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Extraits :
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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 10
ARRET DU 01 DECEMBRE 2022
(n° , 1 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/06542 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CECYC
Décision déférée à la Cour : Jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de PARIS le 25 novembre 2016 sous le RG n° 15/02419 ; infirmé partiellement par un arrêt de la chambre 6/11 de la Cour d’appel de PARIS rendu le 19 Mars 2019 sous le RG n° 17/01977 lui-même partiellement cassé par la Cour de cassation dans son arrêt n° 324 F-D rendu le 10 mars 2021, ayant renvoyé la cause et les parties devant la Cour d’appel de PARIS autrement composée.
APPELANT
Monsieur [B] [V]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Antoine LEGOUBE, avocat au barreau de PARIS, toque : J151
INTIMEE
S.A. LA CIGALE SA
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Benjamin LOUZIER, avocat au barreau de PARIS, toque : J044
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles
805 et
907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 27 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Nicolas TRUC, Président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Monsieur Nicolas TRUC, Président de la chambre
Madame Gwenaelle LEDOIGT, Présidente de la chambre
Madame Véronique BOST, Vice Présidente placée faisant fonction de conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Sonia BERKANE
ARRET :
– contradictoire
– mis à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article
450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur Nicolas TRUC, Président et par Sonia BERKANE, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signatire.
:
M. [B] [V] a été engagé par la société La Cigale à compter du 1er novembre 1988, en qualité d’intermittent du spectacle, puis comme régisseur général à partir de 1990.
Le 1er octobre 2010, M. [V] a été promu directeur technique et responsable de l’accueil aux termes d’un contrat de travail à durée indéterminée ayant prévu un forfait de 217 jours.
Du 7 octobre 2013 au 25 juin 2014, M. [V] a suivi une formation universitaire dans le cadre du droit individuel à la formation (DIF).
A compter du 26 juin 2014, le contrat de travail de M. [V] a été suspendu, dans le cadre d’arrêts-maladie jusqu’au 6 octobre 2014 puis du 10 octobre 2014 jusqu’au 4 juillet 2019, date de rupture de son contrat de travail.
Le 1er décembre 2016, M. [V] a, par ailleurs, été reconnu invalide 2ème catégorie.
Par lettre du 4 juillet 2019, la société La Cigale a licencié M. [V] pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Le conseil de prud’hommes de Paris, saisi par M. [V] le 26 février 2015, a, par jugement du 25 novembre 2016, notifié le 29 décembre 2016, statué comme suit :
– Dit n’y avoir lieu à résiliation judiciaire du contrat de travail
– Déboute M. [B] [V] de l’ensemble de ses demandes
– Déboute la SA La Cigale de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles
– Condamne M. [B] [V] aux entiers dépens.
Suivant arrêt du 19 mars 2019, la cour d’appel de Paris, sur appel de M. [V], a confirmé le jugement prud’homal en toutes ses dispositions et débouté M. [V] de l’ensemble de ses demandes.
Sur pourvoi de M. [V], la Cour de cassation, par décision du 10 mars 2021 et sur moyen relevé d’office, a cassé et annulé l’arrêt rendu le 19 mars 2019 par la cour d’appel de Paris, sauf en ce qu’il a débouté M. [V] de sa demande de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de sécurité de résultat, et la société La Cigale de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive :
La motivation de cet arrêt est la suivante :
« Pour débouter le salarié de sa demande au titre des heures supplémentaires, des congés payés afférents, de sa demande de dommages-intérêts pour privation de repos compensateurs et de sa demande d’indemnité au titre du travail dissimulé, l’arrêt retient que le salarié conclut à la nullité du forfait de deux cent dix-sept jours en ce qu’il stipule à son contrat du 1er octobre 2010 que ‘le forfait annuel est convenu pour une durée d’un an à a compter de la prise d’effet du contrat de travail et il est renouvelable par tacite reconduction ‘d’année en année’, et soutient que ce forfait devait lui être soumis chaque année ainsi que cela résulterait de l’article 27.5 de la convention collective nationale de la branche chanson, variétés, jazz musiques actuelles du 30 avril 2003 qui disposait que ‘le forfait en jours est nécessairement annuel. Il est convenu pour une durée de 1 an renouvelable, dès la prise d’effet du contrat de travail ou de l’avenant qui le prévoit; en conséquence, un contrat à durée déterminée conclu de date à date pour une durée inférieure à 1 an ne peut pas inclure une convention de forfait en jours’.
9. L’arrêt ajoute qu’il ne s’évince pas des termes de cette convention la condition que lui prête le salarié, la clause de renouvellement tacite du forfait n’étant par ailleurs pas contraire au droit commun du contrat de travail, et tandis que la convention collective nationale qui est substituée à la convention du 30 avril 2003 adoptée pour les entreprises du secteur privé du spectacle vivant entrée en vigueur le 1er juillet 2013 dispose en son article 8.11 que ‘le recours au forfait en jours nécessite l’accord exprès de chaque salarié concerné’. Ce dont il déduit que la mise en oeuvre d’une convention de forfait en jours devant résulter d’un écrit, c’est-à-dire d’une clause expresse figurant dans le contrat de travail ou dans un avenant à celui-ci, il en résulte que le moyen manque en droit et doit être écarté.
10. En statuant ainsi, alors que l’article 27.5 de la convention collective nationale de la branche chanson, variété, jazz, musiques actuelles du 30 avril 2003, se limite à prévoir, pour les cadres soumis à une convention annuelle de forfait en jours, d’une part, que le forfait en jours s’accompagne d’un contrôle du nombre de jours travaillés au moyen d’un document de contrôle établi en deux exemplaires signé chaque semaine par le salarié puis par l’employeur ou son représentant, faisant apparaître le nombre et la date des journées travaillées, ainsi que la qualification des jours non travaillés en repos hebdomadaires, congés payés, congés conventionnels ou jours de repos au titre de la réduction du temps de travail, d’autre part, que le salarié bénéficie, chaque année, d’un entretien avec son supérieur hiérarchique au cours duquel seront évoquées l’organisation et la charge de travail de l’intéressé, et l’amplitude de ses journées en ajoutant que cette amplitude et cette charge de travail devront rester raisonnables et assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail des intéressés, que ces dispositions en ce qu’elles ne permettent pas à l’employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable, ne sont pas de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps du travail de l’intéressé, ce dont il se déduisait que la convention de forfait en jours était nulle, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
11. La cassation sur le moyen relevé d’office, entraîne, en application de l’article
624 du code de procédure civile, la cassation par voie de conséquence du chef de disposition critiqué par le quatrième moyen se rapportant au rejet de la demande de résiliation judiciaire et à ses conséquences, qui s’y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
, la Cour
Casse et annule, sauf en ce qu’il déboute M. [V] de sa demande de dommages-intérêts pour violation de l’obligation de sécurité de résultat et la société La Cigale de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, l’arrêt rendu le 19 mars 2019, entre les parties, par la cour d’appel de Paris.’
La cour d’appel de Paris, désignée comme juridiction de renvoi, a été saisie par requête de M. [V] du 13 juillet 2021.
Selon ses dernières conclusions remises et notifiées le 31 août 2022, M. [V] soutient devant la cour d’appel de renvoi les demandes suivantes ainsi exposées ;
– Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Paris le 25 novembre 2016 en toutes ses dispositions,
En conséquence, et statuant à nouveau,
– Constater que la société La Cigale s’est rendue coupable de manquements particulièrement graves à l’égard de M. [V] ;
– Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [V] aux torts exclusifs de la société La Cigale à la date du 4 Juillet 2019, date du licenciement de M. [V];
– Fixer, à titre principal, le salaire de référence de M. [V] à la somme de 8 463,765 euros, et, à titre subsidiaire, fixer le salaire de référence de M. [V] à la somme de 5 385,60 euros,
A titre principal,
– Dire et juger que cette résiliation produit les effets d’un licenciement nul ;
A titre subsidiaire,
– Dire et juger que cette résiliation produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
– En conséquence, condamner la société La Cigale à verser les sommes suivantes au profit de M. [V] :
A titre principal,
– 56 786,95 euros à titre de rappel de salaire ;
– 5 678,69 euros à titre de congés payés afférents ;
– 26 130,34 euros à titre de dommages et intérêts du fait de la privation des repos compensateurs ;
– 50 782,59 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé ;
– 25 391,29 euros à titre d’indemnité de préavis ;
– 2 539,13 euros à titre de congés payés afférents ;
– 27 581,86 euros à titre de solde de l’indemnité de licenciement,
– 230 000 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement nul ou licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
A titre subsidiaire,
– 50782,59 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de sécurité de résultat ;
– 16 156,80 euros à titre d’indemnité de préavis ;
– 1 615,68 euros à titre de congés payés afférents ;
– 150 000 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement nul ou licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
En tout état de cause,
– 10 000 euros au titre de l’article
700 du code de procédure civile.
– Ordonner la délivrance de bulletins de salaire conformes aux salaires versés sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
– Assortir les condamnations qui seront prononcées des intérêts au taux légal à compter de la saisine du Conseil ;
– Condamner la société La Cigale aux entiers dépens de l’instance, y compris les frais éventuels d’exécution.
Selon ses dernières conclusions remises et notifiées le 8 novembre 2021, la société La Cigale fait valoir les demandes suivantes :
– Confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [V] de l’ensemble de ses demandes ;
– Débouter M. [V] de l’ensemble de ses demandes ;
– Condamner M. [V] à verser à la société 10 000 euros au titre de l’article
700 du code de procédure civile ;
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 21 septembre 2022.
Conformément aux dispositions de l’article
455 du Code de procédure civile, il est renvoyé pour plus ample explication aux conclusions des parties évoquées ci-dessus.
Compte tenu du périmètre de cassation de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 19 mars 2019, la cour d’appel de renvoi est tenu de statuer à nouveau sur les points suivants :
1) Sur le harcèlement moral
Selon l’article
L 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Lorsque survient un litige relatif à l’application des articles
L 1152-1 à L 1152-3 et
L 1153-1 à
L 1153-4 du code du travail, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
A l’appui de sa demande en résiliation de son contrat de travail, M. [V] reproche en premier lieu à la société La Cigale une situation de harcèlement moral qu’il estime caractérisée par les faits suivants :
– l’annonce répétée de son éviction et des pressions exercées pour le contraindre à signer une rupture conventionnelle,
– l’absence de fourniture de tout travail à son retour de formation,
– la mise à l’écart des réunions techniques,
– l’absence de paiement des heures supplémentaires accomplies,
– la surcharge de travail pour la période antérieure à son départ en formation dans le cadre du CIF,
– le non-respect de l’obligation d’assurer un suivi de la charge de travail,
– l’absence de garanties suffisantes dans l’accord sur le forfait en jours permettant d’assurer la protection de la santé et de la sécurité du salarié,
– le retard dans les paiements des indemnités versées par la prévoyance à défaut pour la société La Cigale d’avoir accompli les diligences utiles en temps et en heure,
– les accusations formulées à son encontre ,
– la dégradation consécutive de l’état de santé tant physique que psychologique du salarié.
Mais il sera constaté ainsi que le précise l’employeur que M. [V] a bénéficié d’une formation universitaire dans le cadre du droit individuel à la formation du 7 octobre 2013 au 25 juin 2014, avant que son contrat de travail ne soit suspendu dans le cadre d’arrêts-maladie jusqu’au 6 octobre 2014 puis du 10 octobre 2014 jusqu’au 4 juillet 2019, date de son licenciement pour inaptitude.
Il apparaît donc que M. [V] n’a effectivement travaillé que 4 jours durant la période susvisée après une longue période d’absence au cours de laquelle il a dû être pourvu à son remplacement. Cette très courte reprise du travail ne saurait être tenue pour significative d’une volonté de le priver de ses fonctions ou prérogatives compte tenu de la réorganisation de son retour dans l’entreprise, étant observé qu’aucun document ne permet de constater qu’il aurait été exclu de réunions ou missions auxquelles il aurait eu vocation à participer, ce qui ne résulte pas, en toute hypothèse, des correspondances, messages et pièces produits.
D’autre part, aucun élément objectif, au delà des seules affirmations de M. [V], ne démontre qu’il ait pu lui être proposé lors de son retour une rupture conventionnelle, que l’employeur était parfaitement en droit d’envisager, dans des termes, circonstances ou conditions pouvant être tenus pour harcelants.
La société La Cigale verse par ailleurs aux débats des documents (pièces 39 à 40) prouvant suffisamment qu’elle n’a pas manqué de diligences pour reverser à M. [V] les indemnités journalières perçues de l’organisme de prévoyance dont elle ne saurait être tenue des retards ainsi que des attestations de salariés que la cour retient comme crédibles et convaincantes (Mmes et MM. [H], [R], [P] et [Y]) déniant une attitude d’hostilité à l’égard de l’appelant, une privation de travail lors de son bref retour dans l’entreprise ou des reproches ou accusations dont il aurait pu être l’objet.
Il sera également relevé qu’aucune pièce produite ne permet de constater qu’avant son départ pour exercer son droit à formation au mois d’octobre 2013, la société La Cigale ait imposé à M. [V] une charge de travail trop lourde dont ce dernier aurait eu à se plaindre et pouvant constituer, même à retenir un insuffisant contrôle de sa charge de travail dans le cadre de son forfait, un fait de harcèlement. Aucun élément ne permet de constater que M. [V] ait adressé une quelconque plainte ou demande sur ce point à l’employeur avant la suspension de son contrat de travail.
En fin, les documents médicaux dont M. [V] se prévaut, notamment les certificats de son médecin psychiatre des 23 et 30 décembre 2014 (ses pièces 44, 99 et 263), ne comportent aucun constat objectif et direct sur sa situation professionnelle et ne saurait convaincre de la réalité du harcèlement invoqué d’autant que son psychiatre a admis l’irrégularité de ces certificats dans une correspondance adressée à l’employeur le 18 octobre 2016, quand bien-même ce praticien a pu revenir sur les termes de celle-ci dans une lettre postérieure (pièces 47 de l’employeur et 275 du salarié). En outre, M. [V] a été déclaré apte à son poste de travail par le médecin du travail le 6 octobre 2014 sous réserve d’un aménagement du port des charges, soit une restriction sans relation avérée avec un quelconque harcèlement (sa pièce 30).
En l’état de ces éléments et constatations, pris dans leur ensemble, il n’y a pas lieu de retenir une situation de harcèlement moral subie par M. [V].
2) Sur le forfait en jours et les heures supplémentaires
Il sera constaté, ainsi que le soutient M. [V], la nullité de son forfait en jours conclu en application de l’article 27.5 de la convention collective nationale de la branche chanson, varité, jazz musique actuelle du 30 avril 2003, dès lors que ces dispositions conventionnelles ne permettent pas à l’employeur de remédier à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable, ne sont pas de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition dans le temps du travail de l’intéressé, ainsi que l’a retenu la Cour de cassation dans son arrêt du 10 mars 2021.
C’est donc en vain que la société La Cigale maintient dans ses dernières écritures que le forfait de M. [V] serait régulier. Ce dernier est ainsi recevable à réclamer le paiement d’heures supplémentaires selon les règles du droit commun.
Selon l’article
L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
M. [V] soutient que sa demande en paiement d’heures supplémentaires est justifiée par :
– la diversité de ses missions et responsabilités résultant notamment de sa fiche de poste l’ayant conduit à effectuer un horaire mensuel supérieur à 151,67 heures
– les plannings des représentations pour les années 2007 à 2013
– les courriels échangés en interne
– des attestations évoquant sa charge de travail (MM. [M], [O], [F], [L])
– un décompte de son amplitude horaire journalière et quotidienne.
Ces éléments sont suffisamment précis pour établir que M. [V] a pu être amené, en raison de ses fonctions, à accomplir des heures supplémentaires et permettent en toute hypothèse une discussion utile par l’employeur de la réalité des horaires accomplis.
Pour contester les réclamations du salarié, la société La Cigale verse notamment aux débats les état des jours travaillés transmis par M. [V] lui-même mais qui ne comportent aucune indication d’horaires (pièces 31 à 33), un tableau reconstituant les horaires que le salarié aurait réalisés (pièce 48) et des attestations évoquant son travail (MM [H] et [I], pièces 20 et 27).
Mais ces documents, en l’absence de tout enregistrement fiable et objectif du temps de travail réalisé, ne sauraient prouver que le temps de travail de M. [V] ne dépassait pas la durée légale de travail.
En l’état des éléments d’appréciation produit, il sera alloué à M. [V], sur la période considérée (2012 à 2013), un rappel d’heures supplémentaires arbitré à 4 542,95 euros, outre l’indemnité de congés payés afférente.
3) Sur les repos compensateurs
La cour ne constatant pas que M. [V] ait accompli des heures supplémentaires au-delà du contingent annuel applicable pouvant lui ouvrir droit à des repos compensateurs, la demande en dommages et intérêts à ce titre sera rejetée.
4) Sur le travail dissimulé
La preuve d’une volonté imputable à l’employeur de dissimuler l’emploi ou l’activité de M.[V] au sens des articles L 8221-3 et suivants du code du travail et qui ne saurait résulter de la seule créance salariale retenue et de l’annulation du forfait en jours, n’étant pas suffisamment démontrée, aux yeux de la cour, la demande d’indemnité de travail dissimulé sera rejetée.
5) Sur l’obligation de sécurité
La demande en dommages et intérêts au titre de l’obligation de sécurité maintenue par M.[V] devant la cour d’appel de renvoi ne sera pas reçue dès lors que l’arrêt de la Cour de cassation du 10 mars 2021 a expressément exclu du champ de la cassation le rejet de cette demande par l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 19 mars 2019.
6) Sur la résiliation du contrat de travail
Les dispositions combinées des articles
L 1231-1 du code du travail et
1224 du code civil permettent au salarié de demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur en cas de manquements suffisamment graves de ce dernier à ses obligations et qui font obstacle à la poursuite de la relation de travail.
Il sera constaté que le salarié n’a jamais contesté son forfait comme son temps de travail ou sollicité le paiement de rappels de rémunération avant l’engagement de la procédure prud’homale en 2015 alors qu’il ne travaillait plus dans l’entreprise (excepté 4 jours) depuis le mois d’octobre 2013 et que la créance d’heures supplémentaires constatée porte sur une période ancienne.
En l’état de ces constatations, il ne sera retenu aucun manquement grave et actuel de l’employeur à ses obligations pouvant justifier à la date du licenciement soit le 4 juillet 2019, la résiliation du contrat de travail à ses torts.
La décision prud’homale sera ainsi confirmée en ce qu’elle a dit n’y avoir lieu à résiliation du contrat de travail et rejeté les demandes subséquentes de M. [V].
7) Sur les autres demandes
L’équité exige d’allouer 1 500 euros à M. [V] en compensation de ses frais non compris dans les dépens en cause d’appel par application de l’article
700 du code de procédure civile.
Les entiers dépens seront laissés à la charge de la société La Cigale qui succombe à l’instance.
PAR CES MOTIFS
La cour de renvoi statuant dans les limites de sa saisine :
Confirme le jugement du conseil de prud’hommes de Paris du 25 novembre 2016 sauf à annuler le forfait en jours de M. [V] et à lui allouer :
– 4 542, 95 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires ;
– 454,29 euros au titre de l’indemnité de congés payés afférente ;
– 1 500 euros au titre de l’article
700 du code de procédure civile ;
Dit que les créances salariales susvisées porteront intérêts au taux légal à compter du 10 mars 2015, date de convocation de l’employeur devant la juridiction prud’homale et la créances pourfrais irrépétibles à compte de cette décision ;
Enjoint à l’employeur de délivrer au salarié, sans qu’il y ait lieu à astreinte, un bulletin de salaire rectifié conforme à cette décision ;
Rejette toute demande plus ample ou contraire ;
Condamne la société La Cigale aux entiers dépens.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT