Droit de rétractation : Décision du 26 septembre 2023 Cour d’appel de Reims RG n° 22/01818

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Droit de rétractation : Décision du 26 septembre 2023 Cour d’appel de Reims RG n° 22/01818

R.G. : N° RG 22/01818 – N° Portalis DBVQ-V-B7G-FHU7

ARRÊT N°

du : 26 septembre 2023

AL

Formule exécutoire le :

à :

la SELARL Marie-Claire DELVAL

COUR D’APPEL DE REIMS

1ère CHAMBRE CIVILE – SECTION INSTANCE

ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2023

APPELANTE :

d’un jugement rendu le 09 septembre 2022 par le Tribunal de proximité de Sedan (RG 21-000183)

S.A. MY MONEY BANK

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Marie-Claire DELVAL de la SELARL Marie-Claire DELVAL, avocat au barreau des ARDENNES, et Me Martine MESPELAERE, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉS :

Monsieur [E] [P]

[Adresse 2]

[Localité 1]

N’ayant pas constitué avocat

Madame [M] [P] [J]

[Adresse 2]

[Localité 1]

N’ayant pas constitué avocat

DÉBATS :

A l’audience publique du 27 juin 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 26 septembre 2023, sans opposition de la part des conseils des parties et en application de l’article 805 du code de procédure civile, Mme Anne LEFEVRE, conseiller, a entendu les conseils des parties en leurs conclusions et explications, puis ce magistrat en a rendu compte à la cour dans son délibéré

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Benoît PETY, président de chambre

Mme Anne LEFEVRE, conseiller

Mme Christel MAGNARD, conseiller

GREFFIER D’AUDIENCE :

Madame Lucie NICLOT, greffier, lors des débats et M. Francis JOLLY, greffier lors du délibéré,

ARRÊT :

Par défaut, prononcé publiquement, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, signé par Mme Anne LEFEVRE, conseiller, vu l’empêchement du président de chambre, et par M. Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Suivant offre préalable émise le 30 avril 2015 et acceptée le 5 mai 2015, la société GE Money Bank, SA, dénommée ensuite SA My Money Bank, a consenti à M. [E] [P] et Mme [M] [J], son épouse, un regroupement de crédits sous la forme d’un prêt personnel de 44 582,16 euros remboursable en 144 mensualités incluant les intérêts au taux nominal annuel de 6,88 %.

Se prévalant du défaut de paiement des échéances convenues, la société My Money Bank a mis en demeure M. et Mme [P], par lettres recommandées avec avis de réception reçues le 14 septembre 2021, de régler leur dette dans les 15 jours sous peine de déchéance du terme.

Le 9 décembre 2021, la société My Money Bank a fait assigner M. et Mme [P] devant le tribunal de proximité de Sedan, afin qu’ils soient condamnés au paiement d’une somme de 33 792,21 euros, outre intérêts au taux de 6,88 % à compter du 30 septembre 2021, date du dernier décompte, avec capitalisation annuelle des intérêts. Le prêteur sollicitait également leur condamnation aux dépens et au paiement d’une somme de 1 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Lors de l’audience du 13 juin 2022, la société My Money Bank a maintenu ses prétentions.

M. et Mme [P] n’ont pas contesté être débiteurs envers l’établissement bancaire mais ont voulu qu’il soit débouté de l’ensemble de ses demandes. Ils ont précisé bénéficier d’une procédure de surendettement déclarée recevable le 3 novembre 2020, dans le plan de laquelle était incluse la créance du demandeur.

Le jugement du 9 septembre 2022, assorti de droit de l’exécution provisoire, a :

– prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels au titre du prêt du 5 mai 2015,

– condamné M. et Mme [P] à payer à la société My Money Bank la somme de 16 348,20 euros,

– dit que cette somme ne produira pas d’intérêt, même au taux légal,

– débouté la société My Money Bank de sa demande de capitalisation des intérêts,

– dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné M. et Mme [P] aux dépens.

Le 13 octobre 2022, la société My Money Bank a fait appel de cette décision en ses dispositions :

– prononçant la déchéance du droit aux intérêts conventionnels,

– condamnant les époux [P] à lui payer la somme de 16 348,20 euros,

– dit que cette somme ne produira pas d’intérêt, même au taux légal,

– dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions du 25 avril 2023, la société My Money Bank a demandé à la cour d’infirmer le jugement du 9 septembre 2022, afin de :

– condamner M. et Mme [P] solidairement, et à défaut in solidum, à lui payer la somme de 33 792,21 euros assortie des intérêts au taux conventionnel de retard de 6,88 % à compter du 30 septembre 2021, date du dernier décompte,

– constater qu’elle s’en remet au plan de surendettement mis en place par décision du 14 février 2022,

– condamner M. et Mme [P] solidairement, et à défaut in solidum, à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– les condamner aux dépens.

La société My Money Bank a fait signifier à M. et Mme [P] sa déclaration d’appel, par acte remis à l’étude à chacun d’eux le 22 décembre 2022. Elle leur a fait signifier ses conclusions par actes remis le 3 mai 2023, à domicile à M. [P] et à personne à Mme [P].

Les intimés n’ont pas constitué avocat. Le présent arrêt est donc rendu par défaut.

Motifs de la décision :

Selon l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. ‘Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.’

Il résulte des pièces versées que la première échéance impayée est celle du 1er janvier 2020, de sorte que l’action en paiement, par assignation du 9 décembre 2021, est recevable comme intervenue dans les deux ans de l’événement qui lui a donné naissance (article R. 312-35 du code de la consommation).

Sur la remise du bordereau détachable de rétractation :

Selon l’article L. 311-12 du code de la consommation en sa rédaction lors du contrat (devenu l’article L. 312-21 après la recodification par ordonnance du 14 mars 2016), pour permettre à l’emprunteur d’exercer son droit de rétractation, dans un délai de 14 jours calendaires révolus à compter du jour de l’acceptation de l’offre, un formulaire détachable est joint à son exemplaire du contrat de crédit. Ce formulaire est établi selon un modèle type annexé à l’article R. 311-4 ancien du code de la consommation, lequel précise que le formulaire ne peut comporter au verso aucune mention autre que le nom et l’adresse du prêteur.

L’article L. 311-48 ancien du code de la consommation sanctionne par la déchéance du droit aux intérêts conventionnels le prêteur qui ne remet pas à l’emprunteur un contrat satisfaisant aux conditions de l’article L. 311-12.

La preuve par le prêteur de la communication à l’emprunteur du bordereau détachable de rétractation ne saurait résulter de la seule signature apposée par l’emprunteur sous une clause type par laquelle celui-ci reconnaît cette remise. Une telle circonstance ne constitue qu’un simple indice que le prêteur doit compléter par d’autres éléments pour établir l’exécution de son obligation envers l’emprunteur. A défaut la sanction encourue par le prêteur est la déchéance de son droit aux intérêts.

M. et Mme [P] ont accepté l’offre de crédit en apposant leurs signatures, à la date du 5 mai 2015, sous une mention par laquelle ils reconnaissaient, notamment, ‘avoir chacun reçu un exemplaire de : l’offre de contrat de crédit, (…), le bordereau de rétractation de l’offre de contrat de crédit’ (page 7/8 de l’exemplaire du contrat remis au prêteur).

A hauteur de cour, la société My Money Bank verse aux débats, en pièce n°14, copie de l’exemplaire de l’offre de crédit transmis aux emprunteurs et qu’ils doivent conserver. Cette pièce correspond en tous points à l’exemplaire à retourner au prêteur de l’opération de regroupement de crédit, avec en haut à droite de chaque page la date de l’émission de l’offre et le numéro 35506121679 du contrat. Elle présente en page 9/9 un bordereau de rétractation strictement conforme aux dispositions de l’article R. 311-4 du code de la consommation et dont le verso est vierge de toute mention puisque l’exemplaire emprunteur du contrat ne comporte que 9 pages.

Il est ainsi suffisamment établi qu’un formulaire détachable permettant l’exercice du droit de rétractation a été joint à l’exemplaire du contrat remis aux emprunteurs. Aucune déchéance du droit aux intérêts conventionnels n’est encourue à ce titre. Le jugement déféré est donc réformé sur ce point.

Sur le montant de la créance de la société My Money Bank :

Il résulte des pièces produites (contrat de crédit, tableau d’amortissement, décompte de la créance, lettres recommandées de mise en demeure distribuées à chacun des époux le 14 septembre 2021, lettres recommandées notifiant la déchéance du terme distribuées à chacun des époux le 6 octobre 2021, historique du compte) que la société My Money Bank est fondée à obtenir paiement des sommes suivantes, étant observé que les dispositions contractuelles laissent l’indemnité de résiliation de 8 % du capital restant dû à l’appréciation du tribunal, selon le paragraphe ‘défaillance de l’emprunteur’ en page 4/8 du contrat :

– échéances impayées lors de la déchéance du terme : 2 589,43 euros

– capital restant dû à la déchéance du terme : 28 880,48 euros

– clause pénale de 2 310,44 euros, ne revêtant pas un caractère manifestement excessif dans la mesure où les échéances n’ont été honorées que pendant 54 mois sur les 144 prévus.

Le montant total de la créance du prêteur s’élève ainsi à la somme de 33 780,35 euros, à majorer des intérêts au taux contractuel de 6,88 % sur la somme de 31 469,91 euros et au taux légal pour le surplus, à compter du 6 octobre 2021. Par ailleurs, M. et Mme [P] sont condamnés solidairement au paiement de leur dette, puisque les dispositions de la page 6/8 du contrat prévoient que l’obligation est solidaire et indivisible.

La décision combattue est infirmée de ces chefs.

Sur les autres demandes :

L’ouverture d’une procédure de surendettement n’empêche pas le créancier de faire fixer le montant de sa créance par jugement afin d’obtenir un titre exécutoire à l’encontre des débiteurs.

La société My Money Bank est accueillie en sa demande de constat de ce qu’elle s’en remet au plan de surendettement mis en place par décision du 14 février 2022. Aucun élément n’est toutefois fourni aux débats sur la situation actuelle de la procédure de surendettement.

Les époux [P] succombent dans la présente procédure et supportent in solidum les dépens d’appel.

L’équité commande cependant de débouter la société My Money Bank de ses prétentions fondées sur l’article 700 du code de procédure civile, tant en première instance qu’en appel.

Par ces motifs,

Infirme le jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Sedan du 9 septembre 2022, sauf en ce qu’il a condamné M. et Mme [P] aux dépens et dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

Dit n’y avoir lieu à déchéance du prêteur du droit aux intérêts,

Condamne solidairement M. et Mme [P] à payer à la société My Money Bank la somme de 33 780,35 euros, à majorer des intérêts au taux contractuel de 6,88 % sur la somme de 31 469,91 euros et au taux légal pour le surplus, à compter du 6 octobre 2021,

Constate que la société My Money Bank ‘s’en remet au plan de surendettement mis en place par décision du 14 février 2022″,

Déboute la société My Money Bank de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel,

Condamne in solidum M. et Mme [P] aux dépens d’appel.

Le greffier P/ Le président

Le conseiller

 


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