi de M. [E] [K], expert en eucalyptus en soutien du chef de culture (2015), M [B] [N], directeur filiale cultures énergétiques et en relation avec l’entrepreneur de travaux agricoles, et enfin M. [W] [L], chef de culture, en charge de la plantation, de l’irrigation et l’organisation du travail. Elle indique par ailleurs que ses employés résident sur les lieux dans un logement de fonction mis à disposition par le bailleur. Ils se prévalent enfin des procès-verbaux de constat d’huissier, qui témoignent de leur présence sur l’exploitation.
En l’état, il n’est produit aucun contrat de travail permettant de s’assurer de l’emploi effectif des dits salariés ainsi que leur fonction au sein de la société Forestalia Renovables SL. Quand bien même, ces trois salariés représenteraient les intérêts de l’intimée sur le lieu d’exploitation, leur seule présence ne peut témoigner de la participation de la société Forestalia renovables aux travaux agricoles de façon effective et permanente.
Il est en effet établi que les nombreuses prestations sont confiées en leur totalité à un sous-traitant confirmant l’absence d’actes directs d’exploitation agricole de la part de l’intimée.
En effet, il s’avère que des travaux de préparation des sols, de plantation et d’entretien (sous solage, désherbage, griffon, traitement désherbant, glacer…) ont été réalisés par la SARL D’ALAIN pour le compte de la société Forestalia France comme en attestent les factures émises au cours de l’année 2016 et 2017 produites aux débats (pièce 27 – appelante) ce que reconnaît d’ailleurs l’intimée dans un courrier adressé à la société La Reyranglade le 26 avril 2018 (pièce 25).
Il s’ensuit que les travaux relatifs à la plantation des peupliers et eucalyptus ainsi que l’entretien des parcelles sont confiés à un sous-traitant de sorte que la société Forestalia Renovables SL ne justifie nullement de l’exécution directe de travaux agricoles.
En troisième lieu, il s’avère que l’ensemble des factures produites aux débats est adressé à la société Forestalia France tant en ce qui concerne le règlement des redevances que des frais annexes ou des travaux agricoles et ce dès le début de l’exécution de la convention, ce qui interroge sur l’identité de la personne morale qui dirige et commande lesdits travaux.
Or, la société Forestalia France n’est pas partie au contrat et il n’est pas justifié que la société Forestalia Renovables SL, dont le siège social est localisé à Madrid, ait pour dénomination sociale Forestalia France avant la mise à jour des statuts intervenus le 12 juin 2020.
En l’état, l’intimée ne démontre pas l’existence d’un acte d’exploitation qu’elle a assuré directement ou même financé.
Enfin, et en dernier lieu, l’objet social initial de la société Forestalia Renovables SL n’est en rien lié à l’exploitation directe de biens agricoles pour porter essentiellement sur une activité commerciale liée à la production et la revente d’énergie ‘verte’.
Pour rappel, l’objet social de la société intimée est initialement défini comme suit:
a/ l’acquisition par tous moyens, l’administration, la gestion, la direction, la jouissance et l’aliénation d’actions et participations représentant le capital de tous types de sociétés, d’obligations ou tous autres titres;
b/ la prestation de services de conseil, gestion, soutien et direction en matière commerciale, financière, administrative, comptable, fiscale, immobilière et d’organisation d’entreprises commerciales et industrielles;
c/ l’étude, la promotion, la construction et la location de tous types de propriétés rurales et urbaines, dont hôtels et constructions, pour son propre compte ou pour le compte de tiers; l’exploitation, l’acquisition, la transformation et la transmission de tous types de propriétés sous toutes les formes permises par la loi, ainsi que leur division ou leur réunion; l’exécution pour son compte ou pour le compte de tiers , de tous types d’ouvrages;
d/ la production, la vente et commercialisation d’énergie électrique d’origine renouvelable, tel que l’exploitation et le développement de projets en lien avec les énergies renouvelables (éoliennes, photovoltaïques et de tous autres types).
(pièce 44-appelante).
Ainsi, lors de la conclusion de la convention litigieuse, l’objet social de la société Forestalia Renovables SL était orienté vers une activité commerciale consistant notamment en la vente d’énergies renouvelables mais nullement dans le sens d’une exploitation agricole, ce qui constitue un obstacle à la demande de requalification en bail commercial du contrat en cause.
Ceci est d’autant plus vrai que la société Forestalia France a fait le choix de modifier ses statuts, après l’introduction de la présente instance, pour apporter à son objet social l’activité de production agricole et ce en 2021 (pièce 37-2 appelante)
Ainsi, en l’absence de preuve de la réalisation par la société Forestalia Renovables d’actes d’exploitation agricole dans l’exécution du contrat et eu égard à son objet social initial incompatible avec l’exercice d’une activité de production agricole, il ne saurait être fait droit à la demande de requalification.
Le jugement déféré sera infirmé en toutes ses dispositions en ce compris celle relative à l’organisation d’une expertise judiciaire.
III. Sur la restitution des clés des stations de pompage :
La société La Reyranglade sollicite en appel la condamnation de la société Forestalia Renovales SL à lui restituer l’ensemble des clés des stations de pompage.
Cette demande n’est toutefois nullement justifiée.
Le contrat de services fait en effet obligation à l’agriculteur de mettre à disposition des pompes pour que le prestataire dispose d’une quantité d’eau et d’un débit d’eau nécessaire pour irriguer les cultures sur l’ensemble des terres (station de pompage du Rhône). Il n’est nullement fait interdiction au prestataire dans cette convention d’accéder auxdites pompes, ce dernier devant pouvoir procéder librement à l’irrigation des plantations ce qui implique un accès à la station de pompage.
Cette demande sera donc rejetée.
IV. Sur les demandes accessoires :
Le jugement entrepris sera infirmé sur le sort des dépens et celui de l’article 700 du code de procédure civile.
L’intimée, qui succombe, sera condamnée aux entiers dépens qui comprendront le coût des procès-verbaux dressés à la demande de la société La Reyranglade les 5 octobre 2017, 9 septembre 2019 et 16 juin 2021 par Me Laget, en vue d’établir des éléments de preuve nécessaires au soutien de ses prétentions.
L’équité commande qu’il soit accordé à l’appelante la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Rejette les exceptions de procédure présentées par la société Forestalia Renovables SL,
Rejette la pièce n°31 produite aux débats par la société Forestalia Renovables SL,
Infirme le jugement rendu le 29 janvier 2021 par le tribunal paritaire des baux ruraux de Nîmes en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Rejette la demande de requalification en bail rural présentée par la société Forestalia Renovables SL,
Déboute la société La Reyranglade de la demande relative à la remise des clés de la station de pompage,
Condamne la société Forestalia Renovables SL à payer à la SARL La Reyranglade la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles,
Condamne la société Forestalia Renovables SL aux entiers dépens qui comprendront le coût des procès-verbaux dressés à la demande de la société La Reyranglade les 5 octobre 2017, 9 septembre 2019 et 16 juin 2021 par Me Laget.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE