Interdiction de gérer censurée : la question du dépôt des comptes

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Interdiction de gérer censurée : la question du dépôt des comptes
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Le liquidateur d’une société ne reprocher à un gérant de ne pas avoir produit les comptes sociaux pour l’exercice si à la date d’ouverture de la procédure collective, le délai pour l’établissement de ces comptes n’était pas expiré. La décision d’interdiction de gérer prononcée en première instance a été censurée en appel. 

Pour rappel, l’article L 653-5 du code de commerce prévoit que peut être sanctionné par la faillite personnelle et l’interdiction de gérer, le dirigeant qui a fait disparaître des éléments comptables, n’a pas tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font l’obligation ou a tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables.

Synthèse : Dirigeant d’une société commerciale, M. [R] supportait l’obligation de déposer ses comptes annuels. Le rapport du mandataire en date du 9 avril 2021 fait état de ce que malgré les demandes et relances, le dirigeant n’a pas transmis les pièces comptables réclamées.

Il ne peut néanmoins pas être reproché à M. [R] de ne pas avoir produit les comptes sociaux pour l’exercice 2019 puisque à la date d’ouverture de la procédure collective, soit le 3 mars 2020, le délai pour l’établissement de ces comptes n’était pas expiré. Il ne peut pas non plus lui être reproché de ne pas avoir communiqué les autres documents comptables, journaux d’achats, de vente, de trésorerie, Grand Livre des comptes lorsqu’ils lui ont été réclamés en période de confinement le 29 avril 2020.

Par la suite, l’incendie qui a détruit les locaux de la société le 17 juin 2020 permet d’expliquer la disparition de ces documents, caractérisant une impossibilité pour le débiteur de les communiquer au mandataire.

Enfin, devant le premier juge, comme en cause d’appel, M. [R] a produit le bilan et le compte de résultat de la société New web order pour la période du 1er mars 2017 correspondant au début de son activité, au 31 décembre 2018, établi par le cabinet Experliance, dans une édition du 5 juin 2019. Quoique tardive, cette communication est cependant intervenue avant l’audience devant les premiers juges, si bien que le grief tiré du défaut de respect des obligations comptables n’est pas caractérisé.

Le jugement qui a prononcé à l’encontre de M. [R] une interdiction de gérer d’une durée de une année sera donc infirmé en toutes ses dispositions.

 


 

Cour d’appel de Toulouse

RG n° 22/01045 12/04/2023

ARRÊT N°188 N° RG 22/01045 – N° Portalis DBVI-V-B7G-OVQO IMM/CO

Décision déférée du 21 Février 2022 – Tribunal de Commerce de TOULOUSE – 2021F02265 M.MARTIN [W] [R] C/ MP PG COMMERCIAL S.E.L.A.S. EGIDE,

REPRÉSENTÉE PAR ME [K] [N], ÈS QUA LITÉ DE LIQUIDATEUR DE LA SAS NEW WEB ORDER infirmation Grosse délivrée le à REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

*** COUR D’APPEL DE TOULOUSE 2ème chambre

*** ARRÊT DU DOUZE AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS ***

APPELANT

Monsieur [W] [R] [Adresse 1] [Localité 2] Représenté par Me Kamel BENAMGHAR, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES

MP PG COMMERCIAL Cour d’Appel [Adresse 4] [Localité 2] S.E.L.A.S. EGIDE, REPRÉSENTÉE PAR ME [K] [N], ÈN QUA LITÉ DE LIQUIDATEUR DE LA SAS NEW WEB ORDER Es qualité de « Mandataire liquidateur » de la « SAS NEW WEB ORDER » [Adresse 3] [Localité 2] Sans avocat constitué

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 Décembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant V.SALMERON , présidente,I. MARTIN DE LA MOUTTE, Conseiller , chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : V. SALMERON, présidente I. MARTIN DE LA MOUTTE, conseiller F.PENAVAYRE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnlles Greffier, lors des débats : C.OULIE Aux débats , M.JARDIN, substitut générala fait connaître son avis.

ARRET : – REPUTE CONTRADICTOIRE – prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties – signé par V. SALMERON, présidente, et par C.OULIE, greffier de chambre.

Exposé du litige

La Sarl New web order ayant pour gérant M. [W] [R], a été créée le 16 février 2017 et avait pour activités principales la création, le développement et |’administration de site Internet, l’achat vente d’espace publicitaire, la prise de participation, l’achat et ou la vente de site internet, la promotion et le référencement de site internet, la vente sur internet et par correspondance d’objets divers ainsi que toute activité annexe ou connexe en relation avec internet. Sur assignation de l’Urssaf, le tribunal de commerce de Toulouse a par jugement du 3 mars 2020 ouvert le redressement judiciaire de la Sarl New web order, fixé la date de cessation des paiements au 3 mars 2020 et a désigné la Selas Egide en qualité de mandataire judiciaire Tribunal. Les locaux abritant le siège de la société New Web Order ont été détruits dans un incendie le 17 juin 2020.

Par jugement du 22 octobre 2020, le tribunal de commerce de Toulouse a converti le redressement judiciaire en liquidation judiciaire; Le liquidateur a transmis au procureur de la République un rapport faisant état de divers manquements du gérant susceptibles de justifier des sanctions.

Par requête en date du 13 août 2021, le procureur de la République a saisi le tribunal aux fins de voir prononcée une interdiction de gérer de 3 ans à l’encontre de [W] [R]. Par jugement en date du 21 février 2022, le tribunal de commerce a prononcé à l’encontre de M. [W] [R] une interdiction de gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale pour une durée de 1 an avec exécution provisoire, aux motifs que I’intéressé avait omis de mauvaise foi de communiquer au liquidateur les renseignements prévus a l’article L622-6 du Code de commerce, qu’il s’était abstenu volontairement de coopérer avec les organes de la procédure et avait fait obstacle à son bon déroulement et qu’il avait tenu une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions qui lui étaient applicables.

[W] [R] a interjeté appel de cette décision Ie 14 mars 2022. Par ordonnance du 18 mai 2022, le magistrat délégué du premier président a débouté M. [W] [R] de sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire.

Prétentions et moyens des parties :

Vu les conclusions notifiées le 23 novembre 2022 auxquelles il convient de se référer pour le détail de l’argumentation de [W] [R] demandant à la cour au visa des articles L. 653-8, 653-5-5° et 653-5-6° du code de commerce, de :

-Réformer le jugement dont appel du 21 février 2022 ;

Statuant à nouveau :

-Rejeter la requête aux fins de sanction présentée par le Ministère Public contre [W] [R] ; -Rejeter toute demande contraire des intimés ; -Statuer ce que de droit quant aux dépens;

Vu l’avis du procureur Général notifié le 1er juin 2022 demandant à la cour de

-Confirmer Ie jugement rendu le 21 février 2022 par Ie tribunal de commerce de Toulouse, ayant prononce e l’encontre de [W] [R] une interdiction de gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale pour une durée de 1 an.

La Selas Egide, assignée par exploit du 5 avril 2022 signifié à personne ayant qualité pour le recevoir n’a pas constitué avocat

Motifs :

Dans sa requête en date du 13 août 2021 ayant saisi le tribunal de commerce de Toulouse d’une demande de condamnation de M. [R] à une interdiction de gérer de 3 ans, le procureur de la République reprochait au dirigeant en premier lieu d’avoir omis de mauvaise foi de communiquer au liquidateur les renseignements prévus à l’article L622-6 du Code de commerce, en second lieu de s’être abstenu de coopérer avec les organes de la procédure et d’avoir fait obstacle au bon déroulement de la procédure et en troisième lieu d’avoir tenu une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables.

Le tribunal a estimé que les griefs tirés de l’absence de communication des documents et du défaut de coopération avec les organes de la procédure étaient caractérisés mais a écarté celui tiré du non respect des obligations comptables. Dans le cadre de la présente instance, le procureur Général, partie principale, retient que l’omission de remise des documents et celle de coopérer avec les organes de la procédure ne sont pas caractérisées par les pièces produites mais soutient que M. [R] n’a pas satisfait à ses obligations comptables.

L’article L 653-5 du code de commerce prévoit que peut être sanctionné par la faillite personnelle et l’interdiction de gérer, le dirigeant qui a fait disparaître des éléments comptables, n’a pas tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font l’obligation ou a tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables.

Dirigeant d’une société commerciale, M. [R] supportait l’obligation de déposer ses comptes annuels. Le rapport du mandataire en date du 9 avril 2021 fait état de ce que malgré les demandes et relances, le dirigeant n’a pas transmis les pièces comptables réclamées.

Il ne peut néanmoins pas être reproché à M. [R] de ne pas avoir produit les comptes sociaux pour l’exercice 2019 puisque à la date d’ouverture de la procédure collective, soit le 3 mars 2020, le délai pour l’établissement de ces comptes n’était pas expiré. Il ne peut pas non plus lui être reproché de ne pas avoir communiqué les autres documents comptables, journaux d’achats, de vente, de trésorerie, Grand Livre des comptes lorsqu’ils lui ont été réclamés en période de confinement le 29 avril 2020.

Par la suite, l’incendie qui a détruit les locaux de la société le 17 juin 2020 permet d’expliquer la disparition de ces documents, caractérisant une impossibilité pour le débiteur de les communiquer au mandataire.

Enfin, devant le premier juge, comme en cause d’appel, M. [R] a produit le bilan et le compte de résultat de la société New web order pour la période du 1er mars 2017 correspondant au début de son activité, au 31 décembre 2018, établi par le cabinet Experliance, dans une édition du 5 juin 2019. Quoique tardive, cette communication est cependant intervenue avant l’audience devant les premiers juges, si bien que le grief tiré du défaut de respect des obligations comptables n’est pas caractérisé.

Le jugement qui a prononcé à l’encontre de M. [R] une interdiction de gérer d’une durée de une année sera donc infirmé en toutes ses dispositions. Eu égard à l’issue du litige, les dépens seront à la charge du Trésor public. Par ces motifs : Infirme le jugement en toutes ses dispositions, Statuant à nouveau, Dit n’y avoir lieu au prononcé d’une interdiction de gérer, Dit que les dépens de première instance et d’appel seront à la charge du trésor public Le greffier La présidente .  


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