Droit du Numérique : Tribunal administratif de Bordeaux, 21 mars 2023, 2300882

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Droit du Numérique : Tribunal administratif de Bordeaux, 21 mars 2023, 2300882

target=”_blank” rel=”noreferrer” class=”el-tooltip__trigger”>L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune de Bonzac fait valoir que :

– la condition d’urgence n’est pas satisfaite dès lors que, au regard des cartes de l’autorité de régulation des communications électroniques,

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 22 février 2023 et un mémoire enregistré le 14 mars 2023, la société par actions simplifiée (SAS) Free Mobile, représentée par Me Martin, avocat, demande au juge des référés :

1°) d’ordonner, sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l’exécution, d’une part, de l’arrêté du 1er septembre 2022 par lequel le maire de la commune de Bonzac s’est opposé à la déclaration préalable qu’elle a déposée le 10 août 2022 en vue de l’édification d’un pylône d’antennes de téléphonie mobile sur un terrain sis au lieu-dit ” Pouton Sud “, cadastré section C n° 646 et 647, d’autre part, de la décision implicite née du silence gardé par cette autorité sur son recours gracieux reçu le 15 septembre 2022 aux fins de retrait de l’arrêté précité ;

2°) d’enjoindre au maire de Bonzac, à titre principal, de lui délivrer une décision de non-opposition à la déclaration préalable précitée, dans un délai d’un mois à compter de la notification de l’ordonnance à intervenir, ce, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, d’instruire de nouveau sa déclaration préalable et de statuer dans un délai d’un mois à compter de la notification de l’ordonnance ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Bonzac la somme de 5 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SAS Free Mobile soutient que :

– elle a précédemment déféré au tribunal l’arrêté du 1er septembre 2022 du maire de Bonzac ainsi que la décision implicite de cette autorité rejetant son recours gracieux en date du 15 septembre 2022 ;

– la condition d’urgence est remplie dès lors que, en faisant obstacle à l’implantation du pylône en cause, la décision du 1er septembre 2022 du maire de Bonzac porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate, d’une part, à l’intérêt public qui s’attache à la couverture du territoire par ses réseaux de téléphonie mobile 3 G et 4 G mais également par son réseau Très Haut Débit (THD), d’autre part, à ses intérêts propres, en l’empêchant de satisfaire aux engagements qu’elle a pris vis-à-vis de l’Etat en matière de couverture par ses propres installations, la zone concernée n’étant pas desservie par ses réseaux comme en rapportent la preuve les cartes qu’elle produit ;

– pour contester l’urgence, la commune de Bonzac ne peut s’appuyer ni sur les cartes de l’ARCEP, trop générales, ni sur celles publiées sur le site internet, à des fins commerciales ;

– en s’abstenant de porter une appréciation sur les caractéristiques ou l’intérêt des lieux, le maire de Bonzac a fait une inexacte application de l’article R. 111-27 du code de l’urbanisme ;

– en outre, le terrain d’assiette, qui ne fait l’objet d’aucune protection et est situé dans un secteur comportant déjà de nombreuses superstructures, ne présente aucun intérêt particulier, et alors que le choix de construction retenu limite l’atteinte au paysage, la décision est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 mars 2023, la commune de Bonzac, représentée par Me Jean-Philippe Ruffié, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la SAS Free mobile d’une somme de 5 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune de Bonzac fait valoir que :

– la condition d’urgence n’est pas satisfaite dès lors que, au regard des cartes de l’autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP), mais aussi des propres cartes de l’opérateur, la totalité du territoire communal est couverte par le réseau 3G comme le réseau 4G. ;

– les moyens soulevés ne sont pas de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de l’arrêté du 1er septembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

– le code de l’urbanisme ;

– le code de justice administrative.

La présidente du tribunal a désigné M. Bayle, vice-président, pour statuer sur les demandes de référé.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Au cours de l’audience publique du 14 mars 2023 à 14h30, ont été entendus :

– le rapport de M. Bayle, juge des référés ;

– les observations de Me Candelier, représentant la SAS Free Mobile, qui a développé les moyens soulevés dans les écritures de cette dernière ;

– les observations de Me Jouanneaux, représentant la commune de Bonzac, qui a repris les moyens en défense invoqués dans les écritures de cette collectivité.

La parole a été donnée en dernier lieu au défendeur et la clôture de l’instruction a été prononcée à l’issue de l’audience.

La commune de Bonzac a déposé une note en délibéré le 14 mars 2023.

Considérant ce qui suit

:

1. Par la présente requête, la société par actions simplifiée (SAS) Free Mobile demande au juge des référés d’ordonner, sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l’exécution, d’une part, de l’arrêté du 1er septembre 2022 par lequel le maire de la commune de Bonzac s’est opposé à la déclaration préalable qu’elle a déposée le 10 août 2022 en vue de l’édification d’un pylône d’antennes de téléphonie mobile sur un terrain sis au lieu-dit ” Pouton Sud “, cadastré section C n° 646 et 647, d’autre part, de la décision implicite née du silence gardé par cette autorité sur son recours gracieux reçu le 15 septembre 2022 aux fins de retrait de l’arrêté précité.

Sur les conclusions aux fins de suspension :

2. Aux termes de l’article L. 521-1 du code de justice administrative : ” Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision () “.

En ce qui concerne la condition d’urgence :

3. L’urgence justifie que soit prononcée la suspension d’un acte administratif lorsque l’exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre. Il appartient au juge des référés d’apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l’acte en litige sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l’exécution de la décision soit suspendue.

4. Il ressort des pièces du dossier que le projet a pour objet d’améliorer la couverture du territoire de la commune de Bonzac par les réseaux de téléphonie mobile de 3ème et de 4ème générations de la SAS Free Mobile. D’une part, il est constant que la SAS Free Mobile a pris des engagements à ce titre envers l’Etat dans son cahier des charges. Les cartes détaillées produites à l’instance par la société, qui peuvent être prises en considération alors même que ces documents, qu’elle n’a aucun intérêt à biaiser, ont été dressés par elle, montrent que le secteur d’implantation de l’équipement en litige n’est pas correctement desservi par les réseaux de cet opérateur. La commune de Bonzac fait certes valoir que les cartes disponibles sur le site de l’autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP) attestent que la société Free Mobile a satisfait au taux de couverture auquel elle s’était engagée ; toutefois, si elles sont susceptibles d’établir que la société aurait rempli ses obligations en ce qui concerne le taux de couverture de la population globalement dans le département de la Gironde, ces cartes ne présentent pas un degré de précision suffisant pour contredire celles fournies par la société et qui se rapportent à la zone concernée, dont la couverture est, de manière manifeste au regard de ces pièces, mal assurée. De même, la commune de Bonzac ne peut se prévaloir utilement des cartes publiées par la SAS Free Mobil sur son site internet, qui ont une vocation commerciale. D’autre part, il ne peut être sérieusement contesté que la couverture du territoire national par les réseaux de téléphonie mobile présente un intérêt public. Il suit de ce qui précède que l’opposition du maire de Bonzac à la déclaration préalable déposée par la SAS Free Mobile le 10 août 2022 porte une atteinte suffisamment grave et immédiate tant aux intérêts de la SAS Free Mobile qu’à l’intérêt public qui s’attache à la couverture du secteur en cause par les réseaux de téléphonie de cet opérateur. Dès lors, la condition d’urgence posée par l’article L. 521-1 du code de justice administrative doit être regardée comme satisfaite.

En ce qui concerne le moyen propre à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision :

5. En l’état de l’instruction, le moyen invoqué par la SAS Free Mobile et tiré de l’inexacte application de l’article R. 111-27 du code de l’urbanisme est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de l’arrêté du 1er septembre 2022 du maire de Bonzac s’opposant à la déclaration préalable en litige et de la décision de cette autorité rejetant le recours gracieux contre cette opposition.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Free Mobile est fondée à demander la suspension de l’exécution de l’arrêté du 1er septembre 2022 du maire de Bonzac.

Sur les conclusions aux fins d’injonction sous astreinte :

7. La présente ordonnance implique que, nécessairement, le maire de Bonzac délivre à la SAS Free Mobile une décision de non-opposition à la déclaration préalable déposée le 10 août 2022. Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de fixer à un mois à compter de la notification de la présente ordonnance le délai dans lequel la décision de non-opposition devra intervenir. En revanche, il n’y a pas lieu d’assortir cette injonction d’une astreinte.

Sur les conclusions relatives aux frais de l’instance :

8. Les dispositions de cet article font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SAS Free Mobile, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont la commune de Bonzac demande le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Bonzac le versement d’une somme de 1 200 euros à la SAS Free Mobile, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

ORDONNE :

Article 1er

: L’exécution de l’arrêté du 1er septembre 2022 par lequel le maire de la commune de Bonzac s’est opposé à la déclaration préalable déposée par la SAS Free Mobile le 10 août 2022 et de la décision de cette autorité rejetant le recours gracieux contre l’arrêté précité est suspendue.

Article 2 : Il est enjoint au maire de Bonzac de délivrer à la SAS Free Mobile une décision de non-opposition à la déclaration préalable déposée le 10 août 2022, dans un délai d’un mois à compter de la notification de la présente ordonnance.

Article 3 : La commune de Bonzac versera une somme de 1 200 euros à la SAS Free Mobile en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus de la requête et les conclusions de la commune de Bonzac tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée à la société par actions simplifiée Free Mobile et à la commune de Bonzac.

Fait à Bordeaux, le 21 mars 2023.

Le juge des référés,

J-M. BAYLE La greffière,

H. MALO

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme,

La greffière


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