Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 9 – A
ARRÊT DU 07 DÉCEMBRE 2023
(n° , 9 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/01799 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFDIN
Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 octobre 2021 – Tribunal de proximité de SAINT MAUR DES FOSSÉS – RG n° 11-20-000631
APPELANTE
SEGOULA, SARL agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
N° SIRET : 753 386 028 00033
[Adresse 8]
[Adresse 8]
[Localité 5]
représentée par Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090 substituée à l’audience par Me Thierry PIERRON de la SELARL CABINET TAIEB-PIERRON, avocat au barreau de PARIS, toque : D0831
INTIMÉS
Monsieur [E] [J]
né le 17 janvier 1953 à [Localité 6] (88)
[Adresse 2]
[Localité 4]
DÉFAILLANT
Madame [L] [S] épouse [J]
née le 27 août 1956 à [Localité 7] (88)
[Adresse 2]
[Localité 4]
DÉFAILLANTE
La société DOMOFINANCE, société anonyme à conseil d’administration, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité
N° SIRET : 450 275 490 00057
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 3 octobre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre
Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère
Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère
Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE
ARRÊT :
– RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
A la suite d’un démarchage à domicile, M. [E] [J] a, aux termes d’un contrat en date du 26 mai 2015, commandé à la société Segoula sous l’enseigne Solar Eco Green une centrale photovoltaïque moyennant le prix de 22 500 euros TTC.
Pour financer cette installation M. [J] et son épouse, Mme [L] [S] épouse [J], ont le même jour souscrit auprès de la société Domofinance un prêt affecté d’un montant de 22 500 euros remboursable sur 125 mois, soit après un report en 120 mensualités de 241,59 euros hors assurance au taux d’intérêts contractuels de 4, 83 % l’an (TAEG : 4, 94 % l’an) soit une mensualité avec assurance de 262,37 euros.
Le 10 mai 2015, M. [J] a signé une attestation de fin de travaux sans réserve à destination de la société Domofinance en sollicitant le déblocage des fonds.
Le 28 juillet 2015, l’installation a été raccordée au réseau, et les époux [J] ont commencé à percevoir les revenus de revente de l’électricité à ERDF.
Saisi le 22 juin 2020 par les époux [J] d’une demande tendant principalement à l’annulation des contrats de vente et de crédit, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Saint-Maur-des-Fossés a, par jugement contradictoire en date du 29 octobre 2021 :
– prononcé la nullité du contrat de vente et du contrat de crédit affecté,
– condamné en conséquence :
la société Domofinance à restituer aux époux [J] la somme de 17 826,61 euros, arrêtée au mois de septembre 2021, avec intérêts au taux légal à compter du jugement, outre les éventuelles mensualités postérieures versées,
la société Segoula à restituer à la société Domofinance la somme de 22 500 euros au titre de la restitution du capital prêté,
la société Segoula à procéder à la récupération de son installation photovoltaïque et à la remise en l’état de la toiture, l’ensemble à ses frais,
– condamné in solidum les sociétés Segoula et Domofinance à payer aux époux [J] la somme de 600 euros au titre de l’article 700 du code de procécure civile,
– condamné in solidum les sociétés Segoula et Domofinance aux entiers dépens,
– débouté les parties du surplus de leurs demandes,
– rappelé que l’exécution provisoire est de droit.
Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription, le premier juge a relevé que M. [J] avait signé le bon de commande le 26 mai 2015 et avait ainsi en principe jusqu’au 25 mai 2020 pour exercer son action mais que ce délai avait été prorogé jusqu’au 23 juin 2020 en raison de l’état d’urgence sanitaire si bien que M. [J] qui avait assigné le 22 juin 2020 était recevable en son action.
Sur le fond, il a retenu que si les dispositions du code de la consommation étaient bien reproduites dans le bon de commande, elles l’étaient en si petits caractères qu’elles n’étaient pas correctement lisibles par le consommateur, que les époux [J] faisaient valoir que le bon de commande ne précisait ni le nombre de panneaux, ni le modèle, ni les références, ni la performance, ni la dimension et le poids de l’onduleur, que le fait d’avoir réceptionné l’installation sans réserve et ordonné le versement des fonds était insuffisant pour établir que les époux [J] avaient connaissance des vices affectant le contrat principal et avaient entendu les réparer. Il a considéré que le contrat était nul, sans que puisse être constatée une confirmation tacite des vices l’ayant affecté. Il a subséquemment constaté la nullité du contrat de crédit affecté. Il a ensuite ordonné la restitution par la société Domofinance aux époux [J] des sommes qu’ils lui avaient versées et relevé que du fait de la demande en garantie, c’est la société Segoula bénéficiaire des fonds qui devait être condamnée à restituer le capital à la société Domofinance. Il a en outre condamné la société Segoula à procéder à ses frais à la récupération de son installation photovoltaïque et à la remise en l’état de la toiture.
Sur les demandes en dommages et intérêts formées par les époux [J] contre les sociétés Segoula et Domofinance, le premier juge a estimé qu’ils ne justifiaient pas avoir subi un préjudice économique distinct de celui déjà réparé par l’effet des restitutions et ne démontraient pas avoir subi un trouble de jouissance ou un préjudice moral en soulignant que les causes invoquées relevaient pour partie de désagréments inhérents à l’installation de la centrale photovoltaïque, sans lien avec une quelconque faute des sociétés défenderesses.
Il a en revanche admis la demande en garantie formée par la banque au motif que l’annulation des contrats résultait de la faute de la société Segoula mais a rejeté la demande de la banque en dommages et intérêts en relevant qu’elle aurait dû elle-même s’assurer de la régularité formelle du contrat principal avant de le financer, de sorte qu’elle était à l’origine de son propre préjudice.
La société Segoula a interjeté appel de ce jugement par déclaration en date du 22 janvier 2022.
Aux termes de ses conclusions récapitulatives, déposées par voie électronique le 11 septembre 2023, elle demande à la cour :
– de la déclarer bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,
– d’infirmer le jugement sauf en ce qu’il a rejeté des demandes des époux [J] et statuant à nouveau,
– de juger que le contrat de vente est valable et ne saurait être entaché de nullité et en conséquence de juger qu’il ne saurait être procédé à la désinstallation du matériel,
– de débouter les époux [J] ainsi que la société Domofinance de toutes leurs demandes,
– en tout état de cause, de juger que les époux [J] ont entendu confirmer le contrat de vente et qu’ils en ont couvert les éventuelles causes de nullité,
– de débouter la société Domofinance de ses demandes d’appel en garantie et de condamnation et de sa demande reconventionnelle à son encontre,
– de constater la mauvaise foi des époux [J],
– de les débouter de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,
– de les condamner à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 code de procédure civile et aux dépens de la procédure avec le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Elle soutient avoir respecté les dispositions impératives du code de la consommation et que les époux [J] échouent à apporter la preuve du caractère déterminant des prétendues carences du bon de commande.
Elle souligne que les époux [J] qui ont expressément renoncé à exercer leur droit de rétractation et sollicité que l’installation soit posée le 10 juin 2015 ne peuvent se prévaloir d’une prétendue irrégularité du bordereau de rétractation qu’elle conteste par ailleurs et considère que les dispositions qui sont invoquées par les époux [J] s’appliquent uniquement aux contrats de crédit. Elle relève que la sanction d’un défaut d’informations relativement au droit de rétractation n’est pas la nullité du contrat mais la prorogation du délai de rétractation sur douze mois.
Elle fait valoir que la rentabilité de l’installation qui doit s’apprécier sur le long terme n’est jamais entrée dans le champ contractuel, qu’elle ne contrôle pas les prix pratiqués par ERDF et relève que les époux [J] ne produisent aucun relevé de consommation.
Elle conteste tout dol, soutient que les époux [J] ne démontrent pas sa prétendue intention de les tromper et rappelle que le dol ne se présume pas.
Elle soutient que les acquéreurs ont confirmé le contrat et renoncé à se prévaloir d’une irrégularité du bon de commande en attestant de l’exécution conforme des travaux au contrat sans aucune réserve, en ordonnant le paiement du prix puis en contractant avec la société EDF, en vendant l’électricité produite par l’équipement et ce en toute connaissance de cause puisque la reproduction des dispositions de l’article L. 121-23 du code de la consommation leur avait permis de connaître les éventuelles causes de nullité.
Elle prétend en tout état de cause que les époux [J] ont confirmé les éventuels vices ayant affecté le contrat de vente en lui donnant mandat pour les formalités administratives, en laissant s’exécuter les travaux et en les réceptionnant sans réserve, puis en sollicitant le déblocage des fonds, en s’acquittant des échéances du prêt et ce alors qu’ils avaient connaissance des possibles causes de nullité par la reproduction des articles du code de la consommation.
Elle oppose enfin sa bonne foi à la mauvaise foi des époux [J] dont elle affirme qu’ils disposent contrairement à leurs dires d’une installation reconnue conforme par le consuel, autorisée par la mairie et relève qu’elle est en règle avec ses obligations assurancielles. Elle rappelle leur absence de contestation et souligne qu’ils ont attendu plus de 5 ans soit le 22 juin 2020 pour contester leur installation. Elle conteste les préjudices invoqués par ces derniers et relève qu’ils n’hésitent pas à se fonder sur un devis réalisé en 2016 dans le cadre d’un autre litige.
Elle s’oppose à l’appel en garantie de la société Domofinance, au motif qu’elle n’a pas commis de faute et à sa demande en répétition de l’indu au motif que la somme versée trouve son origine dans l’obligation contractée par les époux [J].
Aux termes de ses conclusions récapitulatives, déposées par voie électronique le 12 juin 2023, la société Domofinance demande à la cour :
– d’infirmer le jugement sauf en ce qu’il a rejeté des demandes des époux [J],
– à titre principal, de déclarer irrecevable la demande des époux [J] en nullité du contrat conclu avec la société Segoula et en conséquence irrecevable leur demande en nullité du contrat de crédit, à tout le moins de les dire infondées et de débouter les époux [J] de leurs demandes en nullité des contrats,
– en tout état de cause, de constater que les époux [J] sont défaillants dans le remboursement du crédit, de prononcer la résiliation du contrat de crédit du fait des impayés avec effet au 4 février 2022 et de les condamner solidairement à lui payer la somme de 10 936,51 euros avec les intérêts au taux contractuel à compter du 4 février 2022 sur la somme de 10 126,40 euros et au taux légal pour le surplus outre la restitution des sommes versées en exécution du jugement et subsidiairement, de les condamner solidairement à lui régler la somme de 5 556,57 euros au titre des mensualités échues impayées du 05 février 2022 au 5 décembre 2023, outre la restitution des sommes qui leur ont été restituées en exécution du jugement au titre des mensualités précédemment réglées, et de leur enjoindre de reprendre le remboursement des mensualités à peine de déchéance du terme,
– subsidiairement, en cas de nullité des contrats, de déclarer irrecevable la demande des époux [J] visant à être déchargés de l’obligation de restituer le capital prêté, à tout le moins les en débouter et de les condamner, en conséquence, in solidum à lui régler la somme de 22 500 euros en restitution du capital prêté,
– en tout état de cause, de déclarer irrecevables les demandes des époux [J] tendant à la privation de sa créance ou à tout le moins les en débouter,
– très subsidiairement, de limiter la réparation qu’elle devrait eu égard au préjudice effectivement subi par les emprunteurs, de limiter en conséquence la décharge à concurrence du préjudice subi à charge pour les époux [J] d’en justifier,
– à titre infiniment subsidiaire en cas de privation de sa créance, de condamner in solidum les époux [J] à lui payer la somme de 22 500 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de leur légèreté blâmable, et subsidiairement, de les priver de leur créance en restitution des sommes réglées du fait de leur légèreté blâmable,
– en tout état de cause en cas de nullité des contrats, de dire et juger que la société Segoula est garante de la restitution du capital prêté, ce qui n’exonère toutefois pas l’emprunteur de son obligation lorsqu’il n’en a pas été déchargé et de condamner, en conséquence, la société Segoula à lui garantir la restitution de l’entier capital prêté, et donc à lui payer la somme de 22 500 euros au titre de la créance en garantie de la restitution du capital prêté,
– subsidiairement, si la cour ne devait pas faire droit à la demande de garantie de restitution du capital prêté ou n’y faire droit que partiellement, de condamner la société Segoula à lui payer la somme de 22 500 euros, ou le solde, sur le fondement de la répétition de l’indu, et à défaut sur le fondement de la responsabilité et de la condamner par ailleurs au paiement des intérêts perdus du fait de l’annulation des contrats soit la somme de 6 490,80 euros à ce titre,
– de débouter les époux [J] de leurs demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens,
– d’ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence, – en tout état de cause, de condamner in solidum les époux [J] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l’instance avec distraction au profit de la société Cloix & Mendès-Gil.
Elle soulève l’irrecevabilité des demandes ou leur caractère non-fondé se fondant sur les dispositions de l’article 1134 du code civil qui prévoient une remise en cause exceptionnelle des contrats et sans mauvaise foi.
L’appelante invoque encore le caractère irrecevable, à tout le moins non-fondé du grief tiré de la nullité du contrat de vente qui entraîne la nullité du contrat de crédit sur le fondement d’une irrégularité formelle du bon de commande au regard des dispositions de l’article L. 121-23 du code de la consommation.
Elle conteste les irrégularités du contrat de vente relevées par le tribunal, en soutenant qu’il convient de distinguer entre l’absence de mentions obligatoires et leur imprécision, et que les caractéristiques qui feraient défaut pour le tribunal vont au-delà des exigences de la loi et conduiraient si elles étaient exigées, à une nullité systématique des contrats. Elle rappelle que la marque n’est pas nécessairement une caractéristique essentielle du bien vendu. Elle souligne en tout état de cause que les époux [J] ne justifient d’aucun préjudice qui leur aurait été causé par ces prétendues carences, et que, s’agissant d’une nullité relative, celle-ci a été confirmée par leur comportement, caractérisant une exécution volontaire du contrat et que de surcroît, qu’ils disposent encore aujourd’hui d’une installation parfaitement fonctionnelle, qu’ils utilisent.
En l’absence de nullité du contrat principal, elle conclut au maintien du contrat de crédit dont elle sollicite la résiliation judiciaire pour cause d’impayés durant l’exécution provisoire du premier jugement.
En cas de nullité, elle demande la restitution du capital emprunté et conclut au rejet de la demande des époux [J] tendant à la privation de sa créance, alors qu’ils ne justifient d’aucune faute ni d’aucun préjudice susceptible d’emporter une telle décharge, en soulignant qu’ils ont poursuivi l’exécution volontaire du contrat et l’ont ainsi confirmé. Elle soutient que si le contrat de crédit est annulé, les demandeurs ne peuvent obtenir de dispense de remboursement sur le fondement d’une obligation contractuelle devenue inexistante du fait de l’annulation, et donc sur une faute alléguée de la banque dans la délivrance des fonds et que seule la démonstration d’une faute de nature délictuelle serait alors recevable.
Elle conteste ensuite le principe même de l’obligation qui lui incomberait d’avoir à vérifier la régularité formelle du contrat qu’elle finance, faisant valoir qu’aucun texte ne lui impose une telle obligation. Elle soutient en outre que seule une omission grossière de mentions pourrait éventuellement lui être reprochée et qu’elle n’a pas à garantir le fait d’un tiers. Elle rappelle également que les dispositions du code de la consommation résultent d’une directive de l’Union Européenne d’harmonisation maximale, ceci excluant la faculté pour le législateur de prévoir des règles plus strictes que celles énoncées dans la directive.
Sur le moyen tiré d’un défaut de vérification de l’exécution complète du contrat principal avant de libérer les fonds, elle expose n’avoir fait qu’exécuter l’ordre de paiement émis par ses mandants, qui avaient signé une attestation de livraison et demandé la libération des fonds. Elle souligne que les emprunteurs n’ont subi aucun préjudice du fait du déblocage des fonds puisque l’installation est achevée et fonctionnelle et qu’ils se seraient en tout état de cause rendus coupables de légèreté blâmable en signant une attestation de fin de travaux s’ils estimaient que les travaux n’avaient pas été achevés.
Enfin elle entend obtenir la garantie par le vendeur de la restitution du capital emprunté et des intérêts perdus sur le fondement de l’article L. 311-33 du code de la consommation en relevant que l’annulation lui serait imputable. Elle demande à titre subsidiaire à ce que ces sommes lui soient restituées sur le fondement de la répétition de l’indu ou de la responsabilité civile.
La société Segoula a fait signifier la déclaration d’appel aux époux [J] par actes du 16 mars 2022 délivrés à personne et ses conclusions en leur premier état par actes du 3 mai 2022 également délivrés à personne. Ces derniers n’ont pas constitué avocat.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 26 septembre 2023 et l’affaire a été appelée à l’audience du 3 octobre 2023.
MOTIFS DE LA DECISION
Selon l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s’il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
Il résulte de l’article 954 dernier alinéa du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.
A titre liminaire, la cour relève :
– qu’aucune fin de non-recevoir tirée de la prescription n’est soutenue à hauteur d’appel,
– que les époux [J] n’ont jamais constitué avocat et que la société Domofinance n’a jamais dénoncé ses conclusions aux époux [J] directement.
Dès lors, les demandes de la société Domofinance sont irrecevables en ce qu’elles sont dirigées contre les époux [J] y compris les fins de non-recevoir qu’elle leur oppose mais recevables en ce qu’elles sont dirigées contre la société Segoula.
Sur la validité du contrat de vente
Le contrat a été conclu dans le cadre d’un démarchage à domicile entre la société Segoula et M. [J] le 26 mai 2015. Il est donc soumis aux dispositions des articles L. 121-16 et suivants du code de la consommation dans leur version postérieure à l’entrée en vigueur de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014. C’est donc à tort que le premier juge a fait application de l’article L. 211-23 du code de la consommation pour apprécier la validité du contrat de vente.
En application des articles L. 121-17, L. 121-18 et L. 111-1 du code de la consommation, le professionnel doit informer le consommateur avant la conclusion du contrat et indiquer de manière lisible dans le contrat conclu hors établissement :
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 113-3 et L. 113-3-1 ;
3° En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte, ainsi que, s’il y a lieu, celles relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles. La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d’État.
L’article L. 121-18-1 sanctionne par la nullité du contrat toute violation des dispositions qui précèdent et prévoit que le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° du I de l’article L. 121-17.
Le premier juge a prononcé l’annulation en faisant sienne l’argumentaire des époux [J] qui soutenaient que le bon de commande ne mentionnait pas le nombre de panneaux photovoltaïques, le modèle et les références, la performance la dimension et le poids de l’onduleur. Il n’a pas retenu la taille des caractères comme une cause d’annulation mais pour écarter la couverture de la nullité après l’avoir prononcée.
Les époux [J] n’ayant pas constitué avocat, seule cette cause de nullité est donc en discussion devant la cour même si l’appelante a répondu à des moyens et à des arguments qui étaient développés en première instance mais ne le sont pas en appel puisque les époux [J] ne sont pas constitués.
En l’espèce le bon de commande décrit l’objet de la vente comme suit :
« Installation solaire photovoltaïque Nouvelle génération
Puissance globale de 3000 Wc Soluxtec
Comprenant : Panneaux photovoltaïques certifiés NF EN 61215 CLASSE II Système d’intégration au bâti ‘ Onduleur ‘ Coffret de protection ‘ Disjoncteurs ‘ Coffret parafoudre
Forfait d’installation de l’ensemble (hors tranchées éventuelles)
Démarches administratives (Mairie, Région, EDF, ERDF, Consuel) assurance RC et PE
La mise en service, raccordement ERDF, Consuel et le tirage de câbles entre le compteur et l’onduleur sont inclus »
La désignation du matériel vendu est suffisamment précise et permettait à l’acquéreur de comparer utilement la proposition notamment en termes de prix, avec des offres concurrentes en particulier pendant le délai de rétractation et de vérifier que tous les éléments nécessaires au fonctionnement de l’installation avaient bien été livrés et installés, avant de signer l’attestation de fin de travaux.
La marque des panneaux figure bien au contrat. Si leur nombre n’est pas mentionné, la puissance de l’installation l’est et la cour relève que le 10 juin 2015, M. [J] a signé un protocole d’accord qui portait sur un versement de prime à l’installation en précisant que la société Solar éco green lui avait bien installé la puissance de 3 kWc soit 12 panneaux photovoltaïques d’une puissance de 250 Wc chacun et avait rempli tous ses engagements à son égard.
Il n’est pas étayé en quoi le modèle et les références, la performance la dimension et le poids de l’onduleur pouvaient constituer, in concreto, des caractéristiques essentielles du produit au sens de l’article précité, alors que la description du produit vendu est suffisamment détaillée au regard des exigences textuelles.
Le bon de commande n’encourt donc aucune annulation pour ce motif. Le jugement doit donc être infirmé en ce qu’il a prononcé l’annulation des contrats et en toutes ses autres dispositions sauf en ce qu’il a rejeté les demandes indemnitaires des époux [J].
Sur les autres demandes
Les époux [J] qui succombent doivent être condamnés aux entiers dépens de première instance et d’appel, ces derniers avec le bénéfice de la distraction pour Maître Nathalie Lesenechal et la Selas Cloix & Mendes Gil et il apparaît équitable de leur faire supporter les frais irrépétibles engagés par la société Segoula à hauteur de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant par arrêt réputé contradictoire en dernier ressort,
Déclare irrecevables les demandes de la société Domofinance à l’égard de M. [E] [J] et de Mme [L] [S] épouse [J] ;
Infirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a rejeté les demandes indemnitaires de M. [E] [J] et de Mme [L] [S] épouse [J] ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit n’y avoir lieu à annulation des contrats ;
Condamne M. [E] [J] et Mme [L] [S] épouse [J] in solidum aux entiers dépens de première instance et d’appel, ces derniers avec le bénéfice de la distraction pour Maître Nathalie Lesenechal et la Selas Cloix & Mendes Gil ;
Condamne M. [E] [J] et Mme [L] [S] épouse [J] in solidum au paiement à la société Segoula d’une somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La greffière La présidente