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La pratique consistant pour Amazon à se référencer en premier sur Google (résultat naturels) sur une marque afin de vendre des produits équivalents pourrait être sanctionnée.
La société Mathon a obtenu une première victoire procédurale contre Amazon. Lorsque le terme MATHON est tapé sur la zone de recherche du moteur de recherche GOOGLE le site amazon.fr est affiché à deux reprises dans les quatre premiers résultats dits naturels, Lorsqu’il est effectué une recherche « MATHON » dans le cartouche du moteur de recherche interne du site Amazon.fr, il est automatiquement proposé les requêtes suivantes en lien avec l’univers de la cuisine : « MATHON pâtisserie », « MATHON poêle », « MATHON cuisine », « MATHON casserole », « MATHON mandoline », « MATHON cocotte », « MATHON tapis », « MATHON silicone » et « MATHON couteau » et le site affiche plus de 500 résultats dont les premiers ne sont pas des produits de la société MATHON mais sont similaires si ce n’est identiques à ceux que MATHON commercialise ;
Dans la marge gauche de la page de résultats suite à la requête « MATHON » dans le moteur de recherche interne du site Amazon.fr, il est proposé de cliquer sur la marque « MATHON ». Dans le cas où la marque MATHON est sélectionnée dans l’arborescence du site Amazon.fr, celui-ci propose 7 résultats parmi lesquels, quatre couteaux, sont faussement attribués à la marque MATHON.
Le juge de la mise en état a également écarté la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à défendre opposée par les sociétés AMAZON SERVICES EUROPE S.A.R.L., AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L. et AMAZON EU S.A.R.L.
En effet, les conditions d’utilisations du site amazon.fr, stipulent entre autres qu’« Amazon Europe Core S.A.R.L., Amazon EU S.A.R.L. et/ou leurs sociétés affiliées(«Amazon») (vous) fournissent des fonctionnalités de site internet et d’autres produits et services quand vous visitez le site amazon.fr, effectuez des achats sur le site internet (…)», ou dans la rubrique «Aide et services Client» du site internet amazon.fr, où il est mentionné qu’Amazon services Europe et ses sociétés affiliées («AMAZON») permettent à des vendeurs tiers de lister et de vendre leurs produits sur «amazon.fr», seules informations publiquement disponibles, la société AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L. étant par ailleurs dépositaire du nom de domaine,
La mise en cause des sociétés AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L. et AMAZON SERVICES EUROPE S.A.R.L., était rendue nécessaire par une présentation volontairement opaque des activités spécifiques de chacune et fait également suite à la réponse qui a été apportée le 13 mars 2020 à la mise en demeure initiale adressée par la société MATHON aux seules sociétés AMAZON ONLINE FRANCE SAS et AMAZON SERVICES SAS, mentionnant que cette réclamation avait été transmise à ces sociétés qui menaient «une enquête en interne sur les prétentions qu’elle contient», de sorte qu’il convient de considérer que les sociétés ainsi assignées ont été désignées comme concernées par la procédure par leur propre conseil.
C’est également à bon escient que le juge de la mise en état a retenu que la société AMAZON FRANCE SERVICES SAS qui a pour activité les «prestations de services administratifs comptables, financiers, juridiques et prestations de services d’assistance pour la promotion des ventes, du marketing, du merchandising ou dans les relations avec les fournisseurs, partenaires commerciaux et autorités de toute sorte» n’intervenait manifestement pas dans l’exploitation du site internet et a considéré que les demandes formulées à son égard étaient irrecevables.
Enfin, la question de la qualité d’hébergeur ou d’éditeur des sociétés défenderesses relève du débat au fond, de sorte que l’éventuel non-respect des dispositions des articles 6. I. 2° et 6. I. 5° de la LCEN qui imposent une procédure formelle s’agissant de la notification préalable des faits litigieux à l’hébergeur du site internet, ne saurait être opposé à titre de fin de non-recevoir.
* * *
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
ARRET DU 13 avril 2022
Pôle 5 – Chambre 1 (n° 077/2022) Numéro d’inscription au répertoire général : 21/15895 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CEJWD
Décisions déférées à la Cour :
Ordonnance du 9 juillet 2021 rendue par le juge de la mise état du Tribunal judiciaire de PARIS- 3 ème chambre – 2 ème section RG 20/08865
Ordonnance du 13 août 2021 rendue par le juge de la mise état du Tribunal judiciaire de PARIS – 3 ème chambre – 2 ème section – 20/08865
APPELANTES
Société AMAZON EUROPE CORE SARL Société de droit luxembourgeois Immatriculée au registre du commerce et des sociétés du LUXEMBOURG sous le numéro B-101818 Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège 38, avenue John F. Kennedy L1855 LUXEMBOURG LUXEMBOURG
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477 Assistée de Me Fabienne PANNEAU du PARTNERSHIPS DLA PIPER FRANCE LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : R235
Société AMAZON SERVICES EUROPE SARL Société de droit luxembourgeois Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de LUXEMBOURG sous le numéro B-93815 Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège 38, avenue John F. Kennedy L1855 LUXEMBOURG LUXEMBOURG
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477 Assistée de Me Fabienne PANNEAU du PARTNERSHIPS DLA PIPER FRANCE LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : R235 Société AMAZON EU SARL Société de droit luxembourgeois Immatriculée au registre du commerce et des sociétés du LUXEMBOURG sous le numéro B -101818 Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège 38, avenue John F. Kennedy L1855 LUXEMBOURG LUXEMBOURG Et Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de NANTERRE sous le numéro 487 773 327 Et dont l’établissement en France est situé 67 boulevard du Général Leclerc 92110 CLICHY
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477 Assistée de Me Fabienne PANNEAU du PARTNERSHIPS DLA PIPER FRANCE LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : R235
INTIMÉE
S.A.S. MATHON DÉVELOPPEMENT Société au capital de 1 534 000 euros Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de GRENOBLE sous le numéro 750 85 8 4 82 Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège ZI La Gloriette Chatte 38160 SAINT MARCELLIN
Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER – BEQUET – MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050 Représentée par Me Cyril CHABERT de l’AARPI CHAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0462
PARTIE INTERVENANTE
S.A.S. AMAZON FRANCE SERVICES, SAS à associé unique, Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de NANTERRE sous le numéro 809 869 043 67 boulevard du Général Leclerc 92110 CLICHY
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477 Assistée de Me Fabienne PANNEAU du PARTNERSHIPS DLA PIPER FRANCE LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : R235
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 2 mars 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Déborah BOHÉE, conseillère, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport.
Cette magistrate a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre Mme Françoise BARUTEL, conseillère Mme Déborah BOHÉE, conseillère.
Greffier, lors des débats : Mme K A
ARRÊT :
Contradictoire par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. signé par Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre et par Karine A, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DES FAITS ET DU LITIGE
La société MATHON DEVELOPPEMENT (ci-après « MATHON »), exploite un site internet de commercialisation d’articles de cuisine accessible à l’adresse www.mathon.fr.
Les sociétés AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L., AMAZON SERVICE EUROPE S.A.R.L., AMAZON EU S.A.R.L. (ci-après « les sociétés AMAZON »), sociétés de droit luxembourgeois, sont spécialisées dans la vente de divers biens et services via la boutique www.amazon.fr. La société AMAZON FRANCE SERVICES SAS, immatriculée en 2015, se présente comme une société de « management consulting », destinée à la fourniture de supports aux autres entités AMAZON. La société MATHON est notamment titulaire des marques verbales française n°4140379 et de l’Union européenne « MATHON » n°13545223, toutes deux déposées dans les classes 7, 8, 9, 11, 16, 20, 21, 24 et 25.
La société MATHON indique avoir brièvement, en 2015, entretenu avec les sociétés AMAZON des relations commerciales.
Elle a fait constater par huissier de justice les 30 janvier et 13 mai 2020 sur le site internet http://www.amazon.fr/ et http://www.google.fr/ que :
– Lorsque le terme MATHON est tapé sur la zone de recherche du moteur de recherche GOOGLE le site amazon.fr est affiché à deux reprises dans les quatre premiers résultats dits naturels,
– Lorsqu’il est effectué une recherche « MATHON » dans le cartouche du moteur de recherche interne du site Amazon.fr :
– il est automatiquement proposé les requêtes suivantes en lien avec l’univers de la cuisine : « MATHON pâtisserie », « MATHON poêle », « MATHON cuisine », « MATHON casserole », « MATHON mandoline », « MATHON cocotte », « MATHON tapis », « MATHON silicone » et « MATHON couteau » et le site affiche plus de 500 résultats dont les premiers ne sont pas des produits de la société MATHON mais sont similaires si ce n’est identiques à ceux que MATHON commercialise ;
– dans la marge gauche de la page de résultats suite à la requête « MATHON » dans le moteur de recherche interne du site Amazon.fr, il est proposé de cliquer sur la marque « MATHON »,
– dans le cas où la marque MATHON est sélectionnée dans l’arborescence du site Amazon.fr, celui-ci propose 7 résultats parmi lesquels, quatre couteaux, sont faussement attribués à la marque MATHON.
Par courrier du 2 mars 2020, la société MATHON a vainement mis en demeure les sociétés AMAZON d’avoir à cesser les actes précités et à envisager une réparation du préjudice.
C’est dans ce contexte que, par actes signifiés en date des 28 août et 3 septembre 2020, la société MATHON a fait assigner les sociétés AMAZON devant le tribunal judiciaire de Paris en contrefaçon de marque, concurrence déloyale et réparation de son préjudice, qui ont, par conclusions d’incident, soulevées des fins de non-recevoir tirées du défaut de qualité à se défendre. Par ordonnance du 9 juillet 2021, dont appel, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris a rendu la décision suivante :
– ECARTE la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à défendre des sociétés AMAZON Europe Core S.A.R.L., AMAZON EU S.A.R.L. et AMAZON Services Europe S.A.R.L. ;
– DECLARE en conséquence recevables toutes les demandes formées à leur encontre ;
– DECLARE irrecevables les demandes formées à l’encontre de la société AMAZON France SERVICE SAS ;
– CONDAMNE les sociétés AMAZON Europe Core S.A.R.L., AMAZON EU S.A.R.L. et AMAZON Services Europe S.A.R.L. ensemble à payer à F Ala somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– RENVOIE l’affaire à l’audience de mise en état du 2 septembre 2021 (audience dématérialisée) pour les conclusions au fond des défenderesses ;
– RESERVE les dépens.
Et par ordonnance du 13 août 2021 dont appel, il a statué en ces termes:
– ORDONNE la rectification d’office de l’ordonnance du juge de la mise en état en date du 9 juillet 2021 ;
– DIT que le paragraphe suivant du dispositif de l’ordonnance en date du 9 juillet 2021 :
‘CONDAMNE les sociétés AMAZON Europe Core S.A.R.L., AMAZON EU S.A.R.L. et AMAZON Services Europe S.A.R.L. ensemble à payer à F Ala somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile’
est remplacé par le paragraphe suivant :
‘CONDAMNE les sociétés AMAZON Europe Core S.A.R.L., AMAZON EU S.A.R.L. et AMAZON Services Europe S.A.R.L. ensemble à payer à la société MATHON DEVELOPPEMENT la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile’.
– DIT que le reste du dispositif demeure inchangé ; – DIT que mention de la présente décision sera portée en marge de la minute de l’ordonnance RG° 20/08865 du 9 juillet 2021 et une copie annexée ;
– LAISSE les dépens à la charge de l’Etat.
Les sociétés AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L., AMAZON SERVICE EUROPE S.A.R.L. et AMAZON EU S.A.R.L. ont interjeté appel de ces ordonnances le 23 août 2021.
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 21 janvier 2022 les sociétés AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L., AMAZON SERVICE EUROPE S.A.R.L. et AMAZON EU S.A.R.L., appelantes et la société AMAZON FRANCE SERVICES SAS, intimée sur appel provoqué qui demandent à la cour, de:
– ACCUEILLIR les sociétés AMAZON France Services SAS, AMAZON Europe Core S.A.R.L., AMAZON Services Europe SARL et AMAZON EU SARL en leurs arguments et prétentions et les y déclarer recevables et bien fondées ;
– DEBOUTER la société MATHON Développement de l’ensemble de ses arguments et prétentions, en ce compris de son appel incident et provoqué à l’encontre de la société AMAZON France Services SAS ;
En conséquence,
– CONFIRMER l’ordonnance du 9 juillet 2021 en ce que le Juge de la mise état a accueilli la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à se défendre de la société AMAZON Frances Services SAS ;
– INFIRMER l’ordonnance du 9 juillet 2021 en ce que le Juge de la mise état a :
– écarté la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à se défendre des sociétés AMAZON Europe Core S.A.R.L., AMAZON EU S.A.R.L. et AMAZON Services Europe SARL ;
– déclaré en conséquence recevables les demandes formées à leur encontre ;
– condamné les sociétés AMAZON Europe Core S.A.R.L., AMAZON EU S.A.R.L. et AMAZON Services Europe S.A.R.L. ensemble à payer à la société MATHON la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
STATUANT DE NOUVEAU : – JUGER la société MATHON Développement irrecevable à agir à l’encontre de la société AMAZON EU S.A.R.L. à raison du défaut de qualité à se défendre de cette dernière ;
– JUGER la société MATHON Développement irrecevable à agir à l’encontre de la société AMAZON Services Europe S.A.R.L. à raison d’une part, du défaut de qualité à se défendre de cette dernière et d’autre part, concernant les demandes relatives à la vente de produits prétendument contrefaisants sur la place de marché de la Boutique www.amazon.fr, du défaut de notification conforme aux prescriptions de la LCEN ;
– JUGER la société MATHON Développement irrecevable à agir à l’encontre de la société AMAZON Europe Core S.A.R.L. concernant les demandes relatives à la vente de produits prétendument contrefaisants sur la place de marché de la Boutique www.amazon.fr à raison du défaut de qualité à se défendre de cette dernière ;
– CONDAMNER la société MATHON Développement à verser à chacune des sociétés AMAZON Europe Core S.A.R.L., AMAZON Services Europe S.A.R.L., AMAZON EU S.A.R.L. et AMAZON France Services la somme de 6.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– La CONDAMNER aux entiers dépens d’instance, dont distraction au profit de Maître Boccond-Gibod, Avocat au Barreau de Paris, par application de l’article 699 du même code.
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 11 février 2022 par la société MATHON, intimée et appelante incidente, qui demande à la cour de :
– DECLARER recevable et bien fondée la société MATHON DEVELOPPEMENT en son appel provoqué à l’encontre de la société AMAZON FRANCE SERVICES SAS,
– REJETER toutes les demandes, fins et conclusions des sociétés AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L., AMAZON SERVICES EUROPE S.A.R.L., AMAZON EU S.A.R.L. et AMAZON FRANCE SERVICES SAS,
– CONFIRMER l’ordonnance du 9 juillet 2021, rectifiée le 13 août 2021, en ce qu’elle a écarté la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à défendre des sociétés AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L., AMAZON SERVICES EUROPE S.A.R.L. et AMAZON EU S.A.R.L. et déclaré en conséquence recevables les demandes formées à leur encontre, – L’INFIRMER en ce qu’elle a déclaré irrecevables les demandes formées à l’encontre de la société AMAZON FRANCE SERVICES SAS,
En Conséquence, statuer à nouveau sur ce chef et
– DECLARER recevables les demandes formées à l’encontre de la société AMAZON France SERVICES SAS qui aura à en répondre aux côtés des 3 autres défenderesses,
Y ajoutant,
– CONDAMNER solidairement les sociétés AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L., AMAZON SERVICES EUROPE S.A.R.L., AMAZON EU S.A.R.L. et AMAZON FRANCE SERVICES SAS à verser à la société MATHON DEVELOPPEMENT la somme supplémentaire de 30.000 euros en cause d’appel au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– CONDAMNER solidairement les mêmes sociétés aux dépens de l’appel.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 22 février 2022.
MOTIFS DE L’ARRÊT
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu’elles ont transmises, telles que susvisées.
– Sur les fins de non-recevoir soulevées au titre du défaut de qualité à se défendre des sociétés AMAZON
Les appelantes reprochent tant au juge de la mise en état qu’à la société MATHON de ne pas avoir tenu compte de l’activité spécifique de chacune d’entre elles en leur imputant des griefs identiques alors qu’il revient selon elles à l’intimée de démontrer la recevabilité de son action à l’encontre de chacune d’entre elles en individualisant les griefs en fonction de leur domaine d’action.
Les appelantes font ainsi valoir que l’activité de la société AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L. est exclusivement technique et ne porte pas sur la vente de produits ou l’offre de services sur la boutique, qu’elle est effectivement titulaire du nom de domaine www.amazon.fr puisqu’elle est la gestionnaire technique de la boutique, mais qu’elle ne l’exploite pas, que seuls les griefs relatifs au référencement interne et externe sont recevables à l’encontre de la société AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L. et que les griefs de contrefaçon sont irrecevables à son égard dès lors que, selon elles, les activités de la société AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L. n’ont aucun lien avec les vendeurs tiers opérant sur la place de marché.
Elles soutiennent également que l’activité de la société AMAZON EU S.A.R.L. porte exclusivement sur le retail et non sur l’offre de services aux vendeurs tiers sur la boutique ou sur les activités de référencement ou de gestion technique, de sorte que les griefs de la société MATHON tant fondés sur le référencement interne et externe de la boutique que sur la contrefaçon sont irrecevables à son égard.
Les appelantes plaident que l’activité de la société AMAZON SERVICES EUROPE S.A.R.L. est limitée à l’offre de services de place de marché aux vendeurs tiers opérant sur la boutique, à l’exclusion de l’activité retail et des activités de référencement.
Enfin, les appelantes estiment que seul le grief relatif à l’offre à la vente de produits prétendument contrefaisants par des vendeurs tiers sur la boutique aurait pu être recevable à l’encontre de la société AMAZON SERVICES EUROPE S.A.R.L., si la société MATHON avait effectivement respecté l’article 6 de la LCEN, dès lors que la société AMAZON SERVICES EUROPE S.A.R.L. bénéficie du statut d’hébergeur au sens de cette même loi et soutiennent que la mise en ‘ouvre des articles 6. I. 2° et 6. I. 5° de la LCEN impose une procédure formelle dont le non-respect doit être analysé comme une cause d’irrecevabilité venant compléter la liste des fins de non- recevoir de l’article 122 du code de procédure civile.
L’intimée soutient qu’elle a fait assigner les entités qui lui ont été désignées par AMAZON comme étant concernées par sa réclamation dans sa lettre du 13 mars 2020 et estime que les appelantes se retranchent derrière un montage sociétaire volontairement opaque pour opposer des fins de non-recevoir pour défaut de qualité à se défendre, contrairement aux informations figurant dans leurs documents légaux et alors que le site en cause ne permet pas de connaître le rôle de chacune des entités, qui sont toutes associées sous le vocable «AMAZON».
L’intimée ajoute que la majorité des faits reprochés ne concerne pas la qualité d’hébergeur des appelantes et qu’en outre la notification des griefs effectuée le 2 mars 2020 répond en toute hypothèse aux préconisations de l’article 6. I. 5° de la LCEN. Elle estime également d’une part, que la notification de l’article 6-I-5 n’est pas obligatoire mais permet d’établir une présomption de connaissance et d’autre part, que la question de la notification ou non des faits litigieux à l’hébergeur est une question de fond et non de recevabilité procédurale.
La cour rappelle qu’en vertu des articles 31 et 32 du code de procédure civile, l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie ou pour défendre un intérêt déterminé, toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir étant irrecevable et que, conformément à l’article 122 du même code, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande sans examen au fond pour défaut du droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
Et, en droit, l’intérêt à agir n’est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l’action.
Sur ce, c’est par de justes motifs adoptés par la cour que le premier juge après avoir rappelé les griefs opposés par la société MATHON aux sociétés défenderesses, en lien avec l’exploitation du site amazon.fr, a retenu notamment que tant les mentions figurant sur leur extrait KBIS ou RCS décrivant leur objet social que les conditions d’utilisations du site amazon.fr, qui stipulent entre autres qu’« Amazon Europe Core S.A.R.L., Amazon EU S.A.R.L. et/ou leurs sociétés affiliées(«Amazon») (vous) fournissent des fonctionnalités de site internet et d’autres produits et services quand vous visitez le site amazon.fr, effectuez des achats sur le site internet (…)», ou dans la rubrique «Aide et services Client» du site internet amazon.fr, où il est mentionné qu’Amazon services Europe et ses sociétés affiliées («AMAZON») permettent à des vendeurs tiers de lister et de vendre leurs produits sur «amazon.fr», seules informations publiquement disponibles, la société AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L. étant par ailleurs dépositaire du nom de domaine, a justement écarté la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à défendre opposée par les sociétés AMAZON SERVICES EUROPE S.A.R.L., AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L. et AMAZON EU S.A.R.L.
Il y a seulement lieu pour la cour d’ajouter que la mise en cause des sociétés AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L. et AMAZON SERVICES EUROPE S.A.R.L., rendue nécessaire par une présentation volontairement opaque des activités spécifiques de chacune, fait également suite à la réponse qui a été apportée le 13 mars 2020 à la mise en demeure initiale adressée par la société MATHON aux seules sociétés AMAZON ONLINE FRANCE SAS et AMAZON SERVICES SAS, mentionnant que cette réclamation avait été transmise à ces sociétés qui menaient «une enquête en interne sur les prétentions qu’elle contient», de sorte qu’il convient de considérer que les sociétés ainsi assignées ont été désignées comme concernées par la procédure par leur propre conseil.
En outre, dans le cadre de la présente instance, la société MATHON reproche aux défenderesses :
– des actes de contrefaçons de sa marque au travers de la : o Contrefaçon par création sans droit d’une boutique active Mathon sur Amazon.fr, o Contrefaçon par proposition de déployer au sein de cette boutique des offres de marchands partenaires qui ne vendent pas de produits authentiques « Mathon ».
o Contrefaçon par création d’une arborescence « Mathon » dans le moteur de recherche interne d’Amazon.fr, avec suggestion de rayons spécifiques (« Mathon casseroles », « Mathon poêle », « Mathon mandoline » ‘) renvoyant vers des résultats de produits qui ne sont pas authentiques,
– des actes de concurrence déloyale au travers de :
o l’utilisation de la marque « Mathon » pour doper le référencement naturel du site Amazon.fr sur le moteur de recherche Google afin de reléguer en fin de première page les résultats naturels de recherche du site Mathon.fr et ainsi d’induire le consommateur en erreur sur la disponibilité de produits « Mathon » au sein d’Amazon.fr dans le but de les rabattre vers d’autres offres,
o l’exploitation de la marque « Mathon » dans le moteur de recherche interne d’Amazon.fr, avec suggestion de rayons, pour renvoyer le consommateur vers des produits équivalents dont notamment des produits « Amazon Basics » afin de détourner les internautes et de s’inscrire dans une stratégie de parasitisme,
o et plus généralement l’usage de la marque « Mathon » dans l’espace commercial Amazon.fr, alors que Mathon ne dispose d’aucune boutique active librement acceptée, ce qui relève de pratiques commerciales trompeuses.
Elle en déduit que ces faits touchent de multiples divisions du Groupe Amazon en charge de tâches variées qui implique :
– la structuration et l’arborescence interne du site amazon.fr : avec la création en son sein d’une boutique Mathon,
– la structuration du moteur de recherche interne au site amazon.fr : avec la création de fonctionnalités de suggestion d’univers autour de la marque Mathon,
– la composition de l’algorithme qui préside au fonctionnement du moteur de recherche interne d’amazon.fr,
– les services commerciaux d’Amazon qui pourvoient à l’achalandage des espaces de boutiques créées au sein d’amazon.fr,
– la régie publicitaire d’amazon.fr qui vend un positionnement de résultats dans le fonctionnement du moteur de recherche interne, – la division qui promeut des produits maison « amazon basics » lesquels sont suggérés sur le résultat de requête « Mathon » lancée sur le moteur de recherche interne d’amazon.fr,
– le service informatique d’Amazon et spécifiquement sa division SEO qui dope le référencement naturel d’amazon.fr sur une requête « Mathon » lancée sur google.com en insérant balise ou méta-tags sur de multiples vignettes afin de devancer les offres des produits authentiques Mathon.
En conséquence, la présentation désormais opportunément faite du rôle de chacune des entités en cause au sein de la boutique AMAZON par les appelantes, soit les services aux vendeurs tiers sur «la place de marché» gérés par AMAZON SERVICES EUROPE S.A.R.L., les services de vente ou «Retail» assurés par AMAZON EU S.A.R.L. et le référencement et la gestion technique sous la responsabilité d’AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L., permet de confirmer que chacune des entités mise en cause par la société MATHON a effectivement qualité à défendre dans le cadre de la présente instance.
Enfin, contrairement à ce que soutiennent les appelantes, l’individualisation des griefs en fonction de la responsabilité éventuelle de chacune des sociétés en cause relève de l’examen du bien-fondé de l’action.
C’est également à bon escient que le juge de la mise en état a retenu que la société AMAZON FRANCE SERVICES SAS qui a pour activité les «prestations de services administratifs comptables, financiers, juridiques et prestations de services d’assistance pour la promotion des ventes, du marketing, du merchandising ou dans les relations avec les fournisseurs, partenaires commerciaux et autorités de toute sorte» n’intervenait manifestement pas dans l’exploitation du site internet et a considéré que les demandes formulées à son égard étaient irrecevables.
Le juge de la mise en état doit également être suivi quand il a rappelé que la question de la qualité d’hébergeur ou d’éditeur des sociétés défenderesses relève du débat au fond, de sorte que l’éventuel non-respect des dispositions des articles 6. I. 2° et 6. I. 5° de la LCEN qui imposent une procédure formelle s’agissant de la notification préalable des faits litigieux à l’hébergeur du site internet, ne saurait être opposé à titre de fin de non-recevoir.
En conséquence, l’ordonnance dont appel doit être confirmée de l’ensemble de ces chefs.
– Sur les autres demandes Les sociétés AMAZON SERVICES EUROPE S.A.R.L., AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L. et AMAZON EU S.A.R.L., succombant, seront condamnées aux dépens d’appel et garderont à leur charge les frais non compris dans les dépens qu’elles ont exposés à l’occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et frais irrépétibles de première instance étant confirmées.
Enfin, l’équité et la situation des parties commandent de condamner in solidum les sociétés AMAZON SERVICES EUROPE S.A.R.L., AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L. et AMAZON EU S.A.R.L. à verser à la société MATHON une somme de 9.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
,
LA COUR,
Confirme l’ordonnance du 9 juillet 2021, rectifiée le 13 août 2021, en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne les sociétés AMAZON SERVICES EUROPE S.A.R.L., AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L. et AMAZON EU S.A.R.L. aux dépens d’appel,
Condamne in solidum les sociétés AMAZON SERVICES EUROPE S.A.R.L., AMAZON EUROPE CORE S.A.R.L. et AMAZON EU S.A.R.L. à verser à la société MATHON une somme de 9.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE