Refus de titre de séjour : la non réception de plis postaux

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Refus de titre de séjour : la non réception de plis postaux

M. B, ressortissant algérien né le 23 février 1973, est entré en France en dernier lieu le 23 septembre 2020 sous couvert d’un permis de résidence espagnol valable jusqu’au 8 février 2024. Il a sollicité le 23 septembre 2020 la délivrance d’un certificat de résidence en qualité d’étranger malade. M. B demande l’annulation de l’arrêté du 26 mars 2021 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l’a obligé à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours en fixant le pays de destination.

 

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REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 3 décembre 2021, le 10 décembre 2021 et le 22 avril 2022, M. D B, représenté par Me Sadek, demande au tribunal :

1°) d’annuler l’arrêté du 26 mars 2021 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l’a obligé à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours en fixant le pays de destination ;

2°) d’enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour d’un an portant la mention ” vie privée et familiale ” en raison de son état de santé, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B soutient que :

– la requête est recevable ;

– l’arrêté attaqué est signé par une autorité incompétente ;

– l’arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;

– le préfet n’a pas procédé à un examen complet de sa situation ;

– il appartient au préfet de communiquer l’avis émis par le collège de médecins de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) ;

S’agissant de la décision de refus de séjour :

– la décision attaquée a été prise à l’issue d’une procédure irrégulière, dès lors qu’il n’est pas justifié que l’avis émis par le collège de médecins de l’OFII ait été rendu dans les conditions fixées par les articles 3 et 4 de l’arrêté du 27 décembre 2016, ni que le collège de médecins disposait de l’ensemble des éléments relatifs à son état de santé ;

– le préfet s’est estimé à tort lié par l’avis du collège de médecins de l’OFII ;

– les pathologies dont il souffre ne peuvent être prises en charge en Algérie ;

– la décision attaquée est entachée d’une erreur manifeste dans l’appréciation de sa situation ;

S’agissant de l’obligation de quitter le territoire français :

– il ne pouvait faire l’objet d’une obligation de quitter le territoire français, dès lors qu’il est protégé ;

– la décision attaquée viole les stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

S’agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

– la décision attaquée est illégale par voie de conséquence de l’illégalité de l’obligation de quitter le territoire français ;

– le traitement des pathologies dont il est atteint ne peut être pris en charge en Algérie ;

– il a fixé le centre de ses intérêts privés et médicaux en France.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 janvier 2022, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que la requête est irrecevable comme tardive.

M. B a été admis au bénéfice de l’aide juridictionnelle totale par une décision du 16 novembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

– l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

– le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

– le code des postes et des communications électroniques ;

– le code des relations entre le public et l’administration ;

– la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

– l’arrêté du 7 février 2007 pris en application de l’article R. 2-1 du code des postes et des communications électroniques et fixant les modalités relatives au dépôt et à la distribution des envois postaux ;

– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.

Le rapport de Mme A a été entendu au cours de l’audience publique.

Considérant ce qui suit

:

1. M. B, ressortissant algérien né le 23 février 1973, est entré en France en dernier lieu le 23 septembre 2020 sous couvert d’un permis de résidence espagnol valable jusqu’au 8 février 2024. Il a sollicité le 23 septembre 2020 la délivrance d’un certificat de résidence en qualité d’étranger malade. M. B demande l’annulation de l’arrêté du 26 mars 2021 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l’a obligé à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours en fixant le pays de destination.

2. D’une part, aux termes de l’article L. 512-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de l’arrêté attaqué : ” I. L’étranger qui fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 3°, 5°, 7° ou 8° du I de l’article L. 511-1 ou sur le fondement de l’article L. 511-3-1 et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II de l’article L. 511-1 ou au sixième alinéa de l’article L. 511-3-1 peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l’annulation de cette décision, ainsi que l’annulation de la décision relative au séjour, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d’interdiction de retour sur le territoire français ou d’interdiction de circulation sur le territoire français qui l’accompagnent le cas échéant. () “.

3. D’autre part, aux termes de l’article 5 de l’arrêté du 7 février 2007 pris en application de l’article R. 2-1 du code des postes et des communications électroniques et fixant les modalités relatives au dépôt et à la distribution des envois postaux : ” En cas d’absence du destinataire à l’adresse indiquée par l’expéditeur lors du passage de l’employé chargé de la distribution, un avis du prestataire informe le destinataire que l’envoi postal est mis en instance pendant un délai de quinze jours à compter du lendemain de la présentation de l’envoi postal à son domicile ainsi que du lieu où cet envoi peut être retiré () “.

4. En cas de retour à l’administration, au terme du délai de mise en instance, du pli recommandé contenant la décision, la notification est réputée avoir été régulièrement accomplie à la date à laquelle ce pli a été présenté à l’adresse de l’intéressé, dès lors du moins qu’il résulte soit de mentions précises, claires et concordantes portées sur l’enveloppe, soit, à défaut, d’une attestation du service postal ou d’autres éléments de preuve, que le préposé a, conformément à la réglementation en vigueur, déposé un avis d’instance informant le destinataire que le pli était à sa disposition au bureau de poste. Compte tenu des modalités de présentation des plis recommandés prévues par la réglementation postale, doit être regardé comme portant des mentions précises, claires et concordantes suffisant à constituer la preuve d’une notification régulière le pli recommandé retourné à l’administration auquel est rattaché un volet ” avis de réception ” sur lequel a été apposée la date de vaine présentation du courrier et qui porte, sur l’enveloppe ou l’avis de réception, l’indication du motif pour lequel il n’a pu être remis.

5. Il ressort des pièces du dossier que l’arrêté attaqué du 26 mars 2021, qui mentionne les voies et délais de recours, a été adressé le 30 mars 2021 à M. B à la Croix rouge française où il est domicilié, 10 avenue du Grand Ramier à Toulouse. Ce courrier, présenté le 1er avril 2021 à cette adresse, qui est identique à celle figurant sur la demande de titre de séjour présentée par le requérant et à celle mentionnée sur sa requête, est revenu portant la mention ” pli avisé et non réclamé ” le 19 avril 2021. Le requérant ne saurait sérieusement soutenir ne pas avoir été informé du dépôt de ce pli, du fait de l’absence de mention sur l’adresse d’un numéro de boite postale, alors au demeurant que les services préfectoraux mentionnent ce numéro sur l’arrêté du 26 mars 2021. Ainsi, le délai de recours dont disposait M. B pour contester l’arrêté attaqué a commencé à courir le 1er avril 2021, date de présentation du pli contenant cet arrêté et non le 19 avril 2021, comme le soutient à tort le requérant. La demande d’aide juridictionnelle étant elle-même tardive, comme n’ayant été formée par M. B que le 19 mai 2021, soit après l’expiration du délai de recours de trente jours fixé par les dispositions précitées de l’article L. 512-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, n’a pas été de nature à prolonger le délai de recours. Il en résulte que la fin de non-recevoir opposée par le préfet de la Haute-Garonne et tirée de la tardiveté des conclusions dirigées contre l’arrêté du 26 mars 2021 doit être accueillie.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. B doit être rejetée, en ce compris ses conclusions à fin d’injonction sous astreinte et celles tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. D B, à Me Sadek et au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l’audience du 7 mars 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Héry, présidente,

Mme Soddu, première conseillère,

Mme Biscarel, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 mars 2023.

La présidente-rapporteure,

F. A

L’assesseure la plus ancienne,

N. SODDU

La greffière,

M. C

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme :

La greffière en chef,


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