Droit de rétractation : décision du 8 mars 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 21/13811
Droit de rétractation : décision du 8 mars 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 21/13811
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8

ARRÊT AU FOND

DU 08 MARS 2023

N° 2023/ 110

N° RG 21/13811

N° Portalis DBVB-V-B7F-BIEVN

S.A.R.L. FRANCE RENOVATION

C/

[M] [O]

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Diane-Daphnée AJAVON

Me Joseph CZUB

Me Laurence DE SANTI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de proximité de SALON-DE-PROVENCE en date du 15 Juillet 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 1119000341.

APPELANTE

S.A.R.L. FRANCE RENOVATION

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 4]

représentée par Me Diane-Daphnée AJAVON, membre de la SARL KONNECT AVOCATS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substituée et plaidant par Me Djibril NDIAYE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

INTIMEES

Madame [M] [O]

née le [Date naissance 3] 1948 à [Localité 5] (ALGERIE), demeurant [Adresse 2]

représentée et plaidant par Me Joseph CZUB, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

Agissant poursuite et diligence de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège sis [Adresse 1]

représentée et plaidant par Me Laurence DE SANTI, membre de la SCP DRUJON D’ASTROS & ASSOCIES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 10 Janvier 2023 en audience publique devant la cour composée de :

Monsieur Philippe COULANGE, Président

Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère

Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Maria FREDON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Mars 2023.

ARRÊT

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Mars 2023, signé par Monsieur Philippe COULANGE, Président et Madame Maria FREDON, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Par bon de commande daté du 05 février 2018 et signé le même jour, Mme [O] a confié à la SARL FRANCE RENOVATION la livraison et la pose d’une pergola bioclimatique en aluminium avec LED de 10,50 m² de couleur blanc, garantie 10 ans pour un montant TTC de 30.000 euros.

Cette opération a été financée en totalité par un crédit affecté souscrit par Mme [O] selon offre préalable du même jour auprès de CETELEM, une marque commerciale de la SA BNP PERSONAL FINANCE.

Le prêt était remboursable, après une phase de report d’exigibilité de 180 jours après la date de mise à disposition des fonds, en 96 échéances mensuelles d’un montant unitaire de 407,87 euros, au taux de 6,22 %, soit un taux annuel effectif global de 6,40%.

Par acte d’huissier dressé le 5 novembre 2019, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a fait assigner Mme [O] à comparaître le 24 janvier 2020 devant le Tribunal d’instance de Salon de Provence aux fins d’obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, sa condamnation à lui payer la somme de 33 868,64 € majorée des intérêts au taux contractuel de 6,22 % l’an à compter du 4 juillet 2019 jusqu’à parfait paiement, outre la somme de 500 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre sa condamnation aux dépens.

Par acte d’huissier du 21 septembre 2020, Mme [O] a fait citer la SARL FRANCE RENOVATION à comparaître devant la même juridiction aux fins de la voir relever et garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre et de la voir condamner à lui payer la somme de 16000 € à titre de dommages et intérêts outre 1800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement rendu le 15 juillet 2021, le Tribunal de proximité de Salon de Provence, considérant que le bon de commande a été conclu hors domicile et ne comporte pas de bordereau de rétractation, a :

DECLARE recevable la demande formée par la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

REJETTE l’exception de procédure soulevée par Mme [O] ;

PRONONCE la nullité du contrat conclu entre Mme [O] et la SARL FRANCE RENOVATION, le 05 février 2018;

PRONONCE en conséquence la nullité du contrat de crédit souscrit par Mme [O] selon offre préalable du 05 février 2018 auprès de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, affecté au financement de cette opération;

CONDAMNE la SARL FRANCE RENOVATION, à reprendre possession dans un délai de 3 mois à compter de la signification du jugement, du matériel installé en application du contrat du 5 février 2018;

DIT que passé ce délai, ce matériel demeurera acquis à Mme [O] ;

CONDAMNE Mme [O] à restituer à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 30.000 euros ;

CONDAMNE la SARL FRANCE RENOVATION à relever et garantir Madame [M] [O] de sa condamnation à restituer à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 30.000 euros ;

REJETE le surplus des demandes plus amples ou contraires ;

CONDAMNE la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à verser à Mme [O] la somme de 800 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SARL FRANCE RENOVATION à verser à Mme [O] la somme de 800 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE aux dépens de l’instance principale;

CONDAMNE la SARL FRANCE RENOVATION aux dépens de l’appel en garantie ;

ORDONNE l’exécution provisoire de la présente décision ;

Par déclaration au greffe en date du 29 septembre 2021, la SARL FRANCE RENOVATION a interjeté appel de cette décision.

Elle sollicite :

REFORMER le jugement du Juge des contentieux de la protection du Tribunal de Proximité de Salon-de-Provence du 15 juillet 2021 en ce qu’il a :

– Déclaré recevable la demande formée par la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ;

– Prononcé la nullité du contrat conclu entre Madame [M] [O] et la SARL FRANCE

RENOVATION, le 05 février 2018 ;

– Prononcé en conséquence la nullité du contrat de crédit souscrit par Madame [M] [O] selon offre préalable du 05 février 2018 auprès de la SA BNP PARIBAS

PERSONAL FINANCE, affecté au financement de cette opération ;

– Condamné la SARL FRANCE RENOVATION, à reprendre possession dans un délai de 3 mois

compter de la signification du jugement, du matériel installé en application du contrat du 05 février 2018 ;

– Dit que passé ce délai, ce matériel demeurera acquis à Madame [M] [O] ;

– Condamné la SARL FRANCE RENOVATION à relever et garantir Madame [M] [O] de sa condamnation à restituer à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 30.000 euros ;

– Rejeté le surplus des demandes plus ou contraires ;

– Condamné la SARL FRANCE RENOVATION à verser à Madame [M] [O] la somme de 800 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamné la SARL FRANCE RENOVATION aux dépens de l’appel en garantie ;

– Ordonné l’exécution provisoire de la décision prononcée.

DECLARER recevable et fondé l’appel interjeté par la SARL FRANCE RENOVATION, y faisant droit ;

DEBOUTER Mme [O] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions en cause d’appel ;

DEBOUTER la société SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions dirigées contre la SARL FRANCE RENOVATION ;

Statuant à nouveau,

A TITRE PRINCIPAL

DECLARER que le contrat formé entre Mme [O] et la société FRANCE RENOVATION est totalement valable et que le bon de commande souscrit le 5 février 2018 est régulier ;

JUGER qu’en conséquence, Mme [O] sera déboutée de sa demande de nullité dudit contrat ;

JUGER qu’il n’y a pas lieu à résolution du contrat pour non-respect des dispositions de l’article 1165 du Code civil, étant inapplicable en l’espèce ;

A TITRE SUBSIDIAIRE

JUGER qu’il y a eu confirmation du contrat du fait de son exécution volontaire par Mme [O] ;

JUGER qu’en conséquence, il n’y a pas lieu de prononcer la nullité du contrat conclu le 5 février 2018 entre Mme [O] et la société FRANCE RENOVATION ;

A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE

DECLARER que le premier juge n’a pas tiré toutes les conséquences de ses constatations en termes de restitution du fait de l’annulation du contrat conclu le 5 février 2018 entre Mme [O] et la société FRANCE RENOVATION ;

JUGER que Mme [O] supportera les frais de restitution du matériel installé en application du contrat du 5 février 2018 ;

EN TOUT ETAT DE CAUSE

REJETER la demande de Mme [O] tendant à la condamnation de la société FRANCE RENOVATION au versement de la somme de 16 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

DEBOUTER Mme [O] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

CONDAMNER Mme [O] et la société SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à la SARL FRANCE RENOVATION la somme de 2.500 € au titre de dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

A l’appui de son recours, elle fait valoir:

-que suite à la signature du bon de commande les travaux ont été réalisés, ont donné lieu à un procès verbal de réception sans réserve sans que la cliente ne se plaigne de la qualité de la prestation,

-que Mme [O] cherche à se soustraire à ses obligations contractuelles,

-que le bon de commande répond aux dispositions du code de la consommation, qu’il présente un bordereau de rétractation certes non détachable,

-qu’en tout état de cause l’absence d’informations relatives au droit de rétractation prolonge le délai de rétractation de 12 mois sans que Mme [O] n’est exercé de rétractation dans ce nouveau délai,

-qu’en tout état de cause face à cette nullité relative une confirmation est advenue du fait de l’exécution volontaire du contrat par Mme [O],

-que quoi qu’il en soit les frais de restitution de la pergola doivent être mis à la charge de Mme [O],

-qu’il n’y a pas lieu à résolution du contrat ni à dommages et intérêts,

-qu’elle n’a pas à relever et garantir Mme [O] par rapport à la banque.

Mme [O] conclut:

– DIRE ET JUGER autant irrecevable que mal fondé l’appel interjeté par FRANCE RENOVATION.

– DEBOUTER la société FRANCE RENOVATION et BNPPF de toutes leurs demandes, fins et conclusions.

– CONFIRMER le jugement rendu le 15 juillet 2021 en ce qu’il a annulé le contrat principal et le contrat affecté de crédit et en ce qu’il a jugé que la banque avait bien commis une faute.

– DIRE ET JUGER autant recevable que bien fondé l’appel incident de Mme [O]

– DIRE ET JUGER qu’il convient de surseoir à statuer dans l’attente de l’issue de la plainte pénale, laquelle est susceptible d’exercer directement une influence sur la solution du procès civil.

– REFORMER le jugement de première instance en ce qu’il n’a pas jugé que la banque devait être privée de sa créance de restitution en tout ou partie

– DIRE ET JUGER EN TOUT ÉTAT DE CAUSE que les règles applicables en matière de démarchage à domicile n’ont pas été respectées.

– DIRE ET JUGER que BNPPF en débloquant les fonds sans vérifier les règles élémentaires et d’ordre public du Code de la consommation sur le démarchage à domicile a commis une ou plusieurs fautes, en lien avec le préjudice subi par la requérante qui doit priver cette banque de son droit au remboursement du crédit.

– DIRE ET JUGER le bon de commande avec la société FRANCE RENOVATION en date du 5 février 2018 comporte plusieurs irrégularités, notamment l’absence de délai précis d’exécution de la prestation de services, l’absence de désignation précise de la nature et des caractéristiques essentielles des biens offerts ou des services proposés.

– DIRE ET JUGER que le nom du démarcheur fait défaut,

– DIRE ET JUGER que le formulaire détachable destiné à faciliter l’exercice de la faculté de renonciation du consommateur est absent et en tout état de cause irrégulier.

– DIRE ET JUGER que le bon de commande litigieux est par conséquent nul.

– DIRE ET JUGER que la société FRANCE RENOVATION n’a pas respecté son obligation précontractuelle de conseil.

– DIRE ET JUGER que le contrat d’achat et d’exécution de la prestation souscrit le 5 février 2018 avec la société FRANCE RENOVATION et le contrat de crédit accessoire conclu le même jour avec la société SA BNPPF forment un tout indivisible.

– DIRE ET JUGER que SA BNPPF en sa qualité de professionnel du crédit aurait dû s’assurer de la validité du bon de commande au regard des règles sur le démarchage à domicile.

– DIRE ET JUGER que SA BNPPF ne saurait utilement contester une telle obligation en invoquant qu’il est tiers au contrat principal, qu’il n’existe pas d’obligation expresse en ce sens et qu’elle n’a pas nécessairement à sa disposition le bon de commande.

– DIRE ET JUGER en effet qu’en application de l’article L 311-1 11° du code de la consommation le contrat principal et le contrat de crédit forment une opération commerciale unique, si bien que du fait de l’indivisibilité des contrats, l’établissement de crédit doit procéder préalablement aux vérifications nécessaires auprès du prestataire de service et des consommateurs en réclamant au besoin le bon de commande qui en l’espèce lui aurait permis de déceler immédiatement que le contrat principal était affecté de plusieurs causes évidentes de nullité.

– DIRE ET JUGER que BNPPF a fautivement omis de vérifier l’opération qu’elle finançait et la validité du bon de commande, alors qu’à la simple lecture de celui-ci, elle aurait dû constater les graves carences que celui-ci présentait au regard des dispositions protectrices du consommateur, et se persuader ainsi que le contrat principal s’en trouvait nul ou à tout le moins annulable et refuser en conséquence de mettre les fonds à la disposition

du prestataire de service.

– DIRE ET JUGER que SA BNPPF a commis une faute dans l’accord de financement, ainsi que dans le déblocage des fonds.

– PRONONCER en conséquence l’annulation tant du bon de commande avec la société FRANCE RENOVATION que du contrat de crédit affecté avec SA BNPPF.

– DIRE ET JUGER que la faute de l’organisme de crédit le prive du droit de réclamer à Mme [O] le remboursement des sommes prêtées et que la privation de la créance de restitution de la banque, compte tenu de ses fautes constitue l’exact préjudice de l’emprunteur.

– DIRE ET JUGER que la requérante n’a jamais entendu couvrir la nullité ou renoncer à se prévaloir de la nullité et qu’elle n’a jamais renoncé en toute connaissance de cause à se prévaloir de la nullité.

– DONNER ACTE à la requérante qu’elle tient à la disposition de la société FRANCE RENOVATION l’ensemble des matériels posés à son domicile en contrepartie de l’annulation ou résolution du contrat principal et du contrat de crédit.

Par ailleurs, en tout état de cause :

-DIRE ET JUGER que le contrat principal sera résolu compte tenu de l’importance des abus et manquements contractuels de la société FRANCE RENOVATION et de son démarcheur.

– PRONONCER en conséquence la résolution de la vente et, partant, du contrat de crédit affecté conclu avec SA BNPPF, en ce que les deux forment une opération commerciale unique.

– DIRE ET JUGER que le contrat principal sera résolu notamment en raison de la fixation abusive du prix.

– DIRE ET JUGER que les parties doivent être remises en l’état antérieur à la conclusion desdits contrats.

– DIRE ET JUGER s’agissant de la remise en l’état, que la société FRANCE RENOVATION devra récupérer à ses frais le matériel et remettre bien sûr en l’état le bien immobilier, de la requérante tel qu’il était avant la pose de l’installation.

– CONDAMNER la société FRANCE RENOVATION à garantir Mme [O] en application de l’article L 312-56 du Code de la consommation.

A titre subsidiaire,

– CONDAMNER la société FRANCE RENOVATION à verser à Mme [M] [O] la somme de 16 000 euros à titre de dommages intérêts.

– CONDAMNER in solidum la société FRANCE RENOVATION et la société BNPPF à régler à Mme [M] [O] la somme de 2500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens, tant de première instance que d’appel.

Elle soutient :

-qu’elle n’est pas en possession de l’annexe jointe à la déclaration d’appel,

-qu’elle a été abusée par le démarcheur à domicile de la société FRANCE RENOVATION tant dans ce dossier que dans un autre pour des peintures intérieures et qu’elle a porté plainte, qu’elle sollicite donc un sursis à statuer dans l’attente de l’issue de sa plainte,

-que l’original du bon de commande ne lui a jamais été remis qu’une simple copie a été ultérieurement remise par la banque qui ne contient aucun bordereau de rétractation,

-que s’il faut retenir un modèle d’un autre bon de commande, le bordereau de rétractation est irrégulier,

-qu’il n’y a aucune indication sur le bon de commande sur la date d’exécution de la prestation, aucune date de RDV de métrage n’est précisée, le nom du démarcheur n’est pas renseigné, sans indication des caractéristiques techniques du bien avec un prix global, ce qui justifie la nullité du bon de commande,

-qu’elle a été victime de manoeuvres trompeuses,

-que l’annulation du contrat principal entraîne l’annulation du crédit affecté,

-qu’elle n’a jamais voulu confirmer la nullité,

-que la banque qui n’a pas vérifié la régularité du bon de commande a commis une faute la privant de sa créance de restitution,

-qu’en tout état de cause le bon de commande doit être résolu pour fixation abusive du prix,

-que subsidiairement il doit lui être alloué des dommages et intérêts.

La banque conclut:

A TITRE PRINCIPAL :

REFORMER la décision entreprise en ce qu’elle a prononcé la résolution du contrat principal et par conséquence la nullité du contrat de crédit affecté

DIRE ET JUGER que la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE n’a commis aucune faute,

DEBOUTER Mme [O] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions à l’encontre de la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE,

CONDAMNER Mme [O] à payer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 33.868,64 € majorée des intérêts au taux contractuel de 6,22 % l’an à compter du 4 juillet 2019 jusqu’à parfait paiement.

A TITRE SUBSIDIAIRE, si le Tribunal devait prononcer la résolution ou la nullité du contrat de crédit affecté :

CONFIRMER la décision en ce qu’elle a considéré que la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE devait obtenir la restitution des fonds prêtés

DIRE ET JUGER que les parties doivent être remises dans l’état où elles se trouvaient antérieurement,

DEBOUTER Mme [O] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions à l’encontre de la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

CONDAMNER Mme [O] à payer 30.000 € à BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à titre de remboursement des sommes prêtées

A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE, si par extraordinaire la déchéance du droit aux intérêts était prononcée,

CONDAMNER Mme [O] au paiement de la somme de 30.000 € majorée des intérêts au taux légal à compter du 5 novembre 2019 jusqu’à parfait paiement.

EN TOUT ETAT DE CAUSE,

CONDAMNER Mme [O] à payer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 1.500,00€ sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONDAMNER Mme [O] au paiement des entiers dépens ;

Elle fait valoir :

-qu’en l’absence d’action publique il n’y a pas lieu de surseoir à statuer,

-qu’il ne lui appartient pas de s’assurer du respect par le vendeur des obligations liées à un éventuel démarchage à domicile ou d’apprécier si les omissions affectant le bon de commande traduisent une violation par le vendeur de ses obligations,

-que le bordereau de rétraction du contrat de crédit est parfaitement régulier,

-qu’en tout état de cause la sanction attachée à l’existence de prétendues informations erronées dans le bordereau de rétractation porte uniquement sur une prolongation du délai de rétractation et non sur la nullité du contrat de crédit,

-que le bon de commande mentionne un délai de livraison sans que les dispositions légales n’exigent de date certaine, que la loi n’impose pas que soit apposé sur ce bon le nom du démarcheur, que ce bon renseigne sur les caractéristiques du bien,

-qu’elle ne rapporte pas la preuve des manoeuvres trompeuses dont elle se prévaut pour solliciter la résolution du contrat,

-qu’en tout état de cause la nullité est relative et a été couverte par l’exécution volontaire du contrat par Mme [O],

-que le bon de commande étant régulier, n’ayant pas l’obligation de contrôler le contrat principal, elle n’a commis aucune faute,

-qu’en tout état de cause cette prétendue faute ne cause aucun préjudice à Mme [O] de sorte qu’elle ne peut être privée de sa créance de restitution.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 27 décembre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l’appel principal

Mme [O] prétend que l’appel est irrecevable puisqu’elle ne serait pas en possession de l’annexe jointe à la déclaration d’appel.

Or il résulte des pièces de procédure que la déclaration d’appel, avec annexe jointe, qui liste les chefs du jugement expressément critiqués, a été notifiée à Mme [O] par le greffe de la présente cour le 6 octobre 2021.

En conséquence, l’appel principal est recevable.

Sur l’exception de procédure

L’article 378 du code de procédure civile dispose que la décision de sursis suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’événement qu’elle détermine.

En l’espèce, les demandes de Mme [O] ne se fondent pas sur le dol, de sorte que c’est à juste titre que le premier juge a retenu comme non justifiée la demande de sursis à statuer dans l’attente de l’issue d’une plainte pénale pour escroquerie et a rejeté cette demande.

Sur les demandes de nullité

Sur la demande de nullité du bon de commande

Le bon de commande, versé aux débats, a été signé à [Localité 6], lieu de résidence de Mme [O]. Il s’agit donc d’une démarchage à domicile, soumis à l’article L221-9 du code de la consommation.

Or cet article exige, à peine de nullité en application de l’article L242-1 du même code, que le professionnel remette au consommateur un exemplaire du contrat comportant toutes les informations prévues à l’article L221-5 du même code, qui se rapporte à l’article L111-1, notament:

-les caractéristiques essentielles du bien ou du service,

-en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service.

En l’espèce, le bon de commande précise un délai pour la pose de 6 semaines, après métrage, sans prévoir de date ou de délai pour ce dernier, ce qui ne répond pas aux exigences de l’article précité, laissant le consommateur dans l’incertitude, quant à la date de pose.

En outre, ce bon de commande décrit le bien objet du contrat de la manière suivante: ‘livraison et pose d’une pergola bioclimatique en aluminium avec LED de 10,50 m² de couleur blanc garantie 10 ans pièces, main d’oeuvre et déplacement’, sans que ne soient précisées les caractéristiques techniques du bien comme sa motorisation, son mode de fixation, son type de lames, ses dimensions (hauteur, longueur, largeur)…

Ainsi, ce bon de commande ne respecte pas les dispositions spécifiques prévues pour les contrats conclus hors établissement, à peine de nullité et il convient de confirmer le jugement entrepris par substitution de motifs, en ce qu’il a fait droit à la demande en nullité du contrat de vente conclu le 5 février 2018 entre Mme [O] et la SARL FRANCE RENOVATION.

Sur la nullité du contrat de crédit

En application de l’article L311-1 11° du code de la consommation, le contrat principal et le contrat de crédit forment une opération commerciale unique.

Il résulte de l’article L312-55 du code de la consommation que le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat principal en vue duquel il a été conclu est lui même judiciairement résolu ou annulé.

Les nullités prononcées sont des nullités relatives qui peuvent en application de l’article 1182 du code civil faire l’objet d’une confirmation, consistant en l’exécution volontaire du contrat en connaissance de la cause de nullité.

Il est de jurisprudence constante que pour qu’il y ait confirmation d’une obligation entachée de nullité, il faut une connaissance du vice et l’intention de le réparer.

Le fait que Mme [O] ait contracté un prêt pour financer le projet, ait accepté la livraison et la pose du matériel, ne se soit pas rétractée ni n’ait exprimé de réclamation pendant plus d’un an et pas avant la réception de l’assignation introductive d’instance, ne suffit pas à établir qu’elle a agi en connaissance de cause et exprimé sa volonté expresse et non équivoque de couvrir les irrégularités du bon de commande qu’elle ne pouvait appréhender en qualité de simple consommatrice non avertie.

Aussi, le jugement est confirmé en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat de crédit affecté conclu à la même date.

Sur la faute de la banque

Il est de jurisprudence constante que la banque, qui verse les fonds au vendeur sans procéder préalablement aux vérifications nécessaires auprès du vendeur et des emprunteurs, ce qui lui aurait ainsi permis de constater que le contrat était affecté d’une cause de nullité, en ce qu’il avait été établi en méconnaissance des dispositions du code de la consommation relatives au démarchage à domicile, commet une faute.

En l’espèce, la banque n’a manifestement pas procédé aux vérifications concernant la régularité du contrat qu’elle devait financer, elle a libéré les fonds sans se préoccuper de la régularité du contrat initial financé au regard des dispositions du code de la consommation relatives au démarchage à domicile et a donc commis une faute.

Or, pour que la faute prive la banque de sa créance de restitution, il faut établir l’existence d’un préjudice.

En l’espèce, il n’est pas démontré que l’installation financée ne fonctionne pas ni que la faute de la banque a causé un préjudice à Mme [O] irrégulièrement démarchée autre que celui réparé par l’annulation du contrat principal.

Aussi, le premier juge est confirmé en ce qu’il n’a pas privé la banque de sa créance en restitution.

Sur les restitutions

Il résulte de l’interprétation de l’article 1178 du code civil que la nullité a pour effet l’effacement rétroactif du contrat, de sorte que les parties doivent être remises dans l’état où elles se trouvaient avant cette exécution.

Ainsi, c’est valablement que le premier juge a décidé qu’en conséquence de l’annulation du contrat principal de vente la SA FRANCE RENOVATION doit être condamnée à reprendre possession dans les 3 mois de la signification du jugement du matériel installé en application du contrat du 5 février 2018 au domicile de Mme [O], faute de quoi ledit matériel sera réputé abandonné et pourra être conservé par l’acquéreur.

En effet, les conditions techniques de fixation de la pergola justifient pour la préservation du matériel que le professionnel qui l’a installé procède à son retrait.

En outre, Mme [O] est condamnée à payer à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 30 000€, étant précisé qu’aucun versement n’a été réalisé depuis l’origine du contrat.

Sur l’appel en garantie

En application de l’article 12 du code de procédure civile, c’est à juste titre que le premier juge a requalifié la demande de Mme [O] d’être relevée et garantie par la SARL FRANCE RENOVATION sur le fondement de l’article L312-56 du code de la consommation en demande fondée sur l’article 331 alinéa 2 du code civil, qui dispose qu’un tiers peut être mis en cause par la partie, qui y a intérêt, afin de lui rendre commun le jugement.

Il a tout aussi parfaitement retenu que la SARL FRANCE RENOVATION en concluant un contrat qui ne respecte pas les règles du code de la consommation a commis une faute, occasionnant un préjudice à Mme [O], qui voit le contrat principal annulé tout en ayant obligation de restituer à la banque la capital emprunté, justifiant que la SARL FRANCE RENOVATION soit condamnée à relever et garantir Mme [O] de sa condamnation à payer à la banque la somme de 30 000€.

Sur la demande de dommages et intérêts

Il n’a pas lieu de statuer sur cette demande formulée à titre subsidiaire, alors qu’il a été fait droit à la demande principale en nullité des contrats, d’autant que Mme [O] n’en précise pas le fondement juridique.

Sur les autres demandes

La SARL FRANCE RENOVATION et la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sont condamnés in solidum à payer à Mme [O] la somme de 2 000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe, en dernier ressort,

DECLARE recevable l’appel principal,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 15 juillet 2021 par le Tribunal de proximité de SALON-DE-PROVENCE,

Y ajoutant,

CONDAMNE in solidum La SARL FRANCE RENOVATION et la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à régler à Mme [O] la somme de 2 000€ sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure Civile,

CONDAMNE in solidum La SARL FRANCE RENOVATION et la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE aux entiers dépens de l’appel.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT

 


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