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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 20/01434 – N° Portalis DBVS-V-B7E-FKIF
Minute n° 23/00079
[C]
C/
S.A. DOMOFINANCE, S.A.S. ISOCLOS
Jugement Au fond, origine Tribunal de proximité de SARREBOURG, décision attaquée en date du 06 Juillet 2020, enregistrée sous le n° 19/00132
COUR D’APPEL DE METZ
3ème CHAMBRE – TI
ARRÊT DU 09 MARS 2023
APPELANT :
Monsieur [P] [C]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me David ZACHAYUS, avocat au barreau de METZ
INTIMÉES :
S.A. DOMOFINANCE
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Nathalie ROCHE-DUDEK, avocat postulant au barreau de METZ et par Me Francis DEFFRENNES, avocat plaidant au barreau de LILLE
S.A.S. ISOCLOS Prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentée par Me Agnès BIVER-PATE, avocat postulant au barreau de METZ et par Me Paul ZEITOUN, avocat plaidant au barreau de PARIS
DATE DES DÉBATS : A l’audience publique du 27 Octobre 2022 tenue par Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre, Magistrat rapporteur qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s’y étant pas opposés et en a rendu compte à la cour dans son délibéré pour l’arrêt être rendu le 26 janvier 2023 date à laquelle il a été prorogé au 09 Mars 2023, en application de l’article 450 alinéa 3 du code de procédure civile
GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Mme Sophie GUIMARAES
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
PRÉSIDENT : Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre
ASSESSEURS : M. MICHEL, Conseiller
Mme BASTIDE, Conseillère
ARRÊT : Contradictoire
Rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de Chambre, et par Mme WILD, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
Selon bon de commande n°2018-2655-0328 signé le 6 novembre 2018, M. [P] [C] a conclu avec la SAS Isoclos un contrat de vente et installation d’une pompe à chaleur et d’un chauffe-eau thermodynamique et le même jour, il a contracté un crédit affecté n°42669729239001 auprès de la SA Domofinance pour un montant de 18.900 € avec intérêts au taux contractuel de 3,19% afin de financer l’installation.
Le 17 juin 2019, M. [C] a saisi le tribunal d’instance de Sarrebourg aux fins de voir annuler le contrat de vente, condamner la SAS Isoclos à lui restituer la somme de 23.008,32 euros, annuler le contrat de crédit affecté et condamner solidairement la SAS Isoclos et la SA Domofinance à lui verser une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La SA Domofinance a demandé au tribunal à titre principal, de rejeter les demandes de M. [C] et lui ordonner de poursuivre le règlement des échéances du prêt, à titre subsidiaire le condamner à lui rembourser le capital prêté et condamner la SAS Isoclos à lui verser la somme de 18.900 euros au titre de sa créance en garantie du capital prêté, à titre plus subsidiaire condamner M. [C] à lui rembourser une fraction du capital et la SAS Isoclos à lui verser 18.900 euros de dommages et intérêts pour préjudice financier, outre une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La SAS Isoclos s’est opposée aux demandes et a sollicité la condamnation du demandeur à lui verser une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 6 juillet 2020 le tribunal de proximité de Sarrebourg a débouté M. [C] de toutes ses demandes, dit n’y avoir lieu statuer sur les demande reconventionnelles subsidiaires de la SA Domofinance, rejeté les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile, condamné M. [C] aux dépens et rejeté les autres demandes.
Par déclaration déposée au greffe de la cour le 13 août 2020, M. [C] a interjeté appel des dispositions du jugement ayant rejeté ses demandes et l’ayant condamné aux dépens.
Par ordonnance sur incident du 12 mai 2022, le conseiller de la mise en état s’est déclaré compétent pour statuer sur les fins de non recevoir formées par M. [C] et la SAS Isoclos, a débouté la SAS Isoclos de sa fin de non recevoir tirée de l’irrecevabilité de la demande de résolution du contrat du 6 novembre 2018 et en responsabilité contractuelle formée en appel par M. [C], et débouté M. [C] de sa fin de non recevoir tirée de l’irrecevabilité de la demande en paiement de la somme de 20.379,39 euros avec intérêts au taux contractuel de 3,14% à compter du 8 juillet 2020 formée en appel par la SA Domofinance.
Aux termes de ses dernières conclusions du 30 septembre 2022, l’appelant demande à la cour d’infirmer le jugement et de :
– débouter la SA Domofinance et la SAS Isoclos de l’ensemble de leurs demandes
– ordonner l’irrecevabilité de la demande nouvelle tendant à le voir condamner au paiement de la somme de 20.379,39 euros comme étant nouvelle
– sommer la SA Domofinance de produire le contrat de crédit affecté liant les parties
– sur le fond, à titre principal, prononcer la nullité du contrat de vente signé le 6 novembre 2018 avec la SAS Isoclos et celle du contrat de crédit affecté conclu le 6 novembre 2018 avec la SA Domofinance
– condamner la SA Domofinance à lui rembourser les sommes perçues
– le dispenser de restituer le capital emprunté à la SA Domofinance et à défaut ordonner que la SAS Isoclos garantisse le capital emrpunté
– à titre subsidiaire condamner la SAS Isoclos au paiement de la somme de 23.008,32 euros à titre de dommages et intérêts
– à titre infiniment subsidiaire, prononcer la résolution du contrat de vente et du contrat de crédit affecté conclus le 6 novembre 2018, condamner la SA Domofinance à lui rembourser les sommes perçues, le dispenser de restituer le capital emprunté et à défaut ordonner que la SAS Isoclos garantisse ce capital
– prendre acte qu’il tiendra le matériel, objet du contrat de vente, à la disposition de la SAS Isoclos pendant un délai de trois mois à compter de la signification de l’arrêt et passé ce délai, si la société le l’a pas repris, pourra en disposer librement
– en tout état de cause condamner les intimées à lui verser la somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Au visa des articles 564 et 565 du code de procédure civile, l’appelant soutient que sa demande en résolution des contrats formée en appel n’est pas nouvelle ni irrecevable puisqu’elle tend aux mêmes fins que la demande en nullité des contrat. Il soulève l’irrecevabilité de la demande nouvelle de la banque en paiement de la somme de 20.379,38 euros qui est sans lien avec les demandes initiales.
Sur la nullité du contrat principal, au visa de l’article L.111-1 du code de la consommation, il expose que le bon de commande ne mentionne pas le prix au détail de chaque bien et service vendu, ni les caractéristiques essentielles des biens, ni les indications relatives au médiateur, aux modalités de la garantie, aux coordonnées de l’assureur ou du garant et aux pièces détachées. Il en déduit que le bon de commande est nul et conteste avoir confirmé la nullité en exécutant le contrat, en l’absence de connaissance et conscience des vices alors qu’il est profane et a informé la banque du dysfonctionnement du chauffe-eau.
Sur les conséquences de la nullité du contrat, l’appelant fait valoir qu’en application de l’article L.312-55 du code de la consommation, la nullité du contrat principal emporte celle de plein droit du contrat de crédit affecté en raison de l’indivisibilité du litige, que les parties doivent être replacées en leur état initiale, qu’il tient les matériels à la disposition du vendeur et s’oppose à la demande de restitution du capital en conséquence de la faute du prêteur qui n’a pas vérifié la validité du bon de commande. Il ajoute qu’il n’est pas question de préjudice, que l’installation ne fonctionne pas et que le prêteur doit lui rembourser les échéances réglées. A titre subsidiaire, il soutient que la SAS Isoclos doit lui verser des dommages et intérêts de 23.008,32 euros correspondant au coût total du crédit pour exécution de mauvaise foi du contrat et plus subsidiairement, il invoque la résolution du contrat principal pour inexécution au visa de l’article 1224 du code civil, avec les mêmes conséquences de droit sur les restitutions.
Si la cour ne fait pas droit à sa demande de dispense de remboursement du capital, il se prévaut des dispositions de l’article L.312-56 du code de la consommation relatives à la garantie du vendeur. Enfin, il s’oppose à la demande de dommages et intérêts de la SA Domofinance pour abus de droit.
Selon ses dernières conclusions du 25 août 2022, dont le dispositif doit être expurgé de toutes mentions qui ne constituent pas des demandes mais reprennent les moyens soutenus dans les motifs, la SAS Isoclos demande à la cour de :
– confirmer le jugement en toutes ses dispositions
– débouter M. [C] et la SA Domofinance de leurs demandes à son encontre
– déclarer irrecevables les demandes en résolution du contrat et responsabilité contractuelle comme étant nouvelles en appel
– à titre principal débouter M. [C] de sa demande d’annulation du contrat conclu le 6 novembre 2018
– à titre subsidiaire débouter M. [C] de sa demande en résolution du contrat et sa demande indemnitaire
– à titre plus subsidiaire débouter la SA Domofinance de toutes ses demandes
– en tout état de cause condamner M. [C] à lui verser 5.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive et 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Au visa de l’article 564 du code de procédure civile, l’intimée soutient que la demande en résolution du contrat principal, nouvelle en appel, ne tend pas aux mêmes fins que celle en nullité formée initialement et est irrecevable.
Sur la nullité du bon de commande, elle expose que les caractéristiques essentielles de la pompe à chaleur et du chauffe-eau thermodynamique sont mentionnées, que le coût de chaque élément, du taux et montant de la TVA ne sont pas imposés par le code de la consommation, que les documents relatifs au prêt ont été produits en première instance, que le coût du crédit et ses modalités sont indiqués, que les dates de livraison et installation sont détaillées et ont été respectées, que la mention du médiateur n’a pas à figurer sur le bon de commande, que les coordonnées de la société sont clairement indiquées, que le bon de commande comprend un bordereau de rétractation, qu’il n’y a pas d’obligation d’indication sur les pièces détachées, que les garanties légales et contractuelles figurent aux conditions générales du contrat et en déduit que le bon de commande n’encourt pas la nullité.
Elle soutient que M. [C] avait connaissance du vice affectant le bon de commande par la reproduction des articles du code de la consommation au verso, qu’il a manifesté l’intention de le réparer en renonçant à exercer son droit de rétractation, en acceptant la livraison sans réserve, demandant la libération des fonds et réglant les échéances du prêt, de sorte qu’il a confirmé la nullité. Elle conteste toute exécution de mauvaise foi alors qu’elle a rempli son obligation d’information au vu de ce qui précède et soutient avoir exécuté ses obligation, M. [C] ne rapportant pas la preuve des dysfonctionnements allégués, ni de la livraison de matériels ne correspondant pas au bon de commande, de sorte que sa demande de résolution du contrat doit être rejetée.
Sur la demande d’indemnisation de la SA Domofinance, l’intimée expose qu’elle n’a commis aucune faute, que la banque est tenue à une obligation de vigilance et que sa demande fondée sur l’article L. 312-56 du code de la consommation sera rejetée. Sur la responsabilité délictuelle, elle fait valoir que la banque ne démontre aucune faute à son égard et ne fait que déduire la faute de l’inexécution du contrat principal auquel elle est tiers, de sorte qu’elle doit être déboutée de sa demande. Enfin elle sollicite la condamnation de M. [C] à lui verser des dommages et intérêts pour procédure abusive aux motifs qu’il essaie de se libérer de ses engagements alors que son installation fonctionne.
Aux termes de ses dernières conclusions du 1er juillet 2022, dont le dispositif doit être expurgé de toutes mentions qui ne constituent pas des demandes mais reprennent les moyens soutenus dans les motifs, la SA Domofinance demande à la cour de :
– à titre principal confirmer le jugement en toutes ses dispositions
– débouter M. [C] de ses demandes
– à titre reconventionnel le condamner à lui verser la somme de 20.379,39 euros avec intérêts au taux contractuel de 3,14% à compter du 8 juillet 2020
– à titre subsidiaire, en cas d’annulation des contrats, condamner M. [C] à lui rembourser le capital prêté sous déduction des échéances réglées et condamner la SAS Isoclos à lui verser la somme de 18.900 euros au titre de sa créance en garantie de remboursement du capital prêté sous la même déduction
– à titre plus subsidiaire, si une faute est retenue, condamner M. [C] à lui rembourser le capital prêté sous déduction des échéances réglées, à défaut une fraction du capital qui ne peut être inférieure aux deux tiers du capital
– en tout état de cause condamner solidairement M. [C] et la SAS Isoclos à lui verser la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et in solidum aux entiers dépens avec distraction au profit de Me Roche-Dudek.
Sur la nullité des contrats, elle soutient que les conditions de l’article 1128 du code civil sont réunies, que l’appelant n’a pas exercé son droit de rétractation et que les biens commandés ont été livrés et installés. Sur le non respect des dispositions du code de la consommation, elle expose que le bon de commande est régulier puisqu’il comprend les caractéristiques essentielles des biens, le prix et les modalités de paiement, le délai de livraison, un bordereau de rétractation. Elle ajoute que la violation de ces dispositions est sanctionnée par une nullité relative qui peut être couverte par l’exécution volontaire du contrat, que l’acquéreur avait connaissance du vice affectant le bon de commande dès sa signature par la reproduction des articles du code de la consommation, qu’il avait l’intention de réparer le vice puisqu’il a accepté la livraison et la pose des installations, signé sans réserve l’attestation de fin de travaux et réglé les échéances du prêt, de sorte qu’il a confirmé l’éventuelle nullité du bon de commande. Sur la résolution pour défaut d’exécution, elle expose que l’appelant ne rapporte pas la preuve de dysfonctionnement de la pompe à chaleur ou du chauffe-eau thermodynamique, qu’il a signé sans réserve l’attestation de livraison et n’est plus recevable à opposer au prêteur une inexécution par le vendeur.
A titre reconventionnel, elle indique avoir prononcé le 8 juillet 2020 la déchéance du terme pour non paiement des échéances du prêt et sollicite la condamnation de l’emprunteur à lui verser la somme de 20.379,38 euros avec intérêts au taux contractuel, ajoutant que cette demande est recevable par application de l’article 567 du code de procédure civile.
A titre subsidiaire, si la cour prononce l’annulation ou la résolution des contrats, l’intimée soutient que l’appelant doit être condamné à lui restituer le capital puisque les parties sont remises dans leur état antérieur. Elle rappelle qu’elle a remis les fonds au vu d’une attestation de livraison signée sans réserve par l’emprunteur qui lui demandait de verser les fonds au vendeur, qu’elle n’a pas à faire des investigations complémentaires quant à la réalisation des travaux et qu’il ne lui appartient pas de s’assurer de la conformité du bon de commande au code de la consommation. Plus subsidiairement, elle fait valoir que M. [C] ne peut prétendre qu’à une perte de chance qui ne peut donner lieu à la réparation intégrale du préjudice et qu’il ne justifie d’aucun préjudice puisqu’il dispose de l’installation commandée sans démontrer l’existence de dysfonctionnement. Elle conclut en conséquence à la restitution du capital ou à tout le moins à une fraction de ce capital. Enfin, elle sollicite la garantie du vendeur par application de l’article L.312-56 du code de la consommation.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 27 octobre 2022.
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur la recevabilité des demandes
Par application des articles794 et 907 du code de procédure civile, les ordonnances du conseiller de la mise en état n’ont pas, au principal, l’autorité de la chose jugée à l’exception de celles statuant sur les exceptions de procédure, sur les fins de non-recevoir, sur les incidents mettant fin à l’instance et sur la question de fond tranchée en application des dispositions du 6o de l’article 789.
En l’espèce, il est relevé que par ordonnance sur incident du 12 mai 2022, définitive pour ne pas avoir été déférée à la cour, la fin de non recevoir tirée de l’irrecevabilité des demandes nouvelles, invoquée tant par M. [C] que par la SAS Isoclos, a été rejetée par le conseiller de la mise en état, que cette décision a autorité de la chose jugée et qu’en conséquence la demande formée à nouveau devant la cour est rejetée.
Sur l’annulation du contrat de vente
Dans le cadre d’un contrat conclu hors établissement et en application des articles L.221-5 et L. 221-9 du code de la consommation, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ainsi que celles relatives aux conditions, délai et modalités d’exercice du droit de rétractation. L’article L. 111-1 précise notamment que le professionnel communique au consommateur les informations relatives aux caractéristiques essentielles du bien ou du service, le prix du bien ou du service, en l’absence d’exécution immédiate du contrat la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service, les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte.
Ces dispositions sont prévues à peine de nullité du contrat en application de l’article L. 242-1 du même code. Il est rappelé que selon l’article L. 111-5 du même code, en cas de litige relatif à l’application des articles L. 111-1, L.111-2 et L. 111-4, il appartient au professionnel de prouver qu’il a exécuté ses obligations, cette disposition étant d’ordre public conformément à l’article L. 111-8.
En l’espèce, il n’est pas contesté que le contrat de vente signé le 6 novembre 2018 entre M. [C] et la SAS Isoclos est un contrat conclu hors établissement soumis aux articles précités. Le premier juge a exactement relevé, au vu des pièces produites, que l’exemplaire du bon de commande produit par M. [C] ne contient aucune mention du prix de vente, que ce soit pour le chauffe-eau thermodynamique ou la pompe à chaleur, ni aucun prix global pour les deux installations, la seule mention étant celle du coût total du crédit pour un montant de 23.008,32 euros, qu’il en est de même pour l’exemplaire produit en pièce n°1 par la SAS Isoclos et que seule la photocopie du bon de commande produite en pièce n°7 par la SA Domofinance comprend l’indication du prix total (18.900 euros), étant observé que l’écriture est différente de celle figurant sur toutes les autres mentions. Il en a justement déduit que l’absence de mention du prix de vente sur le bon de commande original signé par M. [C] est de nature à entraîner la nullité du contrat principal.
S’agissant d’une nullité relative, sa confirmation est subordonnée à la conclusion d’un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l’obligation et qu’il a eu l’intention de le réparer, sauf exécution volontaire après l’époque à laquelle celle-ci pouvait être valablement confirmée. L’intention de réparer exige que le vice soit spécialement validé et que la volonté soit suffisamment caractérisée, l’intention ne pouvant se déduire de la simple connaissance du vice sans réaction immédiate par la partie lésée. Il appartient à celui qui se prévaut d’une confirmation de rapporter la double preuve imposée par l’article 1338 du code civil.
En l’espèce, il est relevé qu’en l’absence de reproduction au verso du bon de commande des dispositions des articles précités et notamment celles de l’article L.221-5 sur l’obligation de mentionner le prix de vente sur le contrat et celles de l’article L.242-1 précisant que cette mention est prévue à peine de nullité du contrat, c’est à tort que le premier juge a dit que M. [C] avait connaissance du vice affectant le contrat et l’a exécuté volontairement, alors que la preuve de cette connaissance n’est pas rapportée. En conséquence le bon de commande est annulé et le jugement infirmé.
Sur l’annulation du contrat de prêt
En liminaire, il est constaté que le contrat de crédit affecté signé le 6 novembre 2018 par M. [C] est versé aux débats de sorte que la demande de production de pièce est rejetée.
En application de l’article L. 311-32 devenu L.312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé. Il s’ensuit qu’en raison de la nullité du contrat principal de vente et de l’interdépendance des deux contrats, le contrat de prêt conclu avec la SA Domofinance doit également être annulé. Le jugement déféré est infirmé.
Sur la remise en état
Les parties devant être replacées en leur état antérieur en conséquence de l’annulation des contrats, il convient de donner acte à M. [C] qu’il tiendra le matériel à la disposition de la SAS Isoclos durant un délai de 3 mois suivant la signification de l’arrêt et que passé ce délai, il pourra en disposer librement.
Sur le remboursement du capital prêté
L’annulation ou la résolution du contrat de crédit affecté en conséquence de celle du contrat de vente ou prestation de service qu’il finance, emporte pour l’emprunteur l’obligation de restituer au prêteur le capital prêté. Cependant, le prêteur qui a délivré les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé de tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
En l’espèce, il ressort de ce qui précède sur la nullité du contrat principal de vente que le bon de commande a été établi en méconnaissance des dispositions du code de la consommation, de sorte qu’en versant les fonds au vendeur, sans procéder préalablement aux vérifications nécessaires qui lui aurait permis de constater que le contrat principal était affecté d’une nullité, la banque a commis une faute de nature à la priver de sa créance de restitution.
Cependant, sur le préjudice subi, il est constaté que M. [C] se contente de prétendre que les deux installations ne fonctionneraient pas ou mal, sans produire la moindre pièce pour étayer ses allégations, de sorte qu’il ne démontre pas avoir subi un préjudice lié à la faute de la banque, relative à l’absence de vérification formelle du contrat principal. En conséquence, il doit être condamné à restituer à la SA Domofinance le capital prêté, soit la somme de 18.900 euros, sous déduction des échéances déjà versées.
Il est précisé qu’en l’absence de justificatifs par M. [C] des règlements qu’il aurait effectués auprès du prêteur, il n’y a pas lieu à faire droit à sa demande de condamnation de la SA Domofinance à lui rembourser les sommes perçues.
Sur l’appel en garantie
En application de l’article L. 311-33 devenu L.312-56 du code de la consommation, si l’annulation du contrat principal survient du fait du vendeur, celui-ci pourra, à la demande du prêteur, être condamné à garantir l’emprunteur du remboursement du prêt, sans préjudice de dommages et intérêts vis-à-vis du prêteur et de l’emprunteur.
En l’espèce, le contrat principal ayant été annulé pour non respect par le vendeur des dispositions du code de la consommation, il convient de faire application de l’article susvisé et de condamner la SAS Isoclos à verser à la SA Domofinance la somme de 18.900 euros au titre de sa créance en garantie de remboursement du capital prêté.
Sur les autres dispositions
Selon l’article 954 du code de procédure civile, les conclusions d’appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation, ainsi qu’un bordereau récapitulatif des pièces annexé. La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.
En l’espèce, si M. [C] a formé appel de la disposition du jugement l’ayant débouté de ses demandes, lesquelles comprenaient une demande de condamnation de la SAS Isoclos à lui restituer la somme de 23.008,32 euros, il est constaté qu’il ne reprend pas cette demande au dispositif de ses conclusions d’appel, de sorte que le jugement est confirmé de ce chef. Il est précisé que la demande de condamnation de la SAS Isoclos à lui verser cette même somme à titre de dommages et intérêts n’est formée qu’à titre subsidiaire et qu’il n’y a pas lieu de statuer sur cette prétention puisqu’il a été fait droit à la demande de garantie de créance du prêteur formée à titre principal par l’appelant.
Sur la demande de dommages et intérêts
L’exercice d’une action ne dégénère en abus que s’il constitue un acte de malice ou de mauvaise foi ou s’il s’agit d’une erreur grave équipollente au dol, l’appréciation inexacte que l’une des parties fait de ses droits ne constituant pas une faute susceptible d’engager sa responsabilité à ce titre. Par ailleurs la simple affirmation du caractère abusif de la demande ne peut suppléer la nécessaire démonstration et justification du préjudice allégué.
En l’espèce, la SAS Isoclos ne démontre par aucune pièce que M. [C] aurait agi abusivement en usant de son droit d’ester en justice alors qu’il est fait droit à ses demandes, de sorte qu’elle doit être déboutée de sa demande d’indemnisation.
Sur l’article 700 du code de procédure civile
Le jugement est infirmé sur les dépens et confirmé sur les frais irrépétibles.
Il convient de condamner la SAS Isoclos, partie perdante aux dépens de première instance et d’appel, de la condamner à verser à M. [C] la somme de 1.200 euros et à la SA Domofinance la somme de 1.200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de la débouter de sa propre demande de ce chef. L’article 699 du code de procédure civile n’étant pas applicable dans les départements d’Alsace et de Moselle, il n’y a pas lieu à distraction des dépens.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
DEBOUTE M. [P] [C] et la SAS Isoclos de leurs fins de non recevoir ;
DEBOUTE M. [P] [C] de sa demande de production de pièces ;
CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a débouté M. [P] [C] de sa demande de condamnation de la SAS Isoclos à lui restituer la somme de 23.008,32 euros et débouté les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
L’INFIRME pour le surplus et statuant à nouveau,
PRONONCE l’annulation du bon de commande n°2018-2655-0328 signé le 6 novembre 2018 par M. [P] [C] et la SAS Isoclos ;
PRONONCE l’annulation du contrat de crédit affecté n° 42669729239001 signé le 6 novembre 2018 par M. [P] [C] et la SA Domofinance ;
CONDAMNE M. [P] [C] à verser à la SA Domofinance la somme de 18.900 euros au titre de la restitution du capital prêté, sous déduction des échéances déjà versées ;
DONNE ACTE à M. [P] [C] de ce qu’il tiendra le matériel, objet du contrat de vente, à la disposition de la SAS Isoclos pendant un délai de trois mois à compter de la signification de l’arrêt et que, passé ce délai, si la société le l’a pas repris, il pourra en disposer librement ;
DEBOUTE M. [P] [C] de sa demande de condamnation de la SA Domofinance à lui rembourser les sommes perçues ;
CONDAMNE la SAS Isoclos à verser à la SA Domofinance la somme de 18.900 euros au titre de sa créance en garantie de remboursement du capital prêté ;
CONDAMNE la SAS Isoclos aux dépens de première instance ;
Y ajoutant,
DEBOUTE la SAS Isoclos de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et de sa demande au titre des frais irrépétibles ;
CONDAMNE la SAS Isoclos à verser à M. [C] la somme de 1.200 euros et à la SA Domofinance la somme de 1.200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la SAS Isoclos aux dépens d’appel sans application de l’article 699 du code de procédure civile.
La Greffière La Présidente de chambre