Droit de rétractation : Décision du 5 octobre 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/01786

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Droit de rétractation : Décision du 5 octobre 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/01786

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 05/10/2023

N° de MINUTE : 23/829

N° RG 21/01786 – N° Portalis DBVT-V-B7F-TQ7R

Jugement (N° 20/000319) rendu le 09 Mars 2021 par le Tribunal de proximité de Calais

APPELANTE

SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la SA Sygma Banque agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Francis Deffrennes, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

INTIMÉS

Monsieur [G] [Y]

né le [Date naissance 2] 1952 à [Localité 9] – de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 8]

Madame [J] [P] épouse [Y]

née le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 8] – de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représentés par Me Guy Foutry, avocat au barreau de Douai, avocat constitué asssité de Me Samuel Habib, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant

Monsieur [T] [F] es qualité de Mandataire ad’hoc à la Liquidation Judiciaire de la SARL Sungold – Institut des Nouvelles Energies

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 7]

Défaillant, à qui la déclaration d’appel a été signifiée le 28 mai 2021 (article 659 PC)

DÉBATS à l’audience publique du 14 juin 2023 tenue par Catherine Ménegaire magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Yves Benhamou, président de chambre

Catherine Ménegaire, conseiller

Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

ARRÊT RENDU PAR DEFAUT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 05 octobre 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 1er juin 2023

EXPOSE DU LITIGE

Le 8 octobre 2015, dans le cadre d’un démarchage à domicile, M. [G] [Y] a signé avec la société Sungold agissant sous l’enseigne Institut des nouvelles énergies un contrat portant sur la fourniture et la pose d’une installation photovoltaïque, moyennant le prix de 21 500 euros TTC, suivant bon de commande numéro 16398.

Le même jour, aux fins de financer cette installation, M. [Y] Mme [J] [P] épouse [Y] ont souscrit une offre de crédit affecté auprès de la société Sygma Banque, d’un montant de 21’500 euros, remboursable en 120 échéances mensuelles, au taux d’intérêt de 5,76 % l’an.

La société Sungold a été placée en liquidation judiciaire par jugement rendu le 14 septembre 2016 par le tribunal de commerce de Nanterre. La liquidation a été clôturée pour insuffisance d’actifs le 26 juillet 2019, Me [T] [F] ayant été nommé mandataire ad litem de la société par ordonnance du 17 février 2020.

Par actes d’huissier délivrés les 5 et 6 octobre 2020, M. [Y] et Mme [P] ont assigné la société Sungold prise en la personne de Me [T] [F] ès qualité de mandataire ad litem et la société BNP Paribas Personal finance venant aux droits de la société Sygma Banque aux fins notamment d’obtenir l’annulation des contrats de vente et de crédit affecté.

Par jugement réputé contradictoire du 9 mars 2021, le tribunal de proximité de Calais a :

– prononcé la nullité du contrat souscrit entre M. [Y] et Mme [P] et la société Sungold agissant sous l’enseigne Institut des nouvelles énergies suivant contrat d’achat numéro 16398 signé le 8 octobre 2015,

– prononcé l’annulation subséquente du contrat de crédit affecté conclu le 8 octobre 2015 entre M. [Y] et Mme [P] et la société BNP Paribas personal finance,

– ordonner que les parties soient replacées dans leur état originel,

– dit que les panneaux photovoltaïques et les équipements annexes devront être tenus à la disposition de la société Sungold prise en la personne de Me [T] [F] ès qualité de mandataire ad hoc à charge pour elle de les reprendre au domicile de M. [Y] et Mme [P] et de remettre l’ouvrage en son état initial,

– dit que si la société Sungold prise en la personne de Me [T] [F] ès qualité de mandataire ad hoc n’a pas fait réaliser cette remise en état et l’enlèvement de cette installation dans un délai de cinq mois à compter la signification du présent jugement à son égard, M. [Y] et Mme [P] pourront disposer librement de cette installation,

– condamné la société BNP Paribas personal finance à verser à M. [Y] et Mme [P] l’intégralité des sommes qu’elle a perçues au titre du contrat de crédit affecté,

– débouté M. [Y] et Mme [P] de leurs demandes dommages et intérêts délictuels pour préjudice moral, économique, financier et de jouissance,

– condamné la société BNP Paribas personal finance à payer à M. [Y] et Mme [P] la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société BNP Paribas personal finance aux dépens de l’instance,

– débouté les parties du surplus de leurs demandes,

– dit n’y avoir lieu d’écarter l’exécution provisoire de droit de la présente décision.

Par déclaration reçue par le greffe de la cour le 31 mars 2021 et signifiées à Me [T] [F] ès qualité par d’huissier délivré le 28 mai 2021 selon la procédure de l’article 659 du code de procédure civile, la société BNP Paribas personal finance a fait appel de l’ensemble des chefs de ce jugement.

La société BNP Paribas Personal finance a conclu en qualité d’appelant le 2 juillet 2021 et a signifié ses conclusions à Me [T] [F] ès qualité par d’huissier délivré le 12 juillet 2021 selon la procédure de l’article 659 du code de procédure civile,

Aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 29 mai 2023, la société BNP Paribas personal finance demande à la cour de :

– réformer le jugement rendu par le juge des contentieux la protection du tribunal de proximité de Calais du 20 juillet 2020 en ce qu’il a :

– prononcé la nullité du contrat souscrit entre M. [Y] et Mme [P] et la société Sungold agissant sous l’enseigne L’Institut des nouvelles énergies suivant contrat d’achat numéro 16398 signé le 8 octobre 2015,

– prononcé l’annulation subséquente du contrat de crédit affecté conclu le 8 octobre 2015 entre M. [Y] et Mme [P] et la société BNP Paribas personal finance,

– ordonner que les parties soient replacées dans leur état originel,

– dit que les panneaux photovoltaïques et les équipements annexes devront être tenus à la disposition de la société Sungold prise en la personne de Me [T] [F] ès qualité de mandataire ad hoc à charge pour elle de les reprendre au domicile de M. [Y] et Mme [P] et de remettre l’ouvrage en son état initial,

– dit que si la société Sungold prise en la personne de Me [T] [F] ès qualité de mandataire ad hoc n’a pas fait réaliser cette remise en en état et l’enlèvement de cette installation dans un délai de cinq mois à compter la signification du présent jugement à son égard, M. [Y] et Mme [P] pourront disposer librement de cette installation,

– condamné la société BNP Paribas personal finance à verser à M. [Y] et Mme [P] l’intégralité des sommes qu’elle a perçues au titre du contrat de crédit affecté,

– débouté M. [Y] et Mme [P] de leurs demandes dommages et intérêts délictuels pour préjudice moral, économique, financier et de jouissance,

– condamné la société BNP Paribas personal finance à payer à M. [Y] et Mme [P] la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société BNP Paribas personal finance aux dépens de l’instance,

– débouté les parties du surplus de leurs demandes,

et statuant à nouveau :

à titre principal,

– constater que M. [Y] et Mme [P] ne justifient nullement de leur déclaration de créance alors qu’ils ont engagé leur action postérieurement au jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire de la société Sungold,

– par conséquent, dire et juger que M. [Y] et Mme [P] sont irrecevables à agir en nullité du contrat principal conclu avec la société Sungold et en conséquence à agir en nullité du contrat de crédit affecté qui leur a été consenti par la société BNP Paribas Personal finance,

à titre subsidiaire

– dire et juger que le bon de commande régularisé le 8 octobre 2015 par M. [Y] respecte les dispositions des anciens articles L.121-23 et L.121-24 du code de la consommation,

– à défaut, dire et juger que M. [Y] et Mme [P] ont amplement manifesté leur volonté de renoncer à invoquer la nullité du contrat au titre des prétendus vices l’affectant sur le fondement des anciens articles L.121-23 et suivants du code de la consommation et ce, en toute connaissance des dispositions applicables,

– constater la carence probatoire de M. [Y] et Mme [P],

– dire et juger que les conditions d’annulation du contrat principal de vente sur le fondement d’un prétendu dol ne sont pas réunies et qu’en conséquence le contrat de crédit affecté conclu par M. [Y] et Mme [P] n’est pas annulé,

– dire et juger que les conditions de résolution judiciaire du contrat principal de vente ne sont pas réunies et qu’en conséquence le contrat de crédit affecté conclu par M. [Y] et Mme [P] n’est pas résolu,

– en conséquence, débouter M. [Y] et Mme [P] de l’intégralité de leurs demandes telles que formulées à l’encontre de la société BNP Paribas personal finance, et notamment leurs demandes de remboursement des sommes qui lui ont été versées par les époux [Y] dans le cadre de l’exécution du contrat de crédit affecté qui leur a été consenti,

à titre très subsidiaire, si par extraordinaire la cour devait confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat principal de vente conclu le 8 octobre 2015 et de manière subséquente constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté,

– constater que la société BNP Paribas Personal Finance n’a commis aucune faute en procédant à la délivrance des fonds, ni dans l’octroi du crédit,

– en conséquence, débouter M. [Y] et Mme [P] de l’intégralité de leurs demandes telles que formulées à l’encontre de la société BNP Paribas personal finance, et notamment leurs demandes de remboursement des sommes qui lui ont été versées par les époux M. [Y] dans le cadre de l’exécution du contrat de crédit affecté qui leur a été consenti, à l’exception des seules sommes qui auraient éventuellement pu être versées par les époux [Y] entre les mains du prêteur au delà du capital prêté,

– à titre infiniment subsidiaire, si par impossible la cour considérait à l’instar du premier magistrat que la société BNP Paribas Personal Finance a commis une faute dans le déblocage des fonds,

– dire et juger que le préjudice subi du fait de la perte de chance de ne pas contracter le contrat de crédit affecté litigieux ne peut être égal au montant de la créance de la banque,

– constater la carence probatoire de M. [Y] et Mme [P],

– constater dire et juger que si les époux M. [Y] allèguent de ce que la société Sungold n’aurait pas exécuté la prestation de raccordement des panneaux photovoltaïques par la suite, ils ne produisent pas la moindre pièce au soutien de cette affirmation de sorte qu’ils n’établissent aucunement que la centrale photovoltaïque n’aurait pas été achevée ou serait défectueuse,

– dire et juger que M. [Y] et Mme [P] conserveront l’installation des panneaux solaires photovoltaïques qui ont été livrés et posés à leur domicile par la société Sungold puisque ladite société a fait l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire de sorte qu’elle ne se présentera jamais à leur domicile pour récupérer le matériel installé, que les époux [Y] ne justifient absolument pas d’un quelconque dysfonctionnement qui affecterait les matériels livrés et installés à leur domicile et qu’ils disposent de la faculté de faire raccorder l’installation photovoltaïque au réseau ERDF ENEDIS à un coût modique au regard de la convention régularisée entre les parties mais aussi au regard du montant du crédit affecté consenti, leur permettant ainsi de percevoir des revenus énergétiques grâce à l’installation photovoltaïque litigieuse, (à supposer que l’installation ne soit pas d’ores et déjà raccordée au réseau),

– par conséquent, dire et juger que la société BNP Paribas Personal Finance ne saurait être privée de la totalité de sa créance de restitution compte tenu de l’absence de préjudice avéré subi par M. [Y] et Mme [P],

– en conséquence, débouter M. [Y] et Mme [P] de l’intégralité de leurs demandes telles que formulées à l’encontre de la société BNP Paribas personal finance, et notamment leurs demandes de remboursement des sommes qui lui ont été versées par les époux M. [Y] dans le cadre de l’exécution du contrat de crédit affecté qui leur a été consenti, à l’exception des seules sommes qui auraient éventuellement pu être versées par les époux [Y] entre les mains du prêteur au delà du capital prêté,

– à défaut, réduire à de bien plus juste proportions le préjudice subi les époux M. [Y] et les condamner à restituer à la société BNP Paribas Personal Finance une fraction du capital prêté, qui ne saurait être inférieure aux deux tiers du capital prêté,

en tout état de cause,

– débouter M. [Y] et Mme [P] de l’intégralité de leurs demandes en paiement de dommages et intérêts complémentaires telles que formulées à l’encontre de la société BNP Paribas Personal Finance,

– débouter M. [Y] et Mme [P] de leur demande en paiement de dommages et intérêts au titre de la désinstallation des panneaux telle que formulée à l’encontre de la société BNP Paribas Personal Finance,

– condamner in solidum M. [Y] et Mme [P] à payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers frais et dépens, y compris ceux d’appel, dont distraction au profit de Me Francis Deffrennes, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 12 mai 2023, M. [Y] et Mme [P] demandent à la cour de :

– confirmer le jugement du juge des contentieux la protection du tribunal de proximité de Calais du 9 mars 2021 ce qu’il a :

– prononcé la nullité du contrat souscrit entre M. [Y] et Mme [P] et la société Sungold agissant sous l’enseigne L’Institut des nouvelles énergies suivant contrat d’achat numéro 16398 signé le 8 octobre 2015,

– prononcé l’annulation subséquente du contrat de crédit affecté conclu le 8 octobre 2015 entre M. [Y] et Mme [P] et la société BNP Paribas personal finance,

– ordonner que les parties soient replacées dans leur état originel,

– condamné la société BNP Paribas personal finance à verser à M. [Y] et Mme [P] l’intégralité des sommes qu’elle a perçues au titre du contrat de crédit affecté,

– condamné la société BNP Paribas personal finance à verser à M. [Y] et Mme [P] la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société BNP Paribas personal finance aux dépens de l’instance,

– infirmer pour le surplus et statuant à nouveau,

– débouter la société BNP Paribas personal finance de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

– dire les demandes des époux [Y] recevables et les déclarer bien fondées,

– condamner la société BNP Paribas personal finance venant aux droits de la société Sygma banque à verser aux époux [Y] les sommes de :

– 4 554 euros au titre du préjudice financier,

– 4 000 euros au titre du préjudice économique et trouble de jouissance,

– 5 000 euros au titre du préjudice moral,

à titre subsidiaire,

– si par extraordinaire la cour venait à infirmer le jugement de première instance en ce qu’il a prononcé la nullité du bon commande,

– prononcer la résolution du contrat de vente liant les époux [Y] et la société Sungold,

– prononcer la résolution du contrat de crédit affecté liant les époux [Y] et la société BNP Paribas personal finance,

en conséquence,

– ordonner le remboursement par la société BNP Paribas personal finance venant aux droits de la société Sygma banque des sommes versées par les époux [Y],

à titre infiniment subsidiaire,

– condamner la société BNP Paribas personal finance à verser aux époux [Y] la somme de 21’500 euros à titre de dommages et intérêts, sauf à parfaire, du fait de la négligence fautive de la banque,

– prononcer la déchéance du droit aux intérêts de la banque et en conséquence, ordonner le remboursement des sommes perçues en sus du capital emprunté,

– en tout état de cause, condamner la société BNP Paribas personal finance à payer aux époux [Y] la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société BNP Paribas personal finance au paiement des entiers dépens d’appel.

Les intimés ont signifié leurs conclusions à Me [T] [F] es qualité par acte d’huissier délivré les 12 et 15 mai 2023 selon la procédure de l’article 659 du code de procédure civile.

Me [T] [F] es qualité n’a pas constitué avocat.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour l’exposé de leurs moyens.

La clôture de l’affaire a été rendue le 1er juin 2023, et l’affaire fixée pour être plaidée à l’audience du 14 juin 2023.

MOTIFS

Sur la recevabilité

Aux visa des articles L.622-21 et L.622-22 du code de commerce, la société BNP Paribas Personal Finance soutient que l’action des époux [Y] est irrecevable à raison du principe de l’interdiction des poursuites résultant à la procédure collective de la société Sungold, et faute pour les intimés de justifier de leur déclaration de créance au passif de la procédure collective, alors que leur demande de nullité affectera nécessairement le passif de la liquidation.

Selon l’article L. 622-21, I, du code de commerce le jugement d’ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n’est pas mentionnée au I de l’article L. 622-17 et tendant :

1. à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent ;

2 . À la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent.

En l’espèce, les emprunteurs fondent leur demande d’annulation du contrat de vente sur la violation des dispositions d’ordre public du code de la consommation, ainsi que sur le dol, sans demander de condamnation du vendeur au paiement d’une somme d’argent ni invoquer le défaut de paiement d’une telle somme, ni même réclamer la restitution du prix de vente, de sorte que leurs demandes ne se heurtent pas à l’interdiction des poursuites.

Dès lors, confirmant le jugement déféré, l’action en nullité du contrat de vente, et subséquemment du contrat de crédit sur le fondement de l’article L.311-32 du code de la consommation est parfaitement recevable.

Sur la demande de nullité du bon de commande

Le contrat de vente ayant été conclu le 8 octobre 2015, il y a lieu d’appliquer les dispositions du code la consommation issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014.

En vertu des articles L.121-18-1 du code de la consommation, les contrats conclus hors établissement doivent faire l’objet d’un contrat écrit et daté dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat. Il comprend, à peine de nullité, toutes les informations prévues au I de l’article L.121-17, dont les informations prévues aux articles L.111-1 et L.111-2 du code de la consommation, et lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit. Le contrat doit être accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L.121-17.

Selon l’article L.111-1 du code de la consommation, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° les caractéristiques essentielles du bien ou du service compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné,

2° le prix du bien ou du service en application de l’article L.113-3 et L.113-3-1,

3° en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service,

4° les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte, ainsi que s’il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique, et le cas échéant, à son intéropérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en oeuvre des garanties et autres conditions contractuelles. La liste et le contenu de ces informations sont fixées par décret en conseil d’Etat ; (…)’

En l’espèce, l’exemplaire du bon de commande produit aux débats porte sur la fourniture et la pose d’une installation solaire photovoltaïque d’une puissance globale de 3000 Wc comprenant 12 panneaux solaires d’une puissance unitaire de 250 Wc, certifiés NF EN 61215 Classe II, de type monochristallin de marque Thomson. La société Sungold s’est également engagée à accomplir l’ensemble des démarches administratives (Mairie, ERDF, Consuel), ainsi que le raccordement de l’installation au réseau électrique ERDF.

Le bon de commande prévoit au verso ( article 4) que ‘Le délai de livraison figurant au recto du présent contrat est donné à titre indicatif et ne peut dépasser une limite de 200 jours à compter de la prise d’effet du contrat. La livraison dans les délais ne peut intervenir que si le client est à jour de ses obligations envers le vendeur.’

Or, au recto du verso du bon de commande, le délai de livraison n’est pas indiqué.

De plus, alors que le contrat conclu implique des opérations à la fois matérielles de livraison et d’installation du matériel commandé, mais également des démarches administratives et de raccordement, l’article 4 des conditions générales relatif aux délais est insuffisant pour répondre aux exigences de l’article L. 111-1, 3°du code de la consommation, dès lors qu’il n’est pas distingué entre le délai de pose des modules, et autres matériels et celui de réalisation des prestations à caractère administratif et qu’un tel délai global, particulièrement imprécis, ne permet pas aux acquéreurs de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur aurait exécuté ses différentes obligations.

Dès lors, le bon de commande litigieux contrevient manifestement aux dispositions du code de la consommation prescrites à peine de nullité, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres griefs invoqués par les emprunteurs.

La société BNP Paribas Personal Finance fait valoir que le consommateur a confirmé la nullité relative invoquée dans le mesure où il a exécuté volontairement le contrat en acceptant la livraison des marchandises et le suivi des travaux, en réceptionnant sans réserve l’installation, en demandant le versement des fonds à la banque, et en remboursant le crédit par anticipation.

Si la violation du formalisme prescrit par les dispositions précitées du code de la consommation, et qui a pour finalité la protection des intérêts de l’acquéreur démarché, est sanctionnée par une nullité relative à laquelle il peut renoncer par une exécution volontaire de son engagement irrégulier, il résulte des dispositions de l’article 1338 du code civil dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable à la date de conclusion du contrat que la confirmation tacite d’un acte nul est subordonnée à la double condition que son auteur ait eu connaissance du vice l’affectant et qu’il ait eu l’intention de le réparer.

La renonciation à se prévaloir de la nullité du contrat par son exécution doit, dès lors que la confirmation d’une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d’un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l’obligation et l’intention de le réparer, être caractérisée par sa connaissance préalable de la violation des dispositions destinées à le protéger.

Le rappel des dispositions du code de la consommation sur le démarchage à domicile aux conditions générales du contrat de vente, de surcroît erronées en l’espèce, ne saurait suffire à établir que l’acquéreur a agi en toute connaissance de cause et renoncé à invoquer les vices de forme du contrat de vente alors que, pour que la confirmation soit valable, il faut que son auteur ait pris conscience de la cause de nullité qui affecte l’acte et que la connaissance certaine de ce vice ne peut résulter, pour un consommateur profane, du seul rappel de ces dispositions.

En conséquent, aucun de ses actes postérieurs à la signature du bon de commande ne saurait être considéré comme une confirmation tacite de la nullité par l’acheteur.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a annulé le bon de commande du 8 octobre 2015.

Sur l’annulation du contrat de crédit accessoire

En application du principe de l’interdépendance des contrats constatée par l’article L.311-32 dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 du code de la consommation, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Il y a lieu de confirmer le jugement et de constater la nullité de plein droit du contrat accessoire de crédit du 8 octobre 2015 conclu entre les époux [Y] d’une part, et la société Sygma Banque aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance d’autre part, en application des dispositions susvisées.

Sur les conséquences de l’annulation du contrat accessoire de crédit

Les annulations prononcées entraînent en principe la remise des parties en l’état antérieur à la conclusion des contrats. Ainsi, l’annulation du contrat de prêt en conséquence de celle du contrat de vente qu’il finançait emporte, pour l’emprunteur, l’obligation de rembourser au prêteur le capital prêté, peu important que ce capital ait été été versé directement au vendeur par le prêteur, sauf si l’emprunteur établi l’existence d’une faute du prêteur et d’un préjudice consécutif à cette faute. Elle emporte également pour le prêteur l’obligation de restituer les sommes déjà versées par l’emprunteur.

Cependant, le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution peut être privé de tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.

En l’espèce, le bon de commande était manifestement affecté d’un vice de forme au regard des dispositions du code de la consommation, et la banque, professionnelle dispensatrice de crédits affectés, a commis une faute en ne vérifiant pas sa régularité avant le déblocage des fonds.

Par ailleurs, il ressort du bon de commande du 8 octobre 2015 que la prestation complète de la société Sungold comprenait non seulement l’installation des panneaux, mais également l’ensemble des démarches administratives, de raccordement de la centrale au réseau électrique jusqu’à la mise en service de l’installation, l’obligation de vérifier la complète exécution du contrat pesant sur la banque impliquait de s’assurer aussi de la réalisation de ces prestations.

Le certificat de livraison de biens ou de fourniture de services qui mentionnait ‘Kit photovoltaïque’ n’était pas suffisamment précis pour rendre compte de la complexité de l’opération qui comprenait outre la livraison et la pose des panneaux, la réalisation de l’ensemble des démarche administratives et le raccordement au réseau ERDF auquel la société’Sungold s’ était engagée, et ainsi permettre au prêteur de se convaincre de l’exécution complète du contrat principal.

En outre, ce document ne pouvaient manifestement pas rendre compte de ce que les travaux commandés étaient terminés alors que ce certificat a été émis le 30 octobre 2015, soit moins trois semaines après la signature du bon de commande, ce délai étant à l’évidence trop court pour assurer la finalisation totale de l’installation, étant observé qu’en février 2016, le raccordement n’avait pas été réalisé par la société Sungold, ainsi qu’il résulte des lettres de relance de M. [Y] datées des 4 et 17 février 2016.

En s’abstenant de s’assurer que le contrat était entièrement exécuté, la société BNP Paribas Personal Finance a commis une faute.

Les fautes commises par la banque dans le déblocage des fonds entraînent manifestement un préjudice pour l’emprunteur en l’espèce dans la mesure où il ne sera pas en mesure d’obtenir la restitution du prix, ni la désinstallation de l’équipement et la remise en état de son habitation du fait de la déconfiture de la société Sungold placée en liquidation judiciaire, procédure désormais clôturée pour insuffisance d’actifs, alors que la restitution du prix et la remise en état par la société installatrice aurait dû être la conséquence normale de l’annulation du contrat principal. En outre, l’installation n’est pas fonctionnelle puisqu’elle n’a pas été raccordée au réseau électrique par la société Sungold.

Dès lors, compte tenu du préjudice subi par les emprunteurs, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a privé la banque de la sa créance de restitution et l’a condamnée à restituer aux emprunteurs l’ensemble des sommes versées par eux en exécution du contrat de crédit affecté litigieux, soit la somme de 22 348,97 euros, versée dans le cadre d’un rachat de crédits.

Sur les frais de désinstallation du matériel

Les époux [Y] soutiennent qu’ils subissent un préjudice financier imputable à la banque au motif qu’ils seront obligés de faire déposer l’installation à leur frais, dans la mesure où le mandataire de la société Sungold n’interviendra pas pour l’enlèvement de l’installation et la remise en état de leur toiture.

Selon l’article 1382 du code civil dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ‘tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer’.

Le préjudice indemnisable doit être actuel, direct et certain.

Selon l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

La société Sungold ayant été placée en liquidation judiciaire, désormais clôturée pour insuffisance d’actifs, il est improbable que le mandataire demande la restitution du matériel qui impliquerait pour lui la restitution du prix, de sorte que, malgré l’annulation du contrat de vente, les consorts [Y] vont demeurer propriétaires de l’installation dont il n’est démontré qu’elle ne serait pas opérationnelle.

De plus, rien n’indique à ce jour qu’ils vont mener à bien la désinstallation de la centrale et de remise en état de la toiture dès lors qu’ils restent propriétaires de l’installation, que la nécessité d’enlever cette dernière n’est pas justifiée et qu’il pourront au contraire la conserver, ne sollicitant pas, par ailleurs, la confirmation du jugement en ses dispositions ayant ordonné la dépose du matériel.

Il y a donc lieu de les débouter de leur demande de dommage et intérêts à l’encontre de la société BNP Paribas Personal Finance au titre de la désinstallation du matériel.

Sur les demandes de dommages et intérêts pour préjudice économique, de jouissance et moral

Il convient de débouter les époux M. [Y] de leurs demandes de dommages et intérêts complémentaires au titre du préjudice économique et de jouissance, lequel est d’ors et déjà réparé par la privation de la banque du capital prêté. Ils seront également déboutés de leur demande au titre du préjudice moral, le certificat médical produit n’établissant pas que l’état anxieux de Mme [P] serait en lien avec la faute de la banque.

Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef par substitution de motifs.

Sur les demandes accessoires

Les motifs du premier juge méritant d’être adoptés, le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.

La société BNP Paribas Personal Finance, qui succombe, sera condamnée aux dépens d’appel.

Il paraît équitable de condamner la société BNP Paribas personal finance à payer aux intimés la somme de 1 200 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt par défaut ;

Confirme le jugement entrepris ;

Y ajoutant ;

Déclare l’action de M. [G] [Y] et Mme [J] [P] recevable ;

Condamne la société BNP Paribas Personal Finance à payer aux époux [Y] la somme de 1 200 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens d’appel.

Le greffier

Gaëlle PRZEDLACKI

Le président

Yves BENHAMOU

 


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