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COUR D’APPEL
DE RIOM
Troisième chambre civile et commerciale
ARRET N°
DU : 26 Avril 2023
N° RG 21/02476 – N° Portalis DBVU-V-B7F-FW5B
VTD
Arrêt rendu le vingt six Avril deux mille vingt trois
Sur APPEL d’une décision rendue le 21 octobre 2021 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de MOULINS (RG n° 11-21-000107)
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre
Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller
Madame Virginie DUFAYET, Conseiller
En présence de : Mme Christine VIAL, Greffier, lors de l’appel des causes et du prononcé
ENTRE :
La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
SA immatriculée au RCS de Paris sous le n° 542 097 902 04319
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentant : la SCP COLLET DE ROCQUIGNY CHANTELOT BRODIEZ GOURDOU & ASSOCIES, avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND (postulant) et Me Bernard BOULLOUD, avocat au barreau de GRENOBLE (plaidant)
APPELANTE
ET :
M. [K] [C]
[Adresse 7]
[Localité 1]
Représentants : Me Sébastien RAHON, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND (postulant) et Me Samuel HABIB du cabinet HERACLES AVOCATS, avocat au barreau de PARIS (plaidant)
Mme [O] [X] épouse [C]
[Adresse 7]
[Localité 1]
Représentants : Me Sébastien RAHON, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND (postulant) et Me Samuel HABIB du cabinet HERACLES AVOCATS, avocat au barreau de PARIS (plaidant)
Me [G] [T]
[Adresse 4]
[Localité 6]
agissant ès qualités de mandataire liquidateur de la société SOLUTION ECO ENERGIE, SAS immatriculée au RCS de Bobigny sous le n° 521 970 756 00016, dont le siège est [Adresse 3]
Non représenté, assigné à domicile
INTIMÉS
DÉBATS :
Après avoir entendu en application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, à l’audience publique du 23 Février 2023, sans opposition de leur part, les avocats des parties, Madame THEUIL-DIF, magistrat chargé du rapport, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré.
ARRET :
Prononcé publiquement le 26 Avril 2023 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Le 21 septembre 2016, M. [K] [C] et Mme [O] [X] épouse [C] ont passé commande auprès de la SAS Solutions Eco Energie (Soleco) d’une installation solaire photovoltaïque comprenant 18 panneaux photovoltaïques, pour un montant de 23 900 euros TTC, financée par un contrat de prêt souscrit le même jour auprès de la SA BNP Paribas Personal Finance, sous l’enseigne Cetelem, prêt remboursable en 191 mensualités au taux débiteur de 3,83 %.
Par actes d’huissier en date des 8 et 12 avril 2021, M. et Mme [C] ont fait assigner devant le juge des contentieux de la protection (JCP) du tribunal judiciaire de Moulins, la SAS Soleco et la SA BNP Personal Finance aux fins d’obtenir notamment l’annulation des contrats souscrits et la restitution des sommes versées.
Par jugement du 19 mai 2021, le tribunal de commerce de Bobigny a prononcé la liquidation judiciaire de la SAS Soleco et désigné Me [G] [T] en qualité de liquidateur.
Par acte d’huissier du 29 juillet 2021, les époux [C] ont appelé en cause Me [T] en sa qualité de liquidateur de la SAS Soleco.
Par jugement réputé contradictoire du 21 octobre 2021, le JCP, après s’être déclaré compétent pour connaître du litige, a :
– dit que les dispositions du code de la consommation étaient applicables au litige ;
– déclaré l’action de M. et Mme [C] recevable ;
– prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 21 septembre 2016 entre la SAS Soleco et M. et Mme [C] ;
– constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté signé le 21 septembre 2016 entre la SA BNP Paribas Personal Finance et M. et Mme [C] portant sur un montant emprunté de 23 900 euros ;
– ordonné que les parties soient replacées dans leur état originel ;
– dit que la SA BNP Personal Finance avait manqué à ses obligations lors de la souscription du contrat de crédit ainsi que lors de la libération des fonds, et que ces fautes la privaient du droit de demander le remboursement du capital emprunté et des intérêts ;
– débouté en conséquence la SA BNP Personal Finance de sa demande en paiement du capital financé avec intérêts au taux légal à compter du déblocage des fonds, déduction faites des versements déjà intervenus, au titre du crédit résolu à l’encontre des époux [C] ;
– fixé la créance de la SA BNP Personal Finance au passif de la liquidation judiciaire de la SAS Soleco à la somme de 23 900 euros correspondant au montant du financement ;
– condamné la SA BNP Personal Finance à payer aux époux [C] l’intégralité des montants déjà versés par eux jusqu’au jour du jugement et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la décision ;
– rejeté la demande de dommages et intérêts formées par les époux [C] au titre de leur préjudice économique ;
– condamné la SA BNP Personal Finance à verser à M. et Mme [C] la somme de 800 euros au titre de leur préjudice moral ;
– rejeté les demandes plus amples ou contraires ;
– rappelé que l’exécution provisoire de la décision était de droit ;
– condamné la SA BNP Personal Finance à payer à M. et Mme [C] la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– débouté la SA BNP Personal Finance de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la SA BNP Personal Finance aux dépens qui comprendraient le coût des assignations.
La SA BNP Personal Finance a interjeté appel du jugement le 24 novembre 2021.
Par conclusions déposées et notifiées le 8 juin 2022, la SA BNP Personal Finance demande à la cour de :
confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :
– rejeté la demande de dommages et intérêts formée par les époux [C] au titre de leur préjudice financier ;
– rejeté la demande de dommages et intérêts formée par les époux [C] au titre de leur préjudice économique ;
infirmer le jugement entrepris en ce qu’il :
– a prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 21 septembre 2016 entre d’une part la SAS Soleco et d’autre part M. et Mme [C] ;
– a constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté signé le 21 septembre 2016 entre elle et M. et Mme [C] portant sur un montant emprunté de 23 900 euros ;
– a ordonné que les parties soient replacées dans leur état originel ;
– a dit qu’elle a manqué à ses obligations lors de la souscription du contrat de crédit ainsi que lors de la libération des fonds et que ces fautes la privent du droit de demander le remboursement du capital emprunté et des intérêts ;
– l’a déboutée de sa demande en paiement du capital financé avec intérêts au taux légal à compter du déblocage des fonds, déduction faite des versements déjà intervenus, au titre du crédit résolu à l’encontre des époux [C] ;
– a fixé sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SAS Soleco, à la somme de 23 900 euros correspondant au montant du financement ;
– l’ a condamnée à payer aux époux [C] l’intégralité des montants déjà versés par eux jusqu’au jour du jugement, et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la décision ;
– l’a condamnée à verser à M. et Mme [C] la somme de 800 euros au titre de leur préjudice moral ;
– a rejeté les demandes plus amples ou contraires ;
– a rappelé que l’exécution provisoire de la présente décision est de droit ;
– l’a condamnée à payer à M. et Mme [C] la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– l’a déboutée de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;
– l’a condamnée à payer les dépens qui comprendront notamment le coût des assignations des 8 et 12 avril et 29 juillet 2021 ;
statuant à nouveau :
– débouter M. et Mme [C], mal fondés en toutes leurs demandes ;
– subsidiairement, si le contrat l’unissant à M. et Mme [C] était annulé :
> remettre les parties dans l’état où elles se trouvaient antérieurement à la conclusion du contrat ;
> en conséquence, condamner solidairement M. et Mme [C] à lui rembourser le capital financé outre les intérêts au taux légal à compter du déblocage des fonds, déduction faite des versements ayant déjà pu intervenir ;
> ordonner que le montant de ce remboursement sera assorti d’un intérêt au taux légal avec capitalisation dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil ;
– plus subsidiairement :
> ordonner à M. et Mme [C] la communication des attestations émises ERDF et faisant apparaître les sommes versées par cette société au titre du contrat de rachat de la production ;
> condamner solidairement M. et Mme [C] à lui rembourser une somme correspondant au montant de la revente d’énergie à ERDF ;
> condamner solidairement M. et Mme [C] à lui rembourser le capital financé outre les intérêts au taux légal à compter du déblocage des fonds, déduction faite des versements ayant déjà pu intervenir au titre de la perte de chance ;
– en tout état de cause :
> condamner solidairement M. et Mme [C] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Aux termes de leurs dernières conclusions déposées et notifiées le 27 décembre 2022, M. [K] [C] et Mme [O] [X] épouse [C] demandent à la cour de :
– confirmer le jugement du JCP du tribunal judiciaire de Moulins, en ce qu’il a :
déclaré leur action recevable ;
prononcé la nullité du contrat de vente qu’ils ont conclu le 21 septembre 2016 avec la SAS Soleco ;
constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté qu’ils ont signé le 21 septembre 2016 avec la SA BNP Paribas Personal Finance portant sur un montant emprunté de 23 900 euros ;
ordonné que les parties soient replacées dans leur état originel ;
dit que la SA BNP Paribas Personal Finance a manqué à ses obligations lors de la souscription du contrat de crédit ainsi que lors de la libération des fonds et que ces fautes la privent du droit de demander le remboursement du capital emprunté et des intérêts ;
débouté en conséquence la SA BNP Paribas Personal Finance de sa demande en paiement du capital financé avec intérêts au taux légal à compter du déblocage des fonds, déduction faite des versements déjà intervenus au titre du crédit résolu à leur encontre ;
condamné la SA BNP Paribas Personal Finance à leur payer l’intégralité des montants déjà versées par eux jusqu’au jour du jugement et ce avec intérêts au taux légal à compter de la décision ;
condamné la SA BNP Paribas Personal Finance à leur verser la somme de 800 euros au titre de leur préjudice moral ;
rappelé que l’exécution provisoire de la décision est de droit ;
condamné la SA BNP Paribas Personal Finance à leur payer la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
débouté la SA BNP Paribas Personal Finance de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;
condamné la SA BNP Paribas Personal Finance à leur payer les dépens qui comprennent notamment le coût des assignations des 8 et 12 avril 2021 ;
– infirmer le jugement susvisé, en ce qu’il a :
rejeté la demande de dommages et intérêts qu’ils ont formée au titre de leur préjudice financier ;
rejeté la demande de dommages et intérêts formée au titre de leur préjudice économique;
Et statuant de nouveau :
– débouter la SA BNP Paribas Personal Finance de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
– condamner la SA BNP Paribas Personal Finance à leur verser la somme de :
> 4 554 euros au titre de leur préjudice financier ;
> 3 000 euros au titre de leur préjudice économique ;
> 3 000 euros au titre de leur préjudice moral ;
– en tout état de cause, condamner la SA BNP Paribas Personal Finance à leur payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la SA BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Rahon.
– à titre subsidiaire, si la cour ne faisait pas droit à leurs demandes, considérant que la banque n’a pas commis de fautes, prononcer la déchéance du droit de la SA BNP Paribas Personal Finance aux intérêts du crédit affecté ;
– à titre infiniment subsidiaire, si la cour venait à les débouter de l’intégralité de leurs demandes, ordonner qu’ils reprennent le paiement mensuel des échéances du prêt.
Maître [T] ès qualités de liquidateur de la SAS Solutions Eco Energie (Soleco) n’a pas constitué avocat. La SA BNP Personal Finance lui a signifié la déclaration d’appel le 4 février 2022 et ses conclusions le 8 juin 2022.
Il sera renvoyé pour l’exposé complet des demandes et moyens des parties, à leurs dernières conclusions.
La procédure a été clôturée le 2 février 2023.
MOTIFS :
La SA BNP Paribas Personal Finance n’a pas interjeté appel des dispositions du jugement en ce que le JCP du tribunal judiciaire de Moulins s’est déclaré compétent, a dit que les dispositions du code de la consommation étaient applicables au litige et a déclaré l’action des époux [C] recevable.
– Sur la nullité des contrats
Le bon de commande souscrit le 21 septembre 2016 mentionne que le contrat a été signé à [Localité 8], qui est la commune du domicile de M. et Mme [C] et non le lieu du siège ou d’une agence de la société prestataire, ce qui confirme que l’opération litigieuse a été conclue sur démarchage à domicile.
S’agissant d’un contrat conclu hors établissement, il est en conséquence régi par les dispositions des articles L.221-1 et suivants du code de la consommation applicables à la date de signature des contrats, soit les dispositions du code de la consommation postérieures à la loi n°2014-33 du 17 mars 2014, et postérieures à l’ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 entrée en vigueur le 1er juillet 2016.
Aux termes de l’article L.221-5 du code de la consommation applicable, préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, notamment les informations suivantes :
1° les informations prévues aux articles L.111-1 et L.111-2 ;
2° lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’Etat.
Les informations de l’article L.111-1 sont notamment les suivantes :
1° les caractéristiques essentielles du bien ou du service ;
2° le prix du bien ou du service ;
3° en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service (l’article R.111-1 précise que le contrat indique les modalités d’exécution et de livraison du contrat).
Selon l’article L.221-18, le consommateur dispose d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu à distance, à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d’autres coûts que ceux prévus aux articles L.221-23 à L.221-25.
Le délai mentionné au premier alinéa court à compter du jour :
– de la conclusion du contrat, pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l’article L.221-4 ;
– de la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui, pour les contrats de vente de biens. Pour les contrats conclus hors établissement, le consommateur peut exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat.
Dans le cas d’une commande portant sur plusieurs biens livrés séparément ou dans le cas d’une commande d’un bien composé de lots ou de pièces multiples dont la livraison est échelonnée sur une période définie, le délai court à compter de la réception du dernier bien ou lot ou de la dernière pièce.
Aux termes de l’article L.221-9, le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties. Ce contrat comprend toutes les informations mentionnées à l’article L.221-5. […]. Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L.221-5.
Enfin, l’article L.242-1 prévoit que les dispositions de l’article L.221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.
En l’espèce, sur le bon de commande litigieux, la case ‘Photovoltaïque’ a été cochée et la description du bien vendu est la suivante :
‘Le kit comprend :
panneaux photovoltaïques de 250 Watts Solsonica ou équivalent
panneaux européens
coffret AC/DC
onduleur Solar Edge ou équivalent
étanchéité GSE ou équivalent agréé CEIAB
câbles et connectiques
intégration aux bâtis (hors pose au sol et en superposition)
démarches administratives
mise en conformité CONSUEL’
Ont également été cochées les cases suivantes :
– ‘raccordement ERDF à la charge de SOLECO’
– ‘obtention du contrat de rachat de l’électricité produite’.
Il a en outre été mentionné de manière manuscrite la puissance du kit (4 500) et le nombre de panneaux (18).
Puis, la case ‘Installation’ a été cochée, avec la précision ‘forfait : pose complète des produits. Mise en route. Livraison’.
Il est mentionné dans la partie ‘date prévue de la livraison’ : ‘4 à 6 semaines’.
Enfin, un prix TTC de 23 900 euros est stipulé en fin de contrat.
Dans un contrat de démarchage à domicile, la mention du prix unitaire de chaque élément constitutif n’est pas obligatoire, l’absence d’une telle mention n’étant pas de nature à entraîner l’annulation du contrat (Cass. Civ. 1ère 2 juin 2021, pourvoi n°19-22.607).
Il en va différemment de la marque, du modèle ou des références des panneaux ou ceux de l’onduleur et de l’ensemble des autres matériels en faisant partie.
Ainsi que l’a énoncé le tribunal, la désignation sommaire des produits inscrits sur le bon de commande ne répond pas aux prescriptions de l’article L.111-1 du code de la consommation et n’a pas permis aux acheteurs d’apprécier de façon précise les caractéristiques des biens commandés. Démarchés à domicile, M. et Mme [C] n’ont pas été mis en capacité de comparer le prix de la prestation proposée avec celui offert par d’autres installateurs présents sur le marché.
Par ailleurs, la mention dans le bon de commande ‘date prévue de livraison : 4 à 6 semaines’ sans autre précision, y compris dans les conditions générales, est très insuffisante au regard de l’obligation de mentionner ‘en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service’, l’article R.111-1 précisant que le contrat doit indiquer les modalités d’exécution et de livraison du contrat. Cette mention ne permet pas de renseigner précisément sur la date effective d’installation et de mise en service.
De même, les articles mentionnés dans le bon de commande sont ceux des dispositions du code de la consommation dans leur version antérieure à la loi du 17 mars 2014, loi qui a modifié le démarchage à domicile.
S’agissant notamment du droit de rétractation, si le délai de 14 jours a bien été mentionné (et non 7 jours), le point de départ a été fixé au jour de la commande dans le contrat, alors que l’article L.221-18 prévoit un point de départ à la date de réception du bien dans le cadre d’un contrat de vente de biens.
Le jugement doit être confirmé en ce qu’il a considéré que le bon de commande encourait la nullité, et ce, par motifs en partie substitués.
Il résulte des dispositions de l’article 1338 ancien du code civil que la confirmation d’une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d’un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l’obligation et intention de le réparer, sauf exécution volontaire après l’époque à laquelle celle-ci pouvait être valablement confirmée.
La SA BNP Paribas Personal Finance soutient que les époux [C] ont accepté la livraison, puis la pose du matériel, la demande de crédit, la signature du certificat de livraison et le paiement des échéances pendant près de 4 ans et demi ; que le seul fait de ne pas avoir invoqué plus tôt la nullité du contrat et d’avoir exécuté pendant plusieurs années le contrat de crédit alors qu’ils avaient en main le contrat de vente contenant toutes les dispositions légales du code de la consommation leur ayant permis de le faire dans un délai raisonnable, révèle leur intention de couvrir les irrégularités formelles du contrat.
Si la méconnaissance des dispositions des article L.221-1 et suivants du code de la consommation n’est sanctionnée que par une nullité relative susceptible d’être couverte par des actes manifestant de la part de l’acquéreur une volonté même tacite de confirmer l’acte, il ne ressort pas des éléments de la cause que M. [C], agent de la Poste, et Mme [C], enseignante, consommateurs profanes en la matière, aient eu conscience des vices affectant le contrat principal lorsque celui-ci a commencé à être exécuté et aient manifesté de façon non équivoque une volonté de couvrir les irrégularités du bon de commande. Cette analyse doit être d’autant plus retenue que les articles du code de la consommation mentionnés dans le bon de commande n’étaient pas ceux applicables au contrat.
Le jugement sera en conséquence confirmé par motifs en partie substitués en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat principal, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens de nullité soulevés, et en ce qu’il a prononcé, par application des dispositions de l’article L.312-55 du code de la consommation, l’annulation subséquente du contrat de crédit affecté.
– Sur les conséquences de l’annulation des contrats
Le jugement sera confirmé en ce qu’il a ordonné que les parties soient replacées dans leur état originel, ce qui implique dans les rapports prêteur/emprunteur, l’obligation pour le prêteur de rembourser aux emprunteurs les échéances réglées par ces derniers.
S’agissant du remboursement par l’emprunteur du capital prêté, il s’évince des articles L.312-48 et L.312-55 du code de la consommation que le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute (Cass. Civ 1ère 25 novembre 2020, 19-14.908).
Aussi, il appartenait notamment à la banque prêteuse de vérifier à son initiative la régularité du bon de commande en sollicitant sa communication par le vendeur.
En l’espèce, la SA BNP Paribas Personal Finance a versé les fonds à la société prestataire alors même que l’examen du bon de commande fait ressortir des irrégularités manifestes du contrat. Alors qu’il s’agit d’un organisme de crédit rompu aux mécanismes de financement de ce type d’installations, la SA BNP Paribas Personal Finance aurait dû constater que le bon de commande n’était visiblement pas conforme aux dispositions du code de la consommation.
Par ailleurs, commet une faute au regard des dispositions de l’article L.312-48 du code de la consommation, le prêteur qui se libère des fonds entre les mains de l’installateur sans rechercher si l’attestation dont il a été rendu destinataire, suffit à lui permettre de s’assurer de l’exécution complète du contrat principal.
En l’espèce, la banque a procédé au déblocage des fonds sur la base d’un document versé en pièce n°15 signé par l’installateur et Mme [O] [C] le 21 décembre 2016, document dans lequel le vendeur certifie que le matériel conforme au bon de commande, a été livré et le client demande à BNP Paribas Personal Finance d’adresser le financement de 23 900 euros correspondant à l’opération au vendeur dans les conditions prévues au contrat. Le numéro de dossier est rappelé en haut de ce document : 41487293359001.
Or, le bon de commande incluait également dans les obligations du vendeur-prestataire ‘le raccordement ERDF ‘et ‘l’obtention du contrat de rachat de l’électricité produite’.
Au jour de la libération des fonds, la livraison effective du bien et de la prestation de service comprenant le raccordement et la mise en service n’avaient pas été effectués. Le raccordement de l’installation n’a été effectif que le 16 août 2018.
Le document sus-mentionné ne permettait pas au prêteur de s’assurer de la complète exécution des travaux commandés, outre que le délai séparant la date de signature du contrat de celle de la signature dudit document, ne permettait pas matériellement la réalisation de ces démarches.
L’imprudence fautive de l’organisme de crédit qui a versé la totalité des fonds dès le 3 janvier 2017, est en conséquence caractérisée.
La privation de la créance de restitution du prêteur ne peut toutefois être prononcée qu’à la mesure du préjudice subi par les emprunteurs en lien avec les fautes retenues.
La conclusion et l’exécution du contrat se sont révélées préjudiciables pour M. et Mme [C] en l’état des faibles performances de leur installation qui leur procure un revenu annuel net moyen d’environ 1 080 euros, dont à déduire le coût de location du compteur, insusceptible de couvrir les coûts engendrés par sa réalisation (remboursement annuel du crédit : 2 373,12 euros).
Alors qu’ils auraient pu raisonnablement renoncer à l’opération s’ils avaient été loyalement informés sur le rendement prévisible et les caractéristiques techniques de l’installation, ainsi que sur les coûts annexes, M. et Mme [C] ont perdu, par la faute de la banque qui a financé un contrat nul, une chance de ne pas contracter et d’exercer leur droit de rétractation.
Ces circonstances justifient que la société BNP Paribas Personal Finance soit privée de sa créance de restitution du capital prêté à hauteur d’un tiers, soit 7 967 euros, le jugement étant réformé sur ce point.
Cette dispense de remboursement constitue pour les époux [C] la réparation des préjudices qu’ils invoquent. Le surplus des demandes des intimés doit être rejeté.
Au surplus, il y a lieu de débouter la SA BNP Paribas Personal Finance de sa demande visant à ordonner aux intimés la communication des attestations émises par ERDF faisant apparaître les sommes versées au titre du contrat de rachat de la production, et de sa demande en remboursement des sommes perçues par les époux [C] au titre de la revente d’électricité, ces sommes n’ayant pas été versées par la banque qui ne peut donc en solliciter le remboursement, et ayant été en tout état de cause prises en considération dans l’évaluation du préjudice financier subi par M. et Mme [C].
– Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
Succombant principalement à l’instance, la SA BNP Paribas Personal Finance sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel.
La distraction des dépens sera ordonnée au profit de Maître Sébastien Rahon, avocat.
Il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt de défaut,
Confirme, par motifs en partie substitués, le jugement entrepris en ce qu’il a :
– prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 21 septembre 2016 entre d’une part la SAS Solutions Eco Energie dite Soleco, et d’autre part M. [K] [C] et Mme [O] [X] épouse [C] ;
– constaté la nullité de plein droit du contrat de crédit affecté signé le 21 septembre 2016 entre d’une part la SA BNP Paribas Personal Finance, et d’autre part M. [K] [C] et Mme [O] [X] épouse [C] ;
– ordonné que les parties soient replacées dans leur état originel;
– condamné la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à M. [K] [C] et Mme [O] [X] épouse [C] l’intégralité des montants déjà versés par eux jusqu’au jour de la décision, et ce avec intérêts au taux légal à compter de la décision ;
– condamné la SA BNP Personal Finance à payer à M. [K] [C] et Mme [O] [X] épouse [C] la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Infirme, dans la limite de sa saisine, le jugement pour le surplus de ses dispositions ;
Statuant à nouveau,
Dit que les fautes commises par la SA BNP Paribas Personal Finance justifient que les emprunteurs soient dispensés du remboursement d’un tiers du capital prêté soit la somme de 7.967 euros ;
Condamne solidairement M. [K] [C] et Mme [O] [X] épouse [C] à rembourser à la SA BNP Paribas Personal Finance, la somme de 15 933 euros ;
Ordonne la compensation des créances réciproques des époux [C] et de la SA BNP Paribas Personal Finance ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
Dit n’y avoir lieu à faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SA BNP Paribas Personal aux dépens de première instance et d’appel ;
Ordonne la distraction des dépens au profit de Maître Sébastien Rahon, avocat.
Le greffier, La présidente,