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eptembre 2008, M. et Mme [P] ont acquis de M. et Mme [B] une maison d’habitation dans laquelle ceux-ci avaient fait réaliser des travaux d’aménagement des combles par M.[Y], lequel avait souscrit une assurance responsabilité décennale auprès des MMA par l’intermédiaire de M.[X], agent général d’assurances.
Ayant découvert un affaissement du plancher à l’occasion de travaux de suppression d’un mur non porteur M. et Mme [P] ont, par actes des 11 et 12 mars 2015 saisi le juge des référés du tribunal de grande instance d’Amiens qui a , le 10 avril 2015, ordonné une mesure d’expertise au con
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ARRET
N°
[P]
[U]
C/
[F]
[B]
[Y]
[X]
S.A. MUTUELLES DU [Localité 7] IARD
VBJ/SGS
COUR D’APPEL D’AMIENS
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU DOUZE JANVIER DEUX
MILLE VINGT TROIS
Numéro d’inscription de l’affaire au répertoire général de la cour : N° RG 21/00934 – N° Portalis DBV4-V-B7F-IADN
Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D’AMIENS DU DIX HUIT DECEMBRE DEUX MILLE VINGT
PARTIES EN CAUSE :
Monsieur [G] [P]
né le 22 Juillet 1979 à [Localité 13]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 1]
Madame [K] [U] épouse [P]
née le 05 Février 1983 à [Localité 13]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentés par Me Patrice DUPONCHELLE de la SCP VAN MARIS-DUPONCHELLE, avocat au barreau D’AMIENS
APPELANTS
ET
Madame [O] [F] épouse [B]
née le 07 Octobre 1980 à [Localité 11]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 10]
Monsieur [H] [B]
né le 14 Octobre 1973 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 10]
Représentés par Me Aurélien DESMET de la SCP COTTIGNIES-CAHITTE-DESMET, avocat au barreau D’AMIENS
Monsieur [W] [Y]
né le 19 Mars 1949 à [Localité 12]
de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 8]
Représenté par Me CHOCHOY substituant Me Franck DERBISE de la SCP LEBEGUE DERBISE, avocat au barreau D’AMIENS
Monsieur [M] [X]
né le 29 Mai 1946 à [Localité 14]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 9]
Représenté par Me Carl WALLART de l’AARPI WALLART-RUELLAN, avocat au barreau D’AMIENS
Ayant pour avocat plaidant Me Agnès GOLDMIC, avocat au barreau de Paris
S.A. MUTUELLES DU [Localité 7] IARD
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représentée par Me Xavier D’HELLENCOURT de l’ASSOCIATION CABINET D HELLENCOURT, avocat au barreau D’AMIENS
INTIMES
DÉBATS & DÉLIBÉRÉ :
L’affaire est venue à l’audience publique du 10 novembre 2022 devant la cour composée de Mme Christina DIAS DA SILVA, Présidente de chambre, Mme Véronique BERTHIAU-JEZEQUEL, Présidente de chambre et M. Pascal MAIMONE, Conseiller, qui en ont ensuite délibéré conformément à la loi.
A l’audience, la cour était assistée de me Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.
Sur le rapport de Mme Véronique BERTHIAU-JEZEQUEL et à l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré et la présidente a avisé les parties de ce que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 12 janvier 2023, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.
PRONONCÉ :
Le 12 janvier 2023, l’arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Christina DIAS DA SILVA, Présidente de chambre et Mme Sylvie GOMBAUD-SAINTONGE, greffière.
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DECISION :
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Le 23 septembre 2008, M. et Mme [P] ont acquis de M. et Mme [B] une maison d’habitation dans laquelle ceux-ci avaient fait réaliser des travaux d’aménagement des combles par M.[Y], lequel avait souscrit une assurance responsabilité décennale auprès des MMA par l’intermédiaire de M.[X], agent général d’assurances.
Ayant découvert un affaissement du plancher à l’occasion de travaux de suppression d’un mur non porteur M. et Mme [P] ont, par actes des 11 et 12 mars 2015 saisi le juge des référés du tribunal de grande instance d’Amiens qui a , le 10 avril 2015, ordonné une mesure d’expertise au contradictoire de M. et Mme [B] de M.[Y] et des MMA, assignées en intervention forcée par M. et Mme [B].
Par ordonnances des 10 avril 2015 et 16 novembre 2016, les opérations ont été étendues à M.[Y], à la demande de M. et Mme [B] et à M.[X].
L’expert a déposé son rapport le 13 juillet 2017.
Suivant actes des 31 mai, 27 juin et 5 juillet 2018, M. et Mme [P] ont fait assigner M. et Mme [B], M.[Y] et les MMA devant le tribunal judiciaire d’Amiens en indemnisation de leurs préjudices.
Suivant acte du 28 août 2019, M.[Y] a fait assigner M.[X] en intervention forcée.
Par jugement du 18 décembre 2020, le tribunal judiciaire d’Amiens a ainsi statué :
-Déclare M. et Mme [P] irrecevables en leur action exercée à l’encontre de M. et Mme [P] sur le fondement de la garantie des vices cachés,
-Déclare M. et Mme [P] recevables en leur action exercée à l’encontre de M.[Y] sur le fondement de la responsabilité décennale des constructeurs,
-Déboute M. et Mme [P] de l’intégralité de leurs demandes de dommages-intérêts formées à l’encontre de M. et Mme [B], de M.[Y] et de la SA MMA Iard sur le fondement de la responsabilité décennale des constructeurs,
-Déboute M. et Mme [P], M. et Mme [B], M.[Y], la SA MMA Iard et M.[X] de leurs demandes présentées sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
-Condamne in solidum M. et Mme [P] aux dépens en ce compris les dépens des deux procédures de référé,
-Autorise Me d’Hellencourt, la SCP Cottignies-Cahitte-Desmets et L’aarpi Wallart-Ruellan à recouvrer directement ceux des dépens dont ils ont fait l’avance dans avoir reçu provision.
M. et Mme [P] ont interjeté appel de cette décision le 18 février 2021.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 15 juin 2022 et l’affaire fixée à l’audience des débats du 23 juin 2022, date à laquelle elle a été renvoyée à l’audience du 10 novembre 2022.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusions en date du 18 mai 2021, M. et Mme [P] demandent à la cour d’infirmer le jugement sauf en ce qu’il a déclaré recevable leur action à l’encontre de M.[Y] et statuant à nouveau de:
-condamner M. et Mme [B], M.[Y], les MMA à leur payer la somme de 110 239,19 euros et celle de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– les condamner aux dépens.
M. et Mme [P] soutiennent que leur action engagée sur le fondement des vices cachés à l’encontre de leurs vendeurs est recevable car le délai de 2 ans court à compter de la découverte du vice et le vice caché n’a d’existence certaine qu’à compter du dépôt du rapport d’expertise lequel en l’espèce a été déposé le 13 juillet 2018.
L’immeuble étant affecté d’un vice caché, ils sollicitent la réparation de leur préjudice au coût de la réfaction sur le prix de vente soit une somme équivalente au montant des réparations fixées par l’expert.
Ils ne répliquent pas sur la clause notariée de non garantie invoquée par les vendeurs.
A l’encontre de M.[Y], ils invoquent la responsabilité décennale des constructeurs et font valoir que, comme l’a retenu le tribunal, leur demande n’est nullement tardive: dès lors que l’expert a relevé que la stabilité et la solidité du plancher bois des combles aménagés et de la charpente sont compromises, le tribunal ne pouvait retenir que l’expert n’invoquait « une quelconque impropriété à destination ». En tout état de cause dès lors qu’il résulte de l’expertise que M.[Y] a commis une faute dans la réalisation de l’aménagement des combles, ils s’estiment bien fondés à invoquer la théorie des désordres intermédiaires
Ils soutiennent que la garantie des MMA, assureur décennal est due.
Aux termes de leurs dernières conclusions en date du 10 août 2021, M. et Mme [B] demandent à la cour de confirmer le jugement,
A titre subsidiaire,
Condamner in solidum M.[Y], son assureur MMA et M.[X], ou l’un à défaut de l’autre, à leur payer les sommes qu’ils seraient amenés à régler au profit de M. et Mme [P] et les condamner in solidum, ou l’un à défaut de l’autre, à les garantir de toutes condamnations prononcées à leur encontre tant en principal, intérêts, frais, accessoires et article 700 du code de procédure civile
Débouter M.[Y] et la SA MMA de leurs demandes, fins et prétentions contraires.
Dire inopposable à M. et Mme [B] la franchise de garantie décennale ;
Condamner M. et Mme [P] et à défaut tout succombant à payer à M. et Mme [B] une somme de 3000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
Aux termes de ses dernières conclusions en date du29 juillet 2021, M.[Y] demande à la cour d’infirmer le jugement en ce qu’il l’a débouté de sa fin de non-recevoir tirée de la forclusion de nouveau sur ce point de déclarer irrecevables les demandes de M. et Mme [P] comme étant prescrites tant sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs que sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun, confirmer le jugement pour le surplus
subsidiairement : déclarer irrecevable la demande de garantie présentée par M. et Mme [B] comme étant prescrite et débouter M. et Mme [P] et M. et Mme [B] de leurs entières demandes dirigées à son encontre,
plus subsidiairement : juger que sa responsabilité si elle devait être retenue ne pourrait être engagée que sur le fondement de l’article 1792 du code civil et dans une telle hypothèse, condamner in solidum la société MMA et M.[X] à le garantir et le relever indemne de toutes condamnations en principal, frais, intérêts et accessoires pourraient être prononcés à son encontre
en tout état de cause : condamner in solidum tous succombants à lui payer une somme de 3000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et les condamner aux entiers dépens.
Il soutient que c’est à bon droit que le tribunal a déclaré les demandes de M. et Mme [P] à l’encontre de M. et Mme [B] fondées sur la garantie des vices cachés irrecevables car forcloses.
S’agissant des demandes formées à son encontre sur le fondement de la responsabilité décennale, il indique que le délai décennal avait commencé à courir le 1er avril 2015, date de la réception tacite des travaux, qu’il n’a pas pu être interrompu par l’ordonnance de référé du 10 avril 2015 qui ne lui a pas été signifiée dans les six mois de sa date et qui est donc non avenue par application des dispositions de l’article 478 du code de procédure civile. À la date de la deuxième assignation, le 28 octobre 2016, le délai de 10 ans était expiré. Celle-ci ne mentionnant pas qu’elle réitérait la première assignation : il s’agit d’une nouvelle demande en justice totalement indépendante, engagée postérieurement à l’expiration du délai.
Au fond il souligne que le tribunal a justement considéré que l’atteinte à la solidité mise en avant par l’expert trouve sa cause non dans les travaux qu’il a réalisés mais dans la démolition de la cloison du rez-de-chaussée à laquelle ont procédé M. et Mme [P] courant 2011: cette cause étrangère l’exonère de toute responsabilité comme l’a justement retenu le tribunal.
Sur la notion de désordres intermédiaires soulevée pour la première fois en cause d’appel, il rappelle qu’elle permet d’engager la responsabilité contractuelle de droit commun du constructeur à condition de démontrer un lien de causalité directe entre la faute alléguée et le dommage subi. Or ainsi qu’il a été retenu par le tribunal s’agissant de la responsabilité décennale, ce lien de causalité fait défaut. Les dommages sont imputables à M. et Mme [B] eux-mêmes qui n’ont pris aucune précaution avant de supprimer des cloisons dont il pouvait être légitimement soupçonné qu’elles soient devenues semi-porteuses. Il ajoute que M.[P] ne saurait être considéré comme un profane alors qu’il est expert d’assurance intervenant dans le domaine de la construction. Il rappelle que ses travaux ont donné satisfaction pendant six ans jusqu’à la suppression des cloisons du rez-de-chaussée. Et en tout état de cause si la cour devait déclarer recevable l’action initiée elle ne pourrait être instruite que sous l’empire des articles 1792 et suivants du code civil compte-tenu de l’atteinte à la solidité de l’ouvrage mis en avant par l’expert.
Selon M.[Y], la garantie souscrite auprès des MMA doit s’appliquer. En effet ayant souscrit l’assurance décennale pour son activité qui a toujours été « menuiserie-aménagement de combles » ainsi que l’établit la photo de son enseigne, la garantie inclut nécessairement l’aménagement des combles.
Les MMA qui ne justifient pas des conditions d’assurance ni de la description des activités visées dans le tableau, échouent à démontrer qu’il avait été informé du périmètre de chacune des activités des travaux autorisé et qu’en tout état de cause l’activité « menuiserie » garantie ne lui permettait pas de réaliser des travaux correspondant à la mise en ‘uvre d’éléments de bois comme il l’a fait sur le chantier de M. et Mme [B] .
Si la cour devait retenir une absence de garantie de son activité, M.[Y] conclut à la responsabilité de M.[X] en sa qualité d’agent général d’assurance à l’origine de la souscription du contrat d’assurance professionnelle pour manquement à son obligation de conseil pour ne pas lui avoir proposé une assurance professionnelle conforme à son activité professionnelle qu’il exerçait depuis 1985 et que celui-ci ne pouvait pas ignorer.
Par conclusions en date du 24 septembre 2021, la SA MMA demande à la cour de confirmer le jugement.
Elle conclut à la condamnation de la partie perdante en tous les dépens de la présente procédure et dire que ces derniers pourront être directement recouvrés par Me d’Hellencourt dans les termes de l’article 699 du code de procédure civile et à la condamnation de la partie perdante à lui verser la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Elle fait valoir que la police d’assurance de responsabilité décennale souscrite par M.[Y] applicable au moment du sinistre ne garantissait que l’activité 2.12 « menuiserie-cloisons industrialisées à structure bois », que l’activité 2.11 « charpentes et ossature bois » n’a pas été déclarée ni souscrite par l’assuré et qu’ainsi toutes demandes formées à son encontre doivent être rejetée.
Elle conteste avoir été informée de l’activité réelle de M.[Y] et de son désir éventuel d’être garanti. En tout état de cause elle n’est pas débitrice d’un devoir d’information et de conseil à l’égard d’un professionnel qui maîtrise son métier: aucun manquement au devoir de conseil ne saurait donc lui être reproché.
Elle ajoute que la preuve n’est pas rapportée que l’agent d’assurance ait pu avoir connaissance de l’activité complémentaire, n’étant produit aux débats aucun courrier qui lui aurait été adressé en faisant état.
Par conclusions en date du 22 octobre 2021, M.[X] demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. et Mme [P] de toutes leurs demandes, de dire et juger qu’il n’a pas commis des fautes qui lui sont reprochées par M.[Y] et par conséquent débouter purement et simplement M.[Y], M. et Mme [B] de toutes leurs demandes fins et prétentions, de le mettre purement et simplement hors de cause et de condamner toute partie succombante à lui payer la somme de 5000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens lesquels pourront être recouvrés directement par Me Wallart.
M.[X] rappelle que la garantie responsabilité décennale souscrite par M.[Y] portait sur les activités « menuiserie-cloisons industrialisées à structure en bois », que le contrat est signé de sa main, que s’il en avait sollicité la modification au 1er janvier 2001 par avenant, l’extension de garantie sollicitée portait sur les activités d’isolation, plâtrerie d’électricité et télécommunication.
Il rappelle que les obligations qui incombent à l’agent général consistent à fournir des conseils et des informations sur les points relevant de la technique de l’assurance mais non sur les éléments factuels que l’assuré connaît à savoir son activité. Il ne lui appartient pas de vérifier l’exactitude de la liste des activités que l’assuré a déclaré entreprendre.
En tout état de cause la photographie de l’entreprise versée aux débats sur laquelle est affiché un écriteau annonçant l’activité d’aménagement de combles ne saurait être retenu comme preuve de la connaissance qu’il aurait eue de l’activité réelle de l’entreprise et du manquement à son obligation de conseil pour ne pas avoir proposer de la garantir.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions des parties, visées ci-dessus, pour l’exposé de leurs prétentions et moyens
1. Sur l’action engagée par les époux [P], acquéreurs à l’encontre des époux [B], vendeurs sur le fondement de la garantie des vices cachés
1-1.la recevabilité
Le délai de deux ans prévu par l’article 1648 du code civil constitue, non pas comme l’a retenu le tribunal un délai de forclusion, mais un délai de prescription. Ce délai de prescription est interrompu par une assignation en référé, conformément à l’article 2241 du code civil, et suspendu lorsque le juge fait droit à une demande de mesure d’instruction présentée avant tout procès, en application de l’article 2239 du même code.
En l’espèce, le délai de prescription, qui avait commencé à courir le 23 décembre 2014, date du dépôt du rapport d’expertise amiable, avait été interrompu le 10 mars 2015, date de l’assignation en référé expertise, puis suspendu le 10 avril 20154, date à laquelle il avait été fait droit à la demande, et avait recommencé à courir, le 13 juillet 2017, date du dépôt du rapport de l’expert.
Contrairement à ce qu’a retenu le tribunal, l’action en garantie des vices cachés introduite le 5 juillet 2018 n’était pas prescrite. Le jugement sera donc infirmé sur ce point et l’action en garantie des vices cachés déclarée recevable.
1-2.l’existence de vices cachés
Il résulte de l’article 1641 du code civil que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus.
En l’espèce il résulte du rapport d’expertise que le plancher bois du premier étage s’affaisse en raison d’une insuffisance des poutres de renfort mises en ‘uvre lors de l’aménagement des combles en 2005, insuffisance aggravée par la découpe de deux poutres au droit de l’ancien conduit de fumée métallique. Selon l’expert, la stabilité et la solidité du plancher bois et de la charpente de l’immeuble sont compromises.
Est ainsi caractérisée l’existence d’un vice caché affectant l’immeuble vendu en 2008, le rendant impropre à son usage.
1-3.la clause non garantie notariée
L’article 1643 du code civil prévoit que le vendeur est tenu des vices cachés quand même il ne les aurait pas connus à moins que dans ce cas il n’ait stipulé qu’il ne sera obligé à aucune garantie.
En l’espèce, il est inséré au contrat de vente de l’immeuble litigieux une clause d’exclusion de la garantie des vices cachés et il n’est pas contesté que la facture correspondant aux travaux réalisés par M.[Y] leur a été transmise à l’occasion de la vente.
Par ailleurs il est constant que l’affaissement du plancher ne s’est produit que lors du retrait du mur séparatif entre la cuisine et le séjour par les acheteurs. Selon l’expert, avant la suppression de ce mur, le plancher ne présentait pas de fléchissement conséquent, la structure insuffisante du plancher ayant pris appui sur la tête de cloison qui était devenue porteuse, ce qui n’était pas sa fonction.
Il en résulte qu’à la date de la vente, le désordre ne s’était pas manifesté et que M. et Mme [B] qui avaient eu recours à un professionnel pour l’aménagement des combles ignoraient l’existence du vice caché.
En application de la clause de non garantie, il convient donc de débouter M. et Mme [P] de leur demande fondée sur la garantie des vices cachés.
2.Sur l’action engagée par les époux [P] à l’encontre de M.[Y] sur le fondement de la responsabilité des désordres intermédiaires
2-1.la recevabilité
Vu les articles 1792-4-1, 1792-6 du code civil, 478 du code de procédure civile,
Toute personne physique ou morale dont la responsabilité peut être engagée en vertu des articles 1792 à 1792-4 du Code civil est déchargée des responsabilités et garanties pesant sur elle après 10 ans à compter de la réception des travaux.
Ce délai décennal constitue non pas un délai de prescription mais un délai de forclusion susceptible d’interruption.
Comme l’a exactement relevé le tribunal, la réception tacite de l’ouvrage peut être fixée à la date du 1er avril 2015, correspondant à la date de la mention « payé » que M. et Mme [P] ont porté sur la facture des travaux qui leur avait été adressée par M.[Y] . Le délai décennal qui expirait le 1er avril 2015 a été interrompu par l’assignation en référé du 12 mars 2015.
En effet, contrairement à ce que soutient M.[Y], une assignation en référé qui n’a pas été délivrée à personne, même si elle a abouti à une ordonnance non avenue faute d’avoir été signifiée dans le délai de 6 mois en application de l’article 478 du code de procédure civile, interrompt la forclusion dès lors qu’elle manifeste sans équivoque la volonté des demandeurs d’empêcher le constructeur de prescrire.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a débouté M.[Y] de sa fin de non-recevoir tirée de la forclusion et a déclaré M. et Mme [P] recevables en leur demande dirigée à son encontre sur le fondement de la responsabilité décennale des constructeurs.
3-2.la responsabilité
Vu l’article 1792 du code civil,
En l’espèce il résulte de l’expertise que les travaux réalisés par M.[Y] ont consisté en la modification de la charpente existante pour transformation des combles perdus en combles à aménager et notamment en la fourniture et la pose de poutres en bois interposés entre les entrées bas des fermettes, la création de pied droit et la création d’une trémie en vue de l’installation d’un escalier permettant l’accès aux futurs combles aménagés. Comme l’a justement retenu le premier juge, ces travaux de réhabilitation aux fins d’aménagement des combles, du fait de leur ampleur et de l’utilisation de techniques de construction constitue un ouvrage au sens des dispositions de l’article 1792 du Code civil.
L’expert a relevé un affaissement du plancher en bois avec une importante fissure en tête de la cloison de la gaine technique de l’ancien conduit de fumée de la cheminée du rez-de-chaussée, une flèche de 20 mm du plancher en bois au-devant de cette gaine et des jeux sous les plaintes en bois. Ces désordres trouvent leur origine dans une erreur de conception dans la définition des caractéristiques des poutres fournies et posées par M.[Y] et dans une insuffisance du dispositif constructif, l’expert estimant que les extrémités des poutres coupées auraient dû être reprises en appui , que des lisses auraient dû être posées pour s’opposer à tout déversement de la charpente et que le dispositif d’assemblage par simple clouage n’était pas stable.
Il conclut que la stabilité la solidité du plancher bois des combles aménagés et de la charpente sont compromises.
Compte tenu de ces éléments et de ce que, selon l’expert, la cloison démolie par M. et Mme [P] était devenue « porteuse » en raison des malfaçons et des erreurs de conception commises par M.[Y], alors qu’elle ne l’était nullement à l’origine, le tribunal ne pouvait en déduire que l’affaissement trouve son origine directe, non dans les défauts d’exécution, mais dans la démolition de la cloison.
Sont ainsi caractérisés des désordres de nature décennale.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a débouté M. et Mme [P] de l’intégralité de leurs demandes de dommages intérêts à l’encontre de M.[Y] dont la responsabilité de plein droit est engagée.
Selon l’expert le montant de reprise des désordres s’élève à la somme de 110 239,19 euros. Il convient donc de retenir ce montant qui n’est discuté par aucune partie à hauteur d’appel et de condamner M.[Y] à payer la somme de 110 239,19 euros à M. et Mme [P].
3.Sur la garantie des MMA, assureur de M.[Y]
Vu l’article 1134 ancien du code civil applicable en la cause, 1103 du code civil,
Il résulte des conditions particulières de la police versées aux débats que par contrat à effet au 1er janvier 1997, M.[Y] a souscrit une assurance garantie décennale obligatoire pour les activités figurant au point 2.12 « menuiserie-cloisons industrialisées à structure bois » et n’a pas souscrit cette assurance pour les activités figurant au point 2.11 « charpente ossature bois », situé juste au dessus.
Les travaux réalisés pour M. et Mme [B], siège des désordres, ont consisté selon l’expert en la modification de la charpente existante pour transformation des combles perdus en combles à aménager et notamment en la fourniture et la pose de poutres en bois interposés entre les entrées bas des fermettes, la création de pied droit et la création d’une trémie en vue de l’installation d’un escalier permettant l’accès aux futurs combles aménagés.
Si comme le relève M.[Y] il n’est pas justifié d’une définition de ce que recouvre précisément chacune des activités visées au contrat, il est néanmoins constant que dès lors que la charpente de l’immeuble a été modifiée, l’activité exercée porte sur la charpente et non pas seulement sur les menuiserie-cloisons industrialisées à structure bois visées au contrat.
Il s’agit là d’une activité non garantie par le contrat d’assurance souscrit et il convient de débouter M.[Y] de sa demande de garantie formée à l’encontre de la SA MMA.
4.Sur l’action en responsabilité pour défaut de conseil engagée par M.[Y] à l’encontre de de M.[X], agent général d’assurances
S’il est constant que l’intermédiaire d’assurance doit assistance aux clients lors de la souscription du contrat, sa première obligation est d’offrir à celui-ci un contrat comportant les garanties ajustées aux besoins d’assurance qu’il manifeste: cette obligation de conseil de l’assureur s’apprécie en considération du degré de compétence de l’assuré.
L’assureur n’a pas à vérifier les déclarations faites par l’assuré quant à l’étendue du risque mais s’il a connaissance des activités exactes de l’assuré, il a le devoir de lui conseiller d’étendre sa garantie à l’ensemble de ses activités.
En l’espèce, pour soutenir que M.[X] connaissait son activité exercée depuis 1985, M.[Y] verse aux débats une photographie de l’enseigne de son entreprise qui mentionne « aménagement de combles ». Cette seule photographie qui n’est pas datée est insuffisante pour établir la connaissance par l’assureur de son activité exacte telle qu’allégué par M.[Y].
Et en tant que professionnel de la construction, l’entrepreneur qui sollicite une assurance de responsabilité décennale, assurance obligatoire, ne peut se méprendre sur l’activité pour laquelle il souscrit le contrat.
Ainsi M.[Y] ne saurait prétendre qu’il n’était pas informé de ce que son activité professionnelle d’aménagement de combles avec modification de charpente n’était pas incluse dans la catégorie « menuiserie-cloisons industrialisées à structure bois » alors même que sur la ligne située juste au-dessus figurait la catégorie « charpente-ossature bois » et qu’il affirme lui-même dans ses conclusions qu’il »a toujours exercé en tant que professionnel l’activité « charpente et ossature bois ».
Aucun manquement à son obligation de conseil ne saurait donc être reproché à M.[X].
Il convient donc de débouter M.[Y] de ses demandes à son encontre et à l’encontre des MMA du chef de leur agent général.
4. Sur les frais du procès
M.[Y] succombant, le jugement doit être infirmé s’agissant des dépens. Il convient de mettre à sa charge les dépens de première instance et d’appel
L’équité commande de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
La cour, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort
Infirme le jugement en ce qu’il a:
-déclaré M. et Mme [P] irrecevables en leur action exercée à l’encontre de M. et Mme [B] sur le fondement de la garantie des vices cachés ;
-débouté M. et Mme [P] de l’intégralité de leurs demandes de dommages-intérêts formées à l’encontre de M.[Y] ;
-condamné in solidum M. et Mme [P] aux dépens en ce compris les dépens des deux procédures de référé ;
Le confirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant:
Déclare M. et Mme [P] recevables en leur action exercée à l’encontre de M. et Mme [B] sur le fondement de la garantie des vices cachés ;
Déboute M. et Mme [P] de leur demande formée à l’encontre de M. et Mme [B] sur le fondement de la garantie des vices cachés ;
Déclare engagée la responsabilité décennale de M.[Y] ;
Condamne M.[Y] à payer à M. et Mme [P] la somme de 110 239,19euros ;
Déboute M.[Y] de sa demande de garantie formée à l’encontre de la SA MMA Iard :
Déboute M.[Y] de sa demande de garantie formée à l’encontre de M.[X] ;
Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M.[Y] aux entiers dépens incluant les dépens de la procédure de référé et le coût de l’expertise ;
Autorise Me d’Hellencourt, la SCP Cottignies-Cahitte-Desmets et Me Wallart à recouvrer directement ceux des dépens dont ils ont fait l’avance sans avoir reçu provision
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE