Votre panier est actuellement vide !
Extraits :
* * *
COUR D’APPEL DE RENNES
N° 244/2022 – N° RG 22/00590 – N° Portalis DBVL-V-B7G-TGBA
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
O R D O N N A N C E
article
L 3211-12-4 du code de la santé publique
Nous, Philippe BRICOGNE, Président à la cour d’appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur l’article
L 3211-12-4 du code de la santé publique, assisté de Patricia IBARA, greffière,
Statuant sur l’appel tranmis par courriel du centre hospitalier reçu le 14 Octobre 2022 à 15 heures 33 et formé par :
M. [R] [W], né le 04 Décembre 1975 à [Localité 4]
domicilié [Adresse 1],
hospitalisé au centre hospitalier de [Localité 2]
ayant pour avocat Me Flora BERTHET-LE FLOCH, avocat au barreau de RENNES
d’une ordonnance rendue le 13 Octobre 2022 par le Juge des libertés et de la détention de SAINT NAZAIRE qui a dit n’y avoir lieu à mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète dont il fait l’objet ;
En présence de M. [R] [W], régulièrement avisé de la date de l’audience, assisté de Me Flora BERTHET-LE FLOCH, avocat
En l’absence du représentant du préfet de LOIRE ATLANTIQUE, régulièrement avisé,
En l’absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur DELPERIE, avocat général, ayant déposé un avis écrit le 17 octobre 2022 qui a été communiqué aux parties,
En l’absence du représentant de l’établissement de soins, régulièrement avisé,
Après avoir entendu en audience publique le 20 Octobre 2022 à 14 H 00 l’appelant et son avocat en leurs observations,
Avons mis l’affaire en délibéré et ce jour, après en avoir délibéré, avons rendu par mise à disposition au greffe la décision suivante :
EXPOSÉ DE L’AFFAIRE
Le 8 décembre 2020, M. [R] [W] a été hospitalisé au centre hospitalier spécialisé de Blain en hospitalisation complète sans consentement sur décision du tribunal correctionnel de Nantes et sur arrêté préfectoral du même jour sur la base de l’expertise du Dr. [M] mentionnant une schizophrénie, un processus dissociatif massif avec perte du sens de la réalité, discours incompréhensible, fragmenté et sans logique interne.
M. [R] [W] a bénéficié d’un programme de soins du 1er octobre 2021 au 12 avril 2022, date de sa réintégration en hospitalisation complète. Il a bénéficié d’un second programme de soins le 21 avril 2022 avant d’être réintégré en hospitalisation complète le 5 octobre 2022, sur la base d’un certificat médical du Dr. [O] qui mentionne que les parents de M. [R] [W] font état de menaces verbales sur fond de réclamations d’argent, l’intéressé ayant interrompu son traitement et s’alcoolisant de nouveau, d’où la crainte d’une nouvelle décompensation.
Sur requête du préfet de la Loire-Atlantique du 11 octobre 2022, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Saint-Nazaire a, par ordonnance du 13 octobre 2022, sur la base d’un certificat médical établi le 10 octobre 2022 par le Dr. [C] confirmant l’état de décompensation de l’intéressé qui se présente dans le déni total de ses troubles, logorrhéique, exalté, tenant des idées de grandeur, des propos de persécution sur ses parents et multipliant les projets grandioses, a maintenu le régime d’hospitalisation complète de M. [R] [W] qui en a formé appel le 14 octobre 2022.
À l’audience du 20 octobre 2022 à 14 heures, M. [R] [W] indique qu’il suit un traitement depuis qu’il a été diagnostiqué schizophrène mais qu’il a pu oublier de le prendre de façon accidentelle. Il voudrait reprendre une activité artistique en créant un spectacle vivant via des EURL. Il relate avoir beaucoup voyagé et beaucoup travaillé, mais aussi trop bu d’alcool, ce qui l’aurait conduit à un burn-out. Il a un frère qui vit à [Localité 3]. Lui-même vit dans une maison à côté de celle de ses parents. Il accepte l’hospitalisation mais préférerait un programme de soins à domicile, pour retrouver ses amis et son chien.
Son avocate demande l’infirmation de l’ordonnance et la mainlevée de la mesure d’hospitalisation en raison d’une procédure irrégulière (irrégularité du certificat médical de réintégration qui ne fait pas état de constatations personnelles et qui n’est pas circonstancié et mention de l’impossibilité de recueillir les observations du patient sans explication), d’autant que, sur le fond, son client revendique l’hospitalisation, ce qui constitue l’expression d’un consentement aux soins.
Le centre hospitalier n’est pas représenté mais a adressé des éléments complémentaires, notamment un certificat médical établi le 18 octobre 2022 par le Dr. [B] qui mentionne que M. [R] [W] reste maniaque, avec des idées de grandeur concernant des projets professionnels qui ne correspondent pas à la réalité. Il serait toujours dans le déni de ses troubles, même s’il commence à retrouver par moments des phases plus apaisées du fait de la reprise du traitement et du cadre de l’hospitalisation, les soins sous contrainte restant justifiés au regard du peu d’adhésion aux soins et du déni de ses troubles.
Le préfet de la Loire-Atlantique n’est pas représenté à l’audience.
Le ministère public demande la confirmation de l’ordonnance entreprise.
Sur la recevabilité de l’appel
Aux termes de l’article
R. 3211-18 du code de la santé publique, le délai d’appel est de dix jours à compter de la notification de l’ordonnance.
Selon l’article R. 3211-19, le premier président ou son délégué est saisi par une déclaration d’appel transmise par tout moyen au greffe de la cour d’appel et la déclaration est enregistrée avec mention de la date et de l’heure.
En l’espèce, M. [R] [W] a formé appel le 14 octobre 2022 d’une décision du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Saint-Nazaire du 13 octobre 2022.
Cet appel, régulier en la forme, sera donc déclaré recevable.
Sur la régularité de la procédure
L’article
L. 3211-11 du code de la santé publique dispose en son 2ème alinéa que ‘le psychiatre qui participe à la prise en charge du patient transmet immédiatement au directeur de l’établissement d’accueil un certificat médical circonstancié proposant une hospitalisation complète lorsqu’il constate que la prise en charge de la personne décidée sous une autre forme ne permet plus, notamment du fait du comportement de la personne, de dispenser les soins nécessaires à son état. Lorsqu’il ne peut être procédé à l’examen du patient, il transmet un avis établi sur la base du dossier médical de la personne’.
En l’espèce, M. [R] [W] reproche au certificat médical de réintégration établi le 5 octobre 2022 par le Dr. [O] de ne pas procéder de constatations personnelles et d’être insuffisamment circonstancié.
Le certificat médical du Dr. [O] relate que M. [R] [W] ‘présente les éléments cliniques suivants : (ses) parents (…) nous signalent des troubles du comportement de M. [R] [W] réapparus depuis quelques jours. Il se montrerait menaçant verbalement, à leur encontre, leur réclamant de l’argent. Les parents ont été alertés par leur notaire et d’autres personnes qui sont inquiets pour eux, signalant une ‘dangerosité’ de M. [R] [W]. Les parents pensent qu’il ne prend pas son traitement et reconsomme de l’alcool. Devant ces éléments faisant craindre une redécompensation, il est nécessaire de réintégrer M. [R] [W] ce jour. Au vu de ces éléments cliniques, les soins psychiatriques sans consentement de M. [R] [W] doivent se poursuivre sous la forme d’une hospitalisation complète’.
Le certificat médical ne motive pas les raisons pour lesquelles M. [R] [W] ne peut pas être examiné, par exemple l’absence de son domicile ou le défaut de soumission au programme de soins. Il se contente de rapporter des informations que le praticien n’a pas lui-même constatées tout en évoquant des ‘éléments cliniques’ sans établir un lien avec le dossier médical du patient.
La procédure doit donc être jugée irrégulière.
Il conviendra donc d’infirmer l’ordonnance entreprise de ce chef et, statuant à nouveau, de déclarer la procédure irrégulière et d’ordonner la mainlevée de l’hospitalisation complète de M. [R] [W].
Toutefois, cette mainlevée prendra effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures à compter du prononcé de la présente ordonnance afin qu’un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi. La mesure d’hospitalisation complète prendra fin dès l’établissement de ce programme de soins ou au plus tard à l’issue du délai précité.
Sur les dépens
Les dépens d’appel seront laissés à la charge du trésor public.
Nous, Philippe BRICOGNE, président de chambre, statuant publiquement et en dernier ressort, en matière de contentieux des soins et hospitalisations sous contrainte,
Recevons M. [R] [W] en son appel,
Infirmons l’ordonnance entreprise,
Statuant à nouveau,
Déclarons la procédure irrégulière,
Ordonnons la mainlevée de la mesure de soins psychiatriques sans consentement sous la forme de l’hospitalisation complète de M. [R] [W],
Disons toutefois que cette mainlevée prendra effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures à compter du prononcé de la présente ordonnance afin qu’un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi et que la mesure d’hospitalisation complète prendra fin dès l’établissement de ce programme de soins ou au plus tard à l’issue du délai précité,
Laissons les dépens à la charge du trésor public.
Fait à Rennes, le 21 octobre 2022 à 11 heures.
LE GREFFIER,PAR DÉLÉGATION,
Philippe BRICOGNE, Président
Notification de la présente ordonnnance a été faite ce jour à M. [R] [W], à son avocat, au CH et ARS/tiers demandeur/curateur-tuteur
Le greffier,
Cette ordonnance est susceptible d’un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.
Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général, PR et JLD
Le greffier