Droit de rétractation : Décision du 3 octobre 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 21/03364

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Droit de rétractation : Décision du 3 octobre 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 21/03364

03/10/2023

ARRÊT N°

N° RG 21/03364

N° Portalis DBVI-V-B7F-OJUQ

MD/ND

Décision déférée du 05 Juillet 2021 – Juge des contentieux de la protection de SAINT GAUDENS ( 20/00065)

Mme LOUISON

S.A. FRANFINANCE AFFAIRES SPECIALES

C/

[M] [N]

[F] [J]

S.A.S. IC GROUPE

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU TROIS OCTOBRE DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

S.A. FRANFINANCE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège.

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée par Me Jérôme MARFAING-DIDIER de la SELARL DECKER, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEES

Madame [M] [N]

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représentée par Me Clément POIRIER, avocat au barreau de TOULOUSE

Représentée par Me Karine LEBOUCHER, avocat au barreau de MONTPELLIER

Maître [F] [J] agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société IC GROUPE (anciennement dénommée IMMO CONFORT).

[Adresse 2]

[Localité 6]

Sans avocat constitué

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 Juin 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. DEFIX, Président, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président

J.C. GARRIGUES, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

Greffier, lors des débats : N.DIABY

ARRET :

– PAR DEFAUT

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par M. DEFIX, président, et par N.DIABY, greffier de chambre

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 24 mai 2017, Mme [M] [N], divorcée [L], a conclu avec la société Immo confort, aux droits de laquelle vient la Sas Ic groupe, un contrat d’installation de panneaux photovoltaïques, comprenant le raccordement à Enedis, l’obtention du consuel et du contrat de rachat de l’électricité produite, ainsi que la pose d’un ballon thermodynamique et la réalisation de travaux d’isolation moyennant paiement d’un prix de 22 900 euros toutes taxes comprises.

Suivant offre de crédit du 24 mai 2017, acceptée le jour même, Mme [N] a conclu avec la Sa Franfinance un contrat de crédit affecté destiné au financement du bon de commande précité, pour un capital de 22 900 euros, au taux débiteur fixe de 4,70% et au TAEG fixe de 4,80%, sur 120 mensualités de 244,27 euros chacune.

La société Immo confort a édité une facture le 17 juin 2017 détaillant la réalisation de la prestation ‘kit solaire photovoltaïque’, ‘isolation toiture par extérieur’, ‘ballon aeromax’, ‘main d’oeuvre’.

Le 17 juin 2017, Mme [N] a signé une ‘attestation de livraison – demande de financement’ qui indique que l’acheteur ‘a réceptionné sans restriction ni réserve le bien ou la prestation, objet du financement, conforme au bon de commande, (…) et autorise ainsi Franfinance à régler le vendeur en une seule fois’.

Par courriel du 26 juin 2017, la Sa Franfinance a indiqué à Mme [N] que la société Immo confort l’avait informée de la livraison et de l’installation de la commande. Le prêteur a alors demandé à Mme [N] de l’autoriser à régler le vendeur en confirmant avoir obtenu livraison du bien, en parfait état, conformément au bon de commande et en certifiant que son installation n’appellait aucune restriction ni réserve.

Par courriel du 27 juin 2017, Mme [N] a donné son ‘bon pour accord’ à la société Franfinance qui a versé les fonds au vendeur.

Par jugement du 13 décembre 2018 rendu par le Tribunal de commerce de Nanterre, la Sas Ic Groupe venant aux droits de la société Immo confort, a été placée en liquidation judiciaire.

Par courrier du 14 février 2019, la Sa Edf a indiqué à Mme [N] que : ‘- les exemplaires de l’attestation sur l’honneur de conformité du producteur et de l’installateur ne sont pas conformes car les caractéristiques des panneaux ne sont pas renseignés ou incomplets, la date de signature de l’installateur est absente, la date d’achèvement est postérieure à la date de signature de l’installateur, le nom de l’installateur et/ou son adresse sont absents, le numéro de contrat partie attestation installateur est absent, le nom et la qualité du signataire et/ou le cachet de l’entreprise est absent, la signature de l’installateur est absente,

– les exemplaires du contrat ne sont pas conformes car le contrat comporte une annotation ou une rature’.

Par lettre recommandée avec accusé de réception reçue le 28 octobre 2019, Mme [N] a mis en demeure la société Immo confort d’annuler le bon de commande et de lui restituer les fonds reçus outre l’envoi de plusieurs documents, compte tenu de l’irrespect des dispositions d’ordre public du code de la consommation.

Par lettre recommandée avec accusé de réception reçue le 22 octobre 2019, Mme [N] a informé la Sa Franfinance de sa demande d’annulation de la commande de panneaux solaires auprès de la société Immo confort, et de ‘caducité’ consécutive du prêt souscrit.

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Par exploit d’huissier du 31 octobre 2019, Mme [M] [N] a fait assigner la Sa Franfinance ainsi que la Sas Ic Groupe prise en la personne de son liquidateur judiciaire la Selas Alliance, devant le tribunal judiciaire de Saint-Gaudens aux fins, notamment, d’obtenir la nullité, ou à défaut la résolution, desdits contrats.

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Par jugement du 5 juillet 2021, le Tribunal judiciaire de Saint-Gaudens a :

– dit que la Sas Ic Groupe, venant aux droits de la société Immo confort, prise en la personne de son représentant légal, a été dispensée de comparaître à l’audience du 03 mai 2021,

– déclaré recevable, au regard des dispositions de l’article L.622-21 du Code du commerce, les demandes de Mme [M] [N] tendant à l’annulation ou à la résolution du bon de commande n°4876 signé le 24 mai 2017 avec la société Immo Confort,

– déclaré irrecevables, au regard des dispositions de l’article L.622-21 du Code de commerce,

les demandes tendant à :

* la condamnation solidaire de la Sas IC Groupe, prise en la personne de son représentant légal, à régler à Mme [M] [N] la somme de 5 177,1 1 euros à titre de dommages et intérêts pour la remise en état des lieux,

* la condamnation de la Sas IC Groupe, prise en la personne de son représentant légal,à verser à Mme [M] [N] la somme de 22 900 euros correspondant au coût ducontrat,

* la condamnation de la Sas IC Groupe, prise en la personne de son représentant légal, à garantir la restitution du capital emprunté par Mme [M] [N],

* la condamnation de la Sas IC Groupe, prise en la personne de son représentant légal, à restituer le capital prêté directement entre les mains de la Sa Franfinance,

* la condamnation de la Sas IC Groupe, prise en la personne de son représentant légal, à verser à la Sa Franfinance les sommes de 6 412,40 euros ou 35 724,80 euros à titre de dommages et intérêts,

* régler à Mme [M] [N] la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

* payer les dépens,

* supporter le montant des sommes retenues par l’huissier en application des articles 10 et 12 du décret du 08 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 n°96/1080 relatif au tarif des huissiers,

et à voir inscrire ces sommes au passif de la Sas IC Groupe,

– prononcé l’annulation du bon de commande n°4876 conclu entre la société Immo Confort et Mme [M] [N], le 24 mai 2017,

– constaté que cette annulation entraîne de plein droit la nullité du contrat de crédit affecté et prononcé la nullité du contrat de crédit conclu le 24 mai 2017 entre la Sa Franfinance et Mme [M] [N],

– condamné la Sa Franfinance à verser à Mme [M] [N] la somme de 29 312,40 euros en remboursement des échéances de l’emprunt déjà réglées,

– condamné la Sa Franfinance aux dépens,

– condamné la Sa Franfinance à prendre à sa charge les émoluments prévus à l’article A. 444-32 du Code de commerce,

– condamné la Sa Franfinance à verser à Mme [M] [N] une somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

– débouté les parties de toute demande plus ample ou contraire,

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Le tribunal a considéré que la demande de nullité ou résolution du contrat de vente est recevable à l’encontre du vendeur placé en liquidation judiciaire et que la créance de restitution découlant de l’annulation du contrat naît au jour du prononcé de l’annulation Mme [N] n’avait donc pas d’obligation de déclarer ses créances de ce chef.

Il a estimé que les demandes de condamnation de la société Ic Groupe à payer des sommes d’argent à Mme [N] sont prohibées par l’article L. 622-21 du Code de commerce qui pose le principe de l’interdiction des poursuites, outre que Mme [N] n’établit pas avoir déclaré ses créances.

Il a considéré que la demande de condamnation formée par la Sa Franfinance à l’encontre de la société Ic groupe constitue un appel en garantie au cas de restitution du montant du prêt mais que la société Franfinance ne prouve pas que le courrier adressé à la Selas Alliance pour une créance de 4 798 200 euros a été expédié et réceptionné par le liquidateur. Il a donc jugé que les demandes étaient irrecevables faute d’avoir poursuivi la procédure de déclaration des créances et de justifier d’une ordonnance du juge commissaire.

Le tribunal a estimé que le bon de commande ne respectait pas les dispositions du code de la consommation faute de préciser la marque et les caractéristiques des biens et services, leur prix unitaire et en considération d’un délai de livraison imprécis et d’un bordereau de rétractation non conforme.

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Par déclaration du 23 juillet 2021, la Sa Franfinance a interjeté appel de ce jugement, en ce qu’il a :

– dit que la Sas IC Groupe, venant aux droits de la société Immo confort, prise en la personne de son représentant légal, a été dispensée de comparaître à l’audience du 03 mai 2021,

– déclaré recevable, au regard des dispositions de l’article L.622-21 du Code du commerce, les demandes de Mme [M] [N] tendant à l’annulation ou à la résolution du bon de commande n°4876 signé le 24 mai 2017 avec la société Immo Confort,

– déclaré irrecevables, au regard des dispositions de l’article L. 622-21 du Code de commerce, les demandes tendant à :

* la condamnation solidaire de la Sas IC Groupe, prise en la personne de son représentant légal, à régler à Mme [M] [N] la somme de 5 177,1 1 euros à titre de dommages et intérêts pour la remise en état des lieux,

* la condamnation de la Sas IC Groupe, prise en la personne de son représentant légal,à verser à Mme [M] [N] la somme de 22 900 euros correspondant au coût du contrat,

* la condamnation de la Sas IC Groupe, prise en la personne de son représentant légal, à garantir la restitution du capital emprunté par Mme [M] [N],

* la condamnation de la Sas IC Groupe, prise en la personne de son représentant légal, à restituer le capital prêté directement entre les mains de la Sa Franfinance,

* la condamnation de la Sas IC Groupe, prise en la personne de son représentant légal, à verser à la Sa Franfinance les sommes de 6 412,40 euros ou 35 724,80 euros à titre de dommages et intérêts,

* régler à Mme [M] [N] la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

* payer les dépens,

* supporter le montant des sommes retenues par l’huissier en application des articles 10 et 12 du décret du 08 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 n°96/1080 relatif au tarif des huissiers,

et à voir inscrire ces sommes au passif de la Sas IC Groupe,

– prononcé l’annulation du bon de commande n°4876 conclu entre la société Immo Confort et Mme [M] [N], le 24 mai 2017,

– constaté que cette annulation entraîne de plein droit la nullité du contrat de crédit affecté et prononcé la nullité du contrat de crédit conclu le 24 mai 2017 entre la Sa Franfinance et Mme [M] [N],

– condamné la Sa Franfinance à verser à Mme [M] [N] la somme de 29 312,40 euros en remboursement des échéances de l’emprunt déjà réglées,

– condamné la Sa Franfinance aux dépens,

– condamné la Sa Franfinance à prendre à sa charge les émoluments prévus à l’article A. 444-32 du Code de commerce,

– condamné la Sa Franfinance à verser à Mme [M] [N] une somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

– débouté les parties de toute demande plus ample ou contraire,

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

EXPOSÉ DES MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 21 octobre 2021, la Sa Franfinance, appelante, demande à la cour, au visa des articles L. 312-12 du Code de la consommation, 1134, 1184, 1315 et 1382 du Code civil, de :

– Infirmer le jugement dont appel dans toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau sur tous les points,

Si la cour déboute Mme [M] [N] de sa demande de nullité ou résolution du contrat principal :

– Débouter Mme [M] [N] de sa demande de nullité ou résolution du crédit affecté,

– Débouter Mme [M] [N] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

Si la Cour fait droit à la demande de nullité ou résolution du contrat principal :

– Prononcer la nullité ou résolution subséquente du contrat de crédit affecté,

– ‘Dire et juger’ que les parties devront être remises dans leur état antérieur,

– Condamner Mme [M] [N] au remboursement du capital prêté,

– Donner acte à la banque de ce qu’elle s’engage à restituer les intérêts et frais perçus,

– Condamner la société IC groupe au paiement de la somme de 6 412,40 euros à titre de dommages et intérêts, et en conséquence :

– Fixer au passif de la société IC groupe cette somme,

– Condamner la société IC groupe à garantir la restitution du capital emprunté par Madame [M] [N],

– Débouter Mme [M] [N] de sa demande au titre du coût des travaux incombant à la société A + Energies,

En toutes hypothèses,

– Constater que la banque n’a commis aucune faute lors du déblocage des fonds,

– Débouter Mme [M] [N] de sa demande d’exonération de son obligation de remboursement du capital prêté,

– Débouter Mme [M] [N] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions.

Subsidiairement, si la Cour fait droit à la demande d’exonération de l’obligation de remboursement du capital prêté :

– Condamner la société IC Groupe à la restitution du capital prêté directement entre les mains du prêteur, soit la somme de 29 312,40 euros, outre la somme de 6 412,40 euros à titre de dommages et intérêts, et en conséquence fixer au passif de la société IC Groupe cette somme,

– A défaut, condamner la société IC Groupe au paiement de la somme totale de 35 724,80 euros à titre de dommages et intérêts, et en conséquence fixer au passif de la société IC Groupe cette somme,

En tout état de cause,

– Condamner tout succombant, au paiement de la somme de ‘1. 00,00″ euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens dont distraction au profit de Maître Jérôme Pascal, avocat postulant, sur son affirmation de droit.

À l’appui de ses prétentions, l’appelante soutient que :

– Ses demandes à l’encontre de la société Ic groupe sont recevables car elle a agi en justice contre ladite société, le juge-commissaire n’ayant plus, dès lors, lieu de rendre une ordonnance d’admission des créances,

– Le juge-commissaire ayant rendu une ordonnance en mars 2020 qui constate l’existence d’une procédure au fond contre la société Ic groupe, cela démontre la bonne réception de la déclaration de créance,

– La Sa Franfinance s’en remet à la cour d’appel en ce qui concerne la demande de nullité ou de résolution du contrat,

– Elle a droit à la restitution des fonds prêtés,

– Si la banque a commis une faute, le préjudice subi par l’emprunteur est équivalent aux sommes qu’il doit restituer, entraînant compensation entre les créances de restitution et de réparation,

– Aucune faute ni préjudice ne peuvent être reprochés à la banque,

– Il n’y avait pas lieu de proposer un crédit immobilier en lieu et place du crédit à la consommation, l’acquisition de panneaux photovoltaïque ne relevant pas de l’article L.312-2-1-d) mais du c), à savoir : dépense relative à l’amélioration d’un immeuble à usage d’habitation mais le montant est inférieur au seuil de 75 000 euros,

– La banque a vérifié la solvabilité de Mme [N] comme en atteste la fiche de solvabilité et les justificatifs produits,

– La banque n’était pas tenue d’un devoir de mise en garde compte tenu du faible taux d’endettement et du règlement des échéances sans incident de paiement,

– Il n’est pas démontré que le choix du partenaire commercial serait inopportun,

– Seule la démonstration d’une absence de livraison ou d’exécution de la prestation est de nature priver la banque de son droit à remboursement,

– Les fonds ont été débloqués à la suite de la communication par l’emprunteur du procès-verbal de réception des travaux sans réserve et de la demande de déblocage des fonds signée,

– La facture émise par le vendeur le 17 juin 2017 mentionne la livraison, pose, installation, gestion, suivi du dossier administratif ainsi que le raccordement,

– Les obligations de l’emprunteur prennent effet à compter du début de la livraison s’agissant d’un contrat de prestation de service à exécution successive, l’emprunteur doit donc rembourser le prêt même en cas de livraison partielle,

– En l’espèce, les démarches administratives et le raccordement à Edf, à sa charge, ne faisaient pas partie du prix de vente tel que cela ressort du bon de commande et de la facture,

– Mme [N] savait que certaines démarches étaient encore nécessaires à la mise en service de l’installation mais a expressément demandé à voir débloquer les fonds au profit du vendeur,

– La banque n’a pas d’obligation de vérification de la régularité formelle du contrat principal,

– L’audit technique non contradictoire réalisé par Mme [N] ne retient pas le non-fonctionnement de l’installation mais sa non-conformité qui n’a pas empêché l’emprunteur de rembourser le crédit,

– La banque conteste le défaut de conformité retenu de manière non contradictoire,

– Le fait que la banque ait débloqué les fonds avant l’expiration du délai de rétractation du contrat de vente ne peut permettre de priver la banque de son droit à restitution du capital prêté, le seul délai dont est tenu la banque étant celui relatif au prêt,

– En cas de nullité ou résolution des contrats de vente et de prêt, compte tenu de la faute de la société Ic groupe pour absence de raccordement effectif de l’installation photovoltaïque, le vendeur devrait indemniser la banque pour le préjudice subi qui consiste en la perte du bénéfice des intérêts et frais qu’elle aurait dû percevoir,

– La banque qui n’est pas partie au contrat de vente ne peut être tenue d’indemniser Mme [N] au titre du coût des travaux de dépose de l’installation et de remise en état de la toiture.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 26 mai 2023, Mme [M] [N], intimée, au visa des articles L. 111-1 et suivants, L. 221-1 et suivants, L. 242-1, L. 312-48 et suivants du Code de la consommation, 1103 et suivants et 1224 et suivants du Code civil, demande à la cour de :

– La voir ‘dire et juger’ recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

Y faisant droit,

– Confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de prise en charge du devis de dépose et remise en état par Franfinance,

Et statuant à nouveau sur ce dernier point,

– Condamner Franfinance à prendre en charge le coût des travaux de remise en état, soit la somme de 5 177,11 euros selon devis de dépôt et de remise en état communiqué,

Subsidiairement, si la nullité n’est pas retenue par la cour de céans,

– Ordonner la résolution du contrat de vente et de l’avenant conclus entre Ic Groupe, venant aux droits d’Immo confort, et elle-même au titre de l’inexécution contractuelle imputable à Ic Groupe,

– Ordonner la résolution consécutive du contrat de prêt affecté conclu entre Mme [N] et Franfinance,

– Condamner Franfinance à lui restituer toutes sommes qu’elle a d’ores et déjà versées au titre de l’emprunt souscrit, soit la somme de 29 312,40 euros,

– Constater les fautes imputables à Franfinance,

– Priver Franfinance de fait de tout droit à remboursement contre elle s’agissant du capital, des frais et accessoires versés entre les mains de la société Immo confort,

– ‘Dire et juger’ que Franfinance fera son affaire du remboursement du capital directement entre les mains de la société Ic Groupe, venant aux droits de la société Immo confort,

– Condamner Franfinance à prendre en charge le coût des travaux remise en état, soit la somme de 5 177,11 euros selon devis de dépôt et de remise en état,

Très subsidiairement, si par extraordinaire la nullité et la résolution ne sont pas retenues, ou si le prêteur n’est pas dispensé de son droit à être remboursé du capital,

– Fixer sa créance au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société Ic Groupe à la somme de 22 900 euros correspondant au coût du contrat, outre le coût de dépose du matériel et de remise en état des existants,

– Priver rétroactivement Franfinance de son droit aux intérêts du fait de la nullité ou résolution du contrat de crédit, mais également de ses manquements au contrat de crédit, et condamner Franfinance à rembourser les intérêts et frais perçus,

– Condamner Franfinance à prendre en charge le coût des travaux remise en état, soit la somme de 5 177,11 euros selon devis de dépôt et de remise en état,

En toutes hypothèses,

– Condamner Franfinance à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile pour cette procédure d’appel, outre le paiement des entiers dépens,

– Dire que sur le fondement de l’article R. 631-4 du Code de la consommation, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la présente décision et qu’en cas d’exécution par voie extrajudiciaire les sommes retenues par l’huissier instrumentaire, en application des dispositions de l’article 10 du décret du 8 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996, devront être supportées par Franfinance en sus de l’indemnité mise à sa charge sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

– Débouter Ic Groupe pris en la personne de son liquidateur et Franfinance de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.

À l’appui de ses prétentions, l’intimée soutient que :

– Le contrat est soumis aux dispositions impératives du code de la consommation relatives au démarchage au domicile,

– Le bon de commande n’est pas conforme aux dispositions du Code de la consommation en ce qui concerne les caractéristiques essentielles du bien, le délai d’exécution des prestations, la mention de la possibilité de recourir à un médiateur en cas de litige, la mention du point de départ du délai de rétractation,

– La police des mentions figurant dans les conditions générales de vente ne dépasse pas un millimètre de hauteur, entraînant leur ‘mise à l’écart’ des débats pour non respect de l’ancien article L. 133-2 du Code de la consommation,

– L’installation ne respecte pas les critères de l’intégration au bâti exigé par Edf puisqu’ils sont seulement posés sur les toits et ne remplissent pas une fonction d’étanchéité, de sorte que Mme [N] n’a pas pu conclure de contrat avec Edf alors qu’il s’agit d’une prestation à la charge de la société Immo confort,

– Elle ne peut ni revendre ni consommer l’électricité produite, le manquement du vendeur doit entraîner la résolution du contrat aux torts du vendeur,

– L’installation est en outre affectée de plusieurs malfaçons relevées lors de l’audit technique,

– Le prononcé de la nullité ou de la résolution du contrat de vente doit entraîner des restitutions réciproques,

– Le prêteur a commis une faute dans le déblocage des fonds, réalisés avant l’exécution totale des prestations promises par le vendeur, l’installation n’étant pas alors en état de fonctionner,

– Les biens et prestations ne sont pas décrits dans l’attestation de demande de financement, ce document générique ne permet donc pas au consommateur de comprendre à quoi il s’engage,

– Le prêteur, dont le préposé était le même que celui du vendeur avait nécessairement connaissance des vices du bon de commande,

– L’installation de panneaux photovoltaïque constitue des travaux de construction auxquels le plafond de 75 000 euros n’est pas applicable et relèvent donc du crédit immobilier,

– La banque n’a pas remis de fiche d’informations précontractuelles à Mme [N] ni évalué sa solvabilité à partir d’un nombre suffisant d’informations, entraînant la déchéance du droit aux intérêts,

– Le prêteur a manqué à son obligation de vigilance quant à la fiabilité de son partenaire commercial, et doit établir l’avoir formé,

– Mme [N] supporte le coût d’une installation inutile dont elle ne peut récupérer le prix en raison de la liquidation judiciaire du vendeur,

– L’article L. 312-27 du Code de la consommation rend le prêteur pleinement responsable des agissements de son intermédiaire de crédit Immo confort.

Mme [F] [J] de la Selas Alliance es qualité de liquidateur judiciaire de la société Ic Groupe et la Sas Ic Groupe n’ont pas constitué avocat. La déclaration d’appel a été régulièrement signifiée à Mme [J] le 19 août 2021 par remise à personne habilitée à la recevoir. S’agissant de la société IC Groupe, l’huissier de justice a dressé un procès-verbal de recherches infructueuses.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 30 mai 2023 et l’affaire a été examinée à l’audience du 20 juin 2023.

MOTIVATION DE LA DÉCISION

– Sur la validité du contrat de vente :

1. L’article L. 111-1 du Code de la consommation, dans sa version applicable en l’espèce, dispose que tout professionnel vendeur de biens doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service.

En vertu de l’article L. 221-8 du Code de la consommation, dans sa version applicable en l’espèce, les opérations visées à l’article L. 221-1 (contrat hors établissement) doivent faire l’objet d’un contrat comportant notamment, à peine de nullité, la désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ; les conditions d’exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d’exécution de la prestation de services ; le prix global à payer et modalités de paiement ; le délai d’exécution du service ou de livraison du bien ; la faculté de renonciation prévue à l’article L. 221-18 ainsi que les conditions d’exercice de cette faculté.

L’article L. 221-1 du Code de la consommation, dans sa version applicable en l’espèce, dispose que le contrat doit comprendre un formulaire type de rétractation dont les conditions de présentation et les mentions sont fixées par l’article R. 221-1 qui renvoie à un modèle de formulaire en annexe.

En vertu de l’annexe à l’article R. 221-1 : ‘MODÈLE DE FORMULAIRE DE RÉTRACTATION

(Veuillez compléter et renvoyer le présent formulaire uniquement si vous souhaitez vous rétracter du contrat.)

A l’attention de [le professionnel insère ici son nom, son adresse géographique et, lorsqu’ils sont disponibles, son numéro de télécopieur et son adresse électronique] :

Je/nous (*) vous notifie/notifions (*) par la présente ma/notre (*) rétractation du contrat portant sur la vente du bien (*)/pour la prestation de services (*) ci-dessous :

Commandé le (*)/reçu le (*) :

Nom du (des) consommateur(s) :

Adresse du (des) consommateur(s) :

Signature du (des) consommateur(s) (uniquement en cas de notification du présent formulaire sur papier) :

Date :

(*) Rayez la mention inutile’.

L’article L. 221-18 du Code de la consommation, dans sa version applicable à l’espèce, dispose que le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu hors établissement et que ce délai commence à courir à compter du jour de la conclusion du contrat pour les contrats de prestation de service ou de la réception du bien par le consommateur pour les contrats de vente de bien.

Dans le bon de commande signé le 24 mai 2017 par Mme [M] [N] avec la société Immo confort, il est indiqué :

‘Photovoltaïque :

le kit comprend :

– panneaux photovoltaïque (300 Wc) Soluxtec ou puissance équivalente,

– coffret AC/DC,

– onduleur (Schneider ou équivalent),

– étanchéité GSE ou équivalent agréé CEIAB,

– câbles, connectiques,

– raccordement à la charge de Immo confort,

– obtention du contrat de rachat de l’électricité produite,

– frais et démarches administratives au raccordement Enedis frais et démarches pour l’obtention du consuel.

– Revente totale : vous vendez l’intégralité de votre production photovoltaïque à Edf pour bénéficier d’un revenu.

– nombre de panneaux : 10, puissance Wc 3000,

– montant toutes taxes comprises : 14 000 euros.

À la charge de Immo confort : frais et démarches administratives au raccordement Enedis frais et démarches pour l’obtention du consuel ‘.

‘chauffe-eau thermodynamique : (avec les logos Thaleos et Thermor), 270 litres, montant toutes taxes comprises 6000 euros’.

‘Autres produits : isolation sous toiture, R6 ACTIS, montant total : 1 100 euros toutes taxes comprises’.

‘Forfait pose : 1800 euros toutes taxes comprises; vente à crédit auprès de Franfinance, date prévue d’installation : de 2 à 8 semaines’.

‘Montant hors tva : 20 818,81 euros, tva de 10 %; montant toutes taxes comprises : 22 900 euros’.

En p. 4, au dos des conditions générales de vente figure le bon de rétractation détachable qui indique :

‘Annulation de commande (articles L.121-17 à L.121-21 du Code de la consommation).

Conditions d’utilisation du bon de rétractation : Compléter et signer ce formulaire. Utiliser l’adresse figurant ci-dessous. L’envoyer par lettre recommandé avec accusé de réception au plus tard de quatorzième jour à partir de la commande à Immo confort – [Adresse 3].

Je, (nous), soussigné(s) … déclare annuler la commande ci-après :… nature de la marchandise ou du service commandé….; date de la commande….; numéro de bon de commande….; nom du technicien …. ; nom du client….; adresse….’.

La taille et le poids des panneaux ainsi que leurs performances en terme de rendement n’ont pas à être précisées. En effet, la loi exige que le contrat mentionne les caractéristiques essentielles du bien.

Le prix n’a pas à être détaillé pour chaque composant et l’indication d’un prix global de l’installation est possible, la comparaison du prix de cette installation avec la concurrence n’en étant nullement altérée.

Toutefois, les caractéristiques essentielles du bien et du service doivent être détaillées ce qui n’est pas le cas en l’espèce dès lors que le descriptif du kit photovoltaïque commandé est succinct, sa marque est incertaine, puisqu’il indiqué ‘Soluxtec ou puissance équivalente’, la durée des travaux et leur date d’achèvement est imprécise puisqu’il est indiqué ‘date prévue d’installation : de 2 à 8 semaines’, sans que le début de délai ne soit connu. En outre, ce délai ne concerne que la pose des biens commandés mais celui des démarches pour le raccordement ne sont pas précisées.

En outre, le formulaire de rétractation n’indique pas la nécessité de dater et de signer ledit formulaire.

Si le droit de rétractation peut être exercé par le consommateur par un autre moyen que via le formulaire fourni par le professionnel, ledit formulaire ne doit pas moins être conforme aux dispositions d’ordre public du code de la consommation, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

Le contrat de vente méconnaît donc les dispositions du Code de la consommation en raison des imprécisions sur les caractéristiques essentielles du bien, du délai de livraison et d’exécution des prestations et de l’irrégularité dans la présentation du bordereau de rétractation.

Il s’agit d’irrégularités de nature à justifier la nullité du contrat.

Dans ces conditions, au regard des irrégularités présentées par le bon de commande, il y a lieu de prononcer la nullité du contrat de vente conclu entre la société Immo confort et Mme [N].

Le jugement rendu le 5 juillet 2021 par le Tribunal judiciaire de Saint Gaudens sera, sur ce point, confirmé.

– Sur la nullité du contrat de prêt :

2. Lors de l’annulation d’un contrat de vente, le vendeur doit restituer à l’acheteur le prix perçu et l’acheteur doit lui restituer le bien. Toutefois, en l’espèce, le vendeur a été placé en liquidation judiciaire et Mme [N] n’a pas justifié avoir déclaré sa créance au passif de la procédure collective. Le premier juge a donc considéré sa demande irrecevable. La cour n’est pas saisie d’une demande de Mme [N] sur ce point.

La Sa Franfinance sollicite l’infirmation totale du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Saint Gaudens mais ne présente pas de moyen à l’appui d’une demande de condamnation du vendeur à l’égard de Mme [N] outre qu’il n’a pas d’intérêt pour présenter une telle demande.

En application du principe de l’interdépendance des contrats posée par l’article L. 312-55 du Code de la consommation dans sa version applicable à l’espèce, le contrat de financement accessoire est annulé de plein droit lorsque le contrat principal en vue duquel il a été conclu est annulé.

En conséquence, il y a lieu de prononcer la nullité du contrat de crédit affecté conclu le 24 mai 2017 entre la Sa Franfinance et Mme [N].

Le jugement dont appel sera confirmé sur ce point.

3. Lors de l’annulation d’un contrat de prêt, le prêteur doit restituer à l’emprunteur les frais payés et l’emprunteur lui rembourser le capital prêté, peu important que le capital ait été versé directement au vendeur par le prêteur.

Mme [N] s’oppose à la restitution du capital, invoquant des fautes de la Sa Franfinance.

Le devoir de non-immixtion du prêteur de deniers qui lui interdit de contrôler l’opportunité du contrat principal conclu par l’emprunteur ainsi que la rentabilité de l’opération projetée est limité par le devoir de vigilance qui lui incombe dans l’exécution de son obligation de mise à disposition des fonds prêtés.

Le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute (Civ. 1, 31 août 2022, n°20-18.102).

En l’espèce, le contrat de vente était affecté de plusieurs irrégularités l’exposant à la nullité relative, irrégularités que le prêteur aurait dû déceler. La Sa Franfinance qui n’a pas procédé aux vérifications nécessaires et n’a pas informé Mme [N] à ce titre avant de débloquer les fonds a commis une faute.

La Sa Franfinance soutient que les obligations de l’emprunteur prennent effet à compter du début de la livraison s’agissant d’un contrat de prestation de service à exécution successive, et prétend qu’elle n’aurait pas commis de faute en débloquant les fonds alors que toutes les prestations n’avaient pas été accomplies par le vendeur.

L’article L. 312-48 du Code de la consommation dispose que ‘Les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation.

En cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, les obligations prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d’interruption de celle-ci’.

Le contrat en l’espèce est complexe en ce qu’il met à la charge de la société Immo confort l’exécution de plusieurs obligations, mêlant fourniture de biens et prestations de service.

Il ne s’agit pas d’un contrat à exécution successive au sens de l’article susvisé qui suppose que l’exécution d’une obligation se répète ou s’échelonne dans le temps.

La banque ne peut donc légitimement débloquer la totalité des fonds qu’à compter de la livraison des biens et de l’exécution de toutes les prestations promises.

Sur le bon de commande signé le 24 mai 2017, il est indiqué que dans le kit photovoltaïque, sont compris, à la charge de la société Immo confort le raccordement à Enedis, les démarches pour l’obtention du consuel et l’obtention du contrat de rachat de l’électricité produite. L’accomplissement de ces prestations est donc effectivement mise à la charge du vendeur par le contrat, en échange du paiement du prix stipulé, contrairement à ce que soutient la Sa Franfinance.

La société Immo confort a édité une facture le 17 juin 2017 détaillant la réalisation de la prestation ‘kit solaire photovoltaïque’, ‘isolation toiture par extérieur’, ‘ballon aeromax’, ‘main d’oeuvre’.

Le 17 juin 2017, Mme [N] a signé une ‘attestation de livraison – demande de financement’ qui comporte les clauses suivantes :

l’acheteur ‘a réceptionné sans restriction ni réserve le bien ou la prestation, objet du financement, conforme au bon de commande, (…) et autorise ainsi Franfinance à régler le vendeur en une seule fois’.

Par courriel du 26 juin 2017, la Sa Franfinance a indiqué par courriel à Mme [N] que la société Immo confort l’a informée de la livraison et de l’installation de la commande. Le prêteur a alors demandé à Mme [N] de l’autoriser à régler le vendeur en confirmant avoir livraison du bien, en parfait état, conformément au bon de commande et en certifiant que son installation n’appelle aucune restriction ni réserve.

Par courriel du 27 juin 2017, Mme [N] a donné son ‘bon pour accord’ à la société Franfinance qui a versé les fonds au vendeur.

La Sa Franfinance soutient que Mme [N] savait que certaines démarches étaient encore nécessaires à la mise en service de l’installation mais aurait expressément demandé à voir débloquer les fonds au profit du vendeur.

Toutefois, l’attestation de livraison est insuffisamment précise sur les prestations considérées comme achevées pour décharger la banque de son obligation, avant de verser les fonds au vendeur, de réaliser une vérification élémentaire et à tout le moins de contacter Mme [N] pour s’assurer que toutes les prestations promises avaient bien été exécutées.

En outre, la facture éditée par le vendeur n’évoque nullement la réalisation du raccordement à Enedis, l’obtention du consuel et l’obtention du contrat de rachat d’électricité.

Il ressort des pièces du dossier que, le 7 juillet 2017, le maire de la commune de [Localité 7] a pris un arrêté de non opposition à la déclaration préalable faite par la société Immo confort sous réserve du respect des règles de construction parasismique; que si le 22 juin 2017, une attestation de conformité a été éditée par la Sa Immo confort, puis visée le 23 juin 2017 par le Conseil national pour la sécurité des usagers de l’électricité (consuel), le raccordement au réseau Enedis ou Edf n’était pas réalisé à la date de déblocage des fonds et ne l’est toujours pas à ce jour.

En effet, par courrier du 14 février 2019, la Sa Edf a indiqué à Mme [N] que :

‘- les exemplaires de l’attestation sur l’honneur de conformité du producteur et de l’installateur ne sont pas conformes car les caractéristiques des panneaux ne sont pas renseignés ou incomplets, la date de signature de l’installateur est absente, la date d’achèvement est postérieure à la date de signature de l’installateur, le nom de l’installateur et/ou son adresse sont absents, le numéro de contrat partie attestation installateur est absent, le nom et la qualité du signataire et/ou le cachet de l’entreprise est absent, la signature de l’installateur est absente,

– les exemplaires du contrat ne sont pas conformes car le contrat comporte une annotation ou une rature’.

Un courriel de la société Edf du 29 avril 2023 permet d’établir que Mme [N] n’a jamais été titulaire d’un contrat de revente d’électricité conclu avec Edf.

L’organisme de crédit, soumis à un devoir de vigilance à l’égard de ses clients lui imposant de s’assurer que les démarches indispensables à l’efficience du contrat principal ont été accomplies et que la livraison effective induisait non seulement la pose des panneaux photovoltaïques, mais encore les démarches à accomplir en vue du raccordement au réseau Erdf, ne s’est assurée ni de l’exécution complète du contrat principal qu’elle devait financer ni de la mise en service du dispositif, et a ainsi, en libérant la totalité des fonds entre les mains de l’installateur, commis une faute.

La faute de la Sa Franfinance ayant été retenue de ces chefs, il n’est pas nécessaire d’analyser les autres fautes alléguées par Mme [N].

Cependant, toute faute n’entraîne de sanction que lorsqu’elle a causé un préjudice que les juges doivent apprécier.

Le préjudice réparable dans un tel cas consiste dans le fait, pour les acquéreurs, de devoir payer le prix d’une installation qui n’assume pas sa fonction et sans perspective pour les consommateurs de pouvoir se retourner contre le fournisseur en liquidation judiciaire.

À ce titre, la société Immo confort a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 13 décembre 2018 rendu par le tribunal de commerce de Nanterre.

En outre, Mme [N] a bénéficié d’une installation qui n’assume pas sa fonction. En effet, elle établit, grâce au rapport de visite réalisé par l’entreprise Autant solaire le 8 juillet 2019 – rapport opposable à la Sa Franfinance puisqu’il est soumis à un débat contradictoire dans la présente instance – et au procès-verbal de constat dressé par huissier le 2 mai 2023, que l’installation photovoltaïque est affectée de multiples défauts et non-conformités qui empêchent Mme [N] d’utiliser les panneaux. Egalement, il résulte du courrier du 14 février 2019 envoyé par la société Edf que Mme [N] n’a pu être bénéficiaire d’un contrat de rachat d’électricité.

Il ressort de ce qui précède que si la banque n’avait pas débloqué les fonds, conformément à ses obligations, avant que toutes les prestations de la société Immo confort furent effectuées, il n’y aurait eu aucun versement au vendeur puisque le raccordement au réseau n’a pas été réalisé et aucun contrat de rachat d’électricité signé avec Edf.

Mme [N] a été exposée, du fait des manquements de la Sa Franfinance, à l’impossibilité d’obtenir la restitution des fonds versés au vendeur et à l’existence d’une installation photovoltaïque inutile.

Mme [N] sollicite également la dépose du ballon thermodynamique, toutefois elle n’allègue nullement ni ne démontre que celui-ci ne fonctionnerait pas. Or, la perte du droit à restitution de la banque se limite au préjudice de l’acheteur qui découle de l’inutilité de l’installation financée. Ni le ballon thermodynamique, ni l’isolation dont Mme [N] ne fait cas, ne peuvent être ainsi qualifiés.

De sorte qu’il convient de priver la Sa Franfinance de la seule portion du capital prêté correspondant au kit photovoltaïque et à 50% du coût de la pose des produits, soit un total toutes taxes comprises de 14 000 + 900 euros = 14 900 euros.

Ainsi, compte tenu du principe des restitutions réciproques découlant de la nullité du contrat de crédit, la Sa Franfinance est tenue de restituer à Mme [N] les sommes qu’elle a perçues au titre des intérêts et frais découlant du prêt.

Compte tenu de la privation du droit à restitution du capital prêté à hauteur de 14 900 euros, Mme [N] sera condamnée à restituer à la Sa Franfinance la seule somme de 22 900 – 14 900 = 8 000 euros.

Il y a lieu d’ordonner la compensation entre la dette de restitution des frais et intérêts perçus par la Sa Franfinance et la dette de Mme [N] de restitution de la somme de 8 000 euros au titre du capital prêté.

– Sur la demande de prise en charge du coût des travaux de dépose des panneaux et de remise en état de la toiture :

5. Mme [N] demande également à la cour de condamner la Sa Franfinance d’infirmer le jugement en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de prise en charge du devis de dépose et remise en état par la Sa Franfinance et l’a condamnée à prendre en charge le coût des travaux de remise en état, soit la somme de 5 177,11 euros.

La Sa Franfinance soutient que la remise des parties dans leur état antérieur n’a d’effet qu’entre les parties au contrat. Toutefois, le manque de vigilance de la banque lors de la conclusion du contrat de prêt a rendu possible la conclusion du contrat de vente et l’installation du kit photovoltaïque. La banque doit donc être tenue des suites nécessaires de l’annulation du contrat de vente, comprenant le coût de la dépose et la remise en état de la toiture.

La demande présentée par Mme [N] à ce titre sera accueillie à hauteur de 5.177,11 euros toutes taxes comprises, le devis de la société Pyretherm ne faisant aucune référence à la dépose et au stockage du ballon thermodynamique.

La Sa Franfinance doit donc être condamnée à lui verser la somme de 5 177,11 euros. Le jugement attaqué sera infirmé sur ce point.

– Sur l’action en responsabilité dirigée par la Sa Franfinance à l’encontre de la Sas Ic Groupe :

6. La Sa Franfinance demande à la cour de condamner la société IC groupe au paiement de la somme de 6 412,40 euros à titre de dommages et intérêts, et en conséquence

fixer au passif de la société IC groupe cette somme, et condamner la société IC groupe à garantir la restitution du capital emprunté par Madame [M] [N].

Le Tribunal judiciaire de Saint Gaudens avait, en première instance déclaré ces demandes irrecevables au motif que ces actions devaient s’analyser en un appel en garantie du vendeur nécessitant une déclaration des créances au passif de la procédure collective ouverte à l’encontre de la Sas Ic Groupe mais qu’une telle déclaration n’était pas établie.

Selon les dispositions de l’article L. 622-21 du Code de commerce, le jugement d’ouverture de la procédure collective interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n’est pas mentionnée au I de l’article L. 622-17 et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent.

Par jugement du 13 décembre 2018 rendu par le Tribunal de commerce de Nanterre, la Sas IC Groupe venant aux droits de la société Immo confort, a été placée en liquidation judiciaire.

Par exploit d’huissier du 31 octobre 2019, Mme [M] [N] a fait assigner la Sa Franfinance ainsi que la Sas Ic Groupe. Dans ses conclusions déposées à l’audience le 3 mai 2021, la Sa Franfinance a sollicité la condamnation de la Sas Ic Groupe à garantir la restitution du capital emprunté par [N], subsidiairement la condamner à la restitution du capital prêté outre la somme de 6 412,40 euros à titre de dommages et intérêts.

En vertu de l’article L. 622-24 du Code de commerce, à partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d’ouverture, à l’exception des salariés, adressent la déclaration de leurs créances au mandataire judiciaire dans les deux mois de la publication du jugement d’ouverture au Bodacc.

Les créances nées régulièrement après le jugement d’ouverture, autres que celles mentionnées au I de l’article L. 622-17 sont soumises aux dispositions du présent article L. 622-24 du Code de commerce et les délais courent à compter de la date d’exigibilité de la créance.

Est une créance antérieure au jugement d’ouverture la créance dont le fait générateur est antérieur au jugement d’ouverture de la procédure collective. Les créances de restitution consécutives à l’anéantissement du contrat et celles en indemnisation résultant de l’anéantissement du contrat naissent de l’évènement donnant lieu à restitution, en l’espèce l’annulation du contrat de vente et du contrat de crédit par le jugement du 5 juillet 2021.

La créance de restitution et d’indemnisation, ou de garantie, générée par l’anéantissement du contrat de vente en l’espèce, bien que postérieure au jugement d’ouverture, n’est toutefois pas privilégiée au sens de l’article L 622-17 du Code de commerce et devait faire l’objet d’une déclaration au passif de la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l’encontre de la Sas Ic Groupe.

En vertu de l’article L. 622-26 du Code de commerce, à défaut de déclaration dans les délais prévus à l’article L. 622-24, les créanciers ne sont pas admis dans les répartitions et les dividendes à moins que le juge-commissaire ne les relève de leur forclusion. Les créances et les sûretés non déclarées régulièrement dans ces délais sont inopposables au débiteur.

En l’espèce, la Sa Franfinance produit aux débats un courrier daté du 21 février 2019 à destination de Maître [F] [J], liquidateur judiciaire de la Sas Ic Groupe qui indique qu’en vertu de litiges opposant des emprunteurs à la Sas Ic Groupe, elle déclare une créance de ‘4 798 200 euros’. Toutefois, en vertu de l’article L. 622-25 du Code de commerce, le déclarant est tenu de préciser le montant de la créance et sa nature et de joindre les documents justificatifs de sa créance.

Il n’est nullement établi que ledit document inclut la créance dont se prévaut aujourd’hui la Sa Franfinance devant la cour à l’encontre de la Sas Ic Groupe compte tenu de l’imprécision du courrier, et son envoi et sa réception par le liquidateur judiciaire n’est pas démontré non plus.

La Sa Franfinance produit aux débats une ordonnance rendue par le juge-commissaire le 6 mars 2020 qui fait référence à une créance de 35 833,60 euros déclarée le 20 février 2019 et à l’existence d’une instance pendante devant le Tribunal d’instance de Tourcoing relativement à cette créance. Ce document ne fait donc nullement référence aux créances dont se prévaut la Sa Franfinance devant la cour.

Faute d’établir avoir régulièrement déclaré ses créances à la procédure collective de la Sas Ic groupe, son action en constatation de dettes de la Sas Ic groupe à son encontre et sa demande d’inscription corrélative au passif de la procédure collective sont donc inopposables.

Le jugement rendu le 5 juillet 2021 par le Tribunal judiciaire de Saint Gaudens qui a déclaré irrecevables les demandes de condamnation formées par la Sa Franfinance à l’endroit de la Sas Ic Groupe sera infirmé sur ce point et lesdites demandes seront jugées inopposables à la procédure de liquidation judiciaire de la société Ic Groupe

– Sur les dépens et frais irrépétibles :

Dès lors que les demandes d’annulation des contrats de vente et de crédit, et la perte partielle du droit à restitution du capital de la Sa Franfinance ont été accueillies, il y a lieu de confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Saint Gaudens le 5 juillet 2021 en ce qu’il a condamné la Sa Franfinance aux dépens de première instance et à verser à Mme [N] la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Faisant application des dispositions de l’article R. 631-4 du Code de la consommation, le jugement sera confirmé en ce qu’il a également condamné la Sa Franfinance à prendre en charge les émoluments prévus à l’article A. 444-32 du Code de commerce.

En revanche, dans la mesure où la cour a fait partiellement droit aux demandes du prêteur, il y a lieu de partager les dépens d’appel par moitié entre Mme [N] et la Sa Franfinance.

L’équité commande de laisser à chaque partie la charge des frais irrépétibles qu’elle a exposé en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant, dans la limite de sa saisine, publiquement, par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 5 juillet 2021 par le Tribunal judiciaire de Saint Gaudens sauf en ce qu’il a :

– rejeté la demande formée par la Sa Franfinance à l’encontre de Mme [M] [N] en restitution du capital prêté,

– condamné la Sa Franfinance à verser à Mme [M] [N] la somme de 29 312,40 euros en remboursement des échéances de l’emprunt déjà réglées,

– déclaré irrecevables les demandes de condamnation de la Sas Ic Groupe prise en la personne de son représentant légal,

– débouté Mme [M] [N] de sa demande de condamnation de la Sa Franfinance à avoir à lui verser la somme de 5177,11 au titre des frais de dépose et de remise en état.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la Sa Franfinance à restituer à Mme [M] [N] la totalité des frais et intérêts qu’elle a perçues en vertu du contrat de crédit.

Limite à la somme de 8 000 euros le montant de la restitution par Mme [M] [N] à la Sa Franfinance du capital prêté.

Condamne Mme [M] [N] à restituer à la Sa Franfinance le capital qui lui a été prêté à hauteur de 8 000 euros.

Ordonne la compensation entre ces dettes réciproques.

Condamne la Sa Franfinance à verser à Mme [M] [N] la somme de 5 177,11 euros au titre des frais de dépose et de remise en état de la toiture.

Déclare inopposable à Maître [F] [J] ès qualités de mandataire liquidateur de la Sas Ic Groupe les demandes de condamnation formées par la Sa Frafinance à l’égard de cette dernière.

Partage les dépens de l’appel par moitié entre la Sa Frafinance et Mme [M] [N].

Rejette les demandes formées au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

Le Greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX

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