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05/12/2023
ARRÊT N°
N° RG 22/00833
N° Portalis DBVI-V-B7G-OUPW
MD/ND
Décision déférée du 06 Décembre 2021
Juge des contentieux de la protection d’ALBI
(21/00263)
M GUINARD
[R] [T]
[N] [O] ÉPOUSE [T]
C/
S.A. FRANFINANCE AFFAIRES SPECIALES
S.E.L.A.R.L. ATHENA
INFIRMATION PARTIELLE
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
1ere Chambre Section 1
***
ARRÊT DU CINQ DECEMBRE DEUX MILLE VINGT TROIS
***
APPELANTS
Monsieur [R] [T]
[Adresse 8]
[Localité 6]
Représenté par Me Karine LEBOUCHER de la SELARL LEBOUCHER AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER
Représenté par Me Clément POIRIER, avocat au barreau de TOULOUSE
Madame [N] [O] épouse [T]
[Adresse 8]
[Localité 6]
Représentée par Me Karine LEBOUCHER de la SELARL LEBOUCHER AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER
Représentée par Me Clément POIRIER, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMEES
S.A. FRANFINANCE
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège.
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me Jérôme MARFAING-DIDIER de la SELARL DECKER, avocat au barreau de TOULOUSE
S.E.L.A.R.L. ATHENA
es qualité de mandataire liquidateur de la société SAS AZUR SOLUTION ENERGIE, dont le siège social est [Adresse 1]
[Adresse 2]
[Localité 3]
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 Septembre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. DEFIX , chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. DEFIX, président
J.C. GARRIGUES, conseiller
S. LECLERCQ, conseiller
Greffier, lors des débats : N.DIABY
ARRET :
– REPUTE CONTRADICTOIRE
– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
– signé par M. DEFIX, président, et par N.DIABY, greffier de chambre
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Suivant bon de commande signé le 26 juin 2018, Mme [N] [O] épouse [T] a conclu avec la Sas Azur Solution Énergie un contrat de vente et d’installation à son domicile situé à [Localité 7] (81) de 14 modules photovoltaïques en autoconsommation, un ballon thermodynamique, une pompe à chaleur, 26 ampoules et 6 prises wi-fi domotique, moyennant le prix total de 36 980 euros toutes taxes comprises.
Le même jour, M. [R] [T] et Mme [N] [T] ont signé un contrat de crédit affecté auprès de la Sa Franfinance aux fins de financement du contrat suscité.
Le 26 juillet 2018 les biens ont été livrés et installés.
Mme [T] a signé le 2 juillet 2018, un document qui stipule qu’elle a ‘réceptionné sans restriction ni réserve le bien ou la prestation, objet du financement conforme au bon de commande, (…) a autorisé ainsi Franfinance à régler le vendeur une seule fois’.
Le même jour, elle a signé un formulaire donnant mandat à la Sa Franfinance de débiter son compte.
Les fonds ont été débloqués par la banque le 31 juillet 2018.
Le 27 janvier 2019, un technicien du vendeur est intervenu et a relevé dans le procès-verbal d’intervention ‘plus ECS, Pac ne fonctionne pas, batterie fait disjoncter, faut prévoir une équipe de pose pour raccorder les panneaux à la pac, client très mécontent de Azur pour les problèmes’.
Le 26 février 2019, un technicien du vendeur est intervenu et a indiqué sur le procès-verbal d’intervention ‘malfaçon de la pack system; absence de collecteur de panneaux + Delta CTH et Deltat pack à raccorder ensemble + prévoir une reprise de la pack au complet, min 4 heure de travail’.
Par courrier du 2 juin 2019, Mme [T] a notifié à la Sasu Azur Solution Énergie l’exercice de son droit de rétractation.
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Par acte d’huissier du 19 juillet 2019, M. [R] [T] et Mme [N] [O] épouse [T] ont fait assigner la Sasu Azur Solution Énergie et la Sa Franfinance devant le tribunal d’instance d’Albi en sollicitant notamment le constat de l’exercice de leur droit de rétractation et la caducité du bon de commande.
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Par jugement du 6 décembre 2021, le tribunal judiciaire d’Albi a :
– rejeté toutes conclusions contraires,
– déclaré recevable l’action introduite par M. et Mme [T] à l’encontre de la Sasu Azur Solution Énergie et de la Sa Franfinance,
– constaté que le droit de rétractation exprimé par M. et Mme [T] aux termes de leur courrier en LRAR du 4 juin 2019, a été exercé dans les délais,
– prononcé la caducité du contrat principal conclu entre les parties le 26 juin 2018, ledit contrat étant intervenu hors établissement au domicile des requérants de [Localité 7], soit entre M. [R] [T], Mme [N] [T] née [O] et la Sasu Azur Solution Énergie,
– fixé la date de caducité rétroactivement au 26 juin 2018,
– condamné la Sasu Azur Solution Énergie, prise en la personne de son représentant légal, à rembourser à M. [R] [T] et Mme [N] [T] née [O] la somme principale de 36 980 euros correspondant à la livraison et l’installation des matériels fournis, somme à parfaire déduction faite de la somme de 1 500 euros accordée aux demandeurs au titre d’une remise commerciale,
– dit que les sommes restant dues seront de plein droit augmentées des intérêts au taux légal après écoulement d’un délai de 10 jours à compter du jour où le présent jugement sera définitif, puis majorée de 5 % si le retard est compris entre 10 et 20 jours, 10 % si le retard est compris entre 20 et 30 jours, 20 % si le retard est compris entre 30 et 60 jours; 50 % entre 60 et 90 jours et 5 points supplémentaires par mois de retard jusqu’à concurrence du prix du produit, puis du taux d`intérêt légal,
– condamné la Sasu Azur Solution Énergie en la personne de son représentant légal à procéder dans le mois suivant la date à laquelle le présent jugement sera définitif au démontage et à l’enlèvement, à ses frais, de l’ensemble des biens livrés et installés au domicile de M. et Mme [T], en ce compris tous les accessoires y afférents, étant précisé qu’elle fera son affaire personnelle des biens enlevés et qu’au visa de l’article 1352-1 du code civil, celui qui restitue la chose répond des dégradations et des détériorations qui en ont diminué la valeur, à moins qu’il ne soit de bonne foi et que celles-ci ne soient pas dues à sa faute,
– condamné la Sasu Azur Solution Énergie, prise en la personne de son représentant légal, à procéder à ses frais, dans le mois suivant la date à laquelle le présent jugement sera définitif, à la remise en état de la toiture de la maison d`habitation de M. et Mme [T], ladite habitation étant située à [Localité 7],
– dit qu’à défaut d’y avoir satisfait dans les délais fixés, elle sera condamnée à payer à M. [R] [T] et Mme [N] [T] née [O] la somme de 5 610 euros correspondant au devis produit par les requérants, ledit devis ayant été établi le 28 février 2021 par la société Autan solaire au titre de la dépose des matériels et de la remise en état d’origine de la toiture,
– constaté la résiliation du contrat de crédit affecté accordé le 26 juin 2018 par la Sa Franfinance à M. et Mme [T] avec effet rétroactif au 26 juin 2018,
– condamné in solidum M. [R] [T] et Mme [N] [T] née [O] à payer a la Sa Franfinance, prise en la personne de son représentant légal, la somme principale de 36.980 euros, sous déduction des échéances qu`ils ont acquittées au titre du crédit affecté, déduction faite des sommes qu`ils auront versées au titre du prêt, soit 825 euros au jour de l’assignation, somme à parfaire, en ce compris le capital, les primes d`assurance, les intérêts conventionnels et les frais annexes, exception éventuellement faite des frais engagés pour l’ouverture du dossier de crédit, ainsi qu’en dispose l’article L. 312-54 du code de la consommation,
– condamné la Sasu Azur Solution Énergie, prise en la personne de son représentant au paiement des entiers dépens,
– condamné la Sasu Azur Solution Énergie, prise en la personne de son représentant légal, à payer à M. [R] [T] et Mme [N] [T] née [O] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit que, sur le fondement de l’article R. 631-4 du code de la consommation, à défaut de règlement spontané prononcée par la présente décision et qu’en cas d’exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l’huissier instrumentaire, en application des dispositions de l’article 10 du décret du 8 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996, devront être supportés par la Sasu Azur Solution Énergie, en sus de l’indemnité de 2.500 euros mise à sa charge sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit n’y avoir lieu à ordonner l’exécution provisoire du présent jugement.
Le premier juge a considéré que le contrat de vente s’inscrivait dans le cadre d’une opération de démarchage à domicile, que les conditions générales étant illisibles elles n’étaient pas opposable aux acquéreurs, de sorte que le délai de rétractation a été prolongé de 12 mois et expirait le 10 août 2019.
Il a retenu l’efficacité de l’exercice du droit de rétractation par M. et Mme [T] par courrier du 2 juin 2019 et en a déduit la caducité du contrat de vente.
Il a considéré que la Sa Franfinance n’avait pas commis de faute tant en ce qui concerne les conditions d’octroi du prêt que le déblocage des fonds, rejetant la demande de M. et Mme [T] tendant à la privation du droit de la banque à restitution du capital emprunté.
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Par jugement du 2 février 2022, le tribunal de commerce d’Angers a prononcé l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire à l’encontre de la Sas Azur Solution Énergie.
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Par déclaration du 25 février 2022, M. [R] [T] et Mme [N] [O] épouse [T] ont interjeté appel de ce jugement ‘en ce qu’il a :
– débouté M. et Mme [T] de leur demande de priver l’organisme de crédit de son droit à restitution des fonds ;
– condamné in solidum les époux [T] à payer à Franfinance la somme de 36.980 euros, sous déduction des échéances qu’ils ont acquittées au titre du contrat de crédit affecté, déduction faite des sommes qu’ils auront versées au titre du prêt, soit 825 euros au jour de l’assignation, somme à parfaire, en ce compris le capital, les primes d’assurance, les intérêts conventionnels et les frais annexes, exception éventuellement faite des frais engagés pour l’ouverture du dossier de crédit ainsi qu’en dispose l’article L.312-54 du code de la consommation.
L’objet de la demande du présent appel est de faire droit à toutes exceptions de procédure, annuler sinon infirmer et à tout le moins réformer la décision déférée’.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans leurs dernières écritures transmises par voie électronique le 31 août 2023, M. [R] [T] et Mme [N] [O] épouse [T], appelants, demandent à la cour, au visa des articles L.111-1 et suivants, L. 221-1 et suivants, L. 312-48 et suivants, L. 242-1 du code de la consommation (en vigueur au 1er juillet 2016), 1103 et suivants et 1224 et suivants du code civil (rédaction postérieure au 1er octobre 2016), de :
– confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :
* déclaré recevable l’action qu’ils ont introduite à l’encontre de la Sasu Azur Solution Énergie et de la Sa Franfinance,
* constaté que le droit de rétractation qu’ils ont exprimé aux termes de leur courrier en lettre recommandée avec accusé de réception du 4 juin 2019, a été exercé dans les délais,
* prononcé la caducité du contrat principal conclu entre les parties le 26 juin 2018, ledit contrat étant intervenu hors établissement au domicile des requérants de [Localité 7], soit entre eux et la Sasu Azur Solution Énergie,
* fixé la date de caducité rétroactivement au 26 juin 2018,
* constaté la résiliation du contrat de crédit affecté leur ayant été accordé le 26 juin 2018 par la Sa Franfinance avec effet rétroactif au 26 juin 2018,
– infirmer le jugement dont appel en ce qu’il :
* les a condamnés in solidum à payer a la Sa Franfinance prise en la personne de son représentant légal, la somme principale de 36 980 euros sous déduction des échéances qu`ils ont acquittées au titre du crédit affecté déduction faite des sommes qu’ils auront versées au titre du prêt, soit 825 euros au jour de l’assignation, somme à parfaire, en ce compris le capital, les primes d’assurance, les intérêts conventionnels et les frais annexes, exception éventuellement faite des frais engagés pour l’ouverture du dossier de crédit ainsi qu’en dispose l`article L. 312-54 du code de la consommation,
Statuant de nouveau :
À titre principal :
– condamner Franfinance à leur restituer les échéances acquittées au titre du contrat de crédit,
– priver Franfinance de fait de tout droit à remboursement à leur encontre s’agissant du capital, des frais et accessoires versés entre les mains de la société Azur Solution Énergie,
– fixer leur créance au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la Société Azur Solution Énergie à la somme de 5 610 euros au titre de la dépose et remise en état de l’installation selon devis de dépôt et de remise en état,
À titre subsidiaire,
Si par extraordinaire, la faute du prêteur n’était pas retenue,
– fixer leur créance au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société Azur Solution Énergie à la somme de 36 980 euros correspondant au montant du contrat principal annulé,
– priver rétroactivement Franfinance de son droit aux intérêts du fait de l’anéantissement du contrat de crédit,
En toutes hypothèses,
– condamner solidairement la Selarl Athena, es qualité de liquidateur judiciaire de la société Azur Solution Énergie, et la société Franfinance à leur payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre le paiement des entiers dépens,
– dire que sur le fondement de l’article R. 631-4 du code de la consommation, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la présente décision et qu’en cas d’exécution par voie extrajudiciaire les sommes retenues par l’huissier instrumentaire, en application des dispositions de l’article 10 du décret du 8 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996, devront être supportées par les parties succombantes, en sus de l’indemnité mise à sa charge sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.
À l’appui de leurs prétentions, les appelants soutiennent que :
– la société Franfinance a commis des fautes qui la privent du droit de demander le remboursement du capital,
– elle a commis une faute dans le déblocage des fonds consistant dans le fait d’avoir débloqué les fonds alors que le délai de rétractation de 14 jours courant à compter de la livraison des biens n’était pas écoulé,
– l’attestation de conformité n’est pas valable car elle a été signée avant la livraison des biens,
– la déclaration préalable d’urbanisme n’a pas été déposée pour la pompe à chaleur,
– seule une attestation de fin de travaux peut permettre la libération des fonds à condition d’être conforme au bon de commande, or la société Franfinance produit une demande de financement qui ne décrit ni les biens commandés ni les démarches administratives effectuées,
– la société Franfinance n’a pas correctement exécuté son devoir de contrôle du contrat principal, alors qu’elle a, s’agissant d’un contrat de crédit affecté, nécessairement connaissance du bon de commande et des anomalies qui l’affectent,
– les caractéristiques techniques ne figurent pas sur le bon de commande (marque des panneaux, l’indication Gse solar ne correspondant à aucune marque; la taille, le poids et les dimensions des panneaux, la puissance totale de l’installation, la puissance des micro-onduleurs, la marque de la pompe à chaleur, la marque du ballon thermodynamique), le prix des produits, le délai d’exécution et le délai de rétractation est erroné,
– la société Franfinance a commis des fautes relativement au contrat de crédit, en proposant un crédit à la consommation alors que les travaux entraient dans le champ d’application des crédits immobiliers, leur faisant perdre le bénéfice de règles plus protectrices; en ne démontrant pas avoir satisfait à son obligation de vérification de la solvabilité des emprunteurs; en manquant de vigilance quant au choix de son partenaire commercial,
– M. et Mme [T] subissent plusieurs préjudices tenant au fait qu’ils ont été privés des effets de leur droit de rétractation, ils financent une installation non conforme aux normes de sécurité et une pompe à chaleur non autorisée, et ne peuvent récupérer le prix de vente en raison de la liquidation judiciaire du vendeur,
– la pompe à chaleur ne fonctionne pas ni la batterie des panneaux de telle sorte que l’électricité produite part dans le réseau Enedis au lieu d’alimenter leur maison, sans possibilité de revente,
– les panneaux photovoltaïques, le ballon thermodynamique et la pompe à chaleur devront être retirés et les installations remises en état.
Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 12 juillet 2022, la Sa Franfinance, intimée, demande à la cour, au visa des articles 1240 du code civil et L. 312-56 du code de la consommation, de :
– la recevoir en ses écritures et la dire bien fondée,
À titre principal,
– confirmer le jugement dont appel,
À titre subsidiaire,
– prononcer son admission au passif de la société Azur Solution Énergie pour la somme de 36.980 euros en remboursement du capital versé,
En tout état de cause et y ajoutant :
– condamner Mme et M. [T] au paiement de la somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Mme et M. [T] aux entiers dépens.
À l’appui de ses prétentions, l’intimée soutient que :
– elle a droit au remboursement du capital puisqu’elle n’a pas commis de faute,
– le déblocage des fonds est intervenu à la suite de la réception sans réserve du matériel et son installation sans contestation, l’attestation de livraison sans réserve signée par Mme [T] et contenant la demande de déblocage des fonds, le mandat de prélèvement Sepa signé le jour même, l’attestation de conformité visée par le consuel, la facture émise par le vendeur et correspondant au bon de commande,
– l’installation photovoltaïque ne relève pas du champ d’application des crédits immobiliers,
– la banque a satisfait à son devoir de mise en garde en vérifiant les capacités de remboursement des emprunteurs,
– il n’est pas établi que le vendeur ne serait pas une entreprise sérieuse, outre qu’elle est intervenue deux fois en post-installation.
La Selarl Athena, prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la Sas Azur Solution Énergie, à laquelle la déclaration d’appel a été signifiée par acte d’huissier le 1er juin 2022 n’a pas constitué avocat.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 4 septembre 2023. L’affaire a été examinée à l’audience du 19 septembre 2023.
MOTIVATION DE LA DÉCISION
1. Par le jugement du 6 décembre 2021, le tribunal judiciaire d’Albi a constaté que le droit de rétractation exprimé par les requérants avait été exercé dans les délais. Il a prononcé la caducité du contrat principal, condamné les parties à des restitutions réciproques et constaté la résiliation du contrat de crédit affecté avec effet rétroactif au 26 juin 2018, condamnant en conséquence prêteur et emprunteurs à des restitutions réciproques.
Pour ce faire, il a considéré que les conditions générales de ventes n’étaient pas lisibles en raison de la taille des caractères ne dépassant pas 2 mm, en se référant à l’article R. 312-10 du code de la consommation dédié au contrat de crédit qui exige des caractères d’une hauteur de corps huit, soit environ 0,376mm. Il en a déduit l’inopposabilité des conditions générales à M. et Mme [T] et considéré que l’information relative au droit de rétractation ne leur avait dès lors pas été fournie, permettant l’exercice du délai de rétractation pendant 12 mois supplémentaires.
Tant les acquéreurs que le prêteur de deniers demandent la confirmation du jugement en ce qui concerne le sort des contrats mais s’opposent sur la question relative à la restitution du capital emprunté par M. et Mme [T] à la Sa Franfinance.
Il résulte de l’acte d’appel précédemment reproduit que la cour n’est en réalité saisie que des dispositions relatives aux demandes formées contre la société Franfinance nonobstant la formule générique et conclusive de cet acte ne pouvant s’appliquer qu’aux chefs de jugement critiqués précédemment énoncés par les appelants. Aucune confirmation ne saurait donc être prononcée relativement à des dispositions du jugement n’entrant pas dans la saisine de la cour.
– Sur l’action en restitution du capital prêté dirigée par la Sa Franfinance contre M. et Mme [T] :
2. Invoquant des fautes de la Sa Franfinance, M. et Mme [T] demandent en effet, à ce que celle-ci soit privée de son droit à restitution du capital prêté.
La résolution ou l’annulation d’un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu’il finance, emporte pour l’emprunteur l’obligation de restituer au prêteur le capital prêté. Cependant, le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute (1ère Civ., 7 décembre 2022, pourvoi n° 21-21.389).
3. Pour engager la responsabilité du prêteur, il faut qu’existe un lien de causalité entre la faute qui lui est reprochée et le préjudice dont la réparation est demandée. Dès lors, il n’y a pas lieu, compte tenu de ce que le contrat de vente a été déclaré caduc pour l’exercice du droit de rétractation et non pas nul pour violation des dispositions impératives du code de la consommation, de contrôler l’exercice correct par le prêteur de son devoir de vigilance quant à la régularité formelle du contrat principal sauf en ce qui concerne la stipulation relative au droit de rétractation ayant entraîné la prolongation du délai de rétractation.
Le prêteur commet une faute lorsqu’il libère la totalité des fonds, alors qu’à la simple lecture du contrat de vente il aurait dû constater que sa validité était douteuse au regard des dispositions protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile en lien avec le sort du contrat principal, et spécifiquement en ce qui concerne le cas d’espèce, relativement au droit de rétractation du consommateur.
Or, le premier juge a relevé que le bon de commande conclu avec la société Azur Solution Énergie, comportait, relativement aux modalités d’exercice du droit de rétractation, une irrégularité formelle apparente tenant à la taille des caractères et qui aurait dû conduire le prêteur, professionnel des opérations de crédit affecté, à ne pas libérer des fonds entre les mains du fournisseur avant d’avoir à tout le moins vérifié auprès de Mme [T] que, connaissance prise de ce que le délai, du fait du caractère illisible des conditions générales devait être prolongé d’un an, était toujours ouvert, elle entendait renoncer à l’exercice de ce droit.
Le prêteur n’avait certes pas à assister l’emprunteur lors de la conclusion et de l’exécution du contrat principal, ni à vérifier le bon fonctionnement d’une installation exempte de vice ou la conformité du matériel livré aux stipulations contractuelles, mais il lui appartenait néanmoins de relever les anomalies apparentes du bon de commande, ce dont il résulte qu’en versant les fonds entre les mains du fournisseur, sans procéder à des vérifications complémentaires sur la régularité formelle de ce bon de commande, dès lors que le code de la consommation attache trois conséquences possibles à l’exigence de rédaction claire et compréhensible des contrats (selon une règle d’interprétation in favorem prévue par l’article L.211-1, une sanction tenant à l’allongement du délai de rétractation conformément à l’article L.221-20, outre la nullité compte tenu de l’article L. 221-29 qui qualifie les règles du chapitre relatif aux contrats conclus à distance et hors établissement de règles d’ordre public).
La Sa Franfinance a commis une faute susceptible de la priver du droit d’obtenir le remboursement du capital emprunté.
4. S’agissant du déblocage des fonds, Mme [T] a signé le 26 juillet 2018, un document qui stipule qu’elle a ‘réceptionné sans restriction ni réserve le bien ou la prestation, objet du financement conforme au bon de commande, (…) a autorisé ainsi Franfinance à régler le vendeur une seule fois’.
Le même jour, elle a signé un formulaire donnant mandat à Franfinance de débiter son compte.
Sur le document produit par la Sa Franfinance et récapitulant l’historique du dossier, il est indiqué que les fonds ont été débloqués le 31 juillet 2018.
L’acquéreur disposait d’un délai de rétractation de 14 jours à compter de la livraison des biens conformément à l’article L. 221-18 du code de la consommation applicable à l’espèce.
Il n’est nullement interdit au professionnel de recevoir un paiement ou une contrepartie de la part du consommateur pendant le cours du délai de rétractation, l’article L.221-10 du code de la consommation, indiquant seulement que le professionnel ne peut recevoir aucun paiement ou aucune contrepartie de la part du consommateur avant l’expiration d’un délai de sept jours à compter de la conclusion du contrat hors établissement et l’article L.221-24 fixant le régime de la restitution des sommes versées par le consommateur au cas d’exercice de son droit de rétractation. L’article L.312-48 du code de la consommation régissant le contrat de crédit affecté dispose également que ‘les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestations’, sans reporter ce début d’exécution à l’expiration du délai de rétractation dont peut bénéficier l’emprunteur.
Il ne peut donc être imputé à faute à la société Franfinance d’avoir débloqué les fonds cinq jours après la livraison des biens, et donc avant expiration du délai de rétractation dont bénéficiait Mme [T].
Toutefois, le document signé le 26 juillet 2018 par Mme [T] ne détaille pas les biens livrés et les prestations exécutées par le vendeur, ce qui ne permettait pas à la banque de s’assurer de la pleine exécution de ses obligations par le vendeur avant de débloquer les fonds alors qu’une telle obligation lui incombait.
La Sa Franfinance a donc commis deux fautes, l’une relative à la régularité formelle du bon de commande et l’autre au contrôle de l’exécution de ses obligations par le vendeur avant de débloquer les fonds.
Il n’est donc pas nécessaire d’analyser les fautes relatives au contrat de crédit lui-même tenant à la nature juridique du contrat souscrit, à l’évaluation de la solvabilité des emprunteurs ou au choix du partenaire commercial.
5. Toute faute n’entraîne de sanction que lorsqu’elle a causé un préjudice que les juges doivent apprécier.
Le préjudice réparable dans un tel cas consiste dans le fait, pour les acquéreurs, de devoir payer le prix d’une installation qui n’assume pas sa fonction et sans perspective pour les consommateurs de pouvoir se retourner contre le fournisseur en liquidation judiciaire.
À ce titre, la Sas Azur Solution Énergie a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce d’Angers du 2 février 2022.
Les emprunteurs produisent aux débats deux procès-verbaux d’intervention de GSE qui indiquent :
– le 22 janvier 2019 :
*au titre des problèmes constatés : ‘Plus ECS, Pompe à chaleur ne fonctionne pas, batterie fait disjoncter’,
*au titre des travaux effectués : ‘robinet thermostatique solaire fermé’,
*au titre des problèmes résolus : ‘faut prévoir une équipe de pose pour raccorder les panneaux à la pompe à chaleur. Client très mécontent de Azur pour les problèmes’,
– le 26 février 2019 :
*au titre des problèmes constatés : ‘mal façon de la pack system’,
*au titre des travaux effectués : ‘contrôle qualité de la pack system’,
*au titre des problèmes résolus : ‘non. Absence de collecteur de panneaux + deltat CTH et delta pack à raccorder ensemble + prévoir une reprise de la pack au complet’.
M. et Mme [T] produisent des courriers datés de juillet, octobre, décembre 2018 sans toutefois produire la preuve de leur envoi au vendeur.
En outre, au regard des factures d’électricité, leur consommation n’a pas diminué après installation des panneaux photovoltaïques.
La Sa Franfinance centre les développements de ses conclusions autour de la faute qui lui est reprochée et ne présente aucun moyen relatif au préjudice subi par M. et Mme [T] dont elle ne conteste pas l’existence, les pièces produites faisant ressortir que l’installation photovoltaïque dont ils ont bénéficié n’est pas fonctionnelle.
Or, si la banque n’avait pas conclu le contrat de prêt au regard des stipulations non conformes relatives au droit de rétractation ou débloqué les fonds sur la base d’une attestation insuffisante, en contrariété avec ses obligations, les fonds n’auraient pas été versés au vendeur.
M. et Mme [T] ont été exposés du fait des manquements de la Sa Franfinance à l’impossibilité d’obtenir restitution des fonds versés au vendeur et à l’existence d’une installation photovoltaïque inutile.
En conséquence, il convient de priver la Sa Franfinance de son droit à restitution du capital prêté et d’infirmer le jugement qui a condamné les emprunteurs à lui payer la somme de 36 980 euros.
6. M. et Mme [T] demandent également à la cour de condamner la Sa Franfinance à leur restituer les échéances acquittées au titre du contrat de crédit.
Le premier juge avait ordonné de déduire de la restitution du capital par les emprunteurs les sommes versées au titre du prêt, soit 825 euros au jour de l’assignation, somme à parfaire, en ce compris le capital, les primes d`assurance, les intérêts conventionnels et les frais annexes, exception éventuellement faite des frais engagés pour l’ouverture du dossier de crédit.
En vertu de l’article L.312-54 du code de la consommation applicable à l’espèce, lorsque le consommateur exerce son droit de rétractation du contrat de vente ou de fourniture de prestation de services mentionné au 9° de l’article L. 311-1, le contrat de crédit destiné à en assurer le financement est résilié de plein droit sans frais ni indemnité, à l’exception éventuellement des frais engagés pour l’ouverture du dossier de crédit.
Compte tenu du prononcé de la résiliation du contrat de crédit avec effet rétroactif au 26 juin 2018, la banque est tenue de restituer aux emprunteurs les sommes qu’elle a perçues au titre de ce contrat, hormis les frais engagés pour l’ouverture du dossier de crédit.
– Sur l’action dirigée à l’encontre de la Sas Azur Solution Énergie :
7. Dans le corps de leurs conclusions, M. et Mme [T] demandent à la cour que ‘les requises [supportent] solidairement le coût de la dépose et remise en état’, mais ne dirigent leur prétention dans le dispositif de leurs conclusions qu’à l’encontre de la société Azur Solution Énergie en demandant de fixer leur créance au passif de la procédure de liquidation judiciaire de ladite la somme de 5 610 euros au titre de la dépose et remise en état de l’installation selon devis de dépôt et de remise en état.
Le premier juge avait condamné la Sasu Azur Solution Energie à procéder au démontage et à l’enlèvement, à ses frais, de l’ensemble des biens livrés et installés et, à la remise en état de la toiture de la maison d`habitation de M. et Mme [T],dans le mois suivant la date à laquelle le présent jugement sera définitif, et dit qu’à défaut d’y avoir satisfait dans les délais fixés, elle serait condamnée à payer à M. et Mme [T] la somme de 5 610 euros correspondant au devis établi par la société Autan solaire au titre de la dépose des matériels et de la remise en état d’origine de la toiture.
Par jugement du 2 février 2022, le tribunal de commerce d’Angers a prononcé l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire à l’encontre de la Sas Azur Solution Énergie.
Il sera rappelé que bien qu’ayant intimé le mandataire judiciaire de la société Azur Solution Énergie, les appelants n’ont pas visé cette condamnation parmi les chefs de jugement critiqué ni n’ont d’ailleurs sollicité d’infirmation du jugement sur ce point étant par ailleurs relevé, d’une part que cette disposition non critiquée par la société Francefinance est devenue définitive et, d’autre part que M. et Mme [T] ne produisent pas leur déclaration de créance auprès du liquidateur judiciaire et dont l’absence les exposent à l’inopposabilité de leur créance à la procédure de liquidation judiciaire.
La cour ne peut donc que constater qu’elle n’est pas régulièrement saisie de ce chef de demande.
– Sur l’action de la Sa Franfinance à l’encontre de la Sas Azur solution énergie :
8. Selon l’article 472 du code de procédure civile, en l’absence du défendeur, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
En cas de condamnation prononcée à son encontre, la Sa Franfinance demande à la cour de prononcer son admission au passif de la société Azur Solution Énergie pour la somme de 36 980 euros en remboursement du capital versé.
En vertu de l’article L. 622-25 du Code de commerce, le déclarant est tenu de préciser le montant de la créance et sa nature et de joindre les documents justificatifs de sa créance.
La Sa Franfinance produit devant la cour un courrier rédigé le 31 mars 2022 par lequel elle procède à une déclaration de créance d’un montant de 1 666 859,25 euros au passif de la Sas Azur Solution Énergie. Elle indique joindre les assignations dont elle a été destinataire et initiée par des emprunteurs qui ont sollicité la résolution du contrat conclu avec la Sas Azur Solution Énergie, sans pour autant produire lesdits documents devant la cour.
Il n’est nullement établi que ledit document inclut la créance dont se prévaut aujourd’hui la Sa Franfinance devant la cour à l’encontre de la Sas Azur solution énergie compte tenu de l’imprécision du courrier, outre que son envoi et sa réception par le liquidateur judiciaire ne sont pas démontrés non plus.
Faute d’établir avoir régulièrement déclaré ses créances à la procédure collective de la Sas Azur solution énergie, son action en constatation de dettes à son encontre et sa demande d’inscription corrélative au passif de la procédure collective sont donc inopposables.
– Sur les dépens et frais irrépétibles :
La Sa Franfinance, partie perdante, sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel ainsi qu’à payer à M. et Mme [T] la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.
Il convient également de condamner la Sa Franfinance à prendre en charge les émoluments prévus à l’article L.111-8 du code des procédures civiles d’exécution en application de l’article R. 631-4 du code de la consommation, en ce qui concerne les condamnations prononcées à son encontre.
PAR CES MOTIFS :
La cour statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,
Infirme les dispositions du jugement rendu le 6 décembre 2021 par le tribunal judiciaire d’Albi dans la limite de l’appel partiel dont elle est saisie par l’acte d’appel formé par M. [R] [T] et Mme [N] [O] épouse [T].
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Rejette la demande de la Sa Franfinance tendant à obtenir la condamnation de M. [R] [T] et Mme [N] [O] épouse [T] à lui payer la somme de 36 980 euros.
Condamne la Sa Franfinance à restituer à M. [R] [T] et Mme [N] [O] épouse [T] les échéances acquittées au titre du crédit affecté, exception faite des frais engagés pour l’ouverture du dossier de crédit.
Déclare inopposable à la Selarl Athena, prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la Sas Azur solution énergie la demande de la Sa Franfinance tendant à voir fixer au passif de la Sas Azur solution énergie la somme de 36 980 euros.
Condamne la Sa Franfinance à payer à M. [R] [T] et Mme [N] [O] épouse [T] la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.
Condamne la Sa Franfinance à prendre en charge les émoluments prévus à l’article L.111-8 du code des procédures civiles d’exécution en application de l’article R. 631-4 du code de la consommation, en ce qui concerne les condamnations prononcées à son encontre.
Le Greffier Le Président
N. DIABY M. DEFIX
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