Droit du Numérique : Tribunal Administratif de Cergy-Pontoise, 1ère Chambre, 21 mars 2023, 2010895

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Droit du Numérique : Tribunal Administratif de Cergy-Pontoise, 1ère Chambre, 21 mars 2023, 2010895

d’intérêt général ainsi que d’équipements publics et d’équipement commercial, en tenant compte en particulier des objectifs de répartition géographiquement équilibrée entre emploi, habitat, commerces et services, d’amélioration des performances énergétiques, de développement des communications électroniques,

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 23 octobre 2020 et un mémoire, enregistré le 31 mai 2021, l’association ” Collectif d’Elu.e.s pour le climat, contre le Terminal 4, extension Roissy CDG (C.E.C.C.T.4.) “, la commune d’Andilly, la commune de Chaumontel, la commune de Deuil-la-Barre, la commune de Epinay-sur-Seine, la commune de Franconville, la commune de Gennevilliers, la commune de L’Ile-Saint-Denis, la commune de Saint-Denis, la commune de Saint-Leu-la-Forêt, la commune de Saint-Prix, la commune de Sevran, la commune de Stains, la commune de Taverny et la commune de Villetaneuse, ayant pour avocat la SAS Huglo Lepage Avocats, demandent au tribunal :

1°) d’annuler la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle la communauté d’agglomération Roissy Pays de France a approuvé le schéma de cohérence territoriale (SCoT) applicable à son territoire, ensemble la décision de rejet de leur recours gracieux en date du 24 août 2020 tendant au retrait de cette délibération ;

2°) de mettre à la charge de la communauté la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

– la délibération a été prise au terme d’une enquête publique entachée d’irrégularité ;

– elle méconnaît les dispositions de l’article L. 101-2 du code de l’urbanisme, de l’accord de Paris du 12 décembre 2015 et de l’article L. 100-4 du code de l’énergie.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 26 novembre 2020, le 10 mai 2021 et le 9 novembre 2022, communauté d’agglomération Roissy Pays de France représentée par la SELARL Soler-Couteaux et associés, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge des requérantes la somme de 6 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens.

Elle fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 5 mars 2021, les communes d’Andilly et de Franconville déclarent se désister de leurs requêtes.

Par un mémoire enregistré le 6 avril 2021 la commune de Taverny déclare se désister de sa requête.

Par un mémoire enregistré le 28 avril 2021 la commune d’Arcueil, la commune d’Asnières-sur-Oise, la commune de Boissy L’Aillerie, la commune de Chauconin-Neufmontiers, la commune d’Eaubonne, la commune d’Ezanville, La commune du Plessis-Bouchard, la commune de Moisselles, la commune de Pierrefitte-sur-Seine, l’établissement public territorial Plaine Commune et la commune de Villiers-le-Sec déclarent intervenir en demande à l’appui de la requête.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 19 décembre 2022 par ordonnance du 28 novembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

– l’accord de Paris du 12 décembre 2015 ;

– le code de l’énergie ;

– le code de l’urbanisme ;

– le code de l’environnement ;

– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Après avoir entendu au cours de l’audience publique :

– le rapport de M. Baude, rapporteur,

– les conclusions de M. Louvel, rapporteur public,

– et les observations de Me Huck, représentant la communauté d’agglomération Roissy Pays de France.

Considérant ce qui suit

:

1. L’association ” Collectif d’Elu.e.s pour le climat, contre le Terminal 4, extension Roissy CDG (C.E.C.C.T.4.) ” et autres demandent au tribunal administratif d’annuler la délibération du conseil de la communauté d’agglomération Roissy Pays de France du 19 décembre 2019 par laquelle celui-ci a approuvé le schéma de cohérence territoriale applicable à son territoire.

Sur les désistements :

2. Les désistements des communes d’Andilly et de Franconville et de Taverny sont purs et simples. Rien ne s’oppose à ce qu’il en soit donné acte.

Sur les interventions :

3. Est recevable à former une intervention toute personne qui justifie d’un intérêt suffisant eu égard à la nature et à l’objet du litige et qui n’a pas qualité de partie à l’instance.

4. Il ressort des pièces du dossier que les communes et l’établissement public territorial font valoir au soutien de leur intervention les incidences négatives pour leurs territoires de l’extension de l’aéroport Charles de Gaulle par la réalisation d’un nouveau terminal et qu’elles sont situées à des distances suffisamment proches de cette infrastructure pour être exposées au moins en partie aux manifestations de ces incidences. Dans ces conditions, ces collectivités justifient d’un intérêt suffisant à intervenir au soutien de la demande d’annulation des décisions attaquées. Il y a donc lieu d’admettre ces interventions.

Sur les conclusions à fin d’annulation :

5. En premier lieu, aux termes de l’article L.143-22 du code de l’urbanisme : ” Le projet de schéma de cohérence territoriale arrêté est soumis à enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l’environnement () “. L’article L.123-1 du code de l’environnement dispose : ” L’enquête publique a pour objet d’assurer l’information et la participation du public ainsi que la prise en compte des intérêts des tiers lors de l’élaboration des décisions susceptibles d’affecter l’environnement mentionnées à l’article L. 123-2 “. Enfin aux termes de l’article R. 123-8 du même code : ” Le dossier soumis à l’enquête publique comprend les pièces et avis exigés par les législations et réglementations applicables au projet, plan ou programme “.

6. Aux termes de l’article R. 141-2 du code de l’urbanisme : ” Le rapport de présentation expose le diagnostic prévu à l’article L. 141-3 et précise, le cas échéant, les principales phases de réalisation envisagées. Au titre de l’évaluation environnementale, le rapport de présentation : 1° Analyse l’état initial de l’environnement et les perspectives de son évolution en exposant, notamment, les caractéristiques des zones susceptibles d’être touchées de manière notable par la mise en œuvre du schéma ; 2° Analyse les incidences notables prévisibles de la mise en œuvre du schéma sur l’environnement et expose les problèmes posés par l’adoption du schéma sur la protection des zones revêtant une importance particulière pour l’environnement, en particulier l’évaluation des incidences Natura 2000 mentionnée à l’article L. 414-4 du code de l’environnement ; 3° Explique les raisons qui justifient le choix opéré au regard des solutions de substitution raisonnables tenant compte des objectifs et du champ d’application géographique du schéma au regard notamment des objectifs de protection de l’environnement établis au niveau international, communautaire ou national ; 4° Présente les mesures envisagées pour éviter, réduire et, si possible, compenser s’il y a lieu, les conséquences dommageables de la mise en œuvre du schéma sur l’environnement ; 5° Définit les critères, indicateurs et modalités retenus pour l’analyse des résultats de l’application du schéma prévue à l’article L. 143-28. Ils doivent permettre notamment de suivre les effets du schéma sur l’environnement afin d’identifier, le cas échéant, à un stade précoce, les impacts négatifs imprévus et envisager, si nécessaire, les mesures appropriées ; 6° Comprend un résumé non technique des éléments précédents et une description de la manière dont l’évaluation a été effectuée “.

7. Il résulte de ces dispositions que le dossier de l’enquête publique préalable à l’approbation d’un SCoT doit nécessairement comporter parmi ses pièces le rapport de présentation du schéma. L’insuffisance de celui-ci est de nature à rendre irrégulière le déroulement de cette enquête.

8. Il résulte également de ces dispositions que l’analyse des incidences de la mise en œuvre du SCoT sur l’environnement et l’exposé des problèmes posés par son adoption sur la protection des zones revêtant une importance particulière pour l’environnement doivent être en rapport avec les orientations et objectifs fixés par cet acte réglementaire et qu’ils n’ont pas à porter de manière individualisée sur les effets pouvant résulter de la mise en œuvre de tel ou tel projet d’ouvrage qu’il prend en compte.

9. Il ressort du chapitre 2.1.2 du projet d’aménagement et de développement durable (PADD) du SCoT que la communauté d’agglomération Roissy Pays de France s’est fixé comme objectifs de ” consolider le moteur économique du Grand Roissy autour de l’écosystème aéroportuaire “, ” d’intégrer au projet de territoire porté par le SCoT les projets des plateformes aéroportuaires, qui impliquent des interactions fortes avec le reste du territoire ” , de veiller ” aux incidences sur le fonctionnement et l’organisation du territoire ” des grands projets qui ont vocation à conforter et à renforcer le positionnement international des deux plateformes aéroportuaires, et d’intégrer le développement de ces équipements ” à une organisation réfléchie le plus en amont possible avec les secteurs environnants, afin de garantir la cohérence territoriale “. Il ressort par ailleurs du point 5.3 du document d’orientations et d’objectifs consacré aux plateformes aéroportuaires que la communauté d’agglomération Roissy Pays de France a arrêté comme orientations dans ce domaine de ” renforcer et moderniser l’offre de services permettant de conforter le tourisme d’affaires “, de ” faciliter les déplacements au sein des plateformes aéroportuaires et à leur proximité “, de ” s’appuyer sur le tourisme d’affaires pour valoriser et développer le tourisme de loisirs, notamment en facilitant l’accessibilité des lieux touristiques et aux lieux de loisirs, à partir des lieux d’hébergement et des espaces de travail situés sur et à proximité des plateformes aéroportuaires “, ” d’implanter prioritairement l’offre de services et d’équipements dans les secteurs bénéficiant d’une desserte en transport en commun les reliant aux plateformes aéroportuaires ” et enfin ” d’améliorer l’insertion paysagère des plateformes aéroportuaires, en lien avec celle des infrastructures qui les desservent “.

10. Il résulte de ce qui précède que la communauté d’agglomération Roissy Pays de France, après avoir pris acte de l’existence sur son territoire de deux plateformes aéroportuaires et du projet en cours d’étude d’extension de l’aéroport Charles de Gaulle par la réalisation du terminal T4, s’est fixé comme objectif de favoriser l’insertion économique et paysagère de ces équipements dans leur environnement local. Cet objectif ne vise pas, en tant que tel, à développer les infrastructures aéroportuaires pour accroître les flux des passagers mais répond à la volonté de la communauté de maximiser les retombées économiques de ces flux sur les territoires proches de ces infrastructures, tout en atténuant les impacts paysagers de celles-ci pour le voisinage. Ainsi, alors même que la communauté a exprimé, au sous-chapitre 2.1.2.1 du PADD, son soutien au projet d’Aéroports de Paris d’agrandir l’aéroport Charles de Gaulle par la réalisation du terminal T4, la réalisation de ce terminal ne constitue pour le SCoT ni un objectif ni, a fortiori, une orientation permettant de mettre en œuvre un tel objectif. Dès lors le moyen tiré de ce que le rapport de présentation mis à l’enquête aurait dû comporter une analyse des incidences notables de la réalisation du terminal T4, et expliquer les motifs de cette réalisation, doit être écarté.

11. En second lieu, aux termes de l’article L.101-4 du code de l’énergie : ” Dans le respect des objectifs du développement durable, l’action des collectivités publiques en matière d’urbanisme vise à atteindre les objectifs suivants : 1° L’équilibre entre : a) Les populations résidant dans les zones urbaines et rurales ; b) Le renouvellement urbain, le développement urbain maîtrisé, la restructuration des espaces urbanisés, la revitalisation des centres urbains et ruraux ; c) Une utilisation économe des espaces naturels, la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières et la protection des sites, des milieux et paysages naturels ; d) La sauvegarde des ensembles urbains et du patrimoine bâti remarquables ; e) Les besoins en matière de mobilité ; 2° La qualité urbaine, architecturale et paysagère, notamment des entrées de ville ; 3° La diversité des fonctions urbaines et rurales et la mixité sociale dans l’habitat, en prévoyant des capacités de construction et de réhabilitation suffisantes pour la satisfaction, sans discrimination, des besoins présents et futurs de l’ensemble des modes d’habitat, d’activités économiques, touristiques, sportives, culturelles et d’intérêt général ainsi que d’équipements publics et d’équipement commercial, en tenant compte en particulier des objectifs de répartition géographiquement équilibrée entre emploi, habitat, commerces et services, d’amélioration des performances énergétiques, de développement des communications électroniques, de diminution des obligations de déplacements motorisés et de développement des transports alternatifs à l’usage individuel de l’automobile ; 4° La sécurité et la salubrité publiques ; 5° La prévention des risques naturels prévisibles, des risques miniers, des risques technologiques, des pollutions et des nuisances de toute nature ; 6° La protection des milieux naturels et des paysages, la préservation de la qualité de l’air, de l’eau, du sol et du sous-sol, des ressources naturelles, de la biodiversité, des écosystèmes, des espaces verts ainsi que la création, la préservation et la remise en bon état des continuités écologiques ; 7° La lutte contre le changement climatique et l’adaptation à ce changement, la réduction des émissions de gaz à effet de serre, l’économie des ressources fossiles, la maîtrise de l’énergie et la production énergétique à partir de sources renouvelables “.

12. Il résulte de ce qui a été dit au point 10 que la réalisation du terminal T4 ne constitue pas un objectif du PADD ni une orientation de son document d’orientations et d’objectifs. Il ressort en outre des pièces du dossier que le PADD fixe parmi ses objectifs, au chapitre 2.3.1.2, celui d’atteindre la neutralité carbone par la réduction des émissions de gaz à effet de serre, et que son chapitre 2.3.3.1 est consacré à l’objectif de limiter l’exposition des populations aux nuisances sonores. Le document d’orientations et d’objectifs comporte vingt-sept orientations en faveur de la qualité de l’air, lesquelles assurent la mise en œuvre de l’objectif du PADD d’atteindre la neutralité carbone par des orientations en faveur notamment de la réduction des déplacements motorisés, de la limitation de la consommation foncière et de la diminution des émissions de gaz à effet de serre d’origine non énergétique. Dès lors le moyen tiré de l’incompatibilité de SCoT avec les dispositions des alinéas 5, 6 et 7 de l’article L. 101-2 doit être écarté.

13. En troisième lieu l’accord de Paris signé le 12 décembre 2015 requiert l’intervention d’actes complémentaires pour produire des effets à l’égard des particuliers et est, par suite, dépourvu d’effet direct. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de cet accord ne peut qu’être écarté comme inopérant.

14. En dernier lieu, en raison de l’indépendance des législations, les requérantes ne peuvent utilement invoquer la méconnaissance des orientations et objectifs généraux fixés par l’article L. 100-4 du code de l’énergie, au soutien de ses conclusions tendant à l’annulation de la délibération en litige, régie par le droit de l’urbanisme. Dès lors le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions, inopérant, doit être écarté.

Sur les conclusions relatives aux frais non compris dans les dépens :

15. Aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : ” Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. “

16. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat la somme demandée par les requérantes au titre des frais non compris dans les dépens qu’elles ont exposés.

D E C I D E :

Article 1er : Il est donné acte aux communes d’Andilly, de Taverny et de Franconville de leur désistement.

Article 2 :Les interventions des communes d’Arcueil, d’Asnières-sur-Oise, de Boissy L’Aillerie, de Chauconin-Neufmontiers, d’Eaubonne, d’Ezanville, du Plessis-Bouchard, de Moisselles, de Pierrefitte-sur-Seine, de Villiers-le-Sec et de l’établissement public territorial Plaine Commune sont admises.

Article 3 : La requête de l’association ” Collectif d’Elu.e.s pour le climat, contre le Terminal 4 ” et autres est rejetée.

Article 4 :Le présent jugement sera notifié à l’association Collectif d’Elu.e.s pour le climat, contre le Terminal 4, aux communes d’Andilly, de Taverny de Franconville, d’Arcueil, d’Asnières-sur-Oise, de Boissy-l’Aillerie, de Chauconin-Neufmontiers, d’Eaubonne, d’Ezanville, du Plessis-Bouchard, de Moisselles, de Pierrefitte-sur-Seine et de Villiers-le-Sec, à l’établissement public territorial Plaine Commune et la commune et à la communauté d’agglomération Roissy Pays de France.

Délibéré après l’audience du 7 mars 2023 à laquelle siégeaient :

M. Thierry, président,

M. Baude, premier conseiller,

Mme Zaccaron Guérin, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 mars 2023.

Le rapporteur,

signé

F.-E. Baude Le président,

signé

P. Thierry

La greffière,

signé

S. Le Gueux

La République mande et ordonne au préfet du val d’Oise en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

No 20108952


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