Droit des applications mobiles : 13 octobre 2021 Cour de cassation Pourvoi n° 20-10.765

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Droit des applications mobiles : 13 octobre 2021 Cour de cassation Pourvoi n° 20-10.765
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COMM.

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COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 octobre 2021

Rejet non spécialement motivé

M. GUÉRIN, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 10495 F

Pourvoi n° Q 20-10.765

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 13 OCTOBRE 2021

1°/ la société Dunasys ingenierie, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],

2°/ la société D-R group, anciennement dénommée Dunasys, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° Q 20-10.765 contre l’arrêt rendu le 31 octobre 2019 par la cour d’appel de Versailles (14e chambre), dans le litige les opposant :

1°/ à M. [O] [K], domicilié [Adresse 4],

2°/ à la société Smarto, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Boisselet, conseiller, les observations écrites de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat des sociétés Dunasys ingenierie et D-R Group, de la SCP Ortscheidt, avocat de M. [K] et de la société Smarto, et l’avis de Mme Beaudonnet, avocat général, après débats en l’audience publique du 22 juin 2021 où étaient présents M. Guérin, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Boisselet, conseiller rapporteur, Mme Darbois, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les sociétés Dunasys ingenierie et D-R Group aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par les sociétés Dunasys ingenierie et D-R Group et les condamne à payer à M. [K] et à la société Smarto la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize octobre deux mille vingt et un.
MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour les sociétés Dunasys ingenierie et D-R Group.

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué D’AVOIR infirmé l’ordonnance rendue par le tribunal de commerce de Nanterre le 8 février 2019 en toutes ses dispositions, D’AVOIR rétracté les ordonnances sur requête rendues les 30 avril, 23 mai et 14 juin 2018, D’AVOIR annulé le procès-verbal de constat d’huissier de justice du 28 juin 2018 et les opérations de visite du même jour au siège de la société Smarto et D’AVOIR ordonné à la SCP [B]-[Y], huissiers de justice, de restituer à M. [K] et à la société Smarto l’ensemble des pièces appréhendées lors des opérations de constat du 28 juin 2018 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE :
« B- L’existence d’un motif légitime
Au soutien de leur requête visant à rechercher les éléments de preuve nécessaires à une action en responsabilité délictuelle et en indemnisation de leurs préjudices, les sociétés D-R Group et Dusnasys Ingénierie dénoncent des actes de concurrence déloyale par utilisation de leur savoir-faire et de la technologie innovante qu’elles ont développée en matière de boîtiers connectés pour véhicules depuis 2008, et en dernier lieu à travers leur produit “D-CAR” offrant une multitude de services, qu’elles estiment avoir été copié par la société Smarto avec- la commercialisation en 2017 de ses boîtiers “CarAlgo” et “MicroLihk”.
Les requérantes, parallèlement aux actes de concurrence déloyale dénoncés,font état de soupçons d’abus du droit de céder ses actions commis par M. [K], en sa qualité d’actionnaire de la société D-R Group, ce dernier ayant à deux reprises notifié son souhait de céder ses actions à la société Smarto qu’il dirige, afin de faire entrer sa société concurrente dans le capital social de la société Dunasys.
Il résulte de l’article 145 que le demandeur à la mesure d’instruction n’a pas à démontrer l’existence des faits qu’il invoque puisque cette mesure in futurum est destinée à les établir, mais qu’il doit justifier d’éléments rendant crédibles les griefs allégués.
* sur les actes de concurrence déloyale
Il est constant que M. [K] a créé au mois de février 2014, peu de temps après son licenciement le 11 octobre 2013, une société d’ingénierie concurrente de son ancien employeur, la société Smarto, et que le conseil des prud’hommes de Nanterre l’a condamné, par jugement du 20 avril 2017, pour n’avoir pas respecté la clause de non-concurrence d’une durée de un an stipulée dans son contrat de travail et dont il n’avait pas été délié par la société Dunasys, un appel ayant été toutefois interjeté de ce jugement.
Il est tout aussi : constant que la société Dunasys justifie avoir développé des boîtiers connectés pour véhicules à partir notamment de la solution technique Telediag pour laquelle elle a présenté le 24 juillet 2013 une offre commerciale de développement de prototypes à PSA Peugeot Citroën par l’intermédiaire de M. [K], son directeur technique, en commercialisant un produit “DCAR” à partir de 2014 décliné à compter de l’année 2016 sous deux formes “D-CAR Bluetooth” et “D-CAR 3G”.
Il est par ailleurs établi que la société Smarto a développé dans un premier temps des objets connectés pour le grand public dans le domaine du sport et delà santé pour se tourner ensuite vers les “dongle” à partir de 2015, étant souligné que M. [K] n’était alors plus lié par la clause de non-concurrence.
Si les “dongle” commercialisés par la société Smarto à compter de juillet 2017 présentent des similitudes apparentes de forme avec ceux des sociétés Dunasys, la cour constate toutefois que tous les “dongle” vendus sur le marché se présentent comme des boîtiers connectés plus ou moins similaires.
De même la plupart de ces produits proposent tous la même technologie OBD/CAN/Bluethooth et permettent l’affichage d’informations en temps réel sur smartphones via des applications mobiles, étant relevé que les sociétés Dunasys ne commercialisent que les boîtiers sans aucune application mobile, contrairement à la société Smarto.
Les fonctionnalités proposées par les sociétés Dunasys se retrouvent également chez bon nombre de sociétés concurrentes et pour certaines, n’existent pas dans les produits Smarto (GPS pour la géolocalisation, carte Wifi et 3 G, SD-Card pour les enregistrements en local, protocole MQTT pour la sécurisation des données), ce qui n’est pas contredit par les sociétés intimées.
Il peut être ajouté que cette technologie a été explorée par un grand nombre de “Start-up” ainsi que l’explique un article de presse sur les “nouveaux acteurs de la voiture connectée” en date du 10 juillet 2017, sur le site internet de l’Observatoire du véhicule d’entreprise (pièce appelants 22), qui ne mentionne d’ailleurs pas les produits D-CAR commercialisés par les sociétés Dunasys dont la renommée n’est nullement démontrée.
N’est pas plus pertinente l’allégation selon laquelle des années de recherche auraient été nécessaires pour développer un “dongle OBD”, s’agissant d’un domaine dans lequel les évolutions technologiques sont très rapides et où la recherche et le développement s’inscrivent nécessairement sur des périodes plus courtes, ce qui est expressément mentionné par plusieurs sociétés créées en 2014 ou 2015, telles que les sociétés Drust, Movibia (devenue Eliocity) et Awaken.
Il peut être ajouté que les développements des appelants relatifs à l’absence de débauchage de salariés ou de détournement de clients sont sans objet, ces éléments n’étant pas invoqués dans leur requête par les sociétés Duansys au soutien de leur demande de mesure probatoire.
La cour relève également qu’il n’existe aucun indice :
– d’un quelconque transfert de savoir-faire par les cinq anciens salariés ingénieurs de Dunasys (liste pièce 41) au profit de la société Smarto, lesquels ont rejoint pour quatre d’entre eux la société LGM Group Vélizy, seule l’ancienne responsable RH, Mme [U], qui a quitté la société Dunasys en novembre 2013, ayant été engagée par la société Smarto le 2 février 2015,
– sur un. détournement de clientèle par la société Smarto, étant souligné que la liste produite aux débats et établie par les requérantes, d’”anciens et actuels” clients des sociétés Dunasys (pièce 40), ne repose que sur leurs affirmations sans aucun élément) justificatif, et qu’il est établi par les appelants que les trois clients qu’ils reconnaissent avoir “en commun”, les sociétés Smile, Philog et Oocar, sont pour deux d’entre eux, Smile et Philog, des clients de la branche “assistance technique” qui n’est pas concernée par le présent litige tandis que la société Oocar n’a jamais été cliente des sociétés Dunasys ainsi qu’en atteste son président
Il convient de rappeler à cet égard que les sociétés requérantes ne peuvent se prévaloir des résultats de la mesure d ‘instruction, et en particulier du procès-verbal de constat dressé le 28 juin 2018, pour soutenir qu’il existe un plus grand nombre de clients communs aux sociétés en litige et il est en outre parfaitement inopérant pour les requérantes d’inverser la charge de la preuve qui leur incombe en énonçant que les appelants ne démontrent pas qu’il n’y aurait que trois clients en commun mais également qu’ils n’établissent pas l’absence d’utilisation par eux de son savoir-faire et de sa documentation technique.
Enfin il résulte des pièces produites aux débats, qui ne sont pas utilement contredites par les sociétés Dunasys, que celles-ci n’ont subi aucune baisse de leur chiffre d’affaires et que l’activité de vente des produits litigieux ne représente qu’une faible proportion du chiffre d’affaires respectif des sociétés concurrentes, soit moins de 2,5% de leur chiffre d’affaires.
Dès lors, en l’absence d’un faisceau d’indices suffisants sur le détournement allégué du savoir-faire des sociétés Dunasys par la société Smarto à travers les agissements de son dirigeant, M. [K], le motif légitime n’est pas caractérisé au soutien de la demande de mesure d’instruction in futurum.
* sur l’abus du droit de céder ses actions
La société D-R Group invoque la nécessité de rechercher des éléments de preuve de nature à établir un éventuel abus commis par M. [K] de son droit de céder ses 140 000 actions à la société Smarto, en faisant état des projets de cession d’actions successifs qui lui ont été notifiés par son actionnaire les 28 avril 2017 (13 000 actions), 5 janvier 2018 (27 000 actions) et 10 avril 2019 (30 000 actions), par “blocs d’actions”, à un prix manifestement excessif eu égard à l’évaluation faite par F expert judiciaire le 18 janvier 2019, désigné par le président du tribunal de commerce de Versailles les 28 février et 24 octobre 2018, estimant que ces actes témoignent d’une volonté de nuire manifeste de M. [K].
M, [K] conteste ces allégations en indiquant que ces opérations ont un but fiscal, qu’il est parfaitement indifférent que lui-même ou sa holding, la société Smarto, soit actionnaire, que la cession des actions concerne la seule holding D-R Group et non la société d’exploitation Dunasys Ingénierie, que depuis le prononcé de l’ordonnance entreprise, la société D-R Group a racheté 40 000 actions au prix fixé par l’expert judiciaire et qu’il a accepté de céder l’intégralité de ses actions à la société D-R Group, certes à un prix supérieur mais qui compenserait l’absence de dividendes depuis 12 ans.
S’il est exact qu’à trois reprises, M, [K] a sollicité l’agrément de la société D-R Group aux fins de cession à la société Smarto. d’une partie des actions qu’il détient dans le capital social de la société D-R Group et que cet agrément a été refusé, que la société D-R Group a été contrainte de solliciter la désignation d’un expert judiciaire chargé de procéder à l’évaluation de ces actions, la requérante ne précise pas quels éléments de preuve complémentaires elle entend rechercher à travers la mesure d’instruction in futurum sollicitée, non contradictoire, aux fins d’une action éventuelle en indemnisation au titre de l’abus, de droit de céder ses actions de son actionnaire, qui pourraient être utiles à la préservation de ses droits, alors qu’au surplus, elle est en mesure d’évaluer le préjudice financier qu’elle allègue résultant des demandes d’agrément de cession d’actions répétées de son actionnaire.
Une telle mesure ne saurait être ordonnée pour caractériser la seule intention de nuire de son actionnaire, qu’elle est à même de démontrer à travers les éléments de preuve dont elle dispose.
Dès lors elle ne justifie d’aucun motif légitime au soutien de sa demande de mesure d’instruction probatoire portant sur les faits dénoncés d’abus du droit de céder ses actions par M, [K].
C’est donc à bon droit que le premier juge a écarté de la recherche probatoire les éléments relatifs à un éventuel abus du droit de céder ses actions par M. [K].
Outre l’absence de motif légitime caractérisé, les mesures ordonnées excèdent manifestement les prévisions et limites de l’article 145 du code de procédure civile.
C- Sur l’étendue des mesures
Les appelants soutiennent que les mesures qui ont été ordonnées par le juge de la requête sont disproportionnées et s’apparentent à une véritable perquisition civile. En effet, l’huissier de justice a été autorisé à effectuer toutes recherches et à prendre copie de tous documents qu’il estimera utiles à sa mission, permettant la caractérisation d’actes de concurrence déloyale, et ses investigations ne sont pas suffisamment limitées par l’utilisation de mots-clés puisqu’il a été contraint d’en définir un certain nombre par lui-même sur proposition des requérantes.
Les sociétés intimées font valoir que la recherche est circonscrite dans le temps et dans son objet, qu’elle porte non pas sur l’ensemble des clients de la société Smarto mais seulement sur les clients communs aux sociétés concurrentes, que l’ordonnance vise des listes précises de mots-clés qui sont pertinents (pièces 18 et 40), et qu’elle autorise des recherches sur les anciens salariés susceptibles d’avoir transmis des éléments de leur savoir-faire.
Au sens de l’article 145, les mesures légalement admissibles sont celles prévues par les articles 232 à 284-1 du code de procédure civile et elles ne doivent pas porter une atteinte disproportionnée aux intérêts légitimes du défendeur.
Le secret des affaires ne constitue pas en lui-même un obstacle à l’application des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile dès lors que les mesures ordonnées procèdent d’un motif légitime et sont nécessaires à la protection des droits de la partie qui les a sollicitées.
Enfin, le juge de la rétractation peut modifier la mission en la complétant ou l’amendant afin qu’elle soit limitée dans son étendue et dans le temps, conformément à l’article 149 du code de procédure civile,
La mission confiée à l’huissier de justice, autorisé à se faire assister de tout expert en informatique, à accéder aux boîtes de messagerie professionnelle de M. [K] au sein de la société Smarto et à l’ensemble des serveurs et postes informatiques locaux ou distants de la société Smarto et de son dirigeant, est libellée comme suit :
– Se faire remettre copie de tous documents techniques et commerciaux, fichiers clients ou prospects des requérantes et correspondances échangées entre M. [O] [K] et d’anciens et actuels clients des requérantes, quel qu’en soit le support, informatique ou autre, de nature à établir d’éventuels actes de concurrence déloyale commis par la SAS Smarto à l’encontre des requérantes, ci savoir une appropriation de leur savoir-faire ou une utilisation de leur documentation technique ou tout autre document relatif à leurs activités et un détournement de leur clientèle, pour la période courant de août 2013 au 30 avril 2018, (point 4)
– Rechercher au sein de la SAS Smarto la présence, sur quelque support qu’ils soient, informatique ou autre, des documents techniques sur les produits commercialisés par les requérantes et dont la liste est annexée à la présente (pièce n° 18), (point 5)
– Se faire remettre copie de tous documents, fichiers, et correspondances, quel qu’en soit le support, informatique ou autre, situés tant sur l’ordinateur et la messagerie professionnelle de M. [O] [K], que sur le (s) centre(s) de traitement des données utilisé(s) par ce dernier, de nature ci établir un éventuel abus, commis par M. [O] [K], de son droit de céder ses actions au profit de la SAS Smarto, pour la période courant de janvier 2017 au 30 avril 2018, (point 6)
– Dresser notamment une liste récapitulative précise de l’intégralité des clients et partenaires commerciaux de la SAS Smarto, communs aux anciens et actuels clients ou partenaires commerciaux des requérantes dont la liste est annexée à la présente (pièce n° 40) qui figurent dans les documents, sur quelque support qu’ils soient, saisis lors des opérations et émanant de la SAS Smarto (courriers ou fax, mails, contrats, contacts ), que ce soient des clients ou partenaires seulement démarchés ou en contact que des clients ou partenaires ayant déjà contractés avec la SAS Smarto, (point 7)
– Prendre copie au sein de la SAS Smarto de l’ensemble des documents papiers ou informatiques de nature à établir des actes de concurrence déloyale commis par la SAS Smarto et son dirigeant, M. [O] [K], au préjudice des requérantes, à savoir une appropriation de leur savoir-faire ou une utilisation de leur documentation technique ou tout autre document relatif à leurs activités et un détournement de leur clientèle, pour la période de courant d’août 2013 au 30 avril 2018″. (point 8)
Si les mesures ordonnées sont circonscrites dans le temps, la recherche devant être réalisée à compter d’août 2013 ou janvier 2 017, la cour relève en revanche :
– que l’huissier de justice, à travers le libellé de sa mission, se voit confier un pouvoir d’appréciation sur les documents à appréhender puisqu’il est mentionné, en des termes très généraux, sans détermination de mots-clés, qu’il doit :
o “Se faire remettre copie de tous documents techniques et commerciaux, fichiers clients ou prospects des requérantes et correspondances échangées entre M. [O] [K] et d’anciens et actuels clients des requérantes, quel qu’en soit le support, informatique ou autre, de nature à établir d’éventuels actes de concurrence déloyale commis par la SAS Smarto”,
o Se faire remettre copie de tous documents, fichiers, et correspondances, quel qu’en soit le support, informatique ou autre, situés tant sur l’ordinateur et la messagerie professionnelle de M. [O] [K], que sur le(s) centre(s) de traitement des données utilisé(s) par ce dernier, de nature à établir un éventuel abus, commis par M. [O] [K], de son droit de céder ses actions au profit de la SAS Smarto” ;”prendre copie au sein de la société Smarto de l’ensemble des documents papiers ou informatiques de nature à établir des actes de concurrence déloyale commis par la société Smarto et son dirigeant, M. [O] [K], au préjudice des requérantes, à savoir une appropriation de leur savoir-faire ou une utilisation de leur documentation technique ou tout autre document relatifs à leurs activités et un détournement de clientèle” à partir d’une liste de 42 noms établie par les requérantes (pièce 40), lesquelles ne démontrent nullement que les noms mentionnés sur cette liste sont effectivement ses clients “anciens ou actuels”, partenaires ou prospects,
– que l’huissier de justice instrumentaire, confronté au caractère trop général des mesures ordonnées, mentionne dans son procès-verbal de constat que les points 4, 6 et 8 de l’ordonnance prévoient des recherches sans mots-clés et qu’une liste de mots-clés lui a été communiquée par les requérantes,
– que cette liste de mots-clés, au nombre de 65, figurant en annexe 1 à 4 du procès-verbal, n’a pas été définie intégralement pat le juge de la requête, et elle comprend, outre les noms de la liste “clients” en pièce 40 (42 mots-clés) et celle des produits Dunasys en pièce 18 (9 motsclés), des mots-clés dont la pertinence n’est pas justifiée et permettant l’accès à une quantité disproportionnée de données étrangères au litige ou aux données stratégiques et commerciales de la société Smarto, tels que les mots-clés “action”, “Ândr”, “dongle” (mot générique), “CarAlgo”, “MicroLink” (produits Smarto), ces mots clés n’étant pas combinés entre eux.
– que si les sociétés Dunasys ont sollicité dans leur requête que l’huissier se fasse remettre copie “de tous documents techniques et commerciaux, fichiers clients ou prospects des requérantes et correspondances échangées entre M. [O] [K] et d’anciens et actuels clients et salariés des requérantes, quel qu’en soit le support, informatique ou autre, de nature à établir d’éventuels actes de concurrence déloyale commis par la SAS Smarto”, l’ordonnance rendue le 30 avril 2018 a supprimé la mention relative aux salariés des sociétés requérantes, mais il résulte du procès-verbal de constat qu’une recherche a néanmoins été opérée par l’huissier instrumentaire à partir dés noms des anciens salariés des. sociétés Dunasys, fournis par celles-ci (pièce 41), peu important que le premier juge ait rétabli une recherche sur ce point “jusqu’en 2014” dans la mission qu’il a redéfinie.
Enfin, la réduction du périmètre de la mission par le premier juge, qui n’est qu’une faculté, en ce qu’elle limite les opérations aux documents comprenant des mots de la liste 18 (produits des sociétés Dunasys). les noms des clients actuels et anciens communs aux sociétés concurrentes et des personnes salariées des sociétés Dunasys jusqu’ en 2014. sans toutefois viser une liste de noms précis, et exclut les deux mots-clés “MiçroLink” et “CarÀlgo”, n’est pas suffisante au regard des observations qui précèdent pour circonscrire la mesure dans son objet.
Il résulte de l’ensemble de ces constatations et énonciations que les mesures ordonnées ne sont pas circonscrites aux faits dont pourrait dépendre la solution du litige et sont de nature à porter atteinte de manière disproportionnée aux intérêts stratégiques et commerciaux de la société Smarto dès lors que le pouvoir d’investigation confié à l’huissier de justice n’est pas suffisamment limité, ce qui l’a d’ailleurs conduit à définir lui-même l’étendue de sa recherche sous le contrôle des sociétés requérantes en retenant des mots-clés sur la base de leurs propositions, et que ces 65 mots clés, qui ne sont jamais combinés entre eux, ne sont pour la plupart ni justifiés ni explicités.
L’ordonnance déférée sera donc infirmée en toutes ses dispositions et la cour, statuant à nouveau, dit y avoir lieu à rétracter l’ordonnance sur requête rendue le 3 0 avril et les ordonnances ultérieures des 23 mai et 14 juin 2018.
Il convient de tirer les conséquences de la perte de fondement juridique, du fait de la rétractation, des opérations réalisées en vertu de l’ordonnance sur requête du 30 avril 2018 en annulant le procès-verbal de constat d’huissier du 28 juin 2018 et les opérations de visite du même jour au siège de la société Smarto, et en ordonnant à l’huissier instrumentaire de restituer à la société Smario les pièces appréhendées lors des opérations de constat.
Du fait de la rétractation des ordonnances entreprises, les demandes incidentes des Sociétés intimées relatives notamment à la levée du séquestre sont sans objet. »
1°) ALORS QU’en constatant que M. [K] avait créé au mois de février 2014, peu de temps après son licenciement, une société d’ingénierie concurrente de son ancien employeur, en violation de sa clause de non-concurrence (p. 9 de l’arrêt) sans pour autant en déduire qu’il existait un motif légitime pour ordonner une mesure d’instruction ayant pour objet de rechercher si des fautes ayant causé un préjudice aux sociétés D-R Group et Dunasys n’avaient pas été commises, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l’article 145 du code de procédure civile ;

2°) ALORS, subsidiairement, QU’en recherchant si des faits de concurrence déloyale ou d’abus dans la cession des actions de M. [K] étaient avérés pour déterminer si la mesure d’instruction ordonnée par les ordonnances des 30 avril, 23 mai et 14 juin 2018 était justifiée, c’est-à-dire en se prononçant par une motivation fondée sur la seule absence de faits que la mesure d’instruction ordonnée avait très exactement pour objet d’établir, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de l’article 145 du code de procédure civile ;

3°) ALORS, très subsidiairement, QU’en rétractant l’ordonnance du 9 février 2019, ainsi que les ordonnances des 30 avril, 23 mai et 14 juin 2018 aux motifs qu’il n’était pas démontré de transfert de savoir-faire et de détournement de clientèle (p. 11-12 de l’arrêt), sans pour autant rechercher, comme cela lui était pourtant demandé dans les conclusions d’appel des sociétés D-R Group et Dunasys (p. 32), si un détournement de technologie de nature à capter des clients futurs n’était pas caractérisé indépendamment de tout détournement par d’anciens salariés et de détournement de clientèle déjà établie, quand une mesure d’instruction visant à démontrer des actes de concurrence déloyales est justifiée lorsqu’il est démontré un risque de détournement de technologie ayant pour effet la captation des clients, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de l’article 145 du code de procédure civile, ensemble l’article 1382, devenu 1240, du code civil ;

4°) ALORS QU’en jugeant que la mesure d’instruction sollicitée par la société DR Group ne pouvait avoir pour objet de caractériser l’intention de nuire de M. [K] au motif que cette société est en mesure d’évaluer son préjudice financier (p. 12 de l’arrêt), la cour d’appel a confondu les conditions de faute et de préjudice et s’est prononcée par des motifs inopérants à établir qu’il n’existe pas de motif légitime à rechercher si certains éléments de preuve étaient de nature à démontrer la faute de M. [K], ne donnant ainsi pas de base légale à sa décision au regard de l’article 145 du code de procédure civile, ensemble l’article 1382, devenu 1240, du code civil ;

5°) ALORS QU’en rétractant l’ordonnance du 9 février 2019, ainsi que les ordonnances des 30 avril, 23 mai et 14 juin 2018, aux motifs que les mesures ordonnées ne sont pas circonscrites aux faits dont pourrait dépendre la solution du litige (p. 15 de l’arrêt), quand il appartient au juge de la rétractation de circonscrire la mesure aux éléments permettant d’atteindre cet objectif sans porter une atteinte excessive aux intérêts légitimes des autres parties, la cour d’appel a violé l’article 145 du code de procédure civile ;

6°) ALORS QU’en jugeant que « les développements des appelants relatifs à l’absence de débauchage de salariés ou de détournement de clients sont sans objet, ces éléments n’éta[i]t pas invoqués dans leur requête par les sociétés Dunasys au soutien de leur demande de mesure probatoire » (p. 10 de l’arrêt), quand le juge de la rétractation doit apprécier l’existence du motif légitime au jour du dépôt de la requête initiale et à la lumière des éléments de preuve produits à l’appui de la requête et de ceux produits ultérieurement devant lui, la cour d’appel a violé l’article 145 du code de procédure civile ;

7°) ALORS, en tout état de cause, QU’en constatant un ensemble d’éléments susceptibles de démontrer l’existence d’un litige potentiel entre les parties (pp. 9-12, licenciement de M. [K], similarité entre les boîtiers, existences de clients communs, manoeuvres de M. [K] quant à la cession de ses actions), tout en jugeant que les mesures d’instructions sollicitées n’étaient pas justifiées sans pour autant exposer en quoi tout litige potentiel était exclu au cas d’espèce, quand une cour d’appel doit se prononcer par des motifs exposant en quoi un litige potentiel entre les parties au jour où elle statue est exclu, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de l’article 145 du code de procédure civile.

 


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