Votre panier est actuellement vide !
Attention à toujours encadrer la reprise des actes de la société en formation sous peine de ne pouvoir récupérer le paiement de ses factures.
En l’espèce, au moment du premier contrat, la société [P] n’était pas constituée et elle était toujours en cours d’immatriculation le 06/12/2019.
Or, aux termes de l’article 1843 du code civil, ‘les personnes qui ont agi au nom d’une société en formation avant l’immatriculation sont tenues des obligations nées des actes ainsi accomplis, avec solidarité si la société est commerciale, sans solidarité dans les autres cas.
La société régulièrement immatriculée peut reprendre les engagements souscrits, qui sont alors réputés avoir été dès l’origine contractés par celle-ci’, l’article L.210-6 du code de commerce précisant que ‘les personnes qui ont agi au nom d’une société en formation avant qu’elle ait acquis la jouissance de la personnalité morale sont tenues solidairement et indéfiniment responsables des actes ainsi accomplis, à moins que la société, après avoir été régulièrement constituée et immatriculée, ne reprenne les engagements souscrits. Ces engagements sont alors réputés avoir été souscrits dès l’origine par la société’.
Or, aucun extrait K-bis du registre du commerce et des sociétés justifiant de la date d’immatriculation de la société [P] n’est produit. De même, aucun procès-verbal de délibération de la société [P] prévoyant la reprise des engagements pris par son dirigeant n’est versé aux débats.
Dans ces conditions, M. [L] n’apporte pas la preuve d’une reprise de ses engagements par sa société, et dès lors, la solidarité entre lui-même et la société [P] a été valablement invoquée.
N° RG 22/00102 – N° Portalis DBVM-V-B7G-LQHJ
N° Minute :
Copies délivrées le
Copie exécutoire
délivrée le
à
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
C O U R D ‘ A P P E L D E G R E N O B L E
JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT
ORDONNANCE DE REFERE DU 09 NOVEMBRE 2022
ENTRE :
DEMANDEURS suivant assignation du 03 août 2022
Monsieur [I] [L]
né le 21 septembre 1993 à [Localité 1] ([Localité 1])
de nationalité française
[Adresse 4]
[Localité 1]
représenté par Me Sandrine CUVIER de la SELARL AEGIS, avocat au barreau de VALENCE
S.A.S. [L] [M] prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 1]
représentée par Me Sandrine CUVIER de la SELARL AEGIS, avocat au barreau de VALENCE
ET :
DEFENDERESSE
S.A.S.THE CODING MACHINE prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par Me Romain LACOSTE, avocat au barreau de PARIS substituant Me Maud EGLOFF-CAHEN, avocat au barreau de PARIS
DEBATS : A l’audience publique du 12 octobre 2022 tenue par Anne-Laure PLISKINE, conseillère déléguée par la première présidente de la cour d’appel de Grenoble par ordonnance du 24 juin 2022, assistée de Marie-Ange BARTHALAY, greffier
ORDONNANCE : contradictoire
prononcée publiquement le 09 NOVEMBRE 2022 par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
signée par Anne-Laure PLISKINE, conseillère déléguée par la première présidente et par Marie-Ange BARTHALAY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le 06/03/2019, M. [L] a confié à la société The Coding Machine la conception d’une application informatique à destination des entreprises, et son back office, au prix de 11.000 euros HT, une facture de ce montant étant émise le 13/03/2019.
Le 25/04/2019, un contrat a été conclu entre la société The Coding Machine et la société de Keyser [M] ([P]), représentée par M. [L], pour le développement d’une application mobile Android 4.1 et IOS 9.0, au prix forfaitaire de 11.550 euros HT, 4 factures étant émises pour ce montant entre le 26/04 et le 09/06/2019.
Le 16/05/2019, un second contrat a été signé entre les mêmes parties, pour la poursuite du développement de l’application, au prix de 15.575 euros HT, 4 factures étant émises entre les 27/05 et 29/07/2019.
Entre les 26/06 et 27/10/2019, la société The Coding Machine a effectué en régie des prestations, ce qui a donné lieu à 4 factures, pour la somme totale de 42.997,62 euros HT.
Le 26/03/2020, elle a mis en demeure la société The Coding Machine et M. [L] de payer la somme de 55.039,54 euros TTC.
Le 03/07/2020, elle a déposé une demande en injonction de payer cette somme à l’encontre de la société de Keyser [M], outre 1.000 euros au titre des frais visés à l’article 700 du code de procédure civile devant le tribunal de commerce de Romans-sur-Isère.
Par ordonnance du 13/07/2020, il a été enjoint par le délégataire du président du tribunal à la société de Keyser [M] de payer à la société The Coding Machine la somme de 55.039,54 euros en principal outre 250 euros au titre des frais visés à l’article 700 du code de procédure civile.
Cette ordonnance a été signifiée le 27/08/2020.
La société de Keyser [M] a formé opposition et a appelé par acte du 06/07/2021 en intervention forcée M. [L] aux fins de le voir condamné solidairement à payer les sommes réclamées.
M. [L] et la société [P] ont demandé au premier juge d’écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir concernant les demandes formées par la société The Coding Machine.
Par jugement du 09/03/2022, le tribunal de commerce de Romans-sur-Isère a :
– rejeté comme mal fondée l’opposition de la société de Keyser [M] ;
– confirmé l’injonction de payer ;
– condamné solidairement la société de Keyser [M] et M. [L] à payer à The Coding Machine la somme de 55.039,54 euros en principal outre intérêts au taux légal à compter du 26/03/2020, outre celle de 2.500 euros de dommages-intérêts pour résistance abusive et 1.000 euros au titre des frais visés à l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
La société de Keyser [M] et M. [L] ont interjeté appel de cette décision.
Par acte du 03/08/2022, ils ont assigné en reféré devant la première présidente de la cour d’appel de Grenoble la société The Coding Machine, aux fins de voir arrêter l’exécution provisoire du jugement déféré et en paiement de 4.000 euros au titre des frais visés à l’article 700 du code de procédure civile, faisant valoir dans leurs conclusions en substance que :
– M. [L] a réglé la facture du 13/03/2019, la société The Coding Machine reconnaissant avoir perçu 18.607,60 euros du 18/03 au 20/05/2019, soit 13.200 euros au titre du contrat et le solde au titre de la société [P] en formation ;
– aucune solidarité n’a été stipulée entre M. [L] et la société [P], ce qui constitue un moyen sérieux de réformation de la décision déférée ;
– le premier juge n’a pas répondu au moyen tiré de ce que M. [L] a contracté au nom de la société [P] et pour le compte de celle-ci, alors qu’elle était une société en formation ;
– la société [P] ne doit pas 55.039,54 euros, car elle a réglé les prestations effectivement réalisées, pour 42.307,60 euros, le solde n’étant pas justifié, en l’absence de bon de commande ou de devis ;
– la facturation des prestations en régie n’a pas été acceptée par le client ;
– l’application n’a pas été terminée et n’est pas expoitable en l’état ;
– l’exécution du jugement entraînerait des conséquences manifestement excessives, en l’absence de trésorerie pour la société, M. [L] ne disposant pas non plus des fonds nécessaires, n’ayant eu pour revenus en 2021 que 10.815 euros.
Pour conclure au débouté des requérants de leurs demandes et réclamer reconventionnellement 3.000 euros au titre des frais visés à l’article 700 du code de procédure civile, la société The Coding Machine réplique que :
– la réalité de ses prestations est établie par les comptes-rendus hebdomadaires faits, mentionnant les honoraires facturés au fur et à mesure de l’avancement du projet et par les mails de M. [L], faisant état des bugs constatés ;
– M. [L] a sollicité des délais de paiement le 04/10/2019, et annoncé des règlements les 06/12/2019, 30/01 et 24/03/2020, reconnaissant ainsi le principe de sa dette ;
– ce sont les dispositions de l’article 1843 du code civil, relatives aux sociétés en formation, qui s’appliquent ;
– M. [L] a pris des engagements répétés de régler personnellement les factures dues par la société [P] ;
– il a accepté les prix des prestations vendues ;
– la société [P] ne produit pas de justificatifs de difficultés économiques alléguées.
MOTIFS DE LA DECISION :
– Sur l’arrêt de l’exécution provisoire :
Selon l’article 514-3 du code de procédure civile, ‘en cas d’appel, le premier président peut être saisi afin d’arrêter l’exécution provisoire de la décision lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives. La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d’observations sur l’exécution provisoire n’est recevable que si, outre l’existence d’un moyen sérieux d’annulation ou de réformation, l’exécution provisoire risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance’.
– Sur l’existence d’un moyen sérieux de réformation :
* les prestations de la société The Coding Machine
La société The Coding Machine verse aux débats les spécifications détaillées V0 et les maquettes back office du projet, les factures, faisant apparaître de multiples règlements, et de très nombreux courriels adressés par elle à la société [P], entre avril et septembre 2019, faisant le point de l’avancement du projet, avec un récapitulatif final.
Sont produits aussi 7 courriels de M. [L], de août 2019 à mars 2020, sollicitant des améliorations ou des corrections, (écrivant le 03/10/2019 : ‘on voit le bout et le début de cette super aventure’) et promettant des règlements. Il en résulte que les prestations promises par la société The Coding Machine ont été accomplies, puisque M. [L] a pu suivre chaque semaine l’évolution de l’application et qu’il n’a jamais contesté les sommes réclamées.
* la facturation en régie
Elle a été nécessairement acceptée par les requérants, en raison du courant d’affaires existant entre les parties, établi par des factures, mails, commandes et courriers, et n’a jamais été du reste contestée avant l’engagement de la procédure par la société The Coding Machine.
* la solidarité entre M. [L] et la société [P]
Au moment du premier contrat, la société [P] n’était pas constituée et elle était toujours en cours d’immatriculation le 06/12/2019, comme M. [L] l’écrit dans un mail (pièce défendeur n° 48).
Aux termes de l’article 1843 du code civil, ‘les personnes qui ont agi au nom d’une société en formation avant l’immatriculation sont tenues des obligations nées des actes ainsi accomplis, avec solidarité si la société est commerciale, sans solidarité dans les autres cas. La société régulièrement immatriculée peut reprendre les engagements souscrits, qui sont alors réputés avoir été dès l’origine contractés par celle-ci’, l’article L.210-6 du code de commerce précisant que ‘les personnes qui ont agi au nom d’une société en formation avant qu’elle ait acquis la jouissance de la personnalité morale sont tenues solidairement et indéfiniment responsables des actes ainsi accomplis, à moins que la société, après avoir été régulièrement constituée et immatriculée, ne reprenne les engagements souscrits. Ces engagements sont alors réputés avoir été souscrits dès l’origine par la société’.
Or, aucun extrait K-bis du registre du commerce et des sociétés justifiant de la date d’immatriculation de la société [P] n’est produit. De même, aucun procès-verbal de délibération de la société [P] prévoyant la reprise des engagements pris par son dirigeant n’est versé aux débats.
Dans ces conditions, M. [L] n’apporte pas la preuve d’une reprise de ses engagements par sa société, et dès lors, la solidarité entre lui-même et la société [P] a été valablement invoquée.
Il en résulte que les requérants ne justifient pas de moyens suffisamment sérieux de réformation de la décision attaquée.
Les conditions fixées par le texte susmentionné étant cumulatives et non alternatives, il n’y a ainsi pas lieu d’arrêter l’exécution provisoire.
– Sur les frais irrépétibles :
A ce stade de la procédure, l’équité ne commande pas d’ores et déjà l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés par la société The Coding Machine.
PAR CES MOTIFS :
Nous, Anne-Laure Pliskine, conseillère déléguée par la première présidente, statuant en référé, publiquement, par ordonnance contradictoire, mise à disposition au greffe :
Rejetons la demande d’arrêt de l’exécution provisoire du jugement du tribunal de commerce de Romans sur Isère du 09/03/2022 ;
Disons n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamnons in solidum M. [L] et la société de Keyser [M] aux dépens.
Le greffier La conseillère déléguée
M.A. BARTHALAY A.L. PLISKINE