Droit de rétractation : Décision du 29 septembre 2022 Cour d’appel de Douai RG n° 20/02327

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Droit de rétractation : Décision du 29 septembre 2022 Cour d’appel de Douai RG n° 20/02327

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 29/09/2022

N° de MINUTE : 22/809

N° RG 20/02327 – N° Portalis DBVT-V-B7E-TBVC

Jugement (N° 19/002014) rendu le 11 mai 2020 par le juge des contentieux de la protection de Lille

APPELANTE

Sa Bnp Paribas Personal Finance agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représentée par Me Francis Deffrennes, avocat au barreau de Lille

INTIMÉS

Madame [L] [I]

née le [Date naissance 4] 1956 à [Localité 5] ([Localité 5]) – de nationalité française

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Guillaume Ghestem, avocat au barreau de Lille et Me Ariane Vennin, avocat au barreau de Paris

Maître Alexandre Herbaut agissant ès qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la société F-Energie

de nationalité française

[Adresse 3]

[Localité 8]

Auquel la déclaration d’appel a été signifiée à domicile par acte du 2 septembre 2020, n’a pas constitué avocat

DÉBATS à l’audience publique du 25 mai 2022 tenue par Yves Benhamou magistrat chargé d’instruire le dossier qui, après rapport oral de l’affaire, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Yves Benhamou, président de chambre

Catherine Convain, conseiller

Catherine Ménegaire, conseiller

ARRÊT RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 29 septembre 2022 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLOTURE du 12 mai 2022

– FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:

Dans le cadre d’un démarchage à domicile le 8 juin 2016, Mme [L] [I] a conclu avec la société F-ENERGIE un contrat afférent à une prestation relative à l’installation d’un système photovoltaïque, d’une isolation des fenêtres et de la rénovation de la toiture pour un montant TTC de 24.500 euros.

Pour financer ces installations, selon offre préalable acceptée en date du 8 juin 2016, Mme [I] s’est vu consentir par la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE exerçant alors sous l’enseigne « Cetelem », un crédit d’un montant de 24 500 euros TTC remboursable en 144 mensualités, précédées d’un différé de paiement de 11 mois, et incluant les intérêts au taux nominal annuel de 5,65 %.

Dans le cadre d’un démarchage à domicile, le 5 juillet 2017, Mme [L] [I] a conclu avec la société IMMO CONFORT un contrat afférent à une prestation relative à l’installation d’un système photovoltaïque, d’une unité de gestion et d’un chauffe-eau thermodynamique pour un montant de 24 500 euros TTC.

Pour financer cette installation, selon offre préalable acceptée en date du 5 juillet 2017, Mme [L] [I] s’est vu consentir par la société FRANFINANCE un crédit d’un montant de 24 500 euros remboursable en 120 mensualités, précédées d’un différé de paiement de 5 mois, incluant les intérêts au taux nominal annuel de 4,70 %.

Par acte d’huissier en date du 24 octobre 2018, la société FRANFINANCE a fait assigner en justice Mme [L] [I] aux fins de la voir condamner sous le bénéfice de l’exécution provisoire, à lui payer la somme de 28 038,26 euros selon décompte arrêté au 27 août 2018 outre les intérêts postérieurs au taux de 4,70 %, la somme de 800 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.

Par actes d’huissier des 25 et 26 juillet 2019, Mme [L] [I] a fait assigner en intervention forcée la SELARL [B] prise en la personne de Me Alexandre HERBAUT es qualité de liquidateur judiciaire de la société F-ENERGIE, la société BNP Paribas Personal Finance, Maître Véronique Bécheret es qualité de liquidateur judiciaire de la société IC Groupe exerçant sous l’enseigne « Immo Confort» aux fins de voir prononcer, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, à titre principal la nullité des deux contrats de vente et des deux contrats de crédit affecté, et à titre subsidiaire leur résolution, de condamner les sociétés Franfinance et BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à lui restituer les sommes versées par elle, de condamner solidairement les sociétés FRANFINANCE et BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à lui payer la somme de 2 800 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.

Par acte d’huissier en date du 31 janvier 2020, Mme [L] [I] a fait assigner en intervention forcée Maître BECHERET es qualité de liquidateur judiciaire de la société IC GROUPE exerçant sous l’enseigne ‘IMMO CONFORT’.

Par jugement réputé contradictoire en date du 11 mai 2020, le tribunal judiciaire de Lille, a :

– prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 8 juin 2016 entre Mme [L] [I] et la société FORCE ENERGIE ;

– constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE et Mme [L] [I] en date du 8 juin 2016,

– condamné la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à restituer à Mme [L] [I] l’ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du crédit affecté conclu le 8 juin 2016,

– prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 5 juillet 2017 entre Mme [L] [I] et la société IMMO CONFORT,

– constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre la société FRANFINANCE et Mme [L] [I] en date du 5 juillet 2017,

– condamné la société FRANFINANCE à restituer a Mme [L] [I] l’ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du crédit affecté conclu le 5 juillet 2017,

– condamné Maître Becheret es qualité de liquidateur judiciaire de la société IC Groupe a payer a la société FRANFINANCE la somme de 24 500 euros,

– débouté Mme [L] [I] du surplus de ses demandes,

– débouté la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de ses demandes,

– débouté la société FRANFINANCE du surplus de ses demandes,

– condamné in solidum les sociétés FRANFINANCE et BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à Mme [L] [I] la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de

procédure civile,

– condamné in solidum les sociétés FRANFINANCE et BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE aux dépens.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 29 juin 2020, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a interjeté appel de cette décision en ce qu’elle a:

‘ prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 8 juin 2016 entre Mme [L] [I] et la société FORCE ENERGIE,

 » constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE et Mme [L] [I] en

date du 8 juin 2016,

 » condamné la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à restituer à Mme [L] [I] l’ensemble des sommes versées à quelques titres que ce soit en exécution du crédit affecté conclu le 8 juin 2016,

 » débouté la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de ses demandes,

 » condamné la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à Mme [L] [I] la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure outre les frais et dépens de première instance.

Vu les dernières conclusions de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE en date du 27 janvier 2021, et tendant à voir :

– Recevoir la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE en son appel, la déclarer bien fondée.

– Réformer le jugement intervenu devant le Juge des contentieux de la protection près le Tribunal Judiciaire de LILLE en date du 11 mai 2020 en toutes ses dispositions.

ET STATUANT A NOUVEAU

Vu l’article 122 du Code de Procédure Civile,

Vu les articles L.622-21 et L.622-22 du Code de Commerce,

Vu les anciens articles L.311-32 et L.311-33 du Code de la Consommation dans leur version applicable en la cause,

Vu les anciens articles 1134, 1142, 1147 et 1184 du Code Civil, dans leur rédaction applicable en la cause,

Vu les anciens articles 1108 et suivants du Code Civil, dans leur rédaction applicable en la cause,

Vu l’ancien article 1338 du Code Civil dans sa version applicable en la cause,

Vu l’article 1315 du Code Civil, devenu l’article 1353 du même Code,

Vu l’article 9 du Code de Procédure Civile,

Vu la jurisprudence citée,

Vu les pièces versées aux débats,

A titre principal,

– Constater que Madame [L] [I] ne justifie nullement de sa déclaration de créance alors qu’elle a engagé son action postérieurement au jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire de la société FORCE ENERGIE.

– Par conséquent, dire et juger que Madame [L] [I] est irrecevable à agir en nullité du contrat principal conclu avec la société FORCE ENERGIE et, en conséquence, à agir en nullité du contrat de crédit affecté qui lui a été consenti par la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE. – Condamner Madame [L] [I] à payer à la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme en principal de 27.429,71 euros se décomposant de la façon suivante :

‘ Mensualités échues impayées 1.617,84 euros

‘ Capital restant dû 24.193,81 euros

‘ Indemnité légale de 8 % 1.618,06 euros

‘ Intérêts de retard au taux contractuel de 5,65 % l’an courus

et à courir à compter du 08/03/2019 et jusqu’au jour du plus complet règlement MEMOIRE

A titre subsidiaire,

– Débouter Madame [L] [I] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions telles que dirigées à l’encontre de la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE.

– Dire et juger que le bon de commande régularisé le 08 juin 2016 par Madame [L] [I] respecte les dispositions des anciens articles L.121-17 et L.121-18-1 du Code de la Consommation (dans leur version applicable en la cause).

– A défaut, constater, dire et juger que Madame [L] [I] amplement manifesté leur volonté de renoncer à invoquer la nullité du contrat au titre des prétendus vices l’affectant sur le fondement des articles L.121-17 et L.121-18-1 du Code de la Consommation et ce, en toute connaissance des dispositions applicables.

– En conséquence, condamner Madame [L] [I] à payer à la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme en principal de 27.429,71 euros se décomposant de la façon suivante :

‘ Mensualités échues impayées 1.617,84 euros

‘ Capital restant dû 24.193,81 euros

‘ Indemnité légale de 8 % 1.618,06 euros

‘ Intérêts de retard au taux contractuel de 5,65 % l’an courus

et à courir à compter du 08/03/2019 et jusqu’au jour du plus complet règlement MEMOIRE

A titre très subsidiaire, si par extraordinaire la Cour devait confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat principal de vente conclu le 08 juin 2016 entre la société FORCE ENERGIE et Madame [I] et de manière subséquente constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté consenti à Madame [L] [I] par la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE selon offre préalable acceptée le 08 juin 2016,

– Constater, dire et juger que la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE n’a commis aucune faute en procédant à la délivrance des fonds ni dans l’octroi du crédit.

– Par conséquent, condamner Madame [L] [I] à rembourser à la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE le montant du capital prêté au titre du contrat de crédit affecté litigieux, déduction faite des échéances acquittées par l’emprunteur.

A titre infiniment subsidiaire, si par impossible la Cour considérait à l’instar du premier Magistrat que la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a commis une faute dans le déblocage de fonds,

– Dire et juger que le préjudice subi du fait de la perte de chance de ne pas contracter le contrat de crédit affecté litigieux ne peut être égal au montant de la créance de la banque.

– Dire et juger que Madame [L] [I] conservera l’installation des panneaux solaires photovoltaïques qui ont été livrés et installés à son domicile par la société FORCE ENERGIE (puisque ladite société est en liquidation judiciaire de sorte qu’elle ne se présentera donc jamais au domicile de Madame [I] pour récupérer le matériel installé à son domicile), et que l’installation photovoltaïque fonctionne parfaitement depuis lors puisque ladite installation a bien été raccordée au réseau ERDF-ENEDIS, puis mise en service et puisque Madame [L] [I] a signé avec EDF un contrat de rachat de l’électricité produite par son installation photovoltaïque de sorte que Madame [I] perçoit désormais chaque année des revenus énergétiques grâce à l’installation photovoltaïque querellée.

– Par conséquent, dire et juger que la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ne saurait être privée de sa créance de restitution, compte tenu de l’absence de préjudice avéré pour Madame [L] [I].

– Par conséquent, condamner Madame [L] [I] à rembourser à la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE le montant du capital prêté au titre du contrat de crédit affecté litigieux, déduction faite des échéances acquittées par l’emprunteur.

– A défaut, réduire à de biens plus justes proportions le préjudice subi par Madame [I] et condamner Madame [L] [I] à restituer à la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE une fraction du capital prêté, fraction qui ne saurait être inférieure aux deux tiers du capital prêté au titre du crédit affecté litigieux.

En tout état de cause,

– Condamner Madame [L] [I] à payer à la S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 1.500,00 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

– Condamner Madame [L] [I] aux entiers frais et dépens, y compris ceux d’appel dont distraction au profit de Maître Francis DEFFRENNES, Avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile.

Vu les dernières conclusions de Mme [L] [I] en date du 5 novembre 2020 et tendant à voir :

‘ JUGER infondé l’appel formé par la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à l’encontre du jugement du Juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire de LILLE du 11 mai 2020.

‘ DEBOUTER la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l’encontre des intérêts de Madame [I],

‘ FAIRE DROIT aux demandes, fins et conclusions de Madame [I], soit :

In limine litis:

‘ CONFIRMER le jugement du Juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire de LILLE du 11 mai 2020 en ce qu’il a déclaré parfaitement recevables l’ensemble des demandes, fins et conclusions de Madame [I],

Sur le fond:

‘ CONFIRMER le jugement du Juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire de LILLE du 11 mai 2020 en ce qu’il a prononcé l’annulation du contrat conclu entre Madame [I] et la société FORCE ENERGIE le 8 juin 2016,

‘ CONFIRMER le jugement du Juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire de LILLE du 11 mai 2020 en ce qu’il a prononcé l’annulation de plein droit du contrat de crédit affecté conclu entre Madame [I] et la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE le 8 juin 2016, annulation qui a pour effet de priver la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de son droit aux intérêts dudit contrat,

‘ DONNER ACTE à Madame [I] de ce qu’à la simple demande de la SELARL [B], es-qualité de liquidateur de la société FORCE ENERGIE, elle procédera à ses frais à la désinstallation des biens installés à son domicile en exécution du bon de commande annulé, et les lui livrera également à ses frais,

‘ CONFIRMER le jugement du Juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire de LILLE du 11 mai 2020 en ce qu’il a jugé que la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a commis une faute dans le déblocage des fonds,

‘ LE CONFIRMER également en ce qu’il a jugé que la faute de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la prive de son droit à restitution du capital prêté en ce qu’elle a causé à Madame [I] un préjudice équivalent à son montant,

‘ ET CONFIRMER le jugement du Juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire de LILLE en date du 11 mai 2020 en ce qu’il a condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à restituer à Madame [I] l’indu, soit le montant total des échéances du prêt affecté du 8 juin 2016 déjà remboursées,

‘ CONDAMNER la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à Madame [I] la somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, outre le paiement des entiers dépens.

Pour ce qui la concerne la SELARL [B] en la personne de Maître HERBAUT es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL FORCE ENERGIE a été assignée devant la cour par actes d’huissier respectivement en dates du 30 septembre 2020, du 10 novembre 2020 et du 1er février 2021 signifiés pour le premier à personne habilitée et pour les deux autres à personne morale. La SELARL [B] n’a pas constitué avocat ni donc conclu en cause d’appel.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures respectives.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 12 mai 2022.

– MOTIFS DE LA COUR:

SUR LA RECEVABILITÉ DES DEMANDES DE MADAME [I]:

L’article L 622-21 paragraphe I du code de commerce prévoit en substance que le jugement d’ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n’est pas mentionnée au I de l’article L 622-17 et tendant:

1° A la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent,

2° A la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent.

Par ailleurs l’article L 641-3 du même code quant à lui prévoit en substance que le jugement qui ouvre la liquidation judiciaire a les mêmes effets que ceux qui sont prévus notamment par les articles L 622-21 et L 622-22.

Dans le cas présent il est constant que la société FORCE ENERGIE a été placée en liquidation judiciaire et la SELARL [B] en la personne de Maître Alexandre HERBAUT, désignée es qualité de liquidateur judiciaire de cette société.

Toutefois force est de constater que l’action en nullité d’une vente ou visant à la résolution de la vente ne constitue aucunement une action visant à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent ni une action tendant à la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent.

Dès lors cette action n’entre nullement dans le périmètre des actions soumises au principe de l’interdiction des poursuites individuelles.

Mme [L] [I] n’avait de plus aucunement à se soumettre à l’exigence d’une déclaration de créance quand bien même cette créance serait née postérieurement au jugement d’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire.

Par suite, au regard des considérations qui précédent, il convient de confirmer le jugement querellé en ce qu’il a déclaré recevable l’action de Mme [I] qui invoque à l’encontre de la société FORCE ENERGIE la nullité du contrat principal de vente.

– SUR LA NULLITÉ DU CONTRAT PRINCIPAL DE VENTE CONCLU ENTRE MADAME [I] ET LA SOCIÉTÉ FORCE ENERGIE:

L’ancien article L121-17 du code de la consommation dans sa version résultant de la loi du 17 mars 2014 applicable au présent litige dispose :

I.-Préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;
2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’Etat ;

3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;
4° L’information sur l’obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d’un contrat de prestation de services, de distribution d’eau, de fourniture de gaz ou d’électricité et d’abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l’exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l’article L. 121-21-5 ;
5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l’article L. 121-21-8, l’information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation ;
6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l’utilisation de la technique de communication à distance, à l’existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’Etat.

II.-Si le professionnel n’a pas respecté ses obligations d’information concernant les frais supplémentaires mentionnés au I de l’article L. 113-3-1 et au 3° du I du présent article, le consommateur n’est pas tenu au paiement de ces frais.

III.-La charge de la preuve concernant le respect des obligations d’information mentionnées à la présente sous-section pèse sur le professionnel.

Par ailleurs l’ancien article L 121-18-1 alinéa 1er du même code dans sa version résultant de la loi n°2014-1545 du 20 décembre 2014 quant à lui dispose :

« Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties. Ce contrat comprend, à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I de l’article L. 121-17. »

Par ailleurs l’article L 111-1 du dit code dans sa version résultant de la loi n°2014-344 du 17 mars 2014 dispose :

«Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 113-3 et L. 113-3-1 ;
3° En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte, ainsi que, s’il y a lieu, celles relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles. La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d’Etat.

Le présent article s’applique également aux contrats portant sur la fourniture d’eau, de gaz ou d’électricité, lorsqu’ils ne sont pas conditionnés dans un volume délimité ou en quantité déterminée, ainsi que de chauffage urbain et de contenu numérique non fourni sur un support matériel. Ces contrats font également référence à la nécessité d’une consommation sobre et respectueuse de la préservation de l’environnement.»

Au cas particulier la nature complexe de l’opération contractuelle en question implique que soit précisées certaines caractéristiques essentielles, à savoir de manière distincte: le prix du matériel d’une part et celui de la main d »uvre d’autre part. Faute de telles précisions le consommateur ne sera pas en mesure de procéder ‘ comme il peut légitimement en ressentir la nécessité – à une comparaison entre diverses offres de même nature proposées sur le marché.

Dans le cas présent le bon de commande du 8 juin 2016 concerne trois prestations distinctes, à savoir: l’installation de 12 panneaux photovoltaïques, l’installation d’une isolation des fenêtres, et la rénovation de la toiture. Or ce bon de commande n’indique nullement le coût unitaire de chacune de ces trois prestations fournies et se borne à mentionner le coût global de l’ensemble de ces prestations. En outre il ne précise nullement la ventilation entre le coût des matériaux et le coût de la main d’oeuvre.

Il ressort des observations qui précédent que le consommateur en question n’a pas été suffisamment informé sur la prestation qu’il entendait obtenir dans le cadre du contrat en cause. Il est ainsi incontestable que le bon de commande litigieux ne satisfait pas aux exigences protectrices du consommateur résultant des dispositions précitées du code de la consommation précités sans qu’il soit besoin d’apprécier si ces éléments ont été déterminants du consentement s’agissant d’une nullité d’ordre public.

En outre il ne résulte d’aucun élément objectif du dossier que Mme [I] ait eu connaissance des irrégularités affectant le bon de commande, son acceptation de la livraison n’ayant pas eu pu avoir pour effet de couvrir ces irrégularités ainsi que la nullité qui en découle.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement querellé en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 8 juin 2016 entre Mme [L] [I] et la société FORCE ENERGIE.

– SUR LA NULLITÉ DU CONTRAT DE CRÉDIT:

En application des dispositions de l’ancien article L 311-32 du code de la consommation applicable au présent litige, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui même judiciairement résolu ou annulé.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement querellé en ce qu’il a constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE et Mme [L] [I] le 8 juin 2016.

– SUR LES CONSÉQUENCES DE LA NULLITÉ DU CONTRAT PRINCIPAL ET DU CONTRAT DE CRÉDIT AFFECTÉ:

Il résulte d’une jurisprudence bien établie que commet une faute la banque qui verse les fonds prêtés au vendeur de panneaux photovoltaïques sans avoir dûment et préalablement vérifié la conformité du bon de commande aux dispositions du code de la consommation. La banque commet également une faute en ne s’assurant pas au moyen de toutes démarche utiles, de la bonne exécution des travaux par le vendeur des panneaux photovoltaïques conformément à ses engagements contractuels avant de débloquer les fonds prêtés.

Au cas particulier l’objectivité commande de constater que la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a commis une faute en ne vérifiant pas la conformité du bon de commande litigieux aux dispositions du code de la consommation.

Par ailleurs force est de constater que la banque n’a pas vérifié la bonne exécution des travaux. Or, la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a débloqué les fonds sans vérifier de manière consciencieuse et effective que les travaux avaient été dûment effectués. S’agissant du procès verbal de réception du 25 juin 2016 rédigé en termes pour le moins sommaires, il ne décrit pas les éléments installés et ne fait nullement état d’une fin de travaux Ainsi selon toute vraisemblance les fonds ont été débloqués alors même que les travaux n’étaient pas achevés. Mme [I] du fait de ces fautes de la banque a subi un incontestable préjudice qui ne peut être réduit à la seule chance qu’elle a ainsi perdu de ne pas contracter.

Il convient de plus de mettre en exergue cette évidence que le crédit affecté conclu dans le cadre d’un démarchage à domicile prends place dans une opération commerciale unique. Force est dès lors de constater que dans ce cadre chacun des deux contrats n’existe que par l’autre de telle manière que le déséquilibre s’en trouve d’autant plus accentué vis à vis du consommateur. Par suite, au cas particulier la privation de la banque de sa créance de restitution s’analyse objectivement comme la sanction de la faute commise par le professionnel dans le cadre du contrat principal. Cette faute a incontestablement occasionné un préjudice pour Mme [I] dont l’exacte étendue doit être appréciée souverainement par le juge du fond. Cette faute en l’espèce a causé à Mme [I] un préjudice qui doit être justement et exactement arbitré à hauteur du montant intégral de la créance de restitution.

Il est donc logique au regard des observations qui précédent, que la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE soit privée de sa créance de restitution.

Il convient dès lors de confirmer le jugement querellé en ce qu’il a condamné la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à restituer à Mme [L] [I] l’ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du crédit affecté conclu le 8 juin 2016.

Par ailleurs par des motifs pertinents que la cour adopte, le premier juge dans la décision entreprise ayant opéré une exacte application du droit aux faits, a à juste titre:

 » débouté la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de ses demandes,

 » condamné la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à Mme [L] [I] la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure ainsi qu’aux entiers dépens de première instance.

Le jugement querellé sera donc confirmé sur ces points.

– SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE AU TITRE DE L’INSTANCE D’APPEL:

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de Mme [L] [I] les frais irrépétibles exposés par elle devant la cour et non compris dans les dépens.

Il convient dès lors de condamner la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à Mme [L] [I] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’instance d’appel.

En revanche il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE les frais irrépétibles exposés par elle devant la cour et non compris dans les dépens.

Il y a lieu par suite de débouter la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’instance d’appel.

– SUR LE SURPLUS DES DEMANDES:

Au regard des considérations qui précédent, il convient de débouter les parties du surplus de leurs demandes.

– SUR LES DÉPENS D’APPEL:

Il y a lieu enfin de condamner la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE qui succombe, aux entiers dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt réputé contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

Vu l’appel partiel de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE,

– CONFIRME le jugement querellé en ce qu’il a:

‘ prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 8 juin 2016 entre Mme [L] [I] et la société FORCE ENERGIE,

 » constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE et Mme [L] [I] en

date du 8 juin 2016,

 » condamné la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à restituer à Mme [L] [I] l’ensemble des sommes versées à quelques titres que ce soit en exécution du crédit affecté conclu le 8 juin 2016,

 » débouté la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de ses demandes,

 » condamné la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à Mme [L] [I] la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure ainsi qu’aux entiers dépens de première instance,

Y ajoutant,

– CONDAMNE la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à Mme [L] [I] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’instance d’appel,

– CONDAMNE la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE aux entiers dépens d’appel.

Le greffier,Le président,

G. PrzedlackiY. Benhamou

 


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