Du 09 janvier 2024
53B
SCI/SMH
PPP Contentieux général
N° RG 23/03419 – N° Portalis DBX6-W-B7H-YLCH
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
C/
[V] [Z]
– Expéditions délivrées à
Mr [V] [Z]
– FE délivrée à
Me Emannuelle GERARD-DEPREZ
Le 09/01/2024
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
Pôle protection et proximité
JUGEMENT EN DATE DU 09 JANVIER 2024
JUGE : Monsieur Julien BAUMERT-STORTZ
GREFFIER : Madame Souad MOHAMED-HAMROUN
DEMANDERESSE :
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
RCS PARIS 542 097 902
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Maître Emmanuelle GERARD-DEPREZ de la SELAS DEFIS AVOCATS
DEFENDEUR :
Monsieur [V] [Z]
né le [Date naissance 2] 1997 à [Localité 6] (33)
[Adresse 3]
[Localité 4]
Non comparant
DÉBATS :
Audience publique en date du 21 novembre 2023
PROCÉDURE :
Articles 480 et suivants du code de procédure civile.
QUALIFICATION DU JUGEMENT :
Par défaut, dernier ressort
1
EXPOSE DU LITIGE
Par acte d’huissier en date du 9 octobre 2023, la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a saisi le tribunal de céans d’une demande en paiement à l’encontre de Monsieur [V] [Z].
A l’audience du 21 novembre 2023, la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, représentée par son conseil, demande au tribunal, avec exécution provisoire, de :
– Condamner M. [Z] à lui payer la somme de 1.642,51 € avec intérêts au taux de 19,14% à compter du 19 septembre 2022 ;
– Condamner M. [Z] à lui payer 800 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile, outre les entiers frais et dépens ;
A l’appui de ses prétentions, la partie demanderesse expose avoir consenti à M. [Z], le 29 décembre 2021, un crédit renouvelable utilisable par fractions, remboursable selon des échéances mensuelles d’un montant et selon un taux d’intérêt variables en fonction du capital effectivement utilisé.
Elle ajoute que M. [Z] n’a pas respecté le remboursement régulier de ses échéances de sorte que, par courrier recommandé avec accusé de réception datant du 19 septembre 2022, elle a invoqué la déchéance du terme du contrat de prêt.
Elle en déduit qu’elle est bien fondée à réclamer l’intégralité des sommes restant dues.
Le tribunal a soulevé d’office la question de l’éventuel non respect des dispositions des articles L 312-12, L 312-14 et de l’article L 312-16 du code de la consommation, et sur la déchéance du droit aux intérêts qui pourrait en résulter, en application des articles L 341-1 et suivants du même code.
Régulièrement cité selon les dispositions prévues par l’article 659 du code de procédure civile, M. [Z] n’a pas comparu et n’était pas représenté, de sorte qu’eu égard à la valeur du litige, il y a lieu de statuer par jugement rendu par défaut et en dernier ressort.
MOTIFS DE LA DECISION
I – Sur la demande en paiement de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE :
A – Sur la déchéance du droit aux intérêts :
Attendu qu’il résulte des dispositions de l’article L 312-12 du code de la consommation, que pèse, sur le prêteur et sur tout intermédiaire de crédit, une obligation d’information précontractuelle à l’intention de l’emprunteur, sous la forme d’un écrit ou d’un autre support durable, comportant les mentions prévues par les articles R 312-2 à R 312-4 du même code et établi conformément au modèle-type annexé à l’article R 312-5 du même code ;
Attendu que l’article L 312-14 du même code impose au prêteur, en outre, une obligation d’explication permettant à l’emprunteur de vérifier que le crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière ;
Attendu qu’aux termes de l’article L 312-16 du code de la consommation, le prêteur est tenu de vérifier la solvabilité de l’emprunteur, « à partir d’un nombre suffisant d’informations, y compris des informations fournies par ce dernier », le prêteur ayant notamment l’obligation, à ce titre, de consulter le fichier prévu par l’article L 751-1 du même code ;
Qu’ainsi, pèse sur tout organisme prêteur, une obligation de vérifier, en rassemblant les informations nécessaires, l’adéquation du crédit qu’il propose à la situation financière, et personnelle de l’emprunteur ;
Que le respect de cette obligation doit être assuré par la réalisation de démarches positives de la part du prêteur qui doit s’enquérir de la situation réelle de l’emprunteur en obtenant des informations concrètes relatives à ses revenus, aux charges déjà existantes, à la composition de sa famille, au nombre de personnes à sa charge (…) et à son statut professionnel ;
Attendu qu’aux termes de l’article L 312-21 du code de la consommation, afin de permettre l’exercice du droit de rétractation mentionné à l’article L 312-19 du même code, un formulaire détachable doit être joint à l’exemplaire du contrat de crédit fourni à l’emprunteur ;
Attendu que l’article L 312-29 du même code dispose que lorsque l’offre de contrat de crédit est assortie d’une proposition d’assurance, une notice est fournie à l’emprunteur, sur support papier, ou tout autre support durable, qui comporte les extraits des conditions générales de l’assurance le concernant, notamment les nom et adresse de l’assureur, la durée, les risques couverts et ceux qui sont exclus ;
Attendu que la preuve du respect de l’ensemble de ces dispositions d’ordre public (article L 314-26 du code de la consommation), pèse sur l’organisme prêteur, qui est assujetti au respect des obligations légales ainsi rappelées ;
Attendu que les articles L 341-1 et suivants du code de la consommation disposent que, notamment, le prêteur qui accorde un crédit sans avoir communiqué les informations précontractuelles de l’article L 312-12 du même code ou sans avoir respecté l’obligation d’explication fixée par l’article L 312-14 du même code ou sans avoir procédé à la vérification de la solvabilité de l’emprunteur, requise par l’article L 312-16 du même code ou sans avoir remis à l’emprunteur une notice d’assurance ou une offre de crédit non assortie d’un formulaire détachable permettant l’exercice de son droit de rétractation, conformément aux articles L 312-21 et L 312-29 du même code, encourt la déchéance du droit aux intérêts du prêt, l’emprunteur n’étant alors tenu qu’au remboursement du capital emprunté ;
Attendu qu’en l’espèce, il est établi par les pièces produites par la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE que M. [Z] a, le 29 décembre 2021, accepté une offre préalable de crédit renouvelable utilisable par fractions, remboursable selon des échéances mensuelles d’un montant et selon un taux d’intérêt variables en fonction du capital effectivement utilisé ;
Attendu que, cependant, la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ne produit qu’une fiche d’informations précontractuelles du dit crédit, certes, établie conformément aux articles R 312-2 à R 312-5 du code de la consommation, mais qui n’est revêtue d’aucune mention relative à une paraphe ou une signature électronique, de type « transmis et signé électroniquement par XX », ce qui ne permet pas, en conséquence, d’affirmer que ce document a bien été remis à l’emprunteur ;
Que, de même, la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ne produit qu’une copie de l’offre de crédit, certes dotée d’un formulaire détachable permettant l’exercice du droit de rétractation, mais qui n’est revêtue d’aucune mention relative à une paraphe ou une signature électronique, de type « transmis et signé électroniquement par XX », ce qui ne permet pas, en conséquence, d’affirmer que ce document a bien été remis à l’emprunteur ;
Que, par ailleurs, l’exécution partielle du contrat, qui permet, à tout le moins, de s’assurer du consentement de Mme [R] au crédit, ne démontre pas, cependant, la remise de la copie de l’offre versée aux débats ;
Que, de même, la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ne produit qu’une notice de l’assurance facultative proposée avec le crédit mais qui n’est revêtue d’aucune mention relative à une paraphe ou une signature électronique, de type « transmis et signé électroniquement par XX », ce qui ne permet pas, en conséquence, d’affirmer que ce document a bien été remis à l’emprunteur ;
Qu’au surplus, les documents produits par la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, destinés à rapporter la preuve de la signature électronique de la liasse contractuelle, s’ils précisent la teneur des documents signés par M. [Z], ils ne donnent aucune indication concernant quelles conditions ceux-ci ont été mis à sa disposition après signature, et échouent donc démontrer leur remise effective à l’emprunteur ;
Attendu que, par ailleurs, pour rapporter la preuve de vérification de la solvabilité de l’emprunteur, par le biais notamment de la consultation du fichier prévu par l’article L 751-1 du code de la consommation, qui permet de s’assurer que la situation financière de ce dernier n’est pas déjà obérée, le prêteur ne peut se contenter de produire un document qu’il a lui-même établi, ne permettant pas de garantir les conditions dans lesquelles le FICP aurait été consulté, et dans quelles conditions les données qui auraient pu être ainsi obtenues ont été conservées, et comportant des indications lacunaires
Que statuer différemment reviendrait à méconnaitre le principe selon lequel nul ne peut se constituer une preuve à soi-même ;
Qu’en l’espèce, à ce titre, la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE verse aux débats un document comportant son en-tête, manifestement établi par ses soins, mentionnant, une consultation du fichier qui aurait été réalisée le 29 décembre 2021 ;
Que ce document n’est pas daté, de sorte que sa date d’édition est invérifiable, d’autant que les conditions de conservation des données qu’il relate, dont il appartient à l’organisme prêteur d’assurer l’intégrité, conformément à l’article 13 I de l’arrêté du 26 octobre 2010, relatif au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, ne sont pas justifiées ;
Qu’au surplus, et surtout, le document ne précise même pas la teneur de la réponse qui aurait été apportée par le fichier consulté, concernant M. [Z], ce qui ne permettait pas à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE d’apprécier utilement sa situation financière, notamment en s’assurant qu’aucun défaut de paiement n’avait été enregistré au titre d’un autre crédit ;
Qu’ainsi, la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ne rapporte ni la preuve d’une consultation du FICP à la date de conclusion du prêt, ni la preuve des conditions dans lesquelles les données dont elle se prévaut ont été conservées, ni la vérification effective et suffisante de la solvabilité de M. [Z] ;
Attendu qu’il résulte de ces considérations que la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ne rapporte pas la preuve du respect des dispositions légales sus visées ;
Que la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a ainsi manqué aux obligations lui incombant, en sa qualité de prêteur ;
Qu’il convient, par conséquent, de prononcer la déchéance du droit aux intérêts de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE au titre du prêt conclu le 29 décembre 2021 par M. [Z] ;
B – Sur les sommes restant dues :
Attendu qu’il résulte des dispositions de l’article L 341-8 du code de la consommation qu’en cas de déchéance du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, ce qui exclut également toute forme d’indemnité contractuelle ;
Que les sommes perçues au titre des intérêts sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant du ;
Attendu que plusieurs échéances du prêt souscrit par M. [Z] sont demeurées impayées, sans que la plus ancienne échéance non régularisée par des paiements ultérieurs ne soit antérieure à la date d’introduction de la présente instance minorée de deux ans, de sorte que la forclusion de l’action de la partie demanderesse prévue à l’article R 312-35 du code de la consommation n’est pas encourue ;
Que la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a invoqué la déchéance du terme à la date du 19 septembre 2022 ;
Attendu que, compte tenu de la déchéance du droit aux intérêts, et au regard du décompte versé aux débats, la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE est fondée à réclamer payement du capital emprunté par M. [Z], soit 1.639,81 €, déduction faite de l’ensemble des paiements effectués par celui-ci, soit 30,14 € ;
Que la dette de M. [Z] à l’égard de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sera ainsi fixée à la somme de (1.639,81 – 30,14) €, soit 1.609,67 € ;
Attendu qu’il convient donc de condamner M. [Z] à payer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 1.609,67 €, et de débouter la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE du surplus de ses demandes ;
Que cette ne portera pas intérêts au taux légal, pour assurer l’effectivité de la sanction de déchéance du droit aux intérêts prononcée ;
II – Sur les demandes accessoires :
Attendu qu’il n’est que partiellement fait droit à la demande en paiement, et que la déchéance du droit aux intérêts a été prononcée, il convient de condamner M. [Z] à payer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 150 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;
Que M. [Z] supportera les frais et dépens de l’instance, conformément à l’article 696 du Code de Procédure Civile ;
Qu’il convient de constater l’exécution provisoire du dit jugement, en application de l’article 514 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
LE JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX, statuant publiquement, par jugement rendu par défaut et en dernier ressort, mis à disposition au greffe ;
PRONONCE la déchéance du droit aux intérêts à l’encontre de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE pour le crédit accordé à Monsieur [V] [Z] le 29 décembre 2021 ;
CONDAMNE M. [Z] à payer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 1.609,67 € ;
DIT que cette somme ne portera pas intérêts, ni au taux légal, ni au taux contractuel ;
DEBOUTE la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE du surplus de ses demandes ;
CONDAMNE M. [Z] à payer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 150 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;
CONDAMNE M. [Z] aux entiers frais et dépens ;
CONSTATE que le présent jugement est immédiatement exécutoire par provision ;
Le présent jugement est signé par le président et le greffier
Le GreffierLe Président