Droit de rétractation : Décision du 6 février 2024 Cour d’appel d’Angers RG n° 19/00651

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Droit de rétractation : Décision du 6 février 2024 Cour d’appel d’Angers RG n° 19/00651
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COUR D’APPEL

D’ANGERS

CHAMBRE A – CIVILE

LE/CG

ARRET N°:

AFFAIRE N° RG 19/00651 – N° Portalis DBVP-V-B7D-EPL5

jugement du 22 Février 2019

Tribunal d’Instance de CHOLET

n° d’inscription au RG de première instance 17/00256

ARRET DU 06 FEVRIER 2024

APPELANTS :

Monsieur [I] [F]

né le 13 Mai 1964 à [Localité 10] (Algérie)

[Adresse 6]

[Localité 5]

Madame [L] [N] épouse [F]

née le 22 Mars 1973 à [Localité 9] (Algérie)

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentés par Me Philippe LANGLOIS de la SCP ACR AVOCATS, avocat au barreau d’ANGERS – N° du dossier 71190109

INTIMEES :

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de LA SOCIETE SYGMA BANQUE

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représentée par Me Guillaume QUILICHINI de la SCP PROXIM AVOCATS, avocat postulant au barreau d’ANGERS – N° du dossier 2017411 et par Me Rudy FARIA, avocat plaidant au barreau de SENS

S.A.S.U. AZUR SOLUTION ENERGIE

[Adresse 2]

[Localité 8]

Représentée par Me Nathalie CONTENT, avocat postulant au barreau d’ANGERS – N° du dossier 0530419 et par Me Cécile HUNAULT-CHEDRU, avocat plaidant au barreau de ROUEN

INTIMEE EN INTERVENTION FORCEE :

S.E.L.A.R.L. ATHENA, prise en la personne de Me [E] [C] en qualité de mandataire judiciaire de la Sté AZUR SOLUTION ENERGIE

[Adresse 3]

[Localité 4]

N’ayant pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue publiquement à l’audience du 05 Juin 2023 à 14H00, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée qui a été préalablement entendue en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame MULLER, conseillère faisant fonction de présidente

M. WOLFF, conseiller

Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée

Greffière lors des débats : Mme LEVEUF

Greffier lors du prononcé : M. DA CUNHA

ARRET : réputé contradictoire

Prononcé publiquement le 06 février 2024 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Leïla ELYAHYIOUI, vice-présidente placée, pour la présidente empêchée et par Tony DA CUNHA, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

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FAITS ET PROCÉDURE

M. [I] [F] et Mme [L] [N] son épouse ont commandé, le 11 mars 2015, à la société Azur Solution Energie l’installation de 30 panneaux photovoltaïques pour la somme de 45.100 euros. Cette installation a été financée par un crédit affecté souscrit le 27 mars 2015, auprès de la société Banque Sygma.

Par exploits du 24 juillet 2017, la SA BNP Paribas Personal Finance (BNP PPF), venant aux droits de la Banque Sygma, a fait assigner M. et Mme [F]-[N] devant le tribunal d’instance de Cholet aux fins de condamnation de ces derniers à lui verser les sommes restant dues au titre du prêt, soutenant que les échéances avaient cessé d’être honorées à compter du 1er juin 2016.

Suivant acte d’huissier du 29 novembre 2017, M. et Mme [F]-[N] ont fait assigner la société Azur Solution Energie en intervention forcée aux fins d’annulation du contrat de vente et partant du contrat de prêt.

Par jugement du 22 février 2019, le tribunal d’instance de Cholet a :

– ordonné la jonction des procédures enrôlées sous les n°11-17-256 et 11-17-463,

– rejeté l’ensemble des demandes de M. et Mme [F],

– condamné M. et Mme [F] solidairement à verser à la SA BNP PPF la somme de 55.583,60 euros outre les intérêts au taux de 5,76 % sur la somme de 45.100 euros à compter du 27 mai 2017,

– condamné M. et Mme [F] in solidum à verser à la SA BNP PPF la somme de 600 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

– ordonné l’exécution provisoire,

– rejeté le surplus des demandes de la SA BNP PPF et de la société Azur Solution Energie,

– condamné M. et Mme [F] aux dépens.

Suivant déclaration déposée au greffe de la cour le 4 avril 2019, les emprunteurs ont interjeté appel de cette décision en ce qu’elle a rejeté leurs demandes, les a condamnés au paiement des sommes de 55.583,60 et 600 euros ainsi qu’aux dépens ; intimant dans ce cadre les sociétés Azur Solution Energie et BNP PPF.

Aux termes de conclusions déposées le 2 octobre 2019, la société installatrice a formé appel incident de cette même décision.

Par jugement du 2 février 2022, le tribunal de commerce d’Angers a ouvert une procédure de liquidation judiciaire au bénéfice de la société Azur Solution Energie, désignant la SELARL Athena prise en la personne de Me [E] [C] en qualité de liquidateur.

Dans ces conditions et suivant acte d’huissier du 14 mars 2022 délivré à personne morale, M. et Mme [F]-[N] ont fait assigner en intervention forcée, la SELARL Athena ès qualités et lui ont communiqué leurs dernières écritures, leur bordereau de pièces ainsi que le jugement déféré accompagné de leur déclaration d’appel.

Par courrier du 15 mars 2023, le mandataire a fait savoir à la présente juridiction que la procédure étant impécunieuse, il ne serait pas représenté.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 3 mai 2023 et l’audience de plaidoiries fixée au 5 juin de la même année conformément aux prévisions d’un avis du 3 mars 2023.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de leurs dernières écritures déposées le 2 janvier 2020, M. [F] et Mme [N] épouse [F] demandent à la présente juridiction de :

– les recevoir en leur appel, ainsi qu’en leurs demandes, fins et conclusions, déclarés fondés, y faisant droit,

– infirmer le jugement entrepris,

– dire et juger que le contrat conclu entre eux et la société Azur Solution Energie le 11 mars 2015 est intrinsèquement nul et de nuls effets comme ne respectant pas les dispositions du Code de la consommation,

– à défaut, prononcer la nullité dudit contrat pour dol, au visa des articles 1109 et 1116 anciens du Code civil,

En toute hypothèse :

– prononcer la nullité du contrat de crédit associé conclu avec la société Sygma Banque, sur le fondement de l’article L311-32 du Code de la consommation,

– condamner la société Azur Solution Energie à procéder à la dépose de l’ensemble des installations et à la remise en état antérieur de la toiture,

– débouter la société Azur Solution Energie de son appel incident et de ses demandes, fins et conclusions, déclarés non fondés,

– dire et juger que la société BNP PPF a commis une faute la privant de sa créance de restitution,

– débouter la société BNP PPF, venant aux droits de Sygma Banque, de l’intégralité de ses demandes,

– les décharger des condamnations injustement prononcées à leur encontre,

– enjoindre à la société BNP PPF de faire procéder à la mainlevée de l’inscription des concluants sur le Fichier des Incidents de remboursement des Crédits aux Particuliers (FICP),

– condamner la société BNP PPF, venant aux droits de la société Sygma Banque, à leur verser la somme de 4.000 euros par application de l’article 700 du Code de procédure civile,

– rejeter toutes prétentions contraires comme non recevables, en tout cas non fondées,

– condamner la société BNP PPF, venant aux droits de la société Sygma Banque, aux dépens de première instance et d’appel, lesquels seront recouvrés conformément à l’article 699 du Code de procédure civile.

Aux termes de ses uniques écritures déposées le 2 octobre 2019, la SASU Azur Solution Energie demande à la présente juridiction de :

– réformer le jugement rendu par le tribunal d’instance de Cholet le 22 février 2019 en ce qu’il a considéré que le bon de commande régularisé entre elle et M. et Mme [F] était affecté d’irrégularités purement formelles,

– dire et juger que le contrat conclu entre elle et M. et Mme [F] est parfaitement valable,

– confirmer le jugement rendu par le tribunal d’instance de Cholet en ce qu’il a retenu que l’existence de man’uvres dolosives n’était pas établie,

– dire et juger que l’annulation du contrat de vente n’est pas encourue,

Si par extraordinaire, la cour entendait confirmer le jugement en ce qu’il a retenu l’existence d’irrégularités purement formelles du bon de commande :

– confirmer le jugement en ce qu’il a considéré que M. et Mme [F] avaient en tout état de cause couvert la prétendue nullité du bon de commande, en exécutant volontairement le contrat,

En conséquence et en tout état de cause :

– confirmer le jugement rendu par le tribunal d’instance de Cholet en ce qu’il a débouté M. et Mme [F] de leur demande d’annulation du contrat conclu avec elle,

– débouter M. et Mme [F] de l’ensemble de leurs demandes dirigées à son encontre,

– condamner M. et Mme [F] au paiement d’une somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile en cause d’appel ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Aux termes de ses dernières écritures déposées le 30 avril 2020 et non signifiées au liquidateur, la SA BNP PPF venant aux droits de la SA Sygma Banque, demande à la présente juridiction de :

– la déclarer recevable et bien-fondée en ses demandes, fins et prétentions,

– débouter M. et Mme [F] de leur appel,

A titre principal :

– confirmer le jugement du tribunal d’instance de Cholet rendu le 22 février 2019 en toutes ses dispositions,

A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour d’appel devait considérer que le contrat principal de vente est nul entraînant la nullité du contrat de crédit :

– dire et juger qu’elle n’a commis aucune faute,

– condamner solidairement M. [F] et Mme [N] épouse [F] à lui payer la somme de 45.100 euros au titre de l’obligation pour l’emprunteur de restituer le capital prêté,

En tout état de cause :

– condamner M. et Mme [F] in solidum à lui verser la somme de 1.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile au titre de la procédure d’appel,

– condamner M. et Mme [F] in solidum au paiement des entiers [dépens’] engagés dans le cadre de la procédure d’appel.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 494 du Code de procédure civile, aux dernières écritures, ci-dessus mentionnées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les demandes fondées sur les dispositions du Code de la consommation :

En droit, les articles L 111-1 et L 121-17 du Code de la consommation en leurs versions applicables au présent litige disposent que : ‘Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 113-3 et L. 113-3-1 ;

3° En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;

4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte, ainsi que, s’il y a lieu, celles relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles. La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d’Etat.

(…)’,

‘I.-Préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’Etat (…)’.

Par ailleurs, le premier alinéa de l’article L 121-18-1 de ce même code en sa version présentement applicable prévoit que : ‘Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties. Ce contrat comprend, à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I de l’article L. 121-17″.

Enfin, l’article 1338 du Code civil, en son ancienne formulation dispose que : ‘L’acte de confirmation ou ratification d’une obligation contre laquelle la loi admet l’action en nullité ou en rescision n’est valable que lorsqu’on y trouve la substance de cette obligation, la mention du motif de l’action en rescision, et l’intention de réparer le vice sur lequel cette action est fondée.

A défaut d’acte de confirmation ou ratification, il suffit que l’obligation soit exécutée volontairement après l’époque à laquelle l’obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée.

La confirmation, ratification, ou exécution volontaire dans les formes et à l’époque déterminées par la loi, emporte la renonciation aux moyens et exceptions que l’on pouvait opposer contre cet acte, sans préjudice néanmoins du droit des tiers’.

Le premier juge retenant que les seules caractéristiques précisées des biens commandés étaient le nombre des panneaux et leur puissance ainsi que la marque de l’onduleur a considéré que ces mentions étaient insuffisantes pour renseigner correctement le consommateur quant aux qualités des biens et services en cause. Cependant, il a été observé que l’acquéreur avait attesté de la fourniture des biens ainsi que de la réalisation des prestations de services, sollicitant ainsi la mise à disposition des fonds par la banque. De plus il a été observé qu’une attestation de conformité portant le visa du Consuel a été communiquée outre qu’il n’était pas contesté que l’installation avait été raccordée le 18 juin 2015 pour une mise en service par ERDF le 12 octobre suivant. Dans ces conditions, il a été considéré que les acquéreurs avaient volontairement exécuté le contrat, le confirmant et partant n’étant plus justifiés à se prévaloir de la nullité relative invoquée.

Aux termes de leurs dernières écritures, les appelants indiquent qu’il a déjà ‘été jugé que la marque et les références des produits vendus, la surface et le poids des panneaux doivent figurer dans le contrat de vente sous peine de nullité’. Ils soutiennent également que le prix unitaire des différents biens doit être mentionné. Les appelants indiquent donc que le bon de commande encourt la nullité. S’agissant de la confirmation, ils soutiennent que les conditions dans lesquelles a été établi le certificat de livraison invoqué par leurs contradicteurs, sont frauduleuses. Ainsi, ils indiquent que l’écriture qui y figure n’est pas la leur et qu’il n’a jamais été signé le 23 avril 2015. Ainsi ils affirment qu’il ‘est légitime de penser que ce document a été présenté au concluant pour signature le jour de la souscription du contrat, le commercial ayant complété ultérieurement la date’. De plus ils affirment que cette seule pièce ne pourrait démontrer leur exécution volontaire du contrat et observent que le litige les opposant à l’installateur est bien antérieur à l’introduction de la présente procédure par la banque. Ils concluent donc à l’infirmation de la décision de première instance.

Aux termes de ses uniques écritures, l’intimée déconfite rappelle que le bon de commande litigieux mentionne la marque des panneaux ainsi que leur puissance unitaire outre la marque de l’onduleur. Elle précise par ailleurs que les conditions générales, dont les appelants ont eu connaissance, précisent que la présentation des produits et de l’ensemble de leurs caractéristiques principales a été assumée au moyen de catalogues. De plus, elle souligne que ces mêmes stipulations contractuelles emportent reconnaissance par les clients du fait qu’ils ont eu connaissance de tous les renseignements et informations visées à l’article L 111-1 du Code de la consommation. En outre, elle soutient que les poids et surface des panneaux ainsi que le prix unitaire des biens vendus ne constituent pas des informations fondamentales et en tout état de cause excèdent les exigences du Code de la consommation. De plus l’intimée soutient que ‘dès lors que les dispositions de l’article L 121-23 du Code de la consommation (L 121-17 du Code de la consommation lors de la signature du contrat) figurent expressément sur le bon de commande, le requérant était parfaitement informé de la nullité résultant d’une irrégularité au regard de ce texte, de sorte que l’exécution postérieure valait confirmation’. A ce titre, elle rappelle que l’appelant a attesté du fait que les prestations commandées avaient été intégralement exécutées et sollicité le déblocage des fonds nécessaires au paiement de la commande. De plus, elle souligne que l’installation commandée a été raccordée et mise en service par ERDF le 12 octobre 2015, sans contestation de la part des clients qui avaient préalablement permis la réalisation de l’ensemble des travaux et prestations commandés. Elle conclut donc à la confirmation de la convention et partant à défaut de rejet des demandes en annulation à la confirmation de la décision de première instance.

Aux termes de ses dernières écritures, la SA BNP PPF soutient que les conclusions de l’installateur établissent que la vente est valable, le bon de commande n’étant affecté d’aucune irrégularité formelle et rappelant par ailleurs que les caractéristiques essentielles mentionnées au Code de la consommation ont uniquement pour finalité d’éclairer le client sur le bien ou service vendu. En tout état de cause, la banque rappelle que les appelants ont accepté en toute connaissance de cause la livraison du matériel comme le démontre le certificat du 23 avril 2015 et que leur comportement postérieur établit une exécution volontaire du contrat emportant ‘renonciation aux moyens de nullité dont ils se prévalent’.

Sur ce :

En l’espèce, le bon de commande litigieux mentionne outre ‘1 led relamping’, un ‘pack ‘GSE30″ et ‘GSE air’Sytem’ comprenant :

– 30 panneaux photovoltaïques,

– 1 onduleur

– 1 kit ‘GSE intégration’

– 1boitier DC

– 1cablâge

– 1 installation

– 1 raccordement

– démarches administratives incluses.

Il précise également que les panneaux sont de marque Solarworld pour une ‘puissance panneau’ de 275Wc, l’onduleur étant pour sa part mentionné comme étant de marque Enphase, le tout pour un coût de 45.100 euros TTC.

Or et sauf à considérer que la marque ‘Solarworld’ ne dispose que d’un seul modèle de panneau photovoltaïque pour une puissance de 275Wc (peu important qu’ils soient mono ou polycristallins) et que la société Enphase ne dispose que d’un seul onduleur dès lors que même sa puissance n’est pas mentionnée au bon de commande, il ne peut aucunement être considéré que ces seules mentions permettent d’identifier les biens vendus.

De plus, il doit être rappelé que le bon de commande doit également être lu au regard des prévisions de la facturation émise le 22 avril 2015.

Or force est de constater que les prévisions du bon de commande ne correspondent pas aux biens facturés. Ainsi si le modèle de l’onduleur n’est pas précis au bon de commande quant à sa désignation, il est pour autant expressément mentionné quant à la quantité prévue qu’un seul de ces équipements est visé. Cependant la facture mentionne outre les 1.800 cellules photovoltaïques ’30 micro onduleurs Enphase M215″ avant de préciser ‘Garantie Micro – Onduleurs : 20 ans par le constructeur’.

Il résulte de ce qui précède que la lecture du bon de commande ne permettait aucunement d’identifier avec précision les matériels objet de la vente, puisque cette pièce contractuelle ne mentionnait pas expressément les qualités notamment de l’onduleur, qui finalement ne s’est pas avéré être un équipement unique mais une trentaine (autant que de panneaux) de ‘micro-onduleurs’.

Dans ces conditions et peu important les prévisions des conditions générales qui ne peuvent conventionnellement permettre au professionnel de s’extraire des obligations formelles et d’ordre public prévues par le Code de la consommation quant à la désignation des biens vendus dans le cadre d’un démarchage à domicile, il ne peut qu’être constaté que le bon de commande ne comporte pas les caractéristiques essentielles des biens vendus et dans ce cadre encourt la nullité.

S’agissant de la confirmation de la convention, il doit être rappelé que celui qui l’invoque doit démontrer que le comportement de la partie pouvant invoquer une cause de nullité relative de la convention, établit sa volonté univoque de ratifier le contrat et cela en ayant connaissance du vice affectant l’obligation.

A ce titre, les conditions générales du contrat litigieux précisent in fine : ‘le client reconnaît avoir eu communication, préalablement à la passation de sa commande, d’une manière lisible et compréhensible, des présentes conditions générales de vente et de toutes les informations et renseignements visés aux articles L 111-1 à L 111-7 du Code de la consommation ainsi que ceux visés au I de l’article L 121-17 du même code, et en particulier :

– les caractéristiques essentielles du produit, compte tenu du support de communication utilisé et du produit concerné ;

– le prix des produits et des frais annexes (livraison, par exemple) ;

– la date ou le délai auquel le vendeur s’engage à livrer le produit ;

– les informations relatives à l’identité du vendeur, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, si elles ne ressortent pas du contexte ;

– les informations relatives aux garanties légales et contractuelles et à leurs modalités de mise en oeuvre ;

– les fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité ;

– la possibilité de recourir à une médiation conventionnelle en cas de litige ;

– les informations relatives au droit de rétractation (existence, conditions, délai, modalités d’exercice de ce droit et formulaire type de rétractation), aux frais de renvoi des produits, aux modalités de résiliation et autres conditions contractuelles importantes’.

Cependant cette formule qui au demeurant ne reprend pas intégralement les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 du Code de la consommation, ne permet aucunement d’établir que les appelants avaient connaissance du fait que les caractéristiques essentielles des produits, mais également services commandés, étaient des mentions requises à peine de nullité de la convention.

Par ailleurs, les intimés ne produisent pas de plus amples éléments établissant la connaissance par les consommateurs des vices affectant le contrat principal.

Dans ces conditions il ne peut aucunement être considéré qu’en exécutant, postérieurement à sa conclusion, la convention aujourd’hui litigieuse les appelants aient manifesté une volonté non équivoque de couvrir des vices dont ils avaient connaissance.

Dans ces conditions, la décision de première instance doit être infirmée en ce qu’elle a rejeté les demandes en annulation formées, le bon de commande litigieux étant annulé faute de respect des prescriptions du Code de la consommation et, conformément aux dispositions des articles L 311-30 et suivants de ce même code, le contrat de prêt accessoire à la convention principale doit également être annulé. Cependant, les demandes d’enlèvement des installations et autre remise en état ne peuvent être accueillies, dès lors qu’elles sont formées à l’encontre d’une société désormais judiciairement liquidée et qui ne peut donc y procéder.

Sur les conséquences de l’annulation du contrat de prêt :

Aux termes de leurs dernières écritures, les appelants précisent contester le droit à restitution de la banque au regard des fautes qu’elle a commises. Ainsi, ils soulignent que le bon de commande ‘était intrinsèquement nul comme ne répondant pas aux exigences d’ordre public du Code de la consommation’, situation qui était aisément décelable par le prêteur. Dans ces conditions, elle a commis une faute en finançant un contrat principal affecté de nullité. Ils soutiennent qu’une seconde faute a également été commise par l’établissement de crédit qui a débloqué les fonds ‘sur la base d’un certificat de livraison falsifié et laconique, sans s’assurer au préalable de la bonne exécution par le vendeur de son obligation’. A ce titre, ils indiquent contester ‘fermement avoir signé [cette pièce] à la date indiquée, soit le 23 avril 2015″, période à laquelle au surplus l’installation n’était ni raccordée ni mise en service. Au demeurant, ils précisent que le pack GSE n’a jamais fonctionné et que globalement l’installation est défectueuse et nécessite une remise en état dont le coût est évalué à 6.600 euros (‘les désordre constatés [portant] atteinte à la toiture de l’habitation et ainsi à la structure même de l’immeuble’).

Aux termes de ses écritures, la banque rappelle que l’annulation du contrat de prêt emporte nécessairement restitutions réciproques (sommes prêtées par l’établissement de crédit et celles versées par l’emprunteur). Sur le fond des fautes qui lui sont reprochées, la banque indique que le contrat principal n’était affecté d’aucune cause de nullité et qu’au surplus, elle n’est pas ‘soumise à l’obligation de procéder à un examen approfondi du contrat de vente’. S’agissant de la mise à disposition des fonds, elle rappelle qu’elle ne commet pas de faute en procédant au versement des sommes empruntées sur présentation d’une pièce attestant de la livraison ou de la réalisation des prestations commandées. De plus, elle souligne que les pièces contractuelles mentionnent expressément les conditions dans lesquelles les fonds seront mis à disposition (‘dès la justification au prêteur de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation de services à l’emprunteur’). L’intimée en déduit donc que c’est en connaissance de cause que ses contradicteurs ont daté et signé le certificat de livraison du 23 avril 2015, attestant de la réalisation complète de la prestation commandée. A ce titre la banque soutient que ‘l’intégralité du matériel a été livrée et la prestation réalisée’. L’intimée conclut donc à la condamnation des appelants à restitution du capital emprunté.

Sur ce :

En l’espèce, il est constant que le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.

Or à ce titre, il doit être constaté que les causes de nullité du contrat principal étaient d’autant plus visibles pour l’établissement de crédit intervenant très régulièrement dans le cadre de telles opérations, que les éléments commandés n’étaient pas identifiables à sa seule lecture.

Il en résulte que la banque a commis une faute à ce titre.

Cependant s’agissant de la mise à disposition des fonds, l’intimée communique aux débats un ‘certificat de livraison de bien et/ou de fourniture de services’ portant sur les biens suivants ‘pack GSE + air system’ et présentant l’identité et la signature de l’appelant précédé de la mention suivante : ‘je reconnais qu’en signant le présent certificat j’atteste sans réserve ; que la livraison du ou des bien(s) et/ou la fourniture de la prestation de services ci-dessus désignée(s) a (ont) été pleinement effectuée(s) conformément au contrat principal de vente que j’ai préalablement conclu avec le vendeur ; – que cette livraison et/ou fourniture est intervenue le : 23/04/5.

Je reconnais que conformément à l’article L 311-31 du Code de la consommation mes obligations au titre du contrat de ‘crédit affecté’ ci-dessus référencé prennent effet à compter de la livraison et/ou de la fourniture susvisée(s). En conséquence, je demande au prêteur, par ma signature du présent certificat et en ma qualité d’emprunteur de procéder à la mise à disposition des fonds au titre dudit contrat de ‘crédit affecté”.

S’agissant de la date et du fait qu’elle n’aurait pas été mentionnée par les appelants outre que cette affirmation n’est pas démontrée, plusieurs écritures différentes apparaissant sur cette pièce nécessitant le sceau tant du vendeur que du client, il doit être souligné que cette situation n’est pas de nature à priver l’attestation de toute valeur, dès lors qu’il n’est aucunement contesté par M. [F] qu’il soit le signataire de ce document.

Il s’en déduit que l’intimée a délivré les fonds au regard d’un certificat de livraison comprenant demande de financement et ayant été régulièrement signé par l’un des co-emprunteurs solidaires.

Au-delà de ces éléments et s’agissant du préjudice subi, les appelants soutiennent que l’installation présente des désordres mais également que le pack GSE ainsi commandé ‘n’a jamais fonctionné’.

Or, la seule pièce produite au soutien de cette affirmation est une ‘fiche maintenance photovoltaïque’ du 5 mars 2018, mentionnant quelques problématiques :

– ‘le choix de mettre des micro-onduleurs n’est pas forcément justifié : pas d’ombres ou masques solaires majeures’,

– ‘étriers latéraux et centraux mal centrés, certains étriers sont mal orientés’,

– ‘certaines vis pour fixer l’intégration GSE sont situées dans des couloirs d’eau. Doute sur la conformité des tuiles coupées au niveau de l’abergement de faitage. Liteaux non retirés, il manque les planches de support’,

– ‘manque de gaine pour passage dans plafond’,

– ‘mélange de marque de connecteur MC4″,

– ‘pas de cosse de terre pour le fil de terre sur les vis des micro onduleurs. Manque embout sur le fil de terre de 6mm² arrivant dans le coffre AC’,

– ‘2 sections différentes de fil sur même embout = risque incendie, le coffret [AC] est fixé avec 2 vis dans le même orifice de fixation’,

– ‘la passerelle Envoy est mal fixée. Manque embouts pour l’alimentation de la passerelle sur le disjoncteur’ (sic).

Cependant outre que cette pièce n’établit aucunement quelle serait l’éventuelle incidence des difficultés mentionnées sur le fonctionnement de l’installation commandée, il doit être souligné que les constatations et analyses non contradictoires qui y sont présentées ne sont confirmées par aucune autre pièce dès lors que le devis de travaux de reprise de l’installation photovoltaïque émane de la société ayant effectué ces mêmes constatations.

Il en résulte que les appelants ne démontrent pas le caractère dysfonctionnel de l’installation objet du bon de commande litigieux étant au surplus souligné que la production d’un courrier de la société EDF du 3 janvier 2017, leur retournant une facture qui ne pouvait être honorée, démontre que les biens commandés ont pu produire de l’électricité.

Dans ces conditions et faute pour les appelants de démontrer l’existence d’un préjudice qu’ils subiraient et qui serait en lien avec le manquement de l’établissement de crédit, ils doivent être condamnés à restitution du capital emprunté, la banque pour sa part se devant de leur restituer les sommes perçues en exécution du contrat de prêt du 27 mars 2015.

La décision de première instance sera donc infirmée en ce sens et les appelants condamnés au paiement d’une somme de 45.100 euros au titre de ces restitutions, les prétentions formées au titre du fichier des incidents de paiement, accessoires (au sens de l’article 566 du Code de procédure civile) aux demandes visant à obtenir la décharge de l’obligation de remboursement ou restitution, ne pouvant qu’être rejetées.

Sur les demandes accessoires :

Les parties succombant toutes partiellement en leurs prétentions, chacune d’entre elles conservera la charge de ses propres dépens et les demandes fondées sur les dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile doivent être rejetées.

La décision de première instance sera donc également infirmée à ces titres.

PAR CES MOTIFS

La cour,

INFIRME, dans les limites de sa saisine, le jugement du tribunal d’instance de Cholet du 22 février 2019 ;

Statuant de nouveau et y ajoutant :

ANNULE le bon de commande régularisé le 11 mars 2015 entre M. [I] [F] et Mme [L] [N] épouse [F] d’une part et la société Azur Solution Energie d’autre part ;

REJETTE les demandes en condamnation de la société Azur Solution Energie à procéder à la dépose de l’ensemble des installations et à la remise en état antérieur de la toiture de l’immeuble appartenant à M. [I] [F] et Mme [L] [N] épouse [F] ;

ANNULE le contrat de crédit affecté régularisé le 27 mars 2015 entre M. [I] [F] et Mme [L] [N] épouse [F] d’une part et la SA Sygma Banque d’autre part ;

REJETTE les demandes en réparation formées par M. [I] [F] et Mme [L] [N] épouse [F] à l’encontre de la SA BNP Paribas Personal Finance ;

CONDAMNE in solidum M. [I] [F] et Mme [L] [N] épouse [F] au paiement à la SA BNP Paribas Personal Finance de la somme de 45.100 euros (quarante cinq mille cent euros) au titre des restitutions résultant de l’annulation du contrat du 27 mars 2015 ;

CONDAMNE la SA BNP Paribas Personal Finance à la restitution à M. [I] [F] et Mme [L] [N] épouse [F] de l’ensemble des sommes versées par ces derniers en exécution du contrat du 27 mars 2015 présentement annulé ;

REJETTE les demandes formées par M. [I] [F] et Mme [L] [N] épouse [F] au titre de leur inscription au fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers ;

REJETTE l’ensemble des demandes fondées sur les dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

LAISSE à chaque partie la charge de ses propres dépens.

LE GREFFIER P/LA PRESIDENTE, empêchée

T. DA CUNHA L. ELYAHYIOUI

 


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